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12/02/2025 | FRANCE | N°24VE00186

France | France, Cour administrative d'appel de VERSAILLES, 4ème chambre, 12 février 2025, 24VE00186


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



M. C... A... a demandé au tribunal administratif de Versailles d'annuler l'arrêté du 7 avril 2022 par lequel le maire de Maule a accordé à la SNC Chaussée Saint Vincent un permis de construire valant division et permis de démolir, en vue de la construction de 33 logements et de deux commerces sur un terrain cadastré section AD 120, ainsi que l'arrêté du 24 avril 2023 accordant un permis de construire modificatif pour ce projet.



Par un jugement n° 2207

058 en date du 20 novembre 2023, le tribunal administratif de Versailles a rejeté la demande de M...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... A... a demandé au tribunal administratif de Versailles d'annuler l'arrêté du 7 avril 2022 par lequel le maire de Maule a accordé à la SNC Chaussée Saint Vincent un permis de construire valant division et permis de démolir, en vue de la construction de 33 logements et de deux commerces sur un terrain cadastré section AD 120, ainsi que l'arrêté du 24 avril 2023 accordant un permis de construire modificatif pour ce projet.

Par un jugement n° 2207058 en date du 20 novembre 2023, le tribunal administratif de Versailles a rejeté la demande de M. A... et a mis à sa charge la somme de 1 500 euros à verser à la commune de Maule et à la SNC Chaussée Saint Vincent au titre des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative.

Procédure devant la cour :

Par une requête et deux mémoires, enregistrés les 22 janvier, 24 mai et 17 juin 2024, M. A..., représenté par Me Pitti-Ferrandi, demande, en dernier lieu, à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 2207058 du 20 novembre 2023 rendu par le tribunal administratif de Versailles rejetant sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 7 avril 2022 par lequel le maire de Maule a accordé à la SNC Chaussée Saint Vincent un permis de construire, valant non-opposition à division ;

2°) d'annuler l'arrêté du maire de Maule du 7 avril 2022 ainsi que celui du 24 avril 2023 ;

3°) de mettre à la charge de la commune de Maule et de la SNC Chaussée Saint Vincent la somme de 5 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- le projet ne se situe pas dans une zone tendue de sorte que la cour est compétente ;

- la notification prévue par l'article R. 600-1 du code de l'urbanisme a été faite ;

- sa demande devant le tribunal administratif était recevable dès lors qu'il avait intérêt à agir en qualité de voisin immédiat, conformément à l'article L. 600-1-2 du code de l'urbanisme ; en effet, il subit un préjudice d'intimité du fait de la création d'une vue plongeante sur son terrain et un préjudice esthétique avec le remplacement de la vue sur la Mauldre par la vue sur des bâtiments avec deux rangées de balcons/terrasses et par un préjudice résultant du risque d'inondation et de perte de valeur de son bien ;

- il est propriétaire de la parcelle AE 72, séparée de la parcelle AD 120 par un ru et un sentier ; les arbres existant ne créent pas de barrière verte suffisante ; treize fenêtres et 7 balcons et terrasses donneront sur sa propriété avec des bâtiments de plus de 14 mètres de hauteur à quinze mètres de son terrain et à 45 mètres de sa résidence ;

- le recours formé le 19 septembre 2022 n'est pas tardif ;

- le permis de construire attribué à la SNC Chaussée Saint Vincent méconnait l'article R. 431-13 du code de l'urbanisme, dès lors qu'aucune autorisation d'occupation du domaine public n'a été émise par l'autorité gestionnaire ;

- les articles U1, U6, U10, U11, U12 du règlement du plan local d'urbanisme (PLU) ont été méconnus ; la construction de maisons individuelles est interdite ; l'implantation des bâtiments à 3,50 mètres de l'alignement méconnait l'article U6 ; la hauteur retenue méconnait l'article U10 avec un dernier niveau ne pouvant être assimilé à des combles ; il s'agit en fait d'un bâtiment en R+2 + combles ; l'article U11 a été méconnu dès lors que le projet porte atteinte au caractère et à l'intérêt des lieux avoisinants ; l'article U 12 a été méconnu dès lors que le nombre de places de stationnement prévu est insuffisant, avec 75 places au lieu de 107 ;

