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06/03/2025 | FRANCE | N°23VE00099

France | France, Cour administrative d'appel de VERSAILLES, 5ème chambre, 06 mars 2025, 23VE00099


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



La SAS Oriad Ile-de-France a demandé au tribunal administratif de Cergy-Pontoise de condamner la communauté d'agglomération de Cergy-Pontoise à lui verser la somme de 160 888,44 euros toutes taxes comprises (TTC) au titre du solde du lot n° 1 du marché de prestations de services, conclu le 28 juillet 2014, portant sur l'entretien et le curage des canalisations, bassins et postes des réseaux d'eaux pluviales sur les communes d'Eragny, Osny, Pontoise et Saint-Ouen-l'Aumône, major

ée de la somme de 9 884,33 euros TTC au titre des intérêts moratoires.



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Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La SAS Oriad Ile-de-France a demandé au tribunal administratif de Cergy-Pontoise de condamner la communauté d'agglomération de Cergy-Pontoise à lui verser la somme de 160 888,44 euros toutes taxes comprises (TTC) au titre du solde du lot n° 1 du marché de prestations de services, conclu le 28 juillet 2014, portant sur l'entretien et le curage des canalisations, bassins et postes des réseaux d'eaux pluviales sur les communes d'Eragny, Osny, Pontoise et Saint-Ouen-l'Aumône, majorée de la somme de 9 884,33 euros TTC au titre des intérêts moratoires.

La communauté d'agglomération de Cergy-Pontoise a présenté des conclusions reconventionnelles tendant à la condamnation de la SAS Oriad Ile-de-France à lui reverser un indu de 85 250 euros HT.

Par un jugement n° 1907627 du 10 novembre 2022, le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté la demande de SAS Oriad Ile-de-France, l'a condamnée à verser à la communauté d'agglomération de Cergy-Pontoise la somme de 85 250 euros HT au titre du solde du marché et a mis à sa charge la somme de 2 000 euros HT sur le fondement de l'article

L. 761-1 du code de justice administrative.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés les 13 janvier 2023 et 20 octobre 2024, la société Oriad Ile-de-France, représentée par Me Schmitt et Me Douineau, avocats, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) de condamner la communauté d'agglomération de Cergy-Pontoise à lui verser la somme de 160 888,44 euros TTC au titre du solde du marché, assortie des intérêts moratoires ;

3°) de mettre à la charge de la communauté d'agglomération de Cergy-Pontoise la somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- c'est à tort que le tribunal administratif a considéré que les conclusions de sa demande étaient irrecevables en tant qu'elles concernaient le paiement des deux factures émises le 23 novembre 2017 pour un montant global de 55 099 euros TTC en relevant que le silence gardé par la communauté d'agglomération de Cergy-Pontoise (CACP) sur la mise en demeure qui lui avait été notifiée le 4 juin 2018 de payer ces deux factures sous huit jours avait fait naître un différend portant sur le règlement de ces deux factures le 12 juin 2018 et que la demande n'avait pas été précédée d'un mémoire en réclamation communiqué au pouvoir adjudicateur dans le délai de deux mois suivant l'apparition de ce différend conformément aux stipulations de l'article 37.2 du cahier des clauses administratives générales applicables aux marchés publics de fournitures courantes et de services (CCAG-FCS) ; la demande portait en effet sur le paiement du solde total du marché et indépendamment de la question du règlement de ces deux factures, le marché s'est poursuivi, la CACP continuant à lui commander, dans le cadre de son exécution et jusqu'à son terme en juillet 2018, des prestations, lesquelles n'ont pu être facturées compte tenu des discussions en cours à l'époque en vue de la signature de l'avenant n° 2, dont l'objet était de modifier le BPU à l'initiative de la CACP, rendant par là-même impossible le paiement des prestations effectuées ; dans ces conditions, le différend ayant trait au paiement du solde du marché a pu naître au plus tôt à l'expiration du délai de trente jours qu'elle a imparti à la CACP dans son courrier du 9 novembre 2018 réceptionné par cette dernière le 13 novembre 2018, et le mémoire en réclamation de la société exposante, adressé le 11 février 2019 à la CACP, a été communiqué dans les délais prescrits par l'article 37.2 du CCG-FCS ; en outre, une réclamation au sens de cet article tendant au paiement desdites factures a bel et bien été formulée dès le 8 juin 2018 ;

