Vu les autres pièces du dossier.
La clôture de l'instruction a été fixée au 4 novembre 2024.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales,
- le code des relations entre le public et l'administration,
- le code de l'environnement,
- l'arrêté du 12 août 2010 relatif aux prescriptions générales applicables aux installations classées de méthanisation relevant du régime de l'enregistrement au titre de la rubrique n° 2781 de la nomenclature des installations classées pour la protection de l'environnement,
- l'arrêté du 29 octobre 2009 fixant la liste des oiseaux protégés sur l'ensemble du territoire et les modalités de leur protection,
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Mornet,
- les conclusions de M. Frémont, rapporteur public,
- les observations de Me Leeson, représentant l'association pour la valorisation du cadre de vie à Courçay et autres, ainsi que la commune de Courçay,
- et les observations de M. AD..., représentant la société Méthamorphose.
Une note en délibéré produite pour les requérants a été enregistrée le 23 janvier 2025.
Considérant ce qui suit :
1. La société Méthamorphose a présenté auprès du préfet d'Indre-et-Loire, le 21 février 2019, une demande d'enregistrement en vue de l'exploitation d'une unité de méthanisation sur un terrain situé lieu-dit " Le Pas de la Mule ", à Courçay. Par un arrêté du 19 septembre 2019, le préfet d'Indre-et-Loire a enregistré cette installation. Les requérants ont formé un recours gracieux contre cet arrêté, qui a été implicitement rejeté par le préfet d'Indre-et-Loire, ainsi qu'un recours hiérarchique, implicitement rejeté par le ministre de la transition écologique et solidaire. Par un arrêté du 27 janvier 2020, le préfet d'Indre-et-Loire a modifié l'arrêté du 19 septembre 2019. L'association pour la valorisation du cadre de vie à Courçay et autres demandent à la cour d'annuler le jugement du 29 novembre 2022 par lequel le tribunal administratif d'Orléans a rejeté les demandes tendant à l'annulation des deux arrêtés préfectoraux des 19 septembre 2019 et 27 janvier 2020.
Sur l'intervention de la commune de Courçay :
2. La commune de Courçay, sur le territoire de laquelle se situe le terrain d'implantation de l'installation litigieuse, a intérêt à l'annulation du jugement attaqué du tribunal administratif d'Orléans. Son intervention est, par suite, recevable.
Sur la légalité de l'arrêté du préfet d'Indre-et-Loire du 19 septembre 2019 :
3. En premier lieu, aux termes de l'article L. 512-7-3 du code de l'environnement : " L'arrêté d'enregistrement est pris par le préfet après avis des conseils municipaux intéressés. / En vue d'assurer la protection des intérêts mentionnés à l'article L. 511-1 et, le cas échéant, à l'article L. 211-1, le préfet peut assortir l'enregistrement de prescriptions particulières complétant ou renforçant les prescriptions générales applicables à l'installation. Dans les limites permises par la protection des intérêts mentionnés à l'article L. 511-1, ces prescriptions particulières peuvent aussi inclure des aménagements aux prescriptions générales justifiés par les circonstances locales. (...) ". Et aux termes de l'article R. 512-46-18 du même code : " (...) La décision de refus ou d'enregistrement est motivée notamment au regard des articles L. 512-7 et L. 512-7-2 et notifiée au pétitionnaire. (...) ".
4. L'arrêté litigieux vise les textes dont il fait application et les considérations de fait sur lesquelles il est fondé. S'agissant plus précisément des prescriptions particulières qu'il contient, relatives aux conditions d'épandage du digestat et à la mise en place d'une instance de concertation, et alors que préfet d'Indre-et-Loire n'était pas tenu de mentionner les textes instaurant des périmètres de protection dans des zones voisines du terrain d'implantation de l'installation, l'arrêté rappelle, dans ses considérants, l'origine de ces prescriptions, à savoir les contributions publiques ayant relevé la proximité d'une zone Natura 2000 et les périmètres de protection rapprochée et éloigné de la source de l'Herpenty, du forage de l'Herpenty et du forage des Ouches. Par ailleurs, les motifs de ces prescriptions résultent directement de leur contenu même. Le moyen tiré de l'existence d'une insuffisance de motivation doit donc être écarté comme manquant en fait.
5. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 512-7-3 du code de l'environnement : " (...) Le préfet ne peut prendre l'arrêté d'enregistrement que si le demandeur a justifié que les conditions de l'exploitation projetée garantiraient le respect de l'ensemble des prescriptions générales, et éventuellement particulières, applicables. Il prend en compte les capacités techniques et financières que le pétitionnaire entend mettre en œuvre, à même de lui permettre de conduire son projet dans le respect des intérêts mentionnés à l'article L. 511-1 et, le cas échéant, à l'article L. 211-1, et d'être en mesure de satisfaire aux obligations de l'article L. 512-7-6 lors de la cessation d'activité. (...) ". Et aux termes de l'article R. 512-46-4 du même code : " A chaque exemplaire de la demande d'enregistrement doivent être jointes les pièces suivantes : / (...) 7° Une description des capacités techniques et financières mentionnées à l'article L. 512-7-3 dont le pétitionnaire dispose ou, lorsque ces capacités ne sont pas constituées au dépôt de la demande d'enregistrement, les modalités prévues pour les établir au plus tard à la mise en service de l'installation ; (...) ".
6. Lorsque le juge se prononce sur la légalité de l'autorisation avant la mise en service d'une installation, il lui appartient, si la méconnaissance des règles de fond est soulevée, de vérifier la pertinence des modalités selon lesquelles le pétitionnaire prévoit de disposer de capacités financières et techniques suffisantes pour assumer l'ensemble des exigences susceptibles de découler du fonctionnement, de la cessation éventuelle de l'exploitation et de la remise en état du site au regard des intérêts mentionnés à l'article L. 511-1 du code de l'environnement, ainsi que les garanties de toute nature qu'il peut être appelé à constituer à cette fin en application des articles L. 516-1 et L. 516-2 du même code. Pour l'application de cette règle de fond, le juge administratif doit tenir compte des circonstances de droit et de fait à la date à laquelle il se prononce.
7. Il résulte de l'instruction que le dossier de demande d'enregistrement déposé par la société Méthamorphose comprenait un chapitre intitulé " Capacités techniques, financières et humaines ", indiquant qu'elle bénéficiait de l'appui technique de plusieurs partenaires, dont les sociétés Astrade, Engie, L'Artifex, ainsi que de la chambre d'agriculture, et serait accompagnée notamment par les constructeurs dans la phase d'exploitation pour la gestion, la maintenance, le recrutement et la formation des employés. Elle décrivait en outre les recrutements auxquels elle envisageait de procéder en vue de disposer de l'expérience, du savoir-faire et des compétences techniques nécessaires pour l'exploitation de ses installations, dans des conditions sûres pour l'environnement et les personnels. Par ailleurs, les trois agriculteurs à l'origine du projet ont participé à des formations et visites d'unités de méthanisation organisées par la chambre d'agriculture de la Vienne depuis 2015, les attestations de formation alors délivrées étant jointes au dossier de demande d'enregistrement. Ce dernier présentait également un tableau de financement détaillé par lot, pour un montant total d'investissements de 9,5 millions d'euros, et précisait que le financement serait assuré à hauteur de 10,55 % par un apport en capital, par des subventions et par deux emprunts bancaires dont les taux étaient mentionnés. Il résulte enfin de l'instruction que la société Méthamorphose a, depuis la date d'édiction de l'arrêté attaqué, réalisé les démarches nécessaires à l'obtention de ces subventions et emprunts bancaires, et a reçu plusieurs lettres d'intérêt et d'intention d'établissements bancaires, ainsi qu'une aide FEDER d'un montant de 1 847 000 euros. Dans ces conditions, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions citées au point 5 du présent arrêt doit être écarté.
