Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Cergy-Pontoise d'annuler la décision du 18 juin 2021 par laquelle le préfet du Val-d'Oise a refusé de renouveler son titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination.
Par un jugement n° 2204140 du 29 novembre 2022, le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a annulé cet arrêté, a enjoint au préfet du Val-d'Oise de renouveler le titre de séjour demandé, et ce dans le délai de deux mois suivant la notification de son jugement, de délivrer, dans le délai de quinze jours suivant cette même notification, une autorisation provisoire de séjour à M. A..., et a enfin condamné le préfet du Val-d'Oise à verser au conseil du requérant la somme de 1 000 euros en application des articles 37 de la loi du 10 juillet 1991 et L. 761-1 du code de justice administrative.
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 23 décembre 2022, le préfet du Val-d'Oise demande à la cour d'annuler ce jugement.
Il soutient que :
- le jugement est irrégulier faute d'avoir visé la convention franco-congolaise relative à la circulation et au séjour des personnes signée à Brazzaville le 31 juillet 1993 et l'accord relatif à la gestion concertée des flux migratoires et au codéveloppement, signé à Brazzaville le 25 octobre 2007 ;
- le tribunal a commis une erreur dans l'appréciation des faits ;
- le tribunal s'est mépris sur la valeur probante des certificats médicaux sur lesquels il s'est fondé pour annulé l'arrêté litigieux ;
- cet arrêté n'est entaché d'aucune erreur dans l'appréciation de la possibilité pour M. A... de bénéficier effectivement d'un traitement approprié à ses pathologies dans son pays d'origine.
Par un mémoire en défense, enregistré le 12 décembre 2024, M. A..., représenté par Me Simond, avocat, conclut au rejet de la requête et demande à la cour de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 600 euros en application des articles 37 de la loi du 10 juillet 1991 et L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que les autres moyens soulevés par le préfet du Val-d'Oise ne sont pas fondés.
M. A... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 17 septembre 2024.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991, modifiée ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
La présidente de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Considérant ce qui suit :
1. M. A..., ressortissant congolais né le 29 juillet 1958 à Sibiti (République du Congo) qui a déclaré être entré en France le 7 octobre 2017, a sollicité le 14 janvier 2021 le renouvellement de son titre de séjour délivré sur le fondement des dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, reprises à compter du 1er mai 2021 à l'article L. 425-9 du même code. Par un arrêté du 18 juin 2021, le préfet du Val-d'Oise a rejeté sa demande, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination. Le préfet relève appel du jugement du 29 novembre 2022 par lequel le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a annulé son arrêté.
2. Aux termes de l'article L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger, résidant habituellement en France, dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et qui, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié, se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " d'une durée d'un an. La condition prévue à l'article L. 412-1 n'est pas opposable. La décision de délivrer cette carte de séjour est prise par l'autorité administrative après avis d'un collège de médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, dans des conditions définies par décret en Conseil d'Etat. Sous réserve de l'accord de l'étranger et dans le respect des règles de déontologie médicale, les médecins de l'office peuvent demander aux professionnels de santé qui en disposent les informations médicales nécessaires à l'accomplissement de cette mission. Les médecins de l'office accomplissent cette mission dans le respect des orientations générales fixées par le ministre chargé de la santé. Si le collège de médecins estime dans son avis que les conditions précitées sont réunies, l'autorité administrative ne peut refuser la délivrance du titre de séjour que par une décision spécialement motivée. (...) ".
3. Sous réserve des cas où la loi attribue la charge de la preuve à l'une des parties, il appartient au juge administratif, au vu des pièces du dossier, et compte tenu, le cas échéant, de l'abstention d'une des parties à produire les éléments qu'elle est seule en mesure d'apporter et qui ne sauraient être réclamés qu'à elle-même, d'apprécier si l'état de santé d'un étranger nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve de l'absence d'un traitement approprié dans le pays de renvoi, sauf circonstance humanitaire exceptionnelle. La partie qui justifie d'un avis du collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII) qui lui est favorable doit être regardée comme apportant des éléments de fait susceptibles de faire présumer l'existence ou l'absence d'un état de santé de nature à justifier la délivrance ou le refus d'un titre de séjour. Dans ce cas, il appartient à l'autre partie, dans le respect des règles relatives au secret médical, de produire tous éléments permettant d'apprécier l'état de santé de l'étranger et, le cas échéant, l'existence ou l'absence d'un traitement approprié dans le pays de renvoi. La conviction du juge, à qui il revient d'apprécier si l'état de santé d'un étranger justifie la délivrance d'un titre de séjour dans les conditions ci-dessus rappelées, se détermine au vu de ces échanges contradictoires.
