Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme B... C... a demandé au tribunal administratif de Cergy-Pontoise de condamner le centre hospitalier de Gonesse à lui verser la somme de 49 770 euros, arrêtée au 31 décembre 2019, en réparation du préjudice financier subi du fait d'une erreur d'information de son employeur concernant le montant prévisionnel de sa pension de retraite, ainsi que la somme de 190 260 euros, arrêtée au 1er janvier 2020, au titre de la réparation du préjudice de même nature à venir, pour la période s'étendant du 1er janvier 2020 jusqu'à la date à laquelle elle atteindra l'âge de 85,4 ans, correspondant aux préjudices subis et futurs à la date du jugement.
Par un jugement n° 1604814 du 30 janvier 2020, le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête et trois mémoires, enregistrés le 15 mai 2020, le 15 juillet 2020, le 21 janvier 2021 et le 17 juin 2021, Mme C..., représentée par Me Gatineau, a demandé à la cour, dans le dernier état de ses écritures :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) de condamner le centre hospitalier de Gonesse à lui verser la somme de 59 850 euros, arrêtée au 31 mai 2021, en réparation du préjudice subi, ainsi que la somme de 191 520 euros, en réparation du préjudice à venir pour la période s'étendant du 1er juin 2021 jusqu'à la date à laquelle elle atteindra 85,8 ans, avec actualisation de ces sommes correspondant aux préjudices subis et futurs à la date de la décision juridictionnelle à intervenir ;
3°) et de mettre à la charge du centre hospitalier de Gonesse la somme de 4 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- sa requête, qui relève d'une action en responsabilité pour faute, est recevable au regard de l'article R. 811-1 du code de justice administrative ;
- le jugement attaqué est irrégulier car il ne comporte pas les signatures requises, en méconnaissance des dispositions de l'article R. 741-7 du code de justice administrative ;
- il méconnait le principe du contradictoire ;
- les premiers juges ont relevé d'office un moyen tiré de la faute exonératoire de la victime sans l'en informer comme ils y étaient tenus en application des dispositions de l'article R. 611-7 du code de justice administrative ;
- en tout état de cause, le principe du contradictoire imposait qu'elle soit mise en demeure de discuter le moyen retenu par le tribunal ;
- le centre hospitalier de Gonesse a commis une faute en lui fournissant une information erronée quant au montant de ses droits à pension et, subsidiairement, en transmettant par erreur sa demande de reclassement ;
- aucune faute totalement exonératoire ne pouvait lui être opposée, le principe de confiance légitime à l'égard de l'administration l'autorisant, sauf circonstance particulière non avérée en l'espèce, à se fier aux informations reçues de son employeur ;
- cette faute a pour conséquence directe un préjudice financier dès lors qu'en l'absence d'option exercée, elle aurait conservé une pension de retraite d'un montant de 2 014 euros ;
- son préjudice financier actuel s'élève à la somme de 59 850 euros et son préjudice financier futur s'évalue à la somme de 191 520 euros, ces sommes devant être actualisées au jour de la décision.
Par un mémoire, enregistré le 23 novembre 2020, la Caisse des dépôts et consignations conclut au rejet des conclusions de la requête dirigées contre le jugement du tribunal administratif de Cergy-Pontoise en tant qu'il met hors de cause la Caisse nationale de retraites des agents des collectivités locales (CNRACL).
Elle fait valoir que la cour administrative d'appel n'est pas compétente pour connaître de l'appel formé contre le jugement en tant qu'il met hors de cause la CNRACL, dès lors qu'il s'agit, dans cette mesure, d'un litige en matière de pension.
Par des mémoires en défense, enregistrés le 16 avril 2021 et le 9 juillet 2021, le centre hospitalier de Gonesse, représenté par la SCP Waquet, Farge, Hazan, conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge de Mme C... la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- le jugement est régulier ;
- la faute, dont la preuve incombe au demandeur, n'est pas établie ;
- la requérante a elle-même commis une imprudence fautive de nature à l'exonérer totalement de sa responsabilité.
