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28/02/2025 | FRANCE | N°23VE00765

France | France, Cour administrative d'appel de VERSAILLES, 2ème chambre, 28 février 2025, 23VE00765


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



Mme C... A... a demandé au tribunal administratif de Versailles, à titre principal, d'annuler les décisions des 22 mai 2020 et 17 juillet 2020 procédant à sa réaffectation ainsi que celle rejetant son recours gracieux et de condamner la commune de Viroflay à lui verser une somme de 40 000 euros, assortie des intérêts au taux légal à compter de sa demande indemnitaire préalable et de l'anatocisme si plus d'une année d'intérêts de retard était due, ou, à titre accessoire

, d'enjoindre à la ville de Viroflay de l'affecter sur son poste de directrice de crèche ou...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme C... A... a demandé au tribunal administratif de Versailles, à titre principal, d'annuler les décisions des 22 mai 2020 et 17 juillet 2020 procédant à sa réaffectation ainsi que celle rejetant son recours gracieux et de condamner la commune de Viroflay à lui verser une somme de 40 000 euros, assortie des intérêts au taux légal à compter de sa demande indemnitaire préalable et de l'anatocisme si plus d'une année d'intérêts de retard était due, ou, à titre accessoire, d'enjoindre à la ville de Viroflay de l'affecter sur son poste de directrice de crèche ou sur tout poste de son cadre d'emploi.

Par un jugement n° 2100203 du 10 février 2023, le tribunal administratif de Versailles a condamné la commune de Viroflay à verser une somme de 1 000 euros à Mme A... en raison de la faute constituée par un délai excessif de réponse à sa demande de passage à temps plein, a enjoint au maire de Viroflay de réexaminer la situation de l'intéressée dans un délai de trois mois et a rejeté le surplus des conclusions des parties.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire enregistrés le 11 avril 2023 et le 19 décembre 2024, ainsi que des pièces complémentaires enregistrées le 18 avril 2023 et le 22 mai 2023, Mme C... A..., représentée par Me Rochefort, avocate, demande à la cour :

1°) de reformer le jugement du tribunal administratif de Versailles du 10 février 2023 ;

2°) d'annuler les décisions des 22 mai 2020 et 17 juillet 2020 procédant à sa réaffectation ainsi que la décision de rejet de son recours gracieux ;

3°) de condamner la commune de Viroflay à lui verser une somme de 30 000 euros, assortie des intérêts au taux légal à compter de sa demande indemnitaire préalable et de l'anatocisme si plus d'une année d'intérêts de retard était due ;

4°) ou, à titre subsidiaire, d'enjoindre au maire de Viroflay de l'affecter sur son poste de directrice de crèche, ou tout poste de son cadre d'emploi et équivalent, et de procéder à la reconstitution de ses droits à pension et sociaux pendant la période de privation du temps plein, avec mise à la charge de la commune de Viroflay des charges sociales et patronales correspondantes ;

5°) et de mettre à la charge de la commune de Viroflay le versement de la somme de 4 200 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- les décisions de décharge de fonction et de mutation d'office ne constituent pas des mesures d'ordre intérieur ;

- les premiers juges ont commis des erreurs de droit et d'appréciation en estimant qu'elles ne revêtent pas le caractère d'une sanction disciplinaire déguisée dès lors qu'il en résulte une dégradation de sa situation professionnelle et que la nature des faits qui ont justifié la mesure et l'intention poursuivie par la commune révèlent une volonté de la sanctionner ;

- ils ont entaché leur jugement d'une omission à statuer en ne prononçant pas l'annulation des décisions des 22 mai 2020 et 17 juillet 2020 ;

- ils ont également omis de statuer sur ses conclusions tendant à l'engagement de la responsabilité de la commune pour dysfonctionnement fautif et manquement à son devoir de sécurité ;

- elles sont illégales dès lors que la commune n'apporte pas la preuve qui lui incombe de l'intérêt du service à cette mutation ;

- elles sont entachées d'un défaut de motivation ;