- ce permis est incompatible avec l'orientation d'aménagement et de programmation (OAP) " zone de Dadancourt " ; il ne prévoit pas la préservation des espaces paysagers le long de la Maule ; 25 arbres vont être supprimés ;

- il méconnait le plan de prévention des risques d'inondation (PPRI) ; la côte du premier plancher du bâtiment A et des trois maisons est inférieure à celle exigée ; le bâtiment B comporte un parc de stationnement sous-terrain ;

- l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme a été méconnu en raison du risque d'inondation avec des conséquences en terme de salubrité et de sécurité publique sur le terrain d'assiette et sur les terrains alentour et les décisions attaquées sont entachées d'une erreur manifeste d'appréciation et de fraude ; la présentation des parkings inondables comme mesure compensatoire est frauduleuse.

Par un mémoire en défense, enregistré le 15 mars 2024, la SNC Chaussée Saint Vincent, représenté par Me Guinot, conclut au rejet de la requête et à ce que la somme de 5 000 euros soit mise à la charge de M. A... au titre des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- M. A... ne dispose d'aucun intérêt à agir aux termes de l'article L. 600-1-2 du code de l'urbanisme ; M. A... n'établit pas en quoi le projet immobilier affecte les conditions d'occupation et de jouissance de son bien ; il ne peut se voir reconnaître la qualité de voisin immédiat ; sa propriété est éloignée de plus d'une centaine de mètres du projet et que la façade la plus proche du bâtiment projeté est située à plus de 50 mètres des fenêtres de sa résidence ; aucune atteinte aux conditions d'occupation, d'utilisation et de jouissance du bien du requérant n'est établie ; l'habitation ne portera pas atteinte à l'intimité du requérant ; par ailleurs, le projet s'est voulu d'un faible volume et d'une faible hauteur ; l'effet de masse a été atténué par un séquençage des hauteurs de toitures et des arbres de haute tige seront plantés le long de la limite séparative sud-ouest ; les arbres feront ainsi écran entre le projet et l'habitation du requérant avec une espèce montant à 12 mètres ;

- le projet ne portera pas atteinte à ceux de la famille A... et ne comporte pas de risque accru d'inondation ;

- la circonstance que le projet pour déprécier le bien de M. A... est inopérant ;

- les autres moyens soulevés en première instance ne peuvent être retenus ; le recours était tardif en première instance, aucun recours gracieux n'ayant été introduit visant au retrait de l'acte attaqué et n'a été reçu par la commune dans le délai franc de deux mois ;

- le dossier était complet ; le moyen tiré de la méconnaissance de l'article R. 431-13 du code de l'urbanisme est inopérant ;

- le projet ne méconnait pas les articles U1, U6, U 10, U11, U12 du PLU ;

- il ne méconnait pas plus l'OAP " zone de Dadancourt " ou le PPRI ;

- l'article R111-2 du code de l'urbanisme a été respecté et aucune erreur manifeste d'appréciation ni de fraude n'entachent les décisions attaquées.

Par un mémoire en défense[PF1] et un mémoire, enregistrés le 30 avril et le 7 juillet 2024, la commune de Maule, représentée par Me Garrigues, conclut au rejet de la requête, à titre subsidiaire, à ce qu'il soit sursis à statuer le temps de régulariser un éventuel vice et de mettre à la charge de M. A... la somme de 3 000 euros à lui verser en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

La commune de Maule fait valoir que :

- le requérant n'a pas intérêt à agir, comme l'a retenu le tribunal administratif ;

- la requête est irrecevable pour tardiveté ;

- le dossier était complet ; le moyen tiré de la méconnaissance de l'article R. 431-13 du code de l'urbanisme est inopérant ;