- le tribunal administratif a commis une erreur et une dénaturation des faits en refusant de prendre en compte le prix contractuellement convenu s'agissant du prix unitaire pour le curage d'une bâche sur les postes de Pâtis et de Liesse ; les dimensions de ces postes sont vingt fois plus importantes que celles du poste de St Prix et justifient la différence de tarification décidée par avenant n° 1 ; la CACP avait elle-même convenu que le prix unitaire serait au minimum deux fois supérieur à celui convenu pour le poste de St Prix ;

- c'est à tort que le tribunal administratif a jugé la demande reconventionnelle de la CACP recevable après avoir retenu l'irrecevabilité de la demande principale au titre du paiement des prestations effectuées sur l'exercice 2017 ;

- l'indu allégué par la CACP est infondé dès lors qu'il convient de faire application du prix contractuellement convenu ; dans tous les cas, si les factures émises ont donné lieu à un règlement définitif, la CCAP n'est pas recevable à revendiquer une quelconque créance au titre des factures soldées ;

- la CACP reste redevable à l'exposante d'une somme totale de 160 888,44 euros TTC qui se décompose comme suit : 5 099,00 euros TTC au titre de l'année 2017 (factures n° FA17008167 et FA17008170, respectivement d'un montant de 26 741,00 euros TTC et 28 358,00 euros TTC), 105 789,44 euros TTC au titre de l'année 2018 (facture n° FA18011184 de 52 894,71 euros TTC ; facture n° FA18011185 de 26 541,96 euros TTC ; facture n° FA18011186 de 26 352,77 euros TTC).

Par un mémoire en défense, enregistré le 7 août 2023, et un second mémoire enregistré le 13 novembre 2024, non communiqué, la communauté d'agglomération de Cergy-Pontoise (CACP) et le syndicat intercommunautaire pour l'assainissement de la région de Cergy-Pontoise et du Vexin (SIARCPV), représentés par Me Morice, avocat, demandent à la cour :

1°) de rejeter la requête de la société Oriad Ile-de-France ;

2°) de réformer le jugement attaqué en tant qu'il n'a pas accordé l'intégralité des sommes dues à la communauté d'agglomération de Cergy-Pontoise et/ou au syndicat intercommunautaire pour l'assainissement de la région de Cergy-Pontoise et du Vexin au titre du solde du marché et de condamner la société Oriad Ile-de-France à leur verser la somme de 96 177,85 euros HT au titre du solde du marché ;

3°) de mettre la charge de la société Oriad Ile-de-France la somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- seule la CACP est créancière de la société Oriad Ile-de-France, la créance résultant d'un contrat venu à expiration avant le transfert de compétence en matière d'assainissement au SIARCPV ;

- l'avenant n° 1 a créé une ligne nouvelle pour les postes Pâtis et Liesse afin de tenir compte de l'existence de deux bâches sur ces postes, contrairement au poste de St Prix qui n'en contient qu'une, et ainsi porter à 2 900 euros HT au lieu de 1 450 euros HT le curage des bâches ; une erreur grossière de retranscription au sein du BPU a toutefois conduit à reprendre non pas le prix unitaire de la prestation mais le prix total visé au DQE pour quatre interventions, soit 11 600 euros HT ; la société requérante n'apporte aucun élément de preuve des dimensions qu'elle avance et qui justifieraient le prix de 11 600 euros, lesquelles sont contredites par les fiches d'intervention produites au dossier ; il ne fait aucun doute que la volonté commune des parties était de faire application d'un prix unitaire de 1 450 euros HT pour le curage d'une bâche du poste de Pâtis ou de Liesse ;