- elles sont entachées d'un vice de procédure dès lors que le principe du contradictoire n'a pas été respecté faute d'avoir été informée, préalablement à son entretien individuel, de son droit de consulter son dossier et d'être accompagnée, ainsi que faute d'une enquête administrative préalable en bonne et due forme ;

- elles sont illégales à défaut d'avoir été précédées d'une délibération créant l'emploi sur lequel elle a été affectée, en méconnaissance de l'article 34 de la loi du 26 janvier 1984 ;

- elles sont illégales dès lors qu'elles n'ont pas été précédées d'une publicité quant à la vacance de l'emploi sur lequel elle a été affectée ;

- l'illégalité dont est entachée ces décisions est fautive et engage la responsabilité de la commune de Viroflay ;

- les agissements de la commune, conduisant à des dysfonctionnements du service, au manquement à son devoir de sécurité, à l'exercice anormal du pouvoir hiérarchique et à des conditions anormales d'exercice de ses fonctions au sein de la crèche sont constitutifs d'une faute également de nature à engager sa responsabilité ;

- la commune a également commis une faute en la maintenant à temps partiel en dépit de ses nombreuses demandes de réintégration à temps plein ;

- elle justifie d'un préjudice moral à hauteur de 10 000 euros ainsi que d'un préjudice matériel à hauteur de 20 000 euros.

Par un mémoire en défense, enregistré le 6 novembre 2024, la commune de Viroflay, représentée par Me Gallo, avocat, demande à la cour :

1°) par voie de l'appel incident, d'annuler les articles 1 et 2 du jugement n° 2100203 du 10 février 2023 du tribunal administratif de Versailles en tant qu'il condamne la commune à verser une somme de 1 000 euros à Mme A... en raison de la faute constituée par un délai excessif de réponse à sa demande de passage à temps plein, et à ce qu'il soit enjoint au maire de réexaminer sa situation, dans un délai de trois mois, au motif que le vice de procédure résultant de l'absence de décision préalable du conseil municipal entache d'illégalité la décision de mutation querellée ;

2°) à titre subsidiaire, d'annuler l'article 1er de ce jugement en tant qu'il condamne la commune à verser une somme de 1 000 euros à Mme A... en raison de la faute constituée par un délai excessif de réponse à sa demande de passage à temps plein, ou à tout le moins de ramener cette somme à un montant de 500 euros ;

3°) à titre infiniment subsidiaire, de rejeter la requête d'appel en toutes ces conclusions et de confirmer le jugement du tribunal administratif de Versailles du 10 février 2023 ;

4°) et de mettre à la charge de Mme A... une somme de 4 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que les fautes et le lien de causalité retenus par les premiers juges ne sont pas établis et que les moyens de la requête ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général de la fonction publique ;

- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;

- la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ;

- le décret n° 85-986 du 16 septembre 1985 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Aventino,

- les conclusions de M. Frémont, rapporteur public,

- et les observations de Me Rochefort pour Mme A... et de Me Gallo pour la commune de Viroflay.

Considérant ce qui suit :

