Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. A... B... a demandé au tribunal administratif d'Orléans de condamner le centre hospitalier régional universitaire (CHRU) de Tours à lui verser une somme de 33 981,86 euros, assortie des intérêts au taux légal et de leur capitalisation, en réparation des préjudices résultant d'une infection contractée le 5 novembre 2016.
Par un jugement n° 2001853 du 15 décembre 2022, le tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête et un mémoire, enregistrés les 3 février et 28 juin 2023, M. B..., représenté par Me Gaborit, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du 15 décembre 2022 ;
2°) de condamner le CHRU de Tours à lui verser la somme totale de 56 062,50 euros, assortie des intérêts au taux légal et de leur capitalisation ;
3°) de mettre à la charge du CHRU de Tours la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de le condamner aux entiers dépens.
Il soutient que :
- l'infection contractée, le 5 novembre 2016, à l'occasion de la pose d'un cathéter intra-osseux par l'équipe du service mobile d'urgence et de réanimation (SMUR), constitue une infection nosocomiale entrant dans le champ d'application du régime de responsabilité de plein droit prévu par les dispositions du deuxième alinéa du I de l'article L. 1142-1 du code de la santé publique, lesquelles ne sont pas relatives aux seules infections contractées dans un établissement de santé mais concernent toutes les infections liées à une prise en charge assurée par une équipe médicale relevant d'un tel établissement ; c'est ainsi à tort que le tribunal a estimé que ces dispositions n'étaient pas applicables dès lors que l'infection avait été contractée au cours de l'intervention du SMUR réalisée au domicile du patient ;
- en tout état de cause, il n'est pas établi que la pose puis le retrait du cathéter intra osseux aient été effectués à son domicile ;
- ainsi cette infection, survenue au décours de sa prise en charge par le SMUR et qui n'était ni présente, ni en incubation au début de celle-ci, présente un caractère nosocomial ouvrant droit à la réparation des préjudices en résultant en application du régime de responsabilité de plein droit prévu par les dispositions du deuxième alinéa du I de l'article L. 1142-1 du code de la santé publique ;
- les préjudices subis résultant de cette infection doivent être évalués à la somme totale de 56 062,50 euros, se décomposant comme suit :
- 2 143,50 euros au titre du déficit fonctionnel temporaire ;
- 6 000 euros au titre des souffrances endurées ;
- 3 000 euros au titre du préjudice esthétique temporaire ;
- 4 320 euros au titre du déficit fonctionnel permanent ;
- 2 000 euros au titre du préjudice esthétique permanent ;
- 5 000 euros au titre du préjudice d'agrément ;
- 444,60 euros au titre des frais correspondant à l'assistance par une tierce personne ;
- 20 000 euros au titre de l'incidence professionnelle ;
- 13 154,40 euros au titre des frais d'acquisition et de renouvellement d'un véhicule adapté.
Par des mémoires en défense, enregistrés les 18 avril 2023 et 4 janvier 2024, le CHRU de Tours conclut au rejet de la requête de M. B....
Le CHRU de Tours soutient que :
- en vertu des dispositions de l'article R. 6111-6 du code de la santé publique, seules les infections contractées dans un établissement de santé peuvent être qualifiées d'infection nosocomiale au sens et pour l'application des dispositions du deuxième alinéa du I de l'article L. 1142-1 du code de la santé publique ; par conséquent, ce régime de responsabilité n'est pas applicable en l'espèce, l'infection étant survenue au domicile du patient ; en tout état de cause, l'infection relève d'une cause étrangère, constituée par l'environnement dans lequel est intervenu le SMUR, de nature à exonérer le CHRU de son éventuelle responsabilité ;
- à titre subsidiaire, il y a lieu de ramener le montant des prétentions indemnitaires du requérant à de plus justes proportions ;
- ainsi, le déficit fonctionnel temporaire devra être indemnisé sur la base d'un taux journalier de 13 euros ;
- les prétentions formulées au titre du préjudice esthétique devront être ramenées à de plus justes proportions ;
- les souffrances endurées pourront être évaluées à hauteur de 2 750 euros ;
- l'indemnité allouée au titre du déficit fonctionnel permanent ne saurait excéder 3 400 euros ;
- la réalité du préjudice d'agrément n'est pas justifiée ;
- les frais d'assistance par une tierce personne ne sauraient être évalués sur la base d'un taux horaire excédant 13 euros ;
- la réalité de l'incidence professionnelle n'est pas démontrée ; à titre subsidiaire, il convient de ramener à de plus justes proportions la somme sollicitée à ce titre ;
- la nécessité de disposer d'un véhicule équipé d'une boîte de vitesse automatique du fait des séquelles de l'infection n'est pas démontrée ;
- les conclusions indemnitaires, en tant qu'elles excèdent la somme de 33 981,86 euros sollicitée en première instance, sont nouvelles en appel et, de ce fait, irrecevables.