8. En troisième lieu, aux termes de l'article R. 512-46-4 du code de l'environnement : " A la demande d'enregistrement doivent être jointes les pièces suivantes : / (...) / 6° Le cas échéant, l'évaluation des incidences Natura 2000 dans les cas et conditions prévus par les dispositions réglementaires de la sous-section 5 de la section 1 du chapitre IV du titre Ier du livre IV ; (...) ". Et aux termes de l'article R. 414-19 du même code : " I. - La liste nationale des documents de planification, programmes ou projets ainsi que des manifestations et interventions qui doivent faire l'objet d'une évaluation des incidences sur un ou plusieurs sites Natura 2000 en application du 1° du III de l'article L. 414-4 est la suivante : / (...) / 26° Les installations classées soumises à enregistrements en application de l'article L. 512-7, dès lors que ces installations sont localisées en site Natura 2000. (...) ".
9. Il résulte de l'instruction, notamment des documents cartographiques produits au dossier, et du rapport réalisé le 26 août 2019 par l'inspecteur de l'environnement de la direction départementale de la protection des populations d'Indre-et-Loire, que le terrain d'implantation de l'installation projetée par la société Méthamorphose n'est pas localisée dans le périmètre d'un site Natura 2000. Il s'ensuit que cette installation n'était pas soumise à l'évaluation prévue par les dispositions précitées. Il résulte en tout état de cause de l'instruction que la société pétitionnaire a néanmoins réalisé, sans y être tenue, une évaluation simplifiée des incidences du projet sur les sites Natura 2000 situés à proximité du terrain d'implantation, pour tenir compte des conséquences éventuelles du plan d'épandage du digestat, les prescriptions particulières de l'arrêté litigieux ayant d'ailleurs pour objectif de prévenir ces dernières.
10. En quatrième lieu, il résulte de l'instruction que, contrairement à ce que soutiennent les appelants, la société Méthamorphose a joint au dossier de demande d'enregistrement un plan d'épandage, en application des dispositions de l'annexe I de l'arrêté du 12 août 2010 relatif aux prescriptions générales applicables aux installations classées de méthanisation relevant du régime de l'enregistrement au titre de la rubrique n° 2781 de la nomenclature des installations classées pour la protection de l'environnement. La circonstance que ce plan, mentionné dans le formulaire CERFA rempli par le pétitionnaire, était fourni dans un dossier spécifique est sans incidence à cet égard. Si les appelants soutiennent par ailleurs que ce plan serait insuffisant, relevant qu' " il semble que la quantité de digestat solide et liquide devant prétendument faire l'objet d'un épandage, ne pourra pas être traitée en totalité ", ils n'apportent aucune précision à l'appui de cette allégation. En tout état de cause, comme le relève le ministre en défense, aucune disposition légale ou réglementaire n'impose au pétitionnaire de préciser les modalités de gestion des volumes de digestats qui ne seraient pas épandus, alors au demeurant que le dossier de demande d'enregistrement indique les modalités de gestion du digestat non épandable et que la société Méthamorphose a proposé une solution alternative à l'épandage, à savoir le compostage dans un établissement autorisé. Enfin, il résulte de l'instruction que les conséquences de l'installation projetée sur le trafic routier ont été précisées par le pétitionnaire dans le dossier de demande d'enregistrement, et que ce dernier n'a pas davantage omis de mentionner la réalisation d'un forage sur l'emprise du terrain d'implantation, lequel n'est soumis ni à autorisation, ni à déclaration, en raison du faible volume d'eau prélevé, soit 2 400 mètres cubes par an. Ainsi, le moyen des appelants, nouveau en appel, tiré de ce que le dossier de demande d'enregistrement aurait été incomplet et insuffisant doit être écarté.
11. En cinquième lieu, l'arrêté préfectoral du 19 septembre 2019 portant enregistrement de l'unité de méthanisation exploitée par la société Méthamorphose comporte des prescriptions particulières relatives, d'une part, à l'épandage de digestat liquide, interdit dans le périmètre de protection éloigné de la source de l'Herpenty, du forage de l'Herpenty et du forage des Ouches de la commune de Bléré, à l'exception des épandages réalisés au printemps sur cultures en végétation, et, d'autre part, à la concentration d'épandage sur les zones à enjeux vis-à-vis de la nidification de l'outarde canepetière, dans la zone Natura 2000 Champeigne, qui est à éviter du 30 avril au 15 août, et enfin à la mise en place d'une instance de concertation permettant la rencontre de l'exploitant, des représentants des riverains et des élus locaux des trois communes concernées par le rayon de consultation, d'une association de protection de l'environnement et du comité technique de suivi de la zone Natura 2000 Champeigne, qui se réunira au moins une fois par an pour dresser le bilan de l'année écoulée, recueillir les observations des riverains et présenter les évolutions et projets du site.