1. Mme C... A..., infirmière, a été recrutée par la commune de Viroflay par la voie du détachement, à compter du 22 janvier 2001, pour occuper le poste d'adjointe de direction au sein d'une crèche, à mi-temps. Après que ce détachement a été renouvelé à quatre reprises, Mme A... a été intégrée dans le cadre des infirmiers territoriaux, au grade d'infirmière de classe normale. Mme A... a assuré l'intérim de la direction de la crèche de Verdun en avril 2017 et a demandé son passage à temps plein. Elle a été nommée directrice de la crèche du Plateau à compter du 4 juillet 2018. Par un arrêté du 9 juillet 2018, notifié le 11 octobre 2018, avec effet rétroactif au 1er mars 2018, son temps de travail a été porté à temps plein. Le maire de Viroflay a, par une lettre du 22 mai 2020, indiqué à Mme A... son changement d'affectation en qualité de chargée de projet en prévention santé et que la fiche de poste correspondante lui serait communiquée prochainement. Par un arrêté du 17 juillet 2020, l'intéressée a été affectée au sein du service des affaires sociales, en qualité de chargée de projet en prévention santé. Mme A... a, par un recours gracieux notifié le 11 septembre 2020, invoqué l'illégalité de cette décision de réaffectation et demandé l'indemnisation des préjudices qu'elle estime avoir subis. Mme A... fait appel du jugement n° 2100203 du 10 février 2023 en tant que le tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande d'annulation des décisions des 22 mai 2020 et 17 juillet 2020 ainsi que la décision de rejet de son recours gracieux et a rejeté le surplus de ses demandes d'indemnisation. La commune de Viroflay, par la voie de l'appel incident, demande à la cour d'annuler ce jugement en tant qu'il la condamne à verser une somme de 1 000 euros à Mme A... en raison de la faute constituée par un délai excessif de réponse à sa demande de passage à temps plein, et à ce qu'il soit enjoint au maire de réexaminer sa situation dans un délai de trois mois au motif que le vice de procédure résultant de l'absence de décision préalable du conseil municipal entache d'illégalité la décision de mutation querellée.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. En premier lieu, il ressort de la lecture du jugement attaqué, dans ses motifs comme dans son dispositif, que les premiers juges ont omis de statuer sur les conclusions tendant à l'annulation des décisions des 22 mai et 17 juillet 2020 procédant à sa réaffectation interne, après avoir retenu que Mme A... était fondée à soutenir qu'elles étaient illégales. Le jugement est dès lors entaché d'irrégularité sur ce point et doit, pour ce motif, être annulé en tant qu'il a omis de statuer sur ces conclusions.

3. En second lieu, il ressort de la demande présentée par Mme A... devant le tribunal administratif de Versailles que l'intéressée avait soulevé un moyen tiré de ce que la responsabilité de la commune était engagée en raison de son manquement à son obligation d'assurer des conditions d'hygiène et de sécurité de nature à préserver la santé et l'intégrité physique de son agent et des dysfonctionnements du service. Les premiers juges n'ont pas répondu à ce moyen, qui n'était pas inopérant. Par suite, Mme A... est également fondée à soutenir que le jugement attaqué est entaché d'irrégularité s'agissant des conclusions indemnitaires et à en demander l'annulation.

4. Il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur les demandes présentées par Mme A... devant le tribunal administratif de Versailles.

Sur les conclusions tendant à l'annulation des décisions des 22 mai et 17 juillet 2020 ainsi que de la décision de rejet du recours gracieux :

5. Aux termes de l'article 34 de la loi du 26 janvier 1984 : " Les emplois de chaque collectivité ou établissement sont créés par l'organe délibérant de la collectivité ou de l'établissement. La délibération précise le grade ou, le cas échéant, les grades correspondant à l'emploi créé. (...). Aucune création d'emploi ne peut intervenir si les crédits disponibles au chapitre budgétaire correspondant ne le permettent. ".

6. Il ressort des dispositions précitées que la définition des emplois communaux et la fixation de leur nombre sont des éléments de l'organisation des services communaux entrant dans la compétence du conseil municipal. Or, il est constant que le nouvel emploi de " chargé de projet en prévention santé " rattaché au service des affaires sociales de la municipalité de Viroflay n'a pas été précédé d'une autorisation de création par le conseil municipal. Dès lors, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions susvisées de la loi du 26 janvier 1984 par la décision litigieuse de changement d'affectation doit être accueilli.

7. Il résulte de ce qui précède, sans qu'il ne soit nécessaire de statuer sur les autres moyens de la demande, que Mme A... est fondée à demander l'annulation de la décision de changement d'affectation du 22 mai 2020 et de l'arrêté du 17 juillet 2020 subséquent ainsi que la décision de rejet de son recours gracieux dans cette mesure.

Sur les conclusions indemnitaires :

En ce qui concerne l'illégalité fautive des décisions du 22 mai 2020 et 17 juillet 2020 :

8. En premier lieu, un changement d'affectation prononcé d'office revêt le caractère d'une mesure disciplinaire déguisée lorsque, tout à la fois, il en résulte une dégradation de la situation professionnelle de l'agent concerné et que la nature des faits qui ont justifié la mesure et l'intention poursuivie par l'administration révèlent une volonté de sanctionner cet agent.

