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19/12/2024 | FRANCE | N°24VE00788

France | France, Cour administrative d'appel de VERSAILLES, 5ème chambre, 19 décembre 2024, 24VE00788


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Cergy-Pontoise d'annuler l'arrêté du 10 novembre 2023 par lequel le préfet du Val-d'Oise a rejeté sa demande de titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination, d'enjoindre au préfet du Val-d'Oise de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour dans un délai de quinze jours à compter de la décision à intervenir sous astreinte de 150 eur

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Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Cergy-Pontoise d'annuler l'arrêté du 10 novembre 2023 par lequel le préfet du Val-d'Oise a rejeté sa demande de titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination, d'enjoindre au préfet du Val-d'Oise de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour dans un délai de quinze jours à compter de la décision à intervenir sous astreinte de 150 euros par jour de retard et de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 1 800 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par une ordonnance n° 2316513 du 26 février 2024, la présidente de la 4ème chambre du tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et des pièces, enregistrées respectivement le 25 mars 2024 et 27 novembre 2024, M. A..., représenté par Me Guillier, avocat, demande à la cour :

1°) d'annuler cette ordonnance ;

2°) d'annuler cet arrêté ;

3°) d'enjoindre au préfet du Val-d'Oise de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour dans un délai de quinze jours à compter de la décision à intervenir sous astreinte de 150 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 1 800 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- sa demande de première instance, qui comportait un ensemble de moyens de légalité externe et interne tous assortis de précisions permettant d'en apprécier le bien-fondé, ne pouvait être rejetée en application du 7° de l'article R. 222-1 du code de justice administrative ;

- la décision de refus de titre de séjour est entachée d'incompétence ;

- sa motivation est incohérente ;

- il existe des carences dans l'examen de sa situation personnelle ;

- la décision contestée n'a pas été précédée de la consultation de la commission du titre de séjour ;

- la décision contestée est entachée d'erreurs de fait ;

- elle méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation quant à ses conséquences sur sa situation personnelle ;

- l'obligation de quitter le territoire français est entachée d'incompétence ;

- sa motivation est incohérente ;

- elle est entachée d'erreurs de fait ;

- il entend exciper de l'illégalité de la décision de refus de titre de séjour à l'appui de ses conclusions dirigées contre l'obligation de quitter le territoire français ;

- cette décision méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation quant à ses conséquences sur sa situation personnelle.

La requête a été communiquée au préfet du Val-d'Oise qui n'a pas présenté d'observations.

Des pièces ont été produites pour M. A..., enregistrées le 4 décembre 2024, postérieurement à la clôture d'instruction.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

La présidente de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Camenen,

- et les observations de Me Guillier, pour M. A....

Considérant ce qui suit :

1. M. A..., ressortissant pakistanais né le 7 avril 1984, relève appel de l'ordonnance du 26 février 2024 par laquelle la présidente de la 4ème chambre du tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté, sur le fondement de l'article R. 222-1 7° du code de justice administrative, sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet du Val-d'Oise du 10 novembre 2023 refusant de lui délivrer un titre de séjour, l'obligeant à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixant le pays de destination.

Sur la régularité de l'ordonnance attaquée :

2. Aux termes de l'article R. 222-1 du code de justice administrative : " (...) les présidents de formation de jugement des tribunaux (...) peuvent, par ordonnance : ( ...) 7° Rejeter, après l'expiration du délai de recours ou, lorsqu'un mémoire complémentaire a été annoncé, après la production de ce mémoire, les requêtes ne comportant que des moyens de légalité externe manifestement infondés, des moyens irrecevables, des moyens inopérants ou des moyens qui ne sont assortis que de faits manifestement insusceptibles de venir à leur soutien ou ne sont manifestement pas assortis des précisions permettant d'en apprécier le bien-fondé (...). ".

3. Il ressort des pièces du dossier de première instance qu'à l'appui de ses moyens tirés de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et des dispositions de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, M. A... a notamment précisé qu'il résidait en France depuis plus de 17 ans, qu'il maîtrisait la langue française, qu'il disposait de son propre appartement et qu'il avait travaillé au moins depuis juillet 2019. Si ces moyens n'étaient étayés par aucune pièce justificative, ils ne pouvaient cependant être regardés comme n'étant pas assortis de précisions permettant d'en apprécier le bien-fondé. Il s'ensuit que la présidente de la 4ème chambre du tribunal administratif de Cergy-Pontoise, ne pouvait se fonder sur les dispositions précitées du 7° de l'article R. 222-1 du code de justice administrative pour rejeter la demande de M. A.... Ainsi, l'ordonnance attaquée est entachée d'irrégularité et doit être annulée.

4. Il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par M. A... devant le tribunal administratif de Cergy-Pontoise.