- le jugement devra être réformé en ce qu'il n'a pas accordé à la CACP l'intégralité du montant dû au titre du solde du marché ; le juge de plein contentieux n'est pas lié par les conclusions indemnitaires des parties et doit déterminer le montant du solde du marché ; en outre, les prestations relatives au curage des bâches des postes de Pâtis ou Liesse réalisées par la société sur les années 2016 et 2017 auraient dû conduire à la facturation d'un montant de 23 300 euros HT et non 29 200 euros HT comme retenu à tort par les juges de première instance.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code des marchés publics ;

- le décret n° 2013-269 du 29 mars 2013 ;

- l'arrêté du 19 janvier 2009 portant approbation du cahier des clauses administratives générales des marchés publics de fournitures courantes et de services ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Florent,

- les conclusions de Mme Janicot, rapporteure publique,

- les observations de Me Schmitt pour la société Oriad Ile-de-France et celles de Me Chaves-Guillon pour la communauté d'agglomération de Cergy-Pontoise et le syndicat intercommunautaire pour l'assainissement de la région de Cergy-Pontoise et du Vexin.

Considérant ce qui suit :

1. Par un acte d'engagement en date du 28 juillet 2014, la communauté d'agglomération de Cergy-Pontoise (Val-d'Oise) a confié à la société par actions simplifiée Oriad Ile-de-France la réalisation du lot n° 1 d'un marché à bons de commande de prestations de services portant sur l'entretien et le curage des canalisations, bassins et postes des réseaux d'eaux pluviales sur les communes d'Eragny, Osny, Pontoise et Saint-Ouen-l'Aumône. Ce marché a été modifié par un avenant en date du 6 août 2015. Par un mémoire en réclamation du 11 février 2019, la société Oriad Ile-de-France a vainement demandé à la communauté d'agglomération de Cergy-Pontoise (CACP) de lui régler deux factures émises en 2017 et trois factures émises en 2018, pour un montant global de 160 888,44 euros toutes taxes comprises (TTC). Par la présente requête, la société Oriad Ile-de France relève appel du jugement du 10 novembre 2022 par lequel le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande de condamnation de la CACP au versement de la somme de 160 888,44 euros TTC et, faisant droit aux conclusions reconventionnelles de la CACP, l'a condamnée à verser à la communauté d'agglomération la somme de 85 250 euros HT au titre de solde du marché. Par la voie de l'appel incident, la CACP et le syndicat intercommunautaire pour l'assainissement de la région de Cergy-Pontoise et du Vexin (SIARCPV) demandent la réformation de ce jugement et la condamnation de la société Oriad Ile-de France à leur verser la somme de 96 177,85 euros HT.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Aux termes de l'article 37 du cahier des clauses administratives générales applicables aux marchés publics de fournitures courantes et de services (CCAG-FCS) applicable au marché en cause en vertu de l'article 2 du cahier des clauses administratives particulières du contrat : " 37.1. Le pouvoir adjudicateur et le titulaire s'efforceront de régler à l'amiable tout différend éventuel relatif à l'interprétation des stipulations du marché ou à l'exécution des prestations objet du marché. / 37. 2. Tout différend entre le titulaire et le pouvoir adjudicateur doit faire l'objet, de la part du titulaire, d'un mémoire de réclamation exposant les motifs et indiquant, le cas échéant, le montant des sommes réclamées. Ce mémoire doit être communiqué au pouvoir adjudicateur dans le délai de deux mois, courant à compter du jour où le différend est apparu, sous peine de forclusion. (...) ".

3. L'apparition d'un différend, au sens des stipulations précitées, entre le titulaire du marché et l'acheteur, résulte, en principe, d'une prise de position écrite, explicite et non équivoque émanant de l'acheteur et faisant apparaître le désaccord. Elle peut également résulter du silence gardé par l'acheteur à la suite d'une mise en demeure adressée par le titulaire du marché l'invitant à prendre position sur le désaccord dans un certain délai. En revanche, en l'absence d'une telle mise en demeure, la seule circonstance qu'une personne publique ne s'acquitte pas, en temps utile, des factures qui lui sont adressées, sans refuser explicitement de les honorer, ne suffit pas à caractériser l'existence d'un différend au sens des stipulations précédemment citées.