12. Les appelants soutiennent que ces prescriptions sont insuffisantes, dès lors d'abord qu'elles ne prendraient pas en compte le trafic routier généré par le projet. S'ils font valoir que l'importance de l'unité de méthanisation projetée rendra nécessaire la circulation d'un nombre important de poids-lourds pour l'apport des intrants et le transport du digestat solide et liquide, il résulte de l'instruction que la hausse annuelle du trafic sera, en moyenne, d'environ huit voyages par jour ouvré, le chiffre de cinq camions par heure qu'ils mettent en avant ne concernant qu'une période limitée de l'année, de la fin du mois d'août au milieu du mois de septembre, en raison de la récolte des mâles de maïs semence. L'association pour la valorisation du cadre de vie à Courçay et autres n'établissent par ailleurs aucune augmentation du trafic routier supérieure à celle mentionnée dans le dossier de demande d'enregistrement de l'installation.
13. Les appelants font ensuite valoir que les risques liés au stockage du digestat et de l'épandage à l'égard des cours d'eau, sources et eaux souterraines situés à proximité de l'unité de méthanisation n'ont pas été suffisamment pris en compte par le préfet d'Indre-et-Loire. Il résulte toutefois de l'instruction que ces considérations, mises notamment en lumière lors de la consultation du public sur le projet, font l'objet de la première prescription particulière de l'arrêté litigieux, aux termes de laquelle, comme il a été dit au point 11 du présent arrêt, l'épandage de digestat liquide est interdit dans le périmètre de protection éloigné de la source de l'Herpenty, du forage de l'Herpenty et du forage des Ouches de la commune de Bléré, à l'exception des épandages réalisés au printemps sur les cultures en végétation, concernant des matières fertilisantes qui seront préalablement analysées. Comme l'indiquait le préfet dans ses écritures de première instance, les possibilités d'épandage dans les zones de protection de captage d'eau ont été considérablement réduites par rapport au projet initial de la société Méthamorphose, et les appelants ne démontrent pas en quoi les prescriptions de l'arrêté du 19 septembre 2019 seraient insuffisantes à ce titre.
14. Enfin, il ne résulte d'aucune des dispositions applicables au projet de la société Méthamorphose que l'exploitant de l'installation serait tenu de mettre en place un organisme ayant pour mission d'empêcher la survenue de pollutions de toutes natures. Les appelants ne sauraient dès lors utilement critiquer la prescription particulière relative à la mise en place d'une instance de concertation, ayant pour objet de favoriser le dialogue entre l'exploitant, les riverains, les élus locaux et les associations de protection de l'environnement, au motif que les modalités de réunion de celle-ci ne permettraient pas de répondre aux exigences de l'article L. 512-7-3 du code de l'environnement, dès lors qu'elle se bornerait à constater une fois par an les pollutions survenues. Il est au demeurant constant que la prévention de telles nuisances est assurée par l'application de la réglementation relative aux installations classées pour la protection de l'environnement, prévoyant le dépôt par le pétitionnaire d'un dossier complet de demande d'enregistrement, ainsi que par le respect des prescriptions générales applicables aux unités de méthanisation et des prescriptions particulières de l'arrêté litigieux.
15. En sixième lieu, il résulte de l'instruction que le terrain d'implantation de l'unité de méthanisation projetée est situé à proximité de la zone Natura 2000 Champeigne, au sein de laquelle est défini un périmètre de protection spéciale concernant l'outarde canepetière, espèce protégée par l'arrêté du 29 octobre 2009 fixant la liste des oiseaux protégés sur l'ensemble du territoire et les modalités de leur protection. Toutefois, le projet étant localisé en dehors de cette zone de protection, la société Méthamorphose n'était pas tenue de disposer d'une dérogation à l'interdiction de destruction d'espèces protégées en application des dispositions des articles l'article L. 411-1 et L. 411-2 du code de l'environnement, alors au demeurant que l'évaluation simplifiée des incidences du projet sur la zone Natura 2000 a relevé que la présence de l'outarde canepetière sur le site d'étude était improbable, et que l'arrêté litigieux prescrit à l'exploitant d'éviter la concentration d'épandage sur les zones à enjeux vis-à-vis de la nidification de l'outarde canepetière entre le 30 avril et le 15 août de chaque année.