- le projet ne méconnait pas les articles U1, U6, U 10, U11, U12 du PLU ;

- il ne méconnait pas plus l'OAP " zone de Dadancourt " ou le PPRI ;

- l'article R111-2 du code de l'urbanisme a été respecté et aucune erreur manifeste d'appréciation ni de fraude n'entachent les décisions attaquées.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Pilven, rapporteur,

- les conclusions de Mme Villette, rapporteure publique,

- et les observations de Me Giard, substituant Me Pitti-Ferrandi, représentant M. A..., de Me Garrigues, représentant la commune de Maule et de Me Goncalves, représentant la SNC Chaussée Saint-Vincent.

Considérant ce qui suit :

1. La SNC Chaussée Saint Vincent a déposé, le 29 octobre 2021, une demande de permis en vue de la construction de 33 logements et de deux commerces sur une parcelle cadastrée section AD 120 sur le territoire de la commune de Maule. Par un arrêté du 7 avril 2022, valant permis de division et de démolir, le maire de Maule a accordé le permis de construire sollicité. M. A... a présenté, le 6 juin 2022, un recours gracieux contre ce permis de construire, qui a fait l'objet d'une décision de rejet du maire de Maule en date du 12 juillet 2022. M. A... a demandé au tribunal administratif de Versailles d'annuler l'arrêté du 7 avril 2022 accordant à la SNC Chaussée Saint Vincent le permis de construire sollicité, ainsi que l'arrêté du 24 avril 2023 par lequel le maire de Maule a accordé à la SNC Chaussée Saint Vincent un permis de construire modificatif. Il relève appel du jugement du 20 novembre 2023 par lequel le tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Aux termes de l'article L. 600-1-2 du code de l'urbanisme : " Une personne autre que l'Etat, les collectivités territoriales ou leurs groupements ou une association n'est recevable à former un recours pour excès de pouvoir contre une décision relative à l'occupation ou à l'utilisation du sol régie par le présent code que si la construction, l'aménagement ou le projet autorisé sont de nature à affecter directement les conditions d'occupation, d'utilisation ou de jouissance du bien qu'elle détient ou occupe régulièrement ou pour lequel elle bénéficie d'une promesse de vente, de bail, ou d'un contrat préliminaire mentionné à l'article L. 261-15 du code de la construction et de l'habitation. (...) ".

3. Il résulte de ces dispositions qu'il appartient, en particulier, à tout requérant qui saisit le juge administratif d'un recours pour excès de pouvoir tendant à l'annulation d'un permis de construire, de démolir ou d'aménager, de préciser l'atteinte qu'il invoque pour justifier d'un intérêt lui donnant qualité pour agir, en faisant état de tous éléments suffisamment précis et étayés de nature à établir que cette atteinte est susceptible d'affecter directement les conditions d'occupation, d'utilisation ou de jouissance de son bien. Il appartient, dans tous les cas, au défendeur, s'il entend contester l'intérêt à agir du requérant, d'apporter tous éléments de nature à établir que les atteintes alléguées sont dépourvues de réalité. Le juge de l'excès de pouvoir apprécie la recevabilité de la requête au vu des éléments ainsi versés au dossier par les parties, en écartant le cas échéant les allégations qu'il jugerait insuffisamment étayées mais sans pour autant exiger de l'auteur du recours qu'il apporte la preuve du caractère certain des atteintes qu'il invoque au soutien de la recevabilité de celui-ci. Eu égard à sa situation particulière, le voisin immédiat justifie, en principe, d'un intérêt à agir lorsqu'il fait état devant le juge, qui statue au vu de l'ensemble des pièces du dossier, d'éléments relatifs à la nature, à l'importance ou à la localisation du projet de construction.

4. Il ressort des pièces du dossier que M. A..., qui justifie être propriétaire de la parcelle AE72, doit être regardé comme un voisin immédiat de la parcelle d'assiette du projet, dont il n'est séparé que par un ruisseau et par un chemin de promenade. Par ailleurs, M. A... fait état d'éléments relatifs à la nature, à l'importance ou à la localisation du projet de construction.