4. Par ailleurs, le mémoire du titulaire du marché ne peut être regardé comme une réclamation au sens des stipulations précitées que s'il comporte l'énoncé d'un différend et expose, de façon précise et détaillée, les chefs de la contestation en indiquant, d'une part, les montants des sommes dont le paiement est demandé et, d'autre part, les motifs de ces demandes, notamment les bases de calcul des sommes réclamées.

5. En l'espèce, il résulte de l'instruction qu'à compter de la fin d'année 2017, la CACP a cessé de régler les factures présentées par la société Oriad Ile-de France. Après deux relances de paiement des factures émises par la société le 23 novembre 2017 sous les nos FA17008167 et FA17008170, pour des montants respectifs de 26 741 et 28 358 euros TTC, la CACP a adressé à la société titulaire, par courrier du 16 mai 2018, une proposition d'avenant visant à rectifier l'erreur matérielle entachant selon elle le prix figurant à la ligne 9.2.5 du bordereau des prix unitaires (BPU) modifié par avenant du 5 août 2015 et prévoyant en conséquence un rappel des sommes indument versées sur les factures payées depuis 2015 par la CACP. A la suite de cette proposition, la société Oriad Ile-de France a adressé à la CACP, d'une part, une mise en demeure de payer les factures du 23 novembre 2017 dans un délai de huit jours à compter de sa réception, soit à compter du 4 juin 2018, et, d'autre part, par courrier du 8 juin 2018 reçu le 13 juin 2018, une contre-proposition d'avenant pour " mettre un terme à leur différend " prévoyant, en contrepartie d'une modification du BPU concernant le prix objet de leur désaccord et de son application immédiate aux prestations déjà effectuées en 2018, l'absence de remise en cause de la part de la CACP des factures émises depuis 2015 et le règlement des factures émises le 23 novembre 2017. Cette contre-proposition a été réitérée par courrier du 9 novembre 2018 en réponse à un courrier du 1er octobre 2018 de la CACP.

6. Il résulte ainsi de l'instruction qu'à défaut de prise de position explicite sur la demande de règlement des factures du 23 novembre 2017 par l'administration avant la mise en demeure adressée par le titulaire du marché, le différend relatif au règlement des factures du 23 novembre 2017 doit être regardé comme né à la date d'expiration du délai accordé par la mise en demeure de la société Oriad Ile-de France, soit le 12 juin 2018. Il résulte, par ailleurs, de l'instruction que le courrier reçu le 13 juin 2018, bien que formulant une proposition d'avenant, comporte tous les éléments constitutifs d'une réclamation rappelés au point 4. Dans ces conditions, la société Oriad Ile-de France est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal a rejeté comme irrecevables ses conclusions tendant au paiement des factures du 23 novembre 2017 au motif qu'aucun mémoire en réclamation n'avait été communiqué dans le délai de deux mois suivant l'apparition du différend conformément à l'article 37.2 du CCAG-FCS.

7. Il y a lieu de se prononcer immédiatement par la voie de l'évocation sur ces conclusions de la société Oriad Ile-de France et de statuer par l'effet dévolutif de l'appel sur les autres conclusions des parties.

Sur la recevabilité des conclusions de la société Oriad s'agissant des factures émises au titre de l'année 2018 :

8. S'agissant des factures nos FA18011184, FA18011184 et FA18011186 émises le 26 décembre 2018 pour des montants de 52 894,71, 26 541,96 et 26 352,77 euros TTC dont la société Oriad Ile-de France demande le règlement, la fin de non-recevoir soulevée par la communauté d'agglomération, tirée de la forclusion des demandes de la société Oriad Ile-de-France concernant ces factures, ne peut qu'être écartée dès lors qu'aucun différend n'a pu survenir au sujet de ces factures avant leur émission et qu'il n'est pas contesté que le mémoire en réclamation de la société titulaire, daté du 11 février 2019, a été en tout état de cause reçu dans le délai de deux mois suivant la communication de ces factures.

