Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. B... C... a demandé au tribunal administratif de Cergy-Pontoise d'annuler l'arrêté du 30 avril 2021 par lequel le préfet du Val-d'Oise a rejeté sa demande de titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours, a refusé de lui accorder un délai de départ supplémentaire et a fixé le pays à destination duquel il est susceptible d'être éloigné, d'enjoindre au préfet du Val-d'Oise de lui délivrer un titre de séjour ou, à défaut, de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour et de procéder au réexamen de sa situation, le tout dans un délai d'un mois à compter de la notification du jugement à intervenir et sous astreinte de 50 euros par jour de retard et de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros à verser à Me David sur le fondement de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 ou, en cas de refus de l'aide juridictionnelle, de lui verser cette même somme au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code justice administrative.
Par un jugement n° 2107018 du 17 janvier 2023, le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 3 août 2023, M. C..., représenté par Me David, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) d'annuler cet arrêté ;
3°) d'enjoindre au préfet de police de l'admettre au séjour dans le délai d'un mois à compter de la décision à intervenir, en application de l'article L. 911-1 du code de justice administrative et assortir cette injonction d'une astreinte de 50 euros par jour en application de l'article L. 911-3 du code de justice administrative ou, à titre subsidiaire, de lui délivrer immédiatement une autorisation provisoire de séjour avec autorisation de travail, et de procéder au réexamen de sa situation administrative, dans un délai d'un mois à compter de la décision à intervenir, sous astreinte de 50 euros par jour, en application des articles L. 911-2 et L. 911-3 du code de justice administrative ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 1 500 euros au titre des frais irrépétibles.
Il soutient que :
- le jugement attaqué est irrégulier faute d'être signé ;
- l'arrêté du préfet est insuffisamment motivé ;
En ce qui concerne le refus de séjour :
- le signataire n'avait pas compétence ;
- l'avis du collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII) n'a pas été produit ;
- l'auteur du rapport médical n'est pas identifié ; il n'est pas établi que ce médecin n'a pas siégé au sein du collège de l'OFII ;
- la décision est insuffisamment motivée ;
- il produit des éléments de nature à contredire l'avis des médecins de l'OFII en établissant que l'absence de traitement et de suivi médical pour entrainerait donc des conséquences d'une exceptionnelle gravité pour sa situation personnelle et médicale ; il ne peut pas bénéficier de ce traitement dans son pays d'origine ;
- la décision porte une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale ;
- le préfet a commis une erreur manifeste d'appréciation ;
En ce qui concerne l'obligation de quitter le territoire français :
- le signataire n'avait pas compétence ;
- la décision est insuffisamment motivée ;
- la décision porte une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale ;
- le préfet a commis une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de la décision sur sa situation personnelle ;
- il ne pouvait pas faire l'objet d'une mesure d'éloignement compte tenu de son état de santé ;
En ce qui concerne la décision de ne pas lui accorder un délai de départ volontaire supérieur à 30 jours :
- le préfet a commis une erreur manifeste d'appréciation.
Par un mémoire en défense, enregistré le 13 septembre 2023, le préfet du Val-d'Oise conclut au rejet de la requête en maintenant ses écritures de première instance.
M. C... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par décision du 4 juillet 2023.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de M. Etienvre a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. C..., ressortissant algérien né le 20 janvier 1968, est entré en France, selon ses déclarations, le 1er novembre 2012 muni d'un visa Schengen. Le 27 octobre 2020, il a sollicité son admission au séjour sur le fondement de l'article 6-7 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968. Suite à l'avis rendu le 11 mars 2021 par le collège des médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII), le préfet du Val-d'Oise par un arrêté du 30 avril 2021 a rejeté sa demande, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il est susceptible d'être éloigné. M. C... en a demandé l'annulation au tribunal administratif de Cergy-Pontoise. Par jugement n° 2107018 du 17 janvier 2023, le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande. M. C... relève appel de ce jugement.