16. En septième lieu, aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'environnement : " Sont soumis aux dispositions du présent titre les usines, ateliers, dépôts, chantiers et, d'une manière générale, les installations exploitées ou détenues par toute personne physique ou morale, publique ou privée, qui peuvent présenter des dangers ou des inconvénients soit pour la commodité du voisinage, soit pour la santé, la sécurité, la salubrité publiques, soit pour l'agriculture, soit pour la protection de la nature, de l'environnement et des paysages, soit pour l'utilisation économe des sols naturels, agricoles ou forestiers, soit pour l'utilisation rationnelle de l'énergie, soit pour la conservation des sites et des monuments ainsi que des éléments du patrimoine archéologique. (...) ". Aux termes de l'article L. 512-7 du même code : " I. - Sont soumises à autorisation simplifiée, sous la dénomination d'enregistrement, les installations qui présentent des dangers ou inconvénients graves pour les intérêts mentionnés à l'article L. 511-1, lorsque ces dangers et inconvénients peuvent, en principe, eu égard aux caractéristiques des installations et de leur impact potentiel, être prévenus par le respect de prescriptions générales édictées par le ministre chargé des installations classées. (...) ". Et aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale (...). / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. ".
17. L'association pour la valorisation du cadre de vie à Courçay et autres soutiennent que l'arrêté préfectoral du 19 septembre 2019 méconnaît ces dispositions et stipulations en raison de la production de déchets sur le site d'implantation de l'installation projetée et de l'épandage de digestat, d'une augmentation du trafic routier, de la création d'une nouvelle route et du rejet de CO2 dans l'atmosphère, ainsi que de nuisances sonores, olfactives et visuelles, et de risques accidentels et pour la santé humaine. Toutefois, comme il a été dit au point 12 du présent arrêt, il résulte de l'instruction que les incidences de l'unité de méthanisation sur le trafic routier seront limitées. Par ailleurs, comme l'ont relevé les premiers juges, l'exploitant prévoit un transport du digestat liquide par un réseau de canalisations, ce qui permettra de réduire la circulation de véhicules, et l'agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie (ADEME) a estimé que l'installation impliquera l'économie de 3 650 tonnes de CO2 par an. En ce qui concerne les incidences visuelles, elles seront limitées du fait de l'implantation du projet en territoire rural, de l'absence de périmètre de protection d'un monument historique ou d'un site classé, de la mise en place de plantations aux limites de la parcelle et du choix, pour les bâtiments et digesteurs, de teintes adaptées à l'environnement et à la végétation, dans des tons gris-vert. Le risque d'incendie est par ailleurs faible, n'excédant pas les risques communs liés à la présence de matériel électrique, alors au demeurant que les équipements de sécurité obligatoires sont prévus. De même, le risque d'explosion sera prévenu par les équipements de sécurité mentionnés dans le dossier de demande d'enregistrement déposé par la société pétitionnaire, soit trente-six équipements pour les six éléments composant l'unité de méthanisation. Il résulte en outre de l'instruction que le projet n'emportera pas de nuisances olfactives pour les habitants de la commune de Courçay et des communes environnantes, du fait de l'éloignement des habitations, les plus proches étant situées à 590 mètres, et de la mise en place d'un traitement de l'air par biofiltre. Enfin, si des équipements bruyants doivent permettre le fonctionnement de l'installation projetée, la société Méthamorphose a prévu de les munir d'une capote afin de les insonoriser et de concevoir l'unité de manière à limiter le bruit à 75 décibels à un mètre et à 60 décibels en limite de propriété, en application de la réglementation applicable. Ainsi, l'ensemble des mesures prises par l'exploitant, auxquelles s'ajoutent les prescriptions de l'arrêté litigieux, sont de nature à assurer la préservation de la commodité du voisinage et des divers intérêts mentionnés à l'article L. 511-1 précité du code de l'environnement, qui n'ont donc pas été méconnues. Pour les mêmes motifs, les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales n'ont pas été davantage méconnues.