Par un arrêt n° 20VE01274 du 8 novembre 2022, la cour a, par son article 1er, mis hors de cause la Caisse des dépôts agissant en qualité de gestionnaire de la CNRACL, par son article 2, annulé le jugement du tribunal administratif de Cergy-Pontoise n° 1604814 du 30 janvier 2020, par son article 3, rejeté le surplus des conclusions de la requête de Mme C... ainsi que sa demande de première instance et, par son article 4, mis à la charge de Mme C... la somme de 1 500 euros à verser au centre hospitalier de Gonesse au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Procédure devant le Conseil d'Etat :
Par une décision n° 470254 du 20 mars 2024, le Conseil d'Etat statuant au contentieux a, saisi d'un pourvoi présenté par Mme C..., annulé les articles 3 et 4 de l'arrêt n° 20VE01274 du 8 novembre 2022 et a renvoyé, dans cette mesure, l'affaire devant la cour administrative d'appel de Versailles.
Procédure devant la cour après renvoi du Conseil d'Etat :
Par deux mémoires, enregistrés le 22 avril 2024 et le 9 janvier 2025, Mme C..., représentée par Me Gatineau, demande à la cour :
1°) de condamner le centre hospitalier de Gonesse à lui verser la somme de 83 204,42 euros, arrêtée au 1er avril 2024, en réparation de la perte de pension de retraite subie, ainsi que la somme de 212 629,24 euros, au titre de la perte de pension de retraite future, assortie des intérêts légaux capitalisés à chaque échéance annuelle ;
2°) et de mettre à la charge du centre hospitalier de Gonesse la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle n'invoque pas de nouveaux moyens.
Par un mémoire, enregistré le 28 août 2024, le centre hospitalier de Gonesse, représenté par la SCP Waquet Farge Hazan, conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge de Mme C... la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- les informations erronées délivrées à Mme C... provenaient de l'outil de simulation du site internet de la CNRACL, qu'elle a utilisé conformément aux prescriptions de la circulaire DGOS/RH14/DGCS n° 2013-41 du 5 février 2013 ;
- à supposer que sa responsabilité puisse être engagée, le préjudice de Mme C... ne constitue qu'un préjudice de perte de chance ;
- Mme C... ne peut demander la réparation de l'intégralité de la perte de pension sans apporter des éléments relatifs à sa situation fiscale ;
- le préjudice financier futur dont se prévaut Mme C... présente un caractère trop incertain pour ouvrir droit à indemnisation.
Les parties ont été informées, en application des dispositions de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, de ce que l'arrêt à intervenir était susceptible d'être fondé sur un moyen relevé d'office, tiré de ce que le centre hospitalier de Gonesse ne peut pas être condamné à payer une somme au titre de la prise en compte des éventuelles réformes postérieures à la date de la ou des fautes alléguées liées à des renseignements erronés, commises en 2013, pour le calcul des écarts de pensions allouées aux anciens membres du corps des cadre de santé de la fonction publique hospitalière par rapport aux anciens membres du corps des cadres de santé paramédicaux de la fonction publique hospitalière, à l'exclusion des revalorisations décidées par référence à l'article L. 161-23-1 du code de la sécurité sociale ; qu'il convient de faire application d'office d'un taux d'intérêt calculé selon les dispositions spéciales instituées par l'article L. 161-23-1 du code de la sécurité sociale au lieu du taux légal de droit commun ; et que les indemnités dues au titre des préjudices futurs doivent être allouées sous la forme d'une rente.
La requérante et le centre hospitalier de Gonesse ont répondu à ces moyens d'ordre public par deux mémoires enregistrés respectivement le 21 janvier et le 28 janvier 2025.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la loi n° 2010-751 du 5 juillet 2010 ;
- la circulaire DGOS/RH14/DGCS n° 2013-41 du 5 février 2013 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Even,
- les conclusions de M. Frémont, rapporteur public,
- et les observations de Me Lyautey pour Mme C....
