Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. A... C... a demandé au tribunal administratif de Cergy-Pontoise d'annuler l'arrêté du 28 octobre 2023 par lequel le préfet de l'Essonne l'a obligé à quitter le territoire français sans délai, a fixé le pays de renvoi et lui a interdit le retour sur le territoire français pour une durée d'un an, d'enjoindre au préfet de lui délivrer sans délai une autorisation provisoire de séjour, sous astreinte de 150 euros par jour de retard et de procéder à un nouvel examen de sa situation et de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Par un jugement n° 2316220 du 8 février 2024, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête, des pièces et un mémoire, enregistrés respectivement les 8 mars 2024, 26 juillet 2024 et 1er décembre 2024, M. C..., représenté par Me Doucerain, avocat, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) d'annuler cet arrêté ;
3°) d'enjoindre au préfet de lui délivrer sans délai une autorisation provisoire de séjour, sous astreinte de 150 euros par jour de retard et de procéder à un nouvel examen de sa situation ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- le jugement attaqué est entaché d'erreur de droit en ce que l'article L. 611-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile n'exige pas la preuve d'une résidence effective des enfants au domicile du parent d'enfants français ;
- il est insuffisamment motivé en ce qui concerne l'interdiction de retour ;
- l'arrêté contesté portant obligation de quitter le territoire français est entaché d'incompétence ;
- il est insuffisamment motivé ;
- l'existence d'une menace à l'ordre public n'est pas caractérisée ;
- l'arrêté attaqué méconnaît l'article L. 611-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et est entaché d'erreur manifeste d'appréciation ;
- il méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- il méconnaît les stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale relatives aux droits de l'enfant ;
- l'interdiction de retour est entachée d'incompétence ;
- elle est insuffisamment motivée ;
- il n'a pas reçu une information complète quant à l'enregistrement aux fins de non-admission ;
- il entend exciper de l'illégalité de la mesure d'éloignement et de la décision refusant de lui accorder un délai de départ volontaire à l'appui de ses conclusions dirigées contre l'interdiction de retour ;
- cette interdiction méconnaît l'article L. 612-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation.
La requête a été communiquée au préfet de l'Essonne qui n'a pas présenté d'observations.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative.
La présidente de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de M. Camenen a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. C..., ressortissant de la République démocratique du Congo né le 22 septembre 1995, relève appel du jugement