9. Il résulte de l'instruction que Mme A..., nommée directrice de la crèche multi-accueil du Plateau à compter du 4 juillet 2018, a été affectée au service des affaires sociales en qualité de chargée de prévention santé à compter du 25 mai 2020. Cette nouvelle affectation a entraîné la perte des responsabilités qui lui étaient confiées lorsqu'elle exerçait les fonctions de directrice, en particulier en matière d'encadrement de plusieurs agents, ainsi que la perte du bénéfice des indemnités afférentes. Il résulte de l'instruction qu'en qualité de directrice, Mme A... a été confrontée à des difficultés liées à une pénurie de personnel en particulier du personnel technique en charge de la cuisine de la crèche. Face à cette situation, Mme A... a développé des relations tendues avec sa hiérarchie, notamment la coordinatrice petite enfance, caractérisées par des échanges de nombreux courriels, dans lesquels l'intéressée demandait des moyens supplémentaires, remettait en cause les intentions de ses supérieurs, la pertinence de leurs consignes et contestait les solutions apportées consistant à adapter les emplois du temps, à exploiter les ressources internes et à modifier certaines pratiques. Par ailleurs, plusieurs témoignages concordants, datant de 2019, émanant de l'une des cuisinières et de la personne en charge de la former, de la psychologue de la crèche et de collègues directrices de crèches font état des difficultés rencontrées dans leur collaboration avec Mme A..., qui s'opposait au changement, refusait une partie des consignes pourtant précisément délivrées et contestait les moyens mis à sa disposition. Malgré les objectifs qui lui ont été assignés à la suite d'un bilan effectué le 18 juillet 2019 sur sa prise de fonction, et dont le compte-rendu souligne les difficultés auxquelles faisait face l'intéressée dans la réalisation de ses missions, ainsi que la mise en place d'un suivi par une coach, il résulte de l'instruction que Mme A... n'est pas parvenue à assurer le relais entre sa hiérarchie et ses équipes, n'a pas effectué ses missions avec davantage de transparence et à continuer à s'opposer à l'évolution de ses pratiques. Dans ces conditions, les décisions contestées du maire de Viroflay modifiant son affectation ont été prises dans l'intérêt du service en vue d'assurer le bon fonctionnement de celui-ci, en confiant à l'intéressée des fonctions correspondant à son grade et à ses compétences. Ces décisions ne révèlent donc aucune intention de l'administration communale de sanctionner Mme A.... Par suite, cette dernière n'est pas fondée à soutenir qu'elles seraient illégales à ce titre et de nature à engager la responsabilité de la commune.

10. En second lieu, si l'agent public irrégulièrement évincé a droit à la réparation intégrale du préjudice subi à raison de la mesure illégalement prise à son encontre, ne sont indemnisables que les préjudices de toute nature avec lesquels l'illégalité commise présente, compte tenu de l'importance respective de cette illégalité et des fautes relevées à l'encontre de l'intéressé, un lien de causalité.

11. Il résulte des points 6 et 7 que les décisions portant changement d'affectation de Mme A... sont illégales car elles n'ont pas été précédées d'une création d'emploi par une délibération du conseil municipal de Viroflay. Toutefois, il résulte du point 9 que l'administration aurait pris la même décision dès lors que ce changement d'affectation est justifié au fond. Par suite le lien de causalité entre l'illégalité relevée et les préjudices matériel et moral dont se prévaut Mme A... à ce titre n'est pas établi.