La requête a été communiquée à la caisse primaire d'assurance maladie du Loir-et-Cher, qui n'a pas produit d'observations.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de la santé publique ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Troalen,
- et les conclusions de M. Lerooy, rapporteur public.
Considérant ce qui suit :
1. M. B... a été pris en charge, à son domicile, à la suite d'une intoxication médicamenteuse, le 5 novembre 2016, par la structure mobile d'urgence et de réanimation (SMUR) du centre hospitalier régional universitaire (CHRU) de Tours, puis transporté dans cet établissement et admis au service de réanimation polyvalente. Lors d'une nouvelle hospitalisation, à compter du 24 mars 2017, une infection par staphylocoque doré méti-S a été mise en évidence, laquelle a été à l'origine d'une ostéite occasionnant de multiples complications au genou droit. Le 29 octobre 2018, sur saisine du requérant, le juge des référés du tribunal administratif d'Orléans a ordonné qu'il soit procédé à une expertise. Le 19 février 2019, le médecin désigné a rendu son rapport.
2. Par un jugement du 15 décembre 2022 dont l'intéressé relève appel, le tribunal administratif d'Orléans a rejeté la demande de M. B... tendant à l'indemnisation des préjudices résultant de l'infection précitée par le CHRU de Tours sur le fondement des dispositions du deuxième alinéa du I de l'article L. 1142-1 du code de la santé publique.
Sur la responsabilité du CHRU de Tours sur le fondement des dispositions du deuxième alinéa du I de l'article L. 1142-1 du code de la santé publique :
3. Aux termes du deuxième alinéa du I de l'article L. 1142-1 du code de la santé publique : " les établissements, services ou organismes [dans lesquels sont réalisés des actes individuels de prévention, de diagnostic ou de soins] sont responsables des dommages résultant d'infections nosocomiales, sauf s'ils rapportent la preuve d'une cause étrangère ". Aux termes de l'article R. 6111-6 du même code : " Les infections associées aux soins contractées dans un établissement de santé sont dites infections nosocomiales ".
4. Il résulte de l'instruction, en particulier du rapport d'expertise du 19 février 2019, mais également du compte rendu d'hospitalisation en service de réanimation polyvalente du CHRU de Tours, du 14 novembre 2016, que M. B... a été pris en charge, le 5 novembre 2016, à son domicile, par le SMUR et que cette équipe médicale a posé, sur place, des cathéters intra-osseux au niveau des plateaux tibiaux gauche et droit, avant de transporter le patient dans le service de réanimation polyvalente du CHRU de Tours. Le rapport d'expertise précise que " la porte d'entrée de [l'ostéite contractée par M. B...] est, sans aucun doute possible, la pose du cathéter intra-osseux réalisée le 5 novembre 2016 " et M. B... n'apporte aucun élément de nature à démontrer que l'infection aurait pu être contractée à un autre moment, notamment lors du retrait de ce cathéter. Dans ces conditions, cette infection, si elle résulte de la prise en charge de M. B... par le SMUR du CHRU de Tours, n'a pas été contractée dans un établissement de santé mais au domicile du patient et ne peut donc donner lieu à l'application du régime de responsabilité prévu par les dispositions du deuxième alinéa du I de l'article L. 1142-1 du code de la santé publique.
5. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, les premiers juges ont rejeté sa demande. Les conclusions de sa requête, y compris ses conclusions relatives aux dépens et aux frais d'instance doivent donc être rejetées.
D E C I D E :
Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B..., au centre hospitalier régional de Tours et à la caisse primaire d'assurance maladie du Loir-et-Cher.
Délibéré après l'audience du 29 avril 2025, à laquelle siégeaient :
Mme Versol, présidente de chambre,
M. Tar, premier conseiller,
Mme Troalen, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 15 mai 2025.
La rapporteure,
E. TroalenLa présidente,
F. Versol
La greffière,
C. Drouot
La République mande et ordonne à la ministre du travail, de la santé, des solidarités et des familles en ce qui la concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition conforme,
La greffière,
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N° 23VE00240