Considérant ce qui suit :
1. Aux termes de l'article 37 de la loi du 5 juillet 2010 relative à la rénovation du dialogue social et comportant diverses dispositions relatives à la fonction publique : " I. - La limite d'âge des fonctionnaires régis par les statuts particuliers des corps et cadres d'emplois d'infirmiers et de personnels paramédicaux appartenant à la catégorie A, ainsi que du corps des cadres de santé, créés à compter de la date de publication de la présente loi, est fixée à soixante-sept ans. Les emplois de ces corps et cadres d'emploi ne sont pas classés dans la catégorie active prévue au 1° du I de l'article L. 24 du code des pensions civiles et militaires de retraite. / II. - Les fonctionnaires qui relèvent, à la date de création des corps et cadres d'emplois mentionnés au I du présent article, des corps et cadres d'emplois d'infirmiers et de personnels paramédicaux dont les emplois sont classés dans la catégorie active prévue au 1° du I de l'article L. 24 du code des pensions civiles et militaires de retraite, ainsi que les fonctionnaires qui relèvent à la même date du corps des cadres de santé et des autres corps ou cadres d'emplois de personnels paramédicaux et qui ont occupé des emplois ainsi classés, peuvent, dans des conditions définies par les statuts particuliers des corps et cadres d'emplois, opter individuellement soit en faveur du maintien dans leurs corps ou cadres d'emplois associé à la conservation des droits liés au classement dans la catégorie active, soit en faveur d'une intégration dans les corps et cadres d'emplois mentionnés au I du présent article. / (...) ".
2. Il résulte de l'instruction que Mme D..., cadre de santé de la fonction publique hospitalière au centre hospitalier de Gonesse, a opté, le 29 mars 2013, pour son intégration dans le corps des cadres de santé paramédicaux de la fonction publique hospitalière, en application des dispositions de l'article 37 de la loi du 5 juillet 2010 cité au point 1. Ayant été admise à faire valoir ses droits à la retraite, Mme C... a été radiée des cadres le 1er juillet 2013. La Caisse nationale de retraites des agents des collectivités locales (CNRACL) lui a alors adressé un décompte définitif de pension, daté du 19 juillet 2013, faisant apparaître un montant de pension nettement inférieur à celui que la requérante aurait perçu si elle avait opté pour le maintien dans son corps d'origine. Par une décision du 6 août 2015, la directrice du centre hospitalier de Gonesse a rejeté la demande de Mme C... tendant à l'indemnisation de son préjudice y afférent. Par un jugement du 30 janvier 2020, le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté la demande de Mme C... tendant à la condamnation du centre hospitalier de Gonesse à l'indemniser du préjudice financier qu'elle estimait avoir subi, imputable à la faute commise par cet établissement dans l'information sur le droit d'option qui lui était ouvert en application des dispositions de l'article 37 de la loi du 5 juillet 2010. La cour a, par son arrêt n° 20VE01274 du 8 novembre 2022, mis hors de cause la CNRACL (article 1er), annulé ce jugement du tribunal administratif (article 2), rejeté le surplus des conclusions d'appel et la demande de première instance de Mme C... (article 3) et mis à la charge de cette dernière la somme de 1 500 euros à verser au centre hospitalier de Gonesse au titre des frais de justice (article 4). Le Conseil d'Etat a, par sa décision n° 470254 du 20 mars 2024, annulé les articles 3 et 4 de l'arrêt de la cour, en précisant que le pourvoi n'était dirigé que contre ces deux articles, et lui a renvoyé l'affaire dans cette mesure.
Sur l'étendue du litige :
3. Il résulte de ce qui vient d'être dit que la cassation prononcée n'a pas remis en cause l'annulation pour irrégularité du jugement du tribunal administratif de Cergy-Pontoise du 30 janvier 2020. Il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur les conclusions à fin d'indemnisation présentées par de Mme C....
Sur l'obligation d'information pesant sur le Centre hospitalier de Gonesse :
4. Il ressort des pièces du dossier que, pour accompagner la réforme statutaire qui a permis aux cadres de santé, qui avaient conservé un droit à la liquidation anticipée de leur pension de retraite au titre de la catégorie active, d'opter pour un reclassement dans le corps des cadres de santé paramédicaux, dont le niveau de rémunération était plus élevé, à condition de renoncer à leur droit à la liquidation anticipée, la direction générale de l'offre de soins du ministère chargé de la santé a adressé aux chefs d'établissements hospitaliers une circulaire DGOS/RH4/DGCS n° 2013-41 du 5 février 2013 relative à la mise en œuvre du nouveau statut des cadres de santé paramédicaux de la fonction hospitalière, dont le paragraphe " I.1.2. " intitulé " Information des personnels concernés par le droit d'option et retour de l'option " a prescrit que : " chaque agent doit être personnellement informé de sa situation avant le 22 mars 2013 (par un mode de transmission qui permette d'en garantir la traçabilité), tant ceux bénéficiaires du droit d'option que ceux non concernés par celui-ci, afin de s'assurer que tous les agents concernés par le droit d'option effectuent un choix éclairé dans le délai imparti ". Il en résulte que l'employeur de Mme C... était tenu à une obligation d'information quant aux conséquences de l'option exercée, notamment sur ses droits à pension.