En ce qui concerne les dysfonctionnements du service et le manquement de la commune à son obligation de sécurité :

12. Aux termes de l'article 23 de la loi du 13 juillet 1983 désormais codifié à l'article L. 136-1 du code général de la fonction publique : " Des conditions d'hygiène et de sécurité de nature à préserver leur santé et leur intégrité physique sont assurées aux fonctionnaires durant leur travail (...) ". L'article 2 du décret du 10 juin 1985 dispose que " Dans les collectivités et établissements mentionnés à l'article 1er, les locaux et installations de service doivent être aménagés, les équipements doivent être réalisés et maintenus de manière à garantir la sécurité des agents et des usagers. Les locaux doivent être tenus dans un état constant de propreté et présenter les conditions d'hygiène et de sécurité nécessaires à la santé des personnes. ".

13. Si Mme A... se prévaut de l'obligation de sécurité dans l'organisation du service public de la petite enfance, elle n'établit pas que l'absence de personnel technique en cuisine ou les défaillances qui ont pu être relevées dans le rapport de suivi de la direction départementale de la protection des populations du 2 mars 2020 auraient été de nature à la mettre en danger. Il résulte en outre de l'instruction que si elle a été conduite, comme d'autres membres de son équipe, à pallier l'absence de ce personnel, les services de la commune ont entrepris systématiquement des démarches pour recruter ce personnel, elle a pu faire appel à du personnel des autres structures et une solution de livraison des plats en liaison froide a finalement été proposée. Il résulte également des nombreux échanges que Mme A... a eu avec sa hiérarchie, qu'elle a été accompagnée et que des solutions ont été proposées par le biais de réorganisations des équipes et des plannings, de changement des procédures ou encore l'équipement de nouveaux matériels. Enfin, Mme A... n'établit pas que le personnel de la crèche était inférieur au taux d'encadrement requis alors qu'il résulte également de l'instruction que le service petite enfance était organisé pour permettre à des agents " volants " de remplacer les agents absents. Par suite, cette dernière n'est pas fondée à soutenir que la responsabilité de la commune doit être engagée en raison des dysfonctionnements du service et du manquement à son obligation de sécurité.

En ce qui concerne les carences dans la gestion de sa carrière :

14. En premier lieu, aux termes de l'article 1er de la loi du 12 juillet 1984 relative à la formation professionnelle des agents de la fonction publique territoriale et complétant la loi du 26 janvier 1984 aujourd'hui codifié à l'article L. 422-21 du code général de la fonction publique : " La formation professionnelle tout au long de la vie dans la fonction publique territoriale comprend : 1° La formation d'intégration et de professionnalisation, définie par les statuts particuliers, constituée par : (...) b) Des actions de professionnalisation, dispensées tout au long de la carrière et à l'occasion de l'affectation dans un poste de responsabilité ; 2° La formation de perfectionnement, dispensée en cours de carrière à la demande de l'autorité territoriale ou de l'agent territorial ; (...) 4° La formation personnelle suivie à l'initiative de l'agent territorial ; (...). ". Au titre des obligations de l'employeur, l'article L. 421-2 de ce code dispose que : " Les administrations, collectivités et établissements mentionnés à l'article L. 2 mettent en œuvre, au bénéfice de leurs agents, une politique coordonnée de formation professionnelle et de promotion sociale tout au long de la vie. Cette politique semblable par sa portée et par les moyens employés à celle définie au titre Ier du livre III de la sixième partie du code du travail, à l'exception de son chapitre V, tient compte du caractère spécifique de la fonction publique. ". Aux termes de l'article 6 du décret 85-603 : " En application du 2° de l'article L. 422-21 du code général de la fonction publique une formation pratique et appropriée en matière d'hygiène et de sécurité est organisée : 1° Lors de l'entrée en fonctions des agents ; 2° Lorsque par suite d'un changement de fonctions, de techniques, de matériel ou d'une transformation des locaux, les agents se trouvent exposés à des risques nouveaux ; 3° En cas d'accident de service grave ou de maladie professionnelle ou à caractère professionnel grave ayant entraîné mort d'homme, ou paraissant devoir entraîner une incapacité permanente, ou ayant révélé l'existence d'un danger grave, même si les conséquences ont pu en être évitées ;(...) La formation en matière d'hygiène et de sécurité est au nombre des actions prévues par l'article L. 422-21 du code général de la fonction publique. ". L'article 7 de ce décret prévoit également que : " La formation à l'hygiène et à la sécurité a pour objet d'instruire l'agent des précautions à prendre pour assurer sa propre sécurité, celle de ses collègues de travail et, le cas échéant, celle des usagers du service. Cette formation, normalement dispensée sur les lieux de travail, porte en particulier sur les conditions de circulation sur les lieux de travail et, notamment, les issues et dégagements de secours, les conditions d'exécution du travail et, notamment, les comportements à observer aux différents postes de travail et le fonctionnement des dispositifs de protection et de secours, et les dispositions à prendre en cas d'accident ou de sinistre ainsi que les responsabilités encourues. ".