5. Dans ces conditions, M. A... doit être regardé comme disposant d'un intérêt lui donnant qualité à agir contre l'arrêté du 7 avril 2022 accordant à la SNC Chaussée Saint Vincent le permis de construire sollicité, ainsi que contre l'arrêté du 24 avril 2023 par lequel le maire de Maule a accordé à la SNC Chaussée Saint Vincent un permis de construire modificatif. Par suite, le jugement attaqué est entaché d'irrégularité et doit être annulé.

6. Il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par M. A... devant le tribunal administratif de Versailles.

Sur la tardiveté du recours :

7. La SNC Chaussée Saint-Vincent soutient que le recours contentieux de M. A... serait tardif dès lors que son recours gracieux adressé au maire de Maule le 6 juin 2022 ne pourrait, par ses mentions peu claires, être regardé comme un recours gracieux. Toutefois ce courrier mentionne une demande d'annulation du permis de construire du 7 avril 2022 ce qui semble suffisant pour le regarder comme tendant à demander au maire le retrait de cette décision.

8. Par ailleurs, aux termes de l'article R. 421-1 du code de justice administrative : " La juridiction ne peut être saisie que par voie de recours formé contre une décision, et ce, dans les deux mois à partir de la notification ou de la publication de la décision attaquée (...) ".

9. D'une part, sauf dans le cas où des dispositions législatives ou réglementaires ont organisé des procédures particulières, toute décision administrative peut faire l'objet, dans le délai imparti pour l'introduction d'un recours contentieux, d'un recours gracieux ou hiérarchique qui interrompt le cours de ce délai.

10. D'autre part, le délai de l'article R. 421-1 du code de justice administrative est un délai franc. S'il expire un samedi, un dimanche ou un jour férié ou chômé, il est prorogé jusqu'au premier jour ouvrable suivant. Et sauf dispositions législatives ou réglementaires contraires, telles les dispositions relatives à la contestation des élections politiques ou celles prévoyant des délais exprimés en heures ou expirant à un horaire qu'elles précisent, la date à prendre en considération pour apprécier si un recours contentieux adressé à une juridiction administrative par voie postale a été formé dans le délai de recours contentieux est celle de l'expédition du recours, le cachet de la poste faisant foi. Ces principes sont également applicables aux recours administratifs non obligatoires.

11. La SNC Chaussée Saint Vincent soutient que le recours gracieux envoyé le 6 juin 2022 n'aurait pas prolongé le délai de recours contentieux dès lors qu'il n'a pas été reçu par la commune dans le délai de deux mois, prévu par l'article R. 421-1 du code de justice administrative. Toutefois, M. A... produit les récépissés de dépôt, établissant que le recours gracieux a été adressé par la poste le 6 juin 2022, soit dans le délai de recours contentieux qui a commencé à courir contre l'arrêté du 7 avril 2022. Dès lors la fin de non-recevoir tirée de la tardiveté du recours contentieux de M. A... doit être écartée.

Sur la légalité des arrêtés contestés :

12. Aux termes de l'article R.431-13 du code de l'urbanisme : " Lorsque le projet de construction porte sur une dépendance du domaine public, le dossier joint à la demande de permis de construire comporte une pièce exprimant l'accord du gestionnaire du domaine pour engager la procédure d'autorisation d'occupation temporaire du domaine public ".