Sur les sommes dues à la société Oriad Ile-de France au titre des prestations facturées les 23 novembre 2017 et 26 décembre 2018 :

9. Il résulte de l'instruction que dans l'acte d'engagement du marché, les parties ont convenu, comme cela ressort du BPU du contrat à la ligne 9.2.2, que le curage d'une bâche sur les postes de Pâtis, Liesse ou Saint-Prix, se ferait sur la base d'un tarif unitaire de 1 450 euros HT. Au stade de l'avenant n° 1, à l'initiative de la CACP dont il n'est pas utilement contesté qu'elle souhaitait clarifier la ligne 9.2.2 pour tenir compte de l'existence d'une bâche sur le site de Saint-Prix contre deux sur chacun des sites de Pâtis et de Liesse, les parties ont décidé d'insérer au BPU une nouvelle ligne 9.2.5 relative à ces deux derniers sites afin que le tarif unitaire tienne compte de l'existence de deux bâches sur chaque poste. Alors toutefois que le détail quantitatif estimatif annexé à l'avenant n° 1 prévoyait un prix unitaire de 2 900 euros HT pour chaque curage de l'ensemble des bâches des postes de Pâtis ou de Liesse et un prix total de 11 600 euros HT pour l'ensemble de la prestation, compte tenu de la quantité estimée de quatre interventions sur la durée du contrat, il résulte de l'instruction que le prix total de 11 600 euros HT a été reporté par erreur comme prix unitaire de cette prestation figurant dans le BPU annexé à ce même avenant. Si la société Oriad Ile-de France conteste l'existence d'une erreur, en soutenant que l'insertion de cette nouvelle ligne 9.2.5 avait pour objet de tenir compte de prestations plus complexes sur les postes de Liesse et de Pâtis, en raison notamment de fosses plus vastes et plus profondes, elle n'en justifie pas. En tout état de cause, alors qu'elle se prévaut de dimensions presque vingt fois supérieures à celle des autres postes, la fiche d'intervention n° 24290 du 18 janvier 2016 pour le curage de deux bâches du site de Liesse fait apparaître un volume pompé de 4 m3, cohérent avec le libellé de la ligne 9.2.5 du BPU qui a prévu un volume de boues / graisse pompé de 0 à 8 m3. Dans ces conditions, quand bien même la CACP a mis en paiement plusieurs factures antérieures sans les contester, la société Oriad Ile-de France n'est pas fondée à demander le règlement des sommes figurant sur ses factures du 23 novembre 2017 et 26 décembre 2018 en se prévalant du prix figurant au BPU compte tenu de l'erreur matérielle grossière dont celui-ci est entaché.

10. En revanche, il est constant que les prestations objet de ces factures n'ont donné lieu à aucun règlement sans que la CACP n'en conteste la bonne exécution. Par suite, après application d'un prix unitaire de 2 900 euros HT par intervention sur les deux bâches des postes de Pâtis ou Liesse en lieu et place des 11 600 euros HT facturés, et compte tenu de la révision applicable (taux de 1,0117), la somme due par la CACP à la société Oriad Ile-de France au titre de ces prestations doit être fixée à la somme totale de 23 512,16 euros HT, soit 25 863,38 euros TTC, au titre des factures nos FA17008167 et FA17008170 émises le 23 novembre 2017 et nos°FA18011184, FA18011184 et FA18011186 émises le 26 décembre 2018. Cette somme sera assortie des intérêts moratoires, au taux d'intérêt appliqué par la Banque centrale européenne à ses opérations principales de refinancement les plus récentes, en vigueur au premier jour du semestre de l'année civile au cours duquel les intérêts moratoires ont commencé à courir, majoré de huit points de pourcentage, à compter de l'expiration d'un délai de trente jours à compter de la date de réception de chacune des factures par la CACP, en application de l'article 98 du code des marchés publics et de l'article 8 du décret du 29 mars 2013 relatif à la lutte contre les retards de paiement dans les contrats de la commande publique.

Sur les sommes facturées par la société Oriad Ile-de France antérieurement au 23 novembre 2017 :

11. Chaque commande d'un marché de services à bons de commande donne lieu à des prestations propres pouvant faire l'objet d'une admission et d'un règlement dès leur réalisation. Par suite, sauf à ce que le contrat renvoie le règlement définitif de l'ensemble des commandes au terme du marché, chaque commande peut donner lieu à un règlement définitif.