Sur le principe de la responsabilité et la détermination de la personne responsable :
5. Si la faute commise par une administration publique consistant à fournir des informations erronées est sans influence sur la décision refusant le bénéfice de droits à pension, de tels renseignements erronés peuvent en revanche avoir des conséquences indemnitaires. Il appartient au juge administratif d'analyser si ces renseignements erronés ont incité l'intéressé à adopter un comportement qui l'a privé d'un droit auquel il pouvait prétendre.
6. Il résulte de l'instruction qu'en vue de préparer son départ à la retraite, Mme C... a été reçue par une agente de la direction des ressources humaines du centre hospitalier de Gonesse, le 19 mars 2013. A cette occasion, elle s'est vu remettre une simulation de ses droits à pension dans le cas où elle opterait pour le maintien dans son corps d'origine, qui mentionnait une pension de retraite mensuelle nette d'un montant de 1 994,83 euros. Mme C... affirme, sans être contredite, que lors de cet entretien cette agente lui a indiqué verbalement que l'exercice de l'option prévue par l'article 37 précité de la loi du 5 juillet 2010 permettant son reclassement dans le corps des cadres de santé paramédicaux, lui ouvrirait droit à un montant de retraite supérieur de trente euros. Il est constant qu'elle a été reçue une seconde fois par cette agente le 29 mars 2013, laquelle lui a remis un décompte provisoire de pension, daté du 28 mars 2023, mentionnant une pension de retraite mensuelle nette d'un montant estimé de 2 036 euros si elle choisissait de changer de corps pour intégrer celui des cadres de santé paramédicaux. Mme C... a alors paraphé et signé ce décompte provisoire, optant ainsi pour la levée de l'option et le reclassement dans le corps des cadres de santé paramédicaux.
7. Il résulte de l'instruction qu'en conséquence de son choix Mme C... perçoit depuis sa radiation des cadres le 1er juillet 2013 une pension de retraite inférieure à ce qu'elle aurait perçu si elle avait opté en faveur du maintien dans son corps d'origine, ce qui aurait entrainé la conservation de ses droits à la retraite au titre de ce corps. Par suite, les informations qui lui ont été délivrées par le centre hospitalier de Gonesse doivent être regardées comme étant erronées. Il résulte de l'instruction que l'erreur ainsi commise procède de l'absence de prise en compte d'un paramètre pour le calcul du montant estimatif de la pension de retraite applicable aux anciens membres du corps des cadres de santé paramédicaux, à savoir un coefficient de minoration de 25% correspondant à la situation de l'intéressée.
8. La délivrance de ces informations erronées à Mme C..., qui l'a conduite à choisir l'intégration dans le corps des cadres de santé paramédicaux, la privant ainsi d'une pension de retraite d'un montant plus élevé qu'elle aurait perçu si elle s'était maintenue dans son corps d'origine, est constitutive d'un manquement fautif à l'obligation d'information pesant sur centre hospitalier de Gonesse, qui est de nature à engager sa responsabilité. Si Mme C... n'a produit à l'instance que la simulation de ses droits à pension réalisée par son employeur, correspondant à l'option de reclassement dans le corps des cadres de santé paramédicaux, sans présenter une seconde simulation correspondant à son maintien dans son ancien corps des cadres de santé, qui avait été fournie à l'intéressée conformément aux prescriptions de la circulaire ministérielle du 5 février 2013 précitée, ceci n'est en tout état de cause pas de nature à écarter la preuve d'une faute du centre hospitalier de Gonesse.