Sur les conclusions aux fins d'annulation :
En ce qui concerne la régularité du jugement attaqué :
2. Il ressort des pièces du dossier que la minute du jugement attaqué a été signée par le président-rapporteur, le magistrat assesseur et la greffière. La critique manque donc en fait.
En ce qui concerne le bien-fondé du jugement attaqué :
S'agissant du refus de titre de séjour :
3. En premier lieu, il y a lieu d'écarter le moyen tiré de l'incompétence du signataire par adoption des motifs retenus à bon droit par les premiers juges.
4. En deuxième lieu, l'arrêté attaqué comporte de manière suffisamment précise l'énoncé des considérations de droit et de fait sur lesquelles le préfet s'est fondé et satisfait ainsi aux exigences de motivation.
5. En troisième lieu, comme l'ont indiqué les premiers juges, les pièces du dossier révèlent que la décision du préfet a bien été rendue au vu d'un avis médical, conformément aux dispositions du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et que cet avis a été émis sur la base d'un rapport médical établi le 5 janvier 2021, par un médecin lequel ne faisait pas partie des trois médecins composant le collège dont l'identité et la signature figurent sur l'avis. Le moyen tiré d'un vice de procédure doit être ainsi écarté pris dans toutes ses branches.
6. En quatrième lieu, aux termes de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié : " Les dispositions du présent article (...) fixent les conditions de délivrance et de renouvellement du certificat de résidence aux ressortissants algériens établis en France ainsi qu'à ceux qui s'y établissent. (...) Le certificat de résidence d'un an portant la mention " vie privée et familiale " est délivré de plein droit : (...) / 7) au ressortissant algérien, résidant habituellement en France, dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve qu'il ne puisse pas effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans son pays (...) ".
7. La partie qui justifie d'un avis du collège des médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration venant au soutien de ses dires doit être regardée comme apportant des éléments de fait susceptibles de faire présumer l'existence ou l'absence d'un état de santé de nature à justifier la délivrance ou le refus d'un titre de séjour. Dans ce cas, il appartient à l'autre partie, dans le respect des règles relatives au secret médical, de produire tous éléments permettant d'apprécier l'état de santé de l'étranger et, le cas échéant, l'existence ou l'absence d'un traitement approprié dans le pays de renvoi. La conviction du juge, à qui il revient d'apprécier si l'état de santé d'un étranger justifie la délivrance d'un titre de séjour dans les conditions ci-dessus rappelées, se détermine au vu de ces échanges contradictoires.
8. Pour rejeter la demande de M. C..., le préfet a estimé que si l'état de santé de M. C... nécessitait une prise en charge médicale, pour autant, le défaut de traitement ne pourrait pas entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité. Le préfet se prévaut à cet égard de l'avis émis en ce sens le 11 mars 2021 par le collège de médecins de l'OFII. Il appartient dès lors à M. C... d'apporter des éléments de preuve contraires.
9. M. C... soutient que consécutivement à une agression extrêmement violente, il bénéficie d'un suivi régulier et d'une prise en charge pluridisciplinaire en unité de réanimation chirurgicale et neuro-traumatologique et notamment d'une rééducation orthophonique dont le défaut amoindrirait ses capacités langagières et attentionnelles.
10. Cependant, aucun des documents médicaux produits par M. C... (bulletins de situation, compte rendu d'hospitalisation en chirurgie du 3 janvier 2020, feuille de protocole de soins, fiche de liaison du 22 juin 2020, certificat du docteur D... et certificat du docteur A...) ne permet d'établir que le défaut de prise en charge de son état de santé pourrait entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité.
11. En cinquième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1 Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2 Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".