18. En dernier lieu, aux termes de l'article L. 541-1 du code de l'environnement : " (...) II. - Les dispositions du présent chapitre et de l'article L. 125-1 ont pour objet : / (...) / 4° D'organiser le transport des déchets et de le limiter en distance et en volume selon un principe de proximité ; / (...) / Le principe de proximité mentionné au 4° consiste à assurer la prévention et la gestion des déchets de manière aussi proche que possible de leur lieu de production et permet de répondre aux enjeux environnementaux tout en contribuant au développement de filières professionnelles locales et pérennes. Le respect de ce principe, et notamment l'échelle territoriale pertinente, s'apprécie en fonction de la nature des déchets considérés, de l'efficacité environnementale et technique, de la viabilité économique des modes de traitement envisagés et disponibles à proximité pour ces déchets, des débouchés existant pour ces flux et des conditions techniques et économiques associées à ces débouchés, dans le respect de la hiérarchie de la gestion des déchets et des règles de concurrence et de libre circulation des marchandises. Les collectivités et établissements mentionnés à l'article L. 2224-13 du code général des collectivités territoriales veillent à l'application de ce principe en déterminant, au besoin par convention, les modalités permettant à tout producteur de déchets dont la collecte relève de la compétence de ces collectivités et établissements d'accéder au lieu de collecte pertinent le plus proche du lieu de production desdits déchets. (...) ". Le respect du principe de proximité issu de ces dispositions, qui ne comporte aucun objectif quantifié, ne peut s'apprécier qu'en considération, d'une part, des données géographiques et démographiques du territoire considéré, d'autre part, de la nature, de la capacité et de la localisation des installations déjà existantes sur ce territoire, enfin, de la politique de prévention et de gestion des déchets que les autorités compétentes sont tenues d'élaborer à l'échelle d'un territoire donné en vertu des dispositions de l'article L. 541-14 du code de l'environnement.
19. Si les appelants soutiennent que l'unité de méthanisation projetée par la société Méthamorphose traitera des déchets issus de provenances multiples et éloignées, et que cette exploitation méconnaîtra le principe de proximité énoncé aux dispositions précitées du 4°) de l'article L. 541-1 du code de l'environnement, il résulte de l'instruction que le dossier de demande d'enregistrement présenté par le pétitionnaire mentionne une fourniture en déchets principalement dans un rayon de quarante kilomètres autour du site d'implantation, auprès de producteurs et de centres de collecte de biodéchets, et notamment auprès de huit exploitations et coopératives agricoles situés à moins de treize kilomètres. L'association pour la valorisation du cadre de vie à Courçay et autres ne démontrent pas que la majorité des déchets traités proviendraient des abattoirs les plus proches situés à Bourgueil, à soixante-quatre kilomètres, et à Vendôme, à soixante-seize kilomètres. Ils ne sont donc pas fondés, en tout état de cause, à soutenir que l'arrêté litigieux méconnaît le principe de proximité de gestion des déchets.
Sur la légalité de l'arrêté du préfet d'Indre-et-Loire du 27 janvier 2020 :
20. En premier lieu, par un arrêté modificatif du 27 janvier 2020, le préfet d'Indre-et-Loire a défini les modalités de remise en état du site d'implantation par l'exploitant, lors de l'arrêt définitif de l'installation enregistrée. Cet arrêté vise le courrier daté du 24 décembre 2019 émanant de l'inspection des installations classées préconisant ces prescriptions et décrit précisément les conditions et exigences liées à la remise en état du site. Les motifs de ces prescriptions résultant directement de leur contenu même, le moyen tiré de l'existence d'une insuffisance de motivation doit être écarté.