Sur la légalité de l'arrêté attaqué :

5. En premier lieu, il ressort des pièces du dossier que l'arrêté attaqué a été signé par Mme C..., adjointe au directeur des migrations et de l'intégration de la préfecture du Val-d'Oise, qui a reçu délégation pour signer les décisions litigieuses par un arrêté n° 23-042 du préfet du Val-d'Oise du 11 juillet 2023 publié le même jour au recueil des actes de l'Etat dans le Val-d'Oise.

6. En deuxième lieu, alors même que l'arrêté attaqué comporterait des erreurs de fait rendant sa motivation incohérente, cette circonstance est par elle-même sans incidence sur le caractère suffisant de cette motivation. Ainsi, ce moyen doit être écarté.

7. En troisième lieu, l'ordonnance médicale et les quelques preuves de rechargements de pass Navigo produits au titre du second semestre 2013 et du premier semestre 2014 ne permettent pas d'établir que M. A... résidait en France au cours de cette période et depuis plus de dix ans à la date de l'arrêté attaqué. Ainsi, il n'est pas fondé à soutenir que sa demande d'admission exceptionnelle au séjour devait être soumise pour avis à la commission du titre de séjour.

8. En quatrième lieu, la motivation de l'arrêté attaqué révèle un examen de la situation personnelle de M. A....

9. En cinquième lieu, M. A... soutient que l'arrêté attaqué serait entaché d'erreurs de fait aux motifs qu'il a produit auprès de la préfecture du Val-d'Oise un ensemble de documents établissant sa présence en France depuis 2006 et qu'il a informé l'administration avoir retrouvé un emploi dans une autre entreprise après la cessation d'activité de celle qui l'employait jusqu'en octobre 2022. Toutefois, l'arrêté attaqué précise que M. A... n'a pas été mesure de justifier de façon probante sa présence habituelle en France depuis plus de 10 ans, notamment pour le second semestre de l'année 2013 et le premier semestre de l'année 2014 et que la commission du titre de séjour n'avait pas à être saisie. Il n'est pas établi que cette appréciation serait entachée d'erreur de fait. Il en va de même en ce qui concerne l'appréciation de la situation professionnelle de M. A..., l'arrêté attaqué ayant seulement considéré que la demande d'autorisation de travail et les bulletins de salaire produits ne suffisaient pas à établir la réalité et la pérennité de son emploi.

10. En sixième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. ". Aux termes de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger qui n'entre pas dans les catégories prévues aux articles L. 423-1, L. 423-7, L. 423-14, L. 423-15, L. 423-21 et L. 423-22 ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, et qui dispose de liens personnels et familiaux en France tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " d'une durée d'un an, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 412-1. / Les liens mentionnés au premier alinéa sont appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'étranger, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec sa famille restée dans son pays d'origine. / L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République. ".

11. Il ressort des pièces du dossier que M. A..., qui a produit des justificatifs de présence en France entre 2008 et 2022, ne justifie pas avoir noué des liens suffisamment stables et anciens sur le territoire français et ne fait état que d'une activité professionnelle depuis 2019. Ainsi, il n'est pas fondé à soutenir que l'arrêté attaqué porte une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale et qu'il méconnaît les stipulations précitées de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et les dispositions de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. L'arrêté attaqué n'est pas davantage entaché d'une erreur manifeste d'appréciation quant à ses conséquences sur la situation personnelle du requérant telle que précédemment décrite.

12. Enfin, il résulte de ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que l'obligation de quitter le territoire dont il a fait l'objet doit être annulée par voie de conséquence de l'annulation de la décision de refus de titre de séjour.

13. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à demander l'annulation de l'arrêté du préfet du Val-d'Oise du 10 novembre 2023. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction et celles présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent également être rejetées.

DECIDE :

Article 1er : L'ordonnance n° 2316513 de la présidente de la 4ème chambre du tribunal administratif de Cergy-Pontoise du 26 février 2024 est annulée.

Article 2 : La demande présentée par M. A... devant le tribunal administratif de Cergy-Pontoise et le surplus de ses conclusions en appel sont rejetés.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet du Val-d'Oise.

Délibéré après l'audience du 5 décembre 2024, à laquelle siégeaient :

Mme Signerin-Icre, présidente,

M. Camenen, président assesseur,

Mme Florent, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 19 décembre 2024.

Le rapporteur,

G. CAMENEN

La présidente,

C. SIGNERIN-ICRE

La greffière,

V. MALAGOLILa République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme

La greffière,

N° 24VE00788 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de VERSAILLES
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 24VE00788
Date de la décision : 19/12/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03 Étrangers. - Séjour des étrangers. - Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : Mme SIGNERIN-ICRE
Rapporteur ?: M. Gildas CAMENEN
Rapporteur public ?: Mme JANICOT
Avocat(s) : GUILLIER

Origine de la décision
Date de l'import : 22/12/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-12-19;24ve00788 ?
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