12. En l'espèce, si le CCAP du marché prévoit en son article 10.1 intitulé " Acomptes et paiements partiels définitifs " que " Les acomptes seront versées au titulaire dans les conditions de l'article 11 du CCAG-FCS ", ce dernier article, qui renvoie à l'article 91 du code des marchés publics, prévoit uniquement que " Les prestations qui ont donné lieu à un commencement d'exécution du marché ouvrent droit à des acomptes. ". Il est constant par ailleurs que les pièces contractuelles du marché ne fixent aucune date ou périodicité de versement d'acompte et ne prévoit pas davantage l'établissement d'un décompte général au terme du marché. Dans ces conditions et compte tenu de ce que les clauses particulières du marché n'ont pas entendu déroger à l'article 11.8 du CCAG FCS, qui prévoit que les demandes de paiement pour solde sont adressées après la décision d'admission du pouvoir adjudicateur, laquelle naît, en l'absence de prise de position de l'administration, dans un délai de quinze jours à dater de la livraison en vertu de l'article 25.1, chaque commande du marché litigieux dont la facture a été honorée par la CACP a donné lieu à un règlement définitif qui ne peut plus être remis en cause par les parties. Par suite, la CACP n'était pas fondée à demander, à titre reconventionnel, la condamnation de la société Oriad Ile-de France à lui reverser une partie des sommes réglées définitivement entre 2016 et 2017.

13. Il suit de là que, d'une part, la société Oriad Ile-de France est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a fait droit aux conclusions reconventionnelles de la CACP et que, d'autre part, les conclusions d'appel incident de la CAPC et du SIARCPV ne peuvent qu'être rejetées.

14. Il résulte de tout ce qui précède que la société Oriad Ile-de France est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande et l'a condamnée à verser à la CACP la somme de 85 250 euros HT et à demander la condamnation de la CACP à lui verser la somme de 25 863,38 euros TTC assortie des intérêts moratoires.

Sur les frais d'instance :

15. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la société Oriad Ile-de France, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que la CACP et le SIARCPV sollicitent au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu par ailleurs de mettre à la charge de ces derniers la somme que la société Oriad Ile-de France sollicite sur le fondement de ces mêmes dispositions.

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement n° 1907627 du tribunal administratif de Cergy-Pontoise du 10 novembre 2022 est annulé.

Article 2 : La CACP est condamnée à verser à la société Oriad Ile-de France la somme de 25 863,38 euros TTC assortie des intérêts moratoires calculés dans les conditions précisées au point 10 du présent arrêt.

Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête de la société Oriad Ile-de France est rejeté.

Article 4 : Les conclusions d'appel incident de la CACP et du SIARCPV ainsi que celles présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à la SAS Oriad Ile-de-France, à la communauté d'agglomération de Cergy-Pontoise et au syndicat intercommunautaire pour l'assainissement de la région de Cergy-Pontoise et du Vexin.

Délibéré après l'audience du 13 février 2025, à laquelle siégeaient :

Mme Signerin-Icre, présidente,

M. Camenen, président assesseur,

Mme Florent, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 6 mars 2025.

La rapporteure,

J. FLORENTLa présidente,

C. SIGNERIN-ICRE

La greffière,

V. MALAGOLI

La République mande et ordonne au préfet du Val-d'Oise en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme

La greffière,

N° 23VE00099 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de VERSAILLES
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 23VE00099
Date de la décision : 06/03/2025
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

39-05-02 Marchés et contrats administratifs. - Exécution financière du contrat. - Règlement des marchés.


Composition du Tribunal
Président : Mme SIGNERIN-ICRE
Rapporteur ?: Mme Julie FLORENT
Rapporteur public ?: Mme JANICOT
Avocat(s) : SYMCHOWICZ & WEISSBERG

Origine de la décision
Date de l'import : 16/03/2025
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2025-03-06;23ve00099 ?
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