4. Il ressort des pièces du dossier d'appel et de celui de première instance que M. A... souffre notamment d'hypertension et d'insuffisance cardiaque. Le préfet s'est approprié l'avis émis le 7 juin 2021 par le collège de médecins de l'OFII, aux termes duquel si l'état de santé de l'intéressé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité, toutefois, il pourrait effectivement bénéficier de soins appropriés à ses pathologies en République du Congo. M. A... a contesté cette appréciation devant le tribunal. Pour ce faire, il a produit plusieurs pièces médicales dont un certificat établi le 12 juillet 2021 par le médecin coordonnateur de l'association l'Aurore qui, à cette date, hébergeait M. A..., indiquant que celui-ci " est hébergé sur notre dispositif depuis le 6 janvier 2020 en raison de plusieurs maladies chroniques relevant d'un suivi spécialisé rapproché et coordonné " dont " il ne pourrait pas bénéficier dans son pays d'origine ". Le certificat médical confidentiel établi par une cardiologue à destination de l'OFII, le 15 janvier 2021, mentionne que le suivi et les examens médicaux dont M. A... doit faire l'objet est un suivi de contrôle, de même s'agissant de son suivi hospitalier. Cette même cardiologue a établi des certificats les 25 juin 2021 et 8 mars 2022, soulignant que M. A... présente de nombreux problèmes de santé, notamment cardiovasculaires, nécessitant un suivi régulier spécifique et des consultations par des spécialistes pour l'adaptation de son traitement, ce qui ne peut être effectué dans son pays d'origine. Un troisième médecin a délivré à l'intéressé, le 16 mars 2022, un certificat aux termes duquel " M. A... doit suivre des traitements quotidiens avec une surveillance stricte qui n'est pas possible dans son pays d'origine, le Congo ". Un dernier médecin a établi, le 9 mars 2022, un autre certificat dans lequel il indique que M. A... souffre de pathologies nécessitant une prise en charge et un suivi spécialisé et qu'il est traité et suivi régulièrement en France depuis 2017. Ces pièces, qui font état de la nécessité d'un suivi et de contrôles de l'état de santé de M. A..., ne suffisent pas, au vu leur teneur et de leurs termes, à remettre en cause l'avis du collège des médecins de l'OFII selon lequel ce suivi peut être réalisé en République du Congo. Ainsi, c'est à tort que le tribunal, pour annuler l'arrêté du préfet en date du 18 juin 2021, s'est fondé sur ce que cet arrêté serait entaché d'une erreur dans l'appréciation de la possibilité pour M. A... de bénéficier effectivement d'un traitement approprié à ses pathologies dans son pays d'origine.
5. Il appartient toutefois à la cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. A... devant le tribunal administratif de Cergy-Pontoise.
6. L'avis du collège des médecins de l'OFII daté du 7 juin 2021 a été produit par le préfet en première instance. Il est signé par les trois médecins composant ce collège et porte la mention " Après en avoir délibéré, le collège des médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration émet l'avis suivant ". Cette mention du caractère collégial de l'avis fait foi jusqu'à preuve du contraire, que le requérant n'apporte pas en se bornant à affirmer que la preuve du caractère collégial des délibérations ne serait pas apportée. Cet avis mentionne également le nom du médecin rapporteur, et ceux des membres du collège, le premier ne figurant pas parmi ceux du collège. Comme précédemment, ces mentions font foi jusqu'à preuve du contraire, que le requérant n'apporte pas en se bornant à affirmer que la preuve de ce que le médecin rapporteur n'était pas membre du collège des médecins ne serait pas apportée.
7. Aux termes de l'article L. 611-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa version applicable au litige : " Ne peuvent faire l'objet d'une décision portant obligation de quitter le territoire français : (...) 9° L'étranger résidant habituellement en France si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé du pays de renvoi, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié. "
8. Pour les mêmes motifs que ceux exposés au point 4 du présent arrêt, le moyen tiré de la méconnaissance de ces dispositions doit être écarté.
9. Il résulte de tout ce qui précède que le préfet du Val-d'Oise est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a annulé son arrêté en date du 18 juin 2021.
D E C I D E :
Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Cergy-Pontoise n° 2204140 du 29 novembre 2022 est annulé.
Article 2 : La demande présentée par M. A... devant le tribunal administratif de Cergy-Pontoise est rejetée.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'intérieur et à M. B... A....
Copie en sera adressée au préfet du Val-d'Oise.
Délibéré après l'audience du 17 décembre 2024, à laquelle siégeaient :
Mme Versol, présidente de chambre,
Mme Le Gars, présidente-assesseure,
Mme Hameau, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 16 janvier 2025.
La rapporteure,
M. HameauLa présidente,
F. VersolLa greffière,
A. Gauthier
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition conforme,
La greffière,
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N° 22VE02648