Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Cergy-Pontoise d'annuler l'arrêté du 27 juillet 2022 par lequel le préfet du Val-d'Oise a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays d'éloignement.
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Par un jugement n° 2211779 du 14 septembre 2023, le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête et un mémoire, enregistrés les 29 février et 17 septembre 2024, et un mémoire enregistré le 8 janvier 2025 et non communiqué, M. A..., représenté par Me Langlois, avocate, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du 14 septembre 2023 ;
2°) d'annuler l'arrêté du préfet du Val-d'Oise du 27 juillet 2022 ;
3°) d'enjoindre au préfet du Val-d'Oise de lui délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " ou, subsidiairement, une carte de séjour portant la mention " salarié " ou, à défaut, un récépissé l'autorisant à travailler et à chercher un emploi à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 200 euros par jour de retard, ou à titre subsidiaire d'enjoindre au préfet du Val-d'Oise de réexaminer sa situation dans un délai de quinze jours sous astreinte de 200 euros par jour de retard et de lui délivrer une autorisation de travail l'autorisant à travailler durant cet examen ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Il soutient que :
Sur la décision refusant un titre de séjour :
- elle méconnaît les dispositions de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la commission du titre de séjour aurait dû être saisie ;
- elle est entachée d'erreur manifeste d'appréciation au regard de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et d'erreur de droit;
- le préfet a méconnu sa compétence en n'usant pas de son pouvoir discrétionnaire de régularisation exceptionnelle ;
- la décision est entachée d'incompétence ;
- elle est insuffisamment motivée ;
- elle est entachée d'un défaut d'examen sérieux de sa situation ;
- elle est entachée d'erreur de fait ;
Sur l'obligation de quitter le territoire :
- elle est illégale par voie d'exception ;
- elle est insuffisamment motivée ;
- elle est entachée d'erreur de droit ;
- elle méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Sur la décision fixant le délai de départ volontaire :
- elle est illégale par voie d'exception ;
- elle est insuffisamment motivée ;
- elle est entachée d'erreur manifeste d'appréciation ;
Sur la décision fixant le pays de destination :
- elle est illégale par voie d'exception.
Par un mémoire en défense, enregistré le 5 avril 2024, le préfet du Val-d'Oise conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens soulevés ne sont pas fondés.
M. A... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 9 janvier 2024.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91- 647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
La présidente de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Le Gars,
- et les observations de Me Bernardi-Vingtain, représentant M. A....
Considérant ce qui suit :
1. M. B... A..., ressortissant gambien né le 1er janvier 1979, est entré en France en 2009, selon ses déclarations. Le 24 mai 2022, il a demandé son admission au séjour sur le fondement des dispositions des articles L. 423-23 et L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par un arrêté du 27 juillet 2022, le préfet du Val-d'Oise a refusé de lui délivrer le titre de séjour sollicité, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays d'éloignement. M. A... relève appel du jugement du 14 septembre 2023 par lequel le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande d'annulation de cet arrêté.
Sur l'arrêté du préfet du Val-d'Oise du 27 juillet 2022 :
2. Aux termes de l'article L. 432-13 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Dans chaque département est instituée une commission du titre de séjour qui est saisie pour avis par l'autorité administrative : / 1° Lorsqu'elle envisage de refuser de délivrer ou de renouveler la carte de séjour temporaire prévue aux articles L. 423-1, L. 423-7, L. 423-13, L. 423-14, L. 423-15, L. 423-21, L. 423-22, L. 423-23, L. 425-9 ou L. 426-5 à un étranger qui en remplit effectivement les conditions de délivrance ; / 4° Dans le cas prévu à l'article L. 435-1. ". L'article L. 435-1 du même code prévoit que : " (...) Lorsqu'elle envisage de refuser la demande d'admission exceptionnelle au séjour formée par un étranger qui justifie par tout moyen résider habituellement en France depuis plus de dix ans, l'autorité administrative est tenue de soumettre cette demande pour avis à la commission du titre de séjour prévue à l'article L. 432-14. (...) ".