13. M. A... soutient, en premier lieu, qu'une parcelle de 1 335 m2 sera rétrocédée à la commune après l'achèvement du projet afin de créer une voie publique de sorte que des balcons du projet immobilier se trouveront en surplomb de cette voie alors que le dossier de demande de permis de construire ne comprend aucune pièce exprimant l'accord de la commune pour autoriser cette occupation temporaire du domaine public. Toutefois, la décision du 7 avril 2022 a été prise au visa du projet de convention signée le même jour entre la SNC Chaussée Saint Vincent et la commune et approuvée par le conseil municipal et figurant en annexe de la délibération du 4 avril 2022, prévoyant la rétrocession des voies et espaces communs prévus par le projet, après avis favorable à l'unanimité de la commission d'urbanisme et travaux en date du 19 octobre 2021. Ainsi, le maire de la commune de Maule doit être regardé comme ayant délivré le permis de construire au vu de cet accord de rétrocession ayant pour effet d'autoriser le surplomb des balcons sur la future voie publique.

14. Aux termes du règlement du plan local d'urbanisme (PLU) : " D'une manière générale, sont interdites toutes les constructions incompatibles avec les zones d'habitat. / Secteur U1 : / Est interdite la construction de maisons individuelles ". Aux termes du rapport de présentation de ce PLU : " Le secteur U1 est réservé à la construction de petits collectifs et de maisons de ville type ''cœur de Maule'' afin d'améliorer l'offre en terme de petits et moyens logements et de favoriser l'accueil et le maintien des jeunes sur la commune ".

15. M. A... soutient, en deuxième lieu, que le projet méconnait l'article U1 du PLU dès lors qu'il est prévu la construction de trois maisons individuelles accolées au bâtiment A. Si le rapport de présentation et l'orientation d'aménagement et de programmation (OAP), pour le secteur de Dadancourt, prévoient la possibilité de construction de maisons type " cœur de Maule ", sans en préciser d'ailleurs exactement la notion, il n'en demeure pas moins que l'article U1 du règlement retient de manière très claire l'interdiction de construction de maisons individuelles, qu'elles soient isolées sur une parcelle ou accolées à un bâtiment collectif, sans retenir d'exceptions. Dès lors, M. A... est fondé à soutenir que le permis de construire a été pris en méconnaissance des dispositions précitées de l'article U1 du PLU de la commune de Maule.

16. Aux termes de l'article U6 du règlement du PLU : " Le terme ''voie'' désigne l'ensemble des voies carrossables publique ou privées ouvertes au public. Les façades principales des constructions nouvelles et les annexes à usage de stationnement (y compris les aires de stationnement) doivent être implantées :/ [...] Secteur U1 : / A l'alignement de la voie. Cependant un recul de 3 mètres maximum comptés à partir de l'alignement de la voie est autorisé ".

17. M. A... soutient, en troisième lieu, que les constructions sont prévues en recul de 3,50 mètres par rapport à la voie publique, en méconnaissance de l'article U6 du règlement. Toutefois, le projet doit s'apprécier dans sa configuration prenant en compte la rétrocession d'une parcelle à la commune en vue de créer une nouvelle voie publique, qui avait fait l'objet d'un accord de rétrocession comme mentionné au point 13 du présent arrêt. Il n'est pas contesté qu'à l'issue de cette rétrocession, le projet sera en conformité avec les distances de recul fixées par l'article U6 du PLU, de sorte que ce moyen doit être écarté.

18. Aux termes de l'article U10 du règlement du PLU : " La hauteur ne doit pas excéder : [...] Secteurs Ub et U1 : / RDC + 1 + combles et s'harmoniser avec la hauteur moyenne des bâtiments de la rue ". Par ailleurs, le lexique du PLU définit le comble de la manière suivante : " Comble : / Le comble est un étage constitué par l'espace compris entre le plancher haut et la toiture d'un bâtiment. Il peut comporter un pied droit d'une hauteur maximale d'un mètre. Ponctuellement, une hauteur supérieure pourra être autorisée pour permettre des éléments d'architecture ". Ce même lexique définit le calcul de la hauteur d'une construction de la manière suivante : " La hauteur d'une construction se définit en niveau par rapport au niveau de la voie de desserte la plus proche de la construction à créer ".