9. Si le centre hospitalier de Gonesse fait valoir que le caractère erroné des informations délivrées à Mme C... est imputable à l'outil de simulation des droits à la retraite figurant sur le site internet de la CNRACL élaboré par cette dernière, qu'elle a utilisé conformément aux prescriptions de la circulaire DGOS/RH14/DGCS n° 2013-41 du 5 février 2013 ", cette circonstance est sans incidence sur l'obligation d'information à l'égard des agents pesant sur lui en sa qualité d'employeur, et ne fait pas obstacle à la mise en jeu de sa responsabilité à leur égard. Toutefois, ceci ne fait pas obstacle à ce que l'établissement hospitalier, s'il s'y croit fondé, engage une action récursoire à l'encontre de la CNRACL.
Sur le lien de causalité et l'imprudence fautive alléguée qui aurait été commise par la victime :
10. Il résulte de l'instruction que Mme C... a exercé son option avec les conséquences qui en résultent sur le montant de sa retraite au vu d'informations erronées délivrées par le centre hospitalier. Il n'est pas établi que la requérante aurait ainsi commis une imprudence fautive au moment de son option en faisant confiance à son employeur, qui serait de nature à exonérer totalement ou partiellement le centre hospitalier de sa responsabilité.
11. La faute commise par le centre hospitalier de Gonesse a entraîné un préjudice direct et certain pour Mme C..., résultant de la fixation du montant de sa pension de retraite à un niveau inférieur à celui qu'elle aurait perçu si elle n'avait pas opté en faveur d'une intégration dans le corps des cadres de santé paramédicaux de la fonction publique hospitalière.
Sur le droit à indemnisation de Mme C... et l'évaluation de son préjudice indemnisable :
12. Il ne résulte pas de l'instruction, que l'écart observé, à la date de la radiation des cadres de Mme C... et sa mise à la retraite le 1er juillet 2013, entre le montant qu'elle aurait perçu si elle avait opté en faveur du régime de retraite applicable à son corps d'origine des cadres de santé paramédicaux de la fonction publique hospitalière, et le montant de la pension de vieillesse qui lui a été versé au titre du régime des anciens membres du corps des cadres de santé de la fonction publique hospitalière en faveur duquel elle a opté, ne s'est pas maintenu chaque mois jusqu'à la date du présent arrêt ou qu'il aurait été modifié par des réformes postérieures à la date à laquelle le centre hospitalier a commis une faute en délivrant des renseignements erronés à l'intéressée en 2013. En conséquence, Mme C... est fondée à demander la réparation du préjudice financier qu'elle a subi depuis la date de sa radiation des cadres et sa mise à la retraite le 1er juillet 2013 jusqu'à la date du présent arrêt. Le centre hospitalier doit donc être condamné à lui verser la différence entre le montant qu'elle aurait perçu si elle avait opté en faveur du régime de retraite applicable à son corps d'origine des cadres de santé paramédicaux de la fonction publique hospitalière, et le montant de la pension de vieillesse qui lui a été versé au titre du régime des anciens membres du corps des cadres de santé de la fonction publique hospitalière en faveur duquel elle a opté.
En ce qui concerne le préjudice actuel :
13. Il sera fait une juste appréciation du préjudice financier subi par Mme C... depuis la date de sa radiation des cadres et sa mise à la retraite le 1er juillet 2013 jusqu'à la date du présent arrêt, en condamnant le centre hospitalier de Gonesse à lui verser la différence entre le montant qu'elle aurait perçu si elle avait opté en faveur du maintien dans son corps d'origine des cadres de santé paramédicaux de la fonction publique hospitalière, soit un montant mensuel initial de 2 014 euros, et le montant de la pension de vieillesse qui lui a été versé au titre du régime des anciens membres du corps des cadres de santé de la fonction publique hospitalière en faveur duquel elle a opté, soit un montant mensuel initial de 1 384 euros, à savoir un écart de 630 euros mensuels, assorti d'une revalorisation par application du taux calculé selon les dispositions spéciales instituées par l'article L. 161-23-1 du code de la sécurité sociale dans leur rédaction applicable aux périodes considérées, lesquelles ont été modifiées à trois reprises depuis 2013, le 1er octobre 2014, le 1er octobre 2015 et le 1er janvier 2018, dans la limite de la somme sollicitée.