15. Il résulte des dispositions précitées que si l'administration a l'obligation d'organiser et de proposer des formations, aucune d'entre elles, notamment en matière de sécurité, n'était obligatoire au moment de la prise de fonctions de Mme A..., auparavant directrice-adjointe, en qualité de directrice de la même structure. En outre, il ne résulte pas de l'instruction que Mme A... aurait sollicité des formations que la commune lui aurait refusées, alors qu'il résulte d'un courrier qui lui a été adressé par le service des ressources humaines qu'elle s'est vue communiquer les formulaires lui permettant de s'inscrire aux formations qu'elle avait sollicitées et ayant notamment pour thèmes l'hygiène en crèche, les normes alimentaires et les obligations juridiques. Il résulte également du rapport du 18 juillet 2019 rédigé à la suite du point effectué sur sa prise de poste, un an après, qu'elle a été expressément interrogée sur son éventuel besoin en formation et n'y a pas donné suite. Dès lors, Mme A... n'est pas fondée à soutenir que la responsabilité de la commune doit être engagée en raison de sa carence à lui délivrer des formations appropriées pour sa prise de poste ainsi qu'en matière d'hygiène et de sécurité.

16. En second lieu, aux termes de l'article 60 de la loi du 26 janvier 1984 : " Les modalités d'exercice du travail à temps partiel sont fixées par l'organe délibérant de chaque collectivité ou établissement public, dans les conditions définies par le présent article. (...) A l'issue de la période de travail à temps partiel, les fonctionnaires sont admis de plein droit à occuper à temps plein leur emploi ou, à défaut, un autre emploi correspondant à leur grade. ". L'article 18 du décret n° 2004-777 dispose en outre que : " L'autorisation d'assurer un service à temps partiel est accordée pour une période comprise entre six mois et un an, renouvelable, pour la même durée, par tacite reconduction dans la limite de trois ans. A l'issue de cette période de trois ans, le renouvellement de l'autorisation de travail à temps partiel doit faire l'objet d'une demande et d'une décision expresses. La réintégration à temps plein ou la modification des conditions d'exercice du temps partiel peut intervenir avant l'expiration de la période en cours, sur demande des intéressés présentée au moins deux mois avant la date souhaitée. Toutefois, la réintégration à temps plein peut intervenir sans délai en cas de motif grave, notamment en cas de diminution substantielle des revenus du ménage ou de changement dans la situation familiale ".

17. Il résulte du courrier du 5 juin 2017 adressé à l'administration communale par Mme A... qu'elle évoque l'utilité de son passage à temps plein au regard des missions induites par ses nouvelles fonctions, provisoires, de directrice de crèche. Elle indique ainsi qu'elle " souhaiterait travailler à temps plein " au motif " qu'elle ne voit pas comment assumer cette fonction à temps partiel " tout en précisant avoir noté que l'affectation en cause était provisoire, et en ajoutant espérer " au plus vite réintégrer " son ancien poste, " même à temps plein ". Si ce courrier ne mentionne pas de date précise et manque de clarté sur les intentions de Mme A... quant à la quotité de travail souhaitée, elle a renouvelé sa demande par un courriel du 24 juillet 2017, au sein duquel elle précise vouloir s'organiser pour la rentrée de septembre et aimerait ainsi savoir " où elle travaille et à quelle durée hebdomadaire ". Puis, par un courrier du 28 février 2018, elle a réitéré son vœu de passer à temps plein, précisant néanmoins que " puisque sa demande de travail à temps plein semble impossible à satisfaire à la crèche du Plateau ", elle propose " de transformer son temps de travail de 75% à 80% ". Ensuite, Mme A... a renouvelé sa demande de passage à temps plein en mars 2018, lors de son évaluation annuelle, ainsi qu'en avril 2018 lors d'un entretien avec le maire, et à nouveau par un courrier du 26 mai 2018. Il résulte ainsi de l'instruction que la requérante a évoqué sa demande de passage à temps plein à six reprises avant d'obtenir un retour des services, par un arrêté du maire du 9 juillet 2018 notifié en octobre, avec effet rétroactif au 1er mars 2018, répondant ainsi favorablement à sa demande, seize mois après sa première demande. Ainsi, compte tenu du silence gardé par la commune, pendant seize mois, à la suite de ses nombreuses demandes, Mme A... est fondée à soutenir que la commune a commis une faute dans la gestion de sa carrière.