19. M. A... soutient, en quatrième lieu, que les bâtiments comportant deux niveaux de combles, et le premier niveau de combles disposant de surcroît de balcons ou terrasses, le projet serait en fait constitutif d'une construction en RDC + 2 + combles et non en RDC + 1 + combles comme prescrit par l'article U10 du PLU. Toutefois, la circonstance qu'un comble habitable dans les bâtiments A et B comporte deux niveaux, ne constitue pas en soi une méconnaissance des dispositions de l'article U10 du PLU. Par ailleurs, s'agissant des façades donnant sur la voie de desserte la plus proche, il ressort des schémas figurant au projet et des précisions des parties apportées lors de l'audience que le niveau, qualifié d'après le projet de premier niveau de comble, comportait une hauteur, approximativement d'un mètre de pied droit entre le plancher haut et la toiture du bâtiment, les ouvertures aménagées dans les façades et de nature à rehausser le niveau du plafond pouvant être qualifiées d'éléments de nature à créer un séquençage des façades. En tout état de cause, le volume situé sous la toiture et s'étendant au-dessous de l'égout du toit, du côté de la voie de desserte la plus proche, reste inférieur à 1,80 mètre, de sorte que les bâtiments A et B doivent être regardés comme étant constitués d'un RDC + 1 + combles. Enfin, il ne ressort pas des pièces du dossier que les bâtiments ne seraient pas en harmonie avec la hauteur moyenne des bâtiments de la rue. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article U10 du règlement du PLU doit être écarté.

20. Aux termes de l'article U11 du règlement du PLU : " L'autorisation d'utilisation du sol, de lotissement, de bâtir ou de clôture pourra être refusée ou n'être accordée que sous réserve de prescriptions particulières, si l'opération en cause, par sa situation, ses dimensions, son architecture ou son aspect extérieur est de nature à porter atteinte : / 1. Au caractère ou à l'intérêt des lieux avoisinants, / 2. Au site, aux paysages naturels ou urbains, / 3. Ainsi qu'à la conservation des perspective monumentales ".

21. M. A... soutient, en cinquième lieu, que le projet, par son aspect compact et par la suppression de 25 arbres, ne s'inscrirait pas harmonieusement dans son environnement, fait de maisons individuelles de faible hauteur. Toutefois, le projet est voisin de résidences ainsi que d'une surface de grande distribution et le quartier ne présente aucun caractère particulier, historique ou en termes de type de construction. Le choix de toitures en pente, les coloris et les volumes retenus restent similaires à ceux des maisons avoisinantes et la plantation de 24 arbres vient compenser les arbres abattus de sorte que le moyen tiré de la méconnaissance de l'article U11 du règlement du PLU doit être écarté.

22. Aux termes de l'article U12 du règlement du PLU : " Afin d'assurer en dehors des voies publiques le stationnement des véhicules automobiles ou des deux roues, correspondant aux besoins des constructions et installations, il est exigé : / 1) Pour les constructions à usage d'habitation : / [...] Secteurs U1 et U2 : / 2 places de stationnement par tranche de 50 m2 de surface de plancher avec un minimum de deux places de stationnement par logement. / Des aires de stationnement nécessaires aux deux roues et aux voitures d'enfants doivent être légalement prévues à raison de 2m2 par logement pour les logements collectifs ". Par ailleurs, aux termes de l'article L. 151-36 du code de l'urbanisme : " Pour les constructions destinées à l'habitation, autres que celles mentionnées aux 1° à 3° de l'article L. 151-34, situées à moins de cinq cents mètres d'une gare ou d'une station de transport public guidé ou de transport collectif en site propre et dès lors que la qualité de la desserte le permet, il ne peut, nonobstant toute disposition du plan local d'urbanisme, être exigé la réalisation de plus d'une aire de stationnement par logement. ".