3. M. A..., qui soutient être présent sur le territoire depuis 2009, produit concernant l'année 2012, une feuille de soins du 2 mai 2012, des ordonnances médicales établies les 22 juin 2012 et 10 septembre 2012, ainsi qu'une carte consulaire du 6 décembre 2012. Pour l'année 2013, il produit des ordonnances médicales établies les 11 avril, 7 juin, 19 août, 20 novembre et 9 décembre 2013, ainsi qu'un avis d'imposition de 2014 sur les revenus de l'année 2013, certes sans aucun revenu. Pour l'année 2014, il produit des ordonnances médicales des 14 mars, 1er août, 18 septembre et de novembre 2014, ainsi qu'un avis d'imposition sur les revenus de cette année, certes n'indiquant aucun revenu. Pour l'année 2015, il produit une demande d'aide médicale d'Etat du 13 avril 2015, une attestation de chargement d'une carte Navigo à compter du mois du juillet 2015, des ordonnances médicales des 24 août, 1er et 6 octobre et 19 novembre 2015, ainsi que deux relevés bancaires des 8 septembre et 8 octobre 2015. Sa présence sur le territoire français est ainsi établie entre 2012 et 2015, contrairement à l'appréciation portée par le préfet du Val-d'Oise. En outre, les pièces versées au dossier pour les années 2012 à 2022 sont suffisantes par leur diversité, leur nombre et leur caractère probant pour établir le caractère continu et habituel du séjour de M. A... sur le territoire français durant les dix années précédant la décision portant refus de titre de séjour. M. A... est par suite fondé à soutenir que le préfet ne pouvait légalement refuser de lui délivrer le titre de séjour sollicité sans soumettre son cas à la commission du titre de séjour mentionnée à l'article L. 432-13 du code de l'entrée et du séjour en France des étrangers et du droit d'asile et que cette irrégularité de procédure l'a privé d'une garantie justifiant l'annulation de la décision portant refus de titre de séjour, et par voie de conséquence, des décisions portant obligation de quitter le territoire, fixant le délai de départ volontaire et le pays de destination.
4. Il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens, que M. A... est fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande.
Sur les conclusions aux fins d'injonction :
5. Eu égard au motif d'annulation, et dès lors qu'aucun autre moyen n'est susceptible d'être accueilli en l'état du dossier, le présent arrêt implique seulement qu'il soit enjoint au préfet du Val-d'Oise de réexaminer la situation administrative de M. A..., après avoir recueilli l'avis de la commission mentionnée à l'article L. 432-13 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans un délai de trois mois à compter de la notification du présent arrêt, sans qu'il y ait lieu d'assortir, dans les circonstances de l'espèce, cette injonction d'une astreinte.
Sur les frais liés à l'instance :
6. Il y a lieu, sous réserve de la renonciation de Me Langlois à la part contributive de l'Etat au titre de l'aide juridictionnelle, de mettre à la charge de l'Etat, le versement d'une somme de 1 500 euros au conseil du requérant en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et du deuxième alinéa de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
D E C I D E :
Article 1er : Le jugement n° 2211779 du 14 septembre 2023 du tribunal administratif de Cergy-Pontoise et l'arrêté du préfet du Val-d'Oise du 27 juillet 2022 sont annulés.
Article 2 : Il est enjoint au préfet du Val-d'Oise de procéder, après saisine de la commission du titre de séjour, au réexamen de la situation de M. A... dans un délai de trois mois à compter de la notification du présent arrêt.
Article 3 : L'Etat versera la somme de 1 500 euros à Me Langlois au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et du deuxième alinéa de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve que celle-ci renonce au bénéfice de la part contributive de l'État.
Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête de M. A... est rejeté.
Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A..., au préfet du Val-d'Oise et au ministre de l'intérieur.
Délibéré après l'audience du 14 janvier 2025, à laquelle siégeaient :
Mme Versol, présidente de chambre,
Mme Le Gars, présidente-assesseure,
M.Tar, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 4 février 2025.
La rapporteure,
A.C Le GarsLa présidente,
F. VersolLa greffière,
A. Gauthier
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition conforme,
La greffière,
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N° 24VE00558