14. Lorsqu'ils ont été demandés, et quelle que soit la date de cette demande, les intérêts au taux légal courent à compter du jour où la demande de paiement du principal est parvenue au débiteur ou, en l'absence d'une telle demande préalablement à la saisine du juge, à compter du jour de cette saisine. Mme C... ayant saisi le tribunal administratif de Cergy-Pontoise le 23 mai 2016, elle a droit aux intérêts au taux légal sur les sommes qui lui étaient dues à cette date.
15. La capitalisation des intérêts peut être demandée à tout moment devant le juge du fond, même si, à cette date, les intérêts sont dus depuis moins d'une année. En ce cas, cette demande ne prend toutefois effet qu'à la date à laquelle, pour la première fois, les intérêts sont dus pour une année entière. La capitalisation des intérêts a été demandée le 23 mai 2016. Il y a lieu de faire droit à cette demande à compter du 24 mai 2017, date à laquelle était due, pour la première fois, une année d'intérêts, ainsi qu'à chaque échéance annuelle à compter de cette date.
En ce qui concerne le préjudice futur :
16. Contrairement à ce que soutient le centre hospitalier de Gonesse, le préjudice financier futur dont se prévaut Mme C... ne présente pas un caractère trop incertain la privant d'un droit à indemnisation. Le centre hospitalier doit donc être condamné à lui verser à ce titre, dans la limite des sommes demandées, non pas une indemnité qui constituerait le versement par anticipation d'un élément de rémunération, mais une rente mensuelle à partir de la date du présent arrêt, d'un montant égal à l'écart de pension observé entre la somme qui lui est versée en qualité d'ancien membre du corps des cadres de santé de la fonction publique hospitalière par rapport au montant qui lui aurait été versé en qualité d'ancien membre du corps des cadres de santé paramédicaux de la fonction publique hospitalière, tenant compte des revalorisations périodiques prévues à l'article L. 161-23-1 du code de la sécurité sociale appliquées aux montants de ces pensions de retraite, sous réserve de l'incidence sur l'écart mentionné ci-dessus d'éventuelles réformes intervenues postérieurement à la date à laquelle le centre hospitalier a commis une faute en délivrant des renseignements erronés à l'intéressée en 2013, et sous réserve du maintien d'un écart, actuellement observé, entre les niveaux de retraite accordés par les deux régimes concernés.
Sur l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
17. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de Mme C..., qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, les sommes demandées par le centre hospitalier de Gonesse au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens. Il y a lieu en revanche, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge du centre hospitalier de Gonesse le versement de la somme de 2 000 euros à verser à Mme C... au titre de ces mêmes dispositions.
DÉCIDE :
Article 1er : Le centre hospitalier de Gonesse est condamné à verser à Mme C... une indemnité pour son préjudice actuel et une rente pour son préjudice futur, dont les montants seront calculés conformément aux points 13 et 16 du présent arrêt.
Article 2 : Mme C... a droit aux intérêts au taux légal sur la somme qui lui était due à compter du 23 mai 2016. Les intérêts échus à la date du 24 mai 2017 puis à chaque échéance annuelle à compter de cette date seront capitalisés à chacune de ces dates pour produire eux-mêmes intérêts jusqu'à la date du présent arrêt.
Article 3 : Le centre hospitalier de Gonesse versera à Mme C... la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté.
Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... C... et au centre hospitalier de Gonesse.
Copie en sera adressée à la caisse nationale des retraites des agents des collectivités locales (CNRACL) et à la caisse des dépôts et consignations.
Délibéré après l'audience du 6 février 2025, à laquelle siégeaient :
- M. A... Even, premier vice-président, président de chambre,
- Mme Gaëlle Mornet, présidente assesseure,
- Mme Aventino, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 6 mars 2025.
Le président-rapporteur,
B. Even
La présidente assesseure,
G. Mornet
La greffière,
I. Szymanski
La République mande et ordonne à la ministre du travail, de la santé, des solidarités et des familles en ce qui la concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition conforme
La greffière,
2
N° 24VE00752