23. M. A... soutient, en sixième lieu, que la surface de plancher dédiée aux logements étant de 2 673 m2, il aurait fallu prévoir pour 107 places de stationnement alors que seules 75 places l'ont été par le projet, 68 pour les logements et 7 pour les places extérieures prévues pour les clients des commerces. Toutefois, le projet étant implanté à moins de 500 mètres, à vol d'oiseau, de la gare de Maule, seules 33 places étaient exigibles, en application des dispositions de l'article L. 151-36 du code de l'urbanisme, les liaisons ferroviaires, prévues toutes les demi-heures, permettant une qualité de desserte suffisante. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article U12 du règlement du PLU doit être écarté.

24. Aux termes de l'article 2 du règlement du PLU : " [...] Secteur U1 : / L'aménagement n'est pas soumis à une opération d'aménagement d'ensemble, mais il devra respecter l'orientation d'aménagement conçue pour ce secteur ". Par ailleurs, aux termes de l'OAP de la " zone de Dadancourt " : " Le schéma d'aménagement prévoit : (...) la préservation d'espaces paysagers le long de la Mauldre, (...) Le périmètre du secteur U1 est réservé à la construction de petits collectifs et de maisons de ville type ''cœur de Maule'' ".

25. M. A... soutient, en septième lieu, que le projet serait incompatible avec l'OAP de la zone de Dadancourt, prévoyant la préservation des espaces paysagers le long de la Mauldre et l'implantation de petits collectifs. Toutefois le projet permet de préserver les espaces paysagers le long de la Mauldre, avec la plantation prévue de 24 arbres de haute tige. Par ailleurs, le type de construction, comme mentionné au point 21, ne méconnait aucunement l'OAP de la zone de Dadancourt. Par suite, le moyen doit être écarté.

26. M. A... soutient, en huitième lieu, que le projet de construction méconnait le plan de prévention du risque inondation (PPRI) de la vallée de la Mauldre et du Lieutel. M. A... soutient que la cote du premier plancher habitable se situe en deçà de la cote de 33,38 NGFR, prévue par le règlement graphique du PPRI et que le bâtiment B comporte un parc de stationnement souterrain ce qui est interdit. Toutefois, s'agissant du bâtiment A, le garage qui se situe sous la cote de 33,38 NGFR ne constitue pas un plancher habitable. S'agissant du bâtiment B, le premier plancher habitable se situe au-dessus de cette cote, de même que pour les trois maisons, même si l'accès par les garages est inférieur à cette cote. S'agissant des sous-sols, le permis de construire modificatif fixe le plancher du garage du bâtiment B à une hauteur de 32 mètres, correspondant à la hauteur à l'état naturel du terrain au droit de l'implantation du bâtiment B, de sorte que ce garage ne peut être regardé comme étant installé en sous-sol au sens du PPRI. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance du PPRI doit être écarté.

27. Aux termes de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme : " Le projet peut être refusé ou n'être accepté que sous réserve de l'observation de prescriptions spéciales s'il est de nature à porter atteinte à la salubrité ou à la sécurité publique du fait de sa situation, de ses caractéristiques, de son importance ou de son implantation à proximité d'autres installations. ".

28. M. A... soutient, en neuvième et dernier lieu, que le risque relatif à l'inondation a été volontairement occulté par le pétitionnaire dès lors qu'il n'aurait pas coché la case du formulaire relatif à l'applicabilité de la loi sur l'eau et que le maire aurait méconnu l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme, ce qui serait de nature à porter atteinte à la sécurité et à la salubrité publique. Toutefois, le permis de construire mentionnant que le projet se situe à proximité immédiate du lit de la Mauldre, et qu'il est soumis aux dispositions du PPRI, ne peut être regardé comme entaché de fraude, aucune volonté de dissimilation ne ressortant des pièces du dossier. Par ailleurs, M. A... ne produit aucun élément de nature à établir que le projet aurait été soumis à la loi sur l'eau. Enfin, pour les motifs figurant au point 26, le projet n'est pas implanté en dessous de la cote prévue en matière d'inondation et n'est donc pas entaché d'une erreur manifeste d'appréciation.