21. En deuxième lieu, aux termes de l'article R. 512-46-20 : " Dans le cas d'une installation implantée sur un site nouveau, l'arrêté d'enregistrement détermine également l'état dans lequel le site devra être remis par l'exploitant lors de l'arrêt définitif de l'installation. "
22. Contrairement à ce qui est soutenu par les appelants, les modalités de remise en état du site prescrites par l'arrêté du 27 janvier 2020 prévoient notamment qu'aucune pollution des sols et des eaux ne devra résulter de l'arrêt définitif de l'installation, ni aucun risque pour les tiers. Cet arrêté indique en outre qu'aucun déchet ne devra être laissé sur le site. Si les appelants soutiennent qu'une interdiction d'accès aurait dû être ordonnée, ils ne justifient pas de la nécessité d'une telle mesure dès lors que les modalités énoncées seront respectées. Le moyen tiré de l'insuffisance des prescriptions de remise en état au regard des dispositions de précitées de l'article R. 512-46-20 du code de l'environnement doit donc être écarté.
23. En dernier lieu, il ne résulte d'aucune dispositions législative ou réglementaire que l'exploitant d'une installation devrait justifier de capacités techniques et financières spécifiquement relatives à la remise en état du site après l'arrêt définitif, alors par ailleurs que, comme il a été précisé au point 7 du présent arrêt, la société Méthamorphose a décrit dans la demande d'enregistrement les capacités techniques et financières qu'elle entendait mettre en œuvre.
Sur la légalité de la décision implicite du préfet d'Indre-et-Loire rejetant le recours gracieux :
24. Les appelants soulèvent, à l'appui de leurs conclusions tendant à l'annulation de la décision implicite du préfet d'Indre-et-Loire rejetant leur recours gracieux, un unique moyen tiré de ce que l'administration aurait entaché cette décision d'illégalité en ne faisant pas droit à la demande de communication de documents formulée dans ledit recours. Toutefois, comme l'a opposé en défense le ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, ils ne sont pas recevables à demander l'annulation de la décision litigieuse en tant qu'elle rejette leur demande de communication de documents dès lors qu'ils ne justifient pas avoir exercé le recours administratif préalable obligatoire, auprès de la commission d'accès aux documents administratifs, prévu par les dispositions de l'article R. 343-1 du code des relations entre le public et l'administration.
25. Il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'examiner les fins de non-recevoir opposées en défense, que l'association pour la valorisation du cadre de vie à Courçay et autres ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif d'Orléans a rejeté les demandes tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet d'Indre-et-Loire du 19 septembre 2019 portant enregistrement d'une installation de méthanisation exploitée par la société Méthamorphose au lieu-dit " Le Pas de la Mule ", à Courçay, la décision implicite née du silence gardé par le préfet d'Indre-et-Loire sur leur recours gracieux et la décision implicite née du silence gardé par le ministre de la transition écologique et solidaire sur leur recours hiérarchique, ainsi que de l'arrêté du préfet d'Indre-et-Loire du 27 janvier 2020 modifiant celui du 19 septembre 2019.
Sur les frais liés au litige :
26. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge l'État, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, le versement d'une somme aux appelants au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de ces derniers le versement de la somme globale de 2 000 euros à la société Méthamorphose sur le fondement des mêmes dispositions.
D É C I D E :
Article 1er : L'intervention de la commune de Courçay est admise.
Article 2 : La requête de l'association pour la valorisation du cadre de vie à Courçay et autres et les conclusions de la commune de Courçay sont rejetées.
Article 3 : L'association pour la valorisation du cadre de vie à Courçay et autres verseront la somme globale de 2 000 euros à la société Méthamorphose en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à l'association pour la valorisation du cadre de vie à Courçay, en qualité de représentant unique, à la société Méthamorphose, à la commune de Courçay, au ministre de l'aménagement du territoire et de la décentralisation et à la ministre de la transition écologique, de la biodiversité, de la forêt, de la mer et de la pêche.
Copie en sera adressée au préfet d'Indre-et-Loire.
Délibéré après l'audience du 9 janvier 2025, à laquelle siégeaient :
- M. C..., premier vice-président, président de chambre,
- Mme Mornet, présidente assesseure,
- M. Cozic, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 28 janvier 2025.
La rapporteure,
G. MornetLe président,
B. C...
La greffière,
I. Szymanski
La République mande et ordonne au ministre de l'aménagement du territoire et de la décentralisation et à la ministre de la transition écologique, de la biodiversité, de la forêt, de la mer et de la pêche, en ce qui les concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 23VE00223