18. Il ne résulte pas de l'instruction que le préjudice financier invoqué par Mme A... au titre du différentiel de rémunération soit directement imputable à cet agissement fautif, dans la mesure où l'intéressée a été rémunérée pour les heures complémentaires qu'elle a pu effectuer durant cette période. Pour les mêmes raisons, les conclusions tendant à la reconstitution de ses droits à pension et sociaux pendant la période de privation du temps plein, avec mise à la charge de la commune de Viroflay des charges sociales et patronales correspondantes doivent être rejetées. Toutefois, son préjudice moral pourra, en raison du délai excessif du traitement de sa demande, être évalué à 2 000 euros.

Sur les conclusions aux fins d'injonction :

19. L'exécution du présent arrêt, qui annule les décisions de changement d'affectation, implique seulement, compte tenu de son motif, d'enjoindre au maire de la commune de Viroflay, en application de l'article L. 911-2 du code de justice administrative, de réexaminer la situation de Mme A... dans un délai de trois mois.

Sur les frais liés au litige :

20. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de Mme A..., qui n'est pas la partie essentiellement perdante dans la présente instance, la somme que demande la commune de Viroflay au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens. Il y a lieu en revanche, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de cette dernière le versement de la somme de 2 000 euros à Mme A... sur le fondement des mêmes dispositions.

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Versailles n° 2100203 du 10 février 2023 est annulé.

Article 2 : Les décisions du maire de la commune de Viroflay du 22 mai 2020 et du 17 juillet 2020, ainsi que la décision de rejet du recours gracieux dans cette mesure, sont annulées.

Article 3 : Il est enjoint au maire de Viroflay de réexaminer la situation de Mme A... dans un délai de trois mois.

Article 4 : La commune de Viroflay versera une somme de 2 000 euros à Mme A... en raison de la faute constituée par un délai excessif de réponse à sa demande de passage à temps plein.

Article 5 : La commune de Viroflay versera la somme de 2 000 euros à Mme A... en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 6 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté.

Article 7 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C... A... et à la commune de Viroflay.

Délibéré après l'audience du 6 février 2025, à laquelle siégeaient :

- M. B... Even, premier vice-président, président de chambre,

- Mme Gaëlle Mornet, présidente assesseure,

- Mme Aventino, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 28 février 2025.

La rapporteure,

B. AventinoLe président,

B. Even

La greffière,

I. Szymanski

La République mande et ordonne au préfet des Yvelines en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme

La greffière,

2

N° 23VE00765


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de VERSAILLES
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 23VE00765
Date de la décision : 28/02/2025
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

Fonctionnaires et agents publics - Positions - Affectation et mutation.

Fonctionnaires et agents publics - Contentieux de la fonction publique - Contentieux de l'indemnité.


Composition du Tribunal
Président : M. EVEN
Rapporteur ?: Mme Barbara AVENTINO
Rapporteur public ?: M. FREMONT
Avocat(s) : ROCHEFORT

Origine de la décision
Date de l'import : 09/03/2025
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2025-02-28;23ve00765 ?
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