12. A la date de l'arrêté attaqué, M. C... était célibataire et sans charges de famille. Il n'est par ailleurs entré en France qu'à l'âge de 44 ans. Dans ces conditions, il ressort des pièces du dossier que le préfet du Val-d'Oise n'a pas, en prenant la décision contestée, porté une atteinte disproportionnée au droit de l'intéressé au respect de sa vie privée et familiale nonobstant la durée de sa présence en France et le réseau de solidarité qu'il aurait tissé.
13. En sixième et dernier lieu, le préfet n'a pas davantage commis une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de la décision contestée sur la situation personnelle de l'intéressé.
S'agissant de l'obligation de quitter le territoire français :
14. En premier lieu, il y a lieu d'écarter le moyen tiré de l'incompétence du signataire par adoption des motifs retenus à bon droit par les premiers juges.
15. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 611-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'autorité administrative peut obliger un étranger à quitter le territoire français lorsqu'il se trouve dans les cas suivants : (...) / 3° L'étranger s'est vu refuser la délivrance d'un titre de séjour, le renouvellement du titre de séjour, du document provisoire délivré à l'occasion d'une demande de titre de séjour ou de l'autorisation provisoire de séjour qui lui avait été délivré ou s'est vu retirer un de ces documents (...). ". Aux termes de l'article L. 613-1 du même code : " La décision portant obligation de quitter le territoire français est motivée. (...) / Dans le cas prévu au 3° de l'article L. 611-1, la décision portant obligation de quitter le territoire français n'a pas à faire l'objet d'une motivation distincte de celle de la décision relative au séjour. (...) ".
16. M. C... s'étant vu refuser la délivrance d'un titre de séjour, la décision portant obligation de quitter le territoire français n'avait pas à faire l'objet d'une motivation distincte.
17. En troisième lieu, il ressort des pièces du dossier que le préfet n'a pas davantage porté, en prenant la décision contestée, une atteinte disproportionnée au droit de M. C... au respect de sa vie privée et familiale ni commis une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de cette décision sur la situation personnelle de l'intéressé.
18. En quatrième et dernier lieu, aux termes de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Ne peuvent faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français : (...) 10° L'étranger résidant habituellement en France si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé du pays de renvoi, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié ".
19. M. C... n'est pas fondé à soutenir que la décision contestée a été prise en violation de ces dispositions compte tenu de ce qui a été dit au point 10.
S'agissant de la décision de départ volontaire :
20. Aux termes de l'article L. 612-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger auquel il est fait obligation de quitter le territoire français dispose d'un délai de départ volontaire de trente jours à compter de la notification de l'obligation de quitter le territoire français. L'autorité administrative peut accorder, à titre exceptionnel, un délai de départ volontaire supérieur à trente jours s'il apparaît nécessaire de tenir compte de circonstances propres à chaque cas (...) ".
21. Si M. C... se prévaut de sa présence en France depuis 2012, de son état de santé, des liens dont il dispose en France et de la mesure de contrôle judiciaire dont il fait l'objet, ces différentes circonstances sont insuffisantes pour établir que le préfet a commis une erreur manifeste d'appréciation en n'accordant pas à l'intéressé, à titre exceptionnel, un délai de départ volontaire supérieur à trente jours.
Sur les conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte présentées par M. C... :
22. Le présent arrêt, de rejet, n'impliquant aucune mesure d'exécution, les conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte présentées par M. C... ne peuvent qu'être rejetées.
Sur les conclusions tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 :
23. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante, le versement d'une somme au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.
24. Il résulte de tout ce qui précède que la requête de M. C... doit être rejetée.
D É C I D E :
Article 1er : La requête de M. C... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... C... et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera transmise pour information au préfet du Val-d'Oise.
Délibéré après l'audience du 7 janvier 2025, à laquelle siégeaient :
M. Etienvre, président de chambre,
M. Ablard, premier conseiller,
Mme Pham, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 21 janvier 2025.
L'assesseur le plus ancien,
T. AblardLe président-rapporteur,
F. Etienvre
La greffière,
S. Diabouga
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition conforme
La greffière,
N° 23VE01827 2