29. Il résulte de ce qui précède que M. A... est uniquement fondé à soutenir que le permis de construire, délivré par arrêté du maire de Maule du 7 avril 2022, et modifié par celui du 24 avril 2023, est entaché d'illégalité en tant qu'il méconnait l'article U1 du règlement du PLU en prévoyant la construction de trois maisons individuelles.

Sur l'application de l'article L. 600-5 du code de l'urbanisme :

30. Aux termes de l'article L. 600-5 du code de l'urbanisme : " Sans préjudice de la mise en œuvre de l'article L. 600-5-1, le juge administratif qui, saisi de conclusions dirigées contre un permis de construire, de démolir ou d'aménager ou contre une décision de non-opposition à déclaration préalable, estime, après avoir constaté que les autres moyens ne sont pas fondés, qu'un vice n'affectant qu'une partie du projet peut être régularisé, limite à cette partie la portée de l'annulation qu'il prononce et, le cas échéant, fixe le délai dans lequel le titulaire de l'autorisation pourra en demander la régularisation, même après l'achèvement des travaux. Le refus par le juge de faire droit à une demande d'annulation partielle est motivé. ".

31. Le vice mentionné au point 15 du présent arrêt et relatif à la construction de trois maisons individuelles sur le terrain d'assiette du projet est susceptible de régularisation. Dès lors, l'arrêté du 7 avril 2022, modifié par celui du 24 avril 2023, doit être annulé uniquement en tant qu'il méconnaît les dispositions du plan local d'urbanisme relatives à la construction de trois maisons individuelles. Il convient de fixer à trois mois le délai imparti au pétitionnaire pour solliciter la régularisation de l'autorisation qui lui a été délivrée.

Sur les frais liés au litige :

32. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de M. A..., qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, les sommes que la commune de Maule et de la SNC Chaussée Saint Vincent demandent à ce titre. Il y a lieu, en revanche, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la commune de Maule et de la SNC Chaussée Saint Vincent une somme de 2 000 euros, à verser à M. A... à hauteur de 1 000 euros par la commune de Maule et à hauteur de 1 000 euros par la SNC Chaussée Saint Vincent, au titre des mêmes dispositions.

D E C I D E :

Article 1er : Le jugement n° 2207058 du 20 novembre 2023 du tribunal administratif de Versailles est annulé.

Article 2 : L'arrêté du 7 avril 2022, modifié par celui du 24 avril 2023, est annulé en tant seulement qu'il méconnait l'article U1 du règlement du plan local d'urbanisme en autorisant la construction de trois maisons individuelles.

Article 3 : Le délai dans lequel la SNC Chaussée Saint Vincent devra demander la régularisation de l'autorisation qui lui a été accordée par l'arrêté du 7 avril 2022, modifié par celui du 24 avril 2023, est fixé à trois mois à compter de la notification du présent arrêt.

Article 4 : La commune de Maule et la SNC Chaussée Saint Vincent verseront une somme de 1 000 euros, chacune, à M. A... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 5 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté.

Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A..., à la commune de Maule et la SNC Chaussée Saint Vincent.

Délibéré après l'audience du 21 janvier 2025, à laquelle siégeaient :

M. Etienvre, président de chambre,

M. Pilven, président-assesseur,

Mme Pham, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 12 février 2025.

Le président-assesseur,

J-E. PilvenLe président,

F. Etienvre

La greffière,

F. Petit-Galland

La République mande et ordonne au préfet des Yvelines en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente ordonnance.

Pour expédition conforme

La greffière,

[PF1]et un mémoire

2

N° 24VE00186


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de VERSAILLES
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 24VE00186
Date de la décision : 12/02/2025
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

68-03 Urbanisme et aménagement du territoire. - Permis de construire.


Composition du Tribunal
Président : M. ETIENVRE
Rapporteur ?: M. Jean-Edmond PILVEN
Rapporteur public ?: Mme VILLETTE
Avocat(s) : SCP GARRIGUES BEAULAC ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 23/02/2025
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2025-02-12;24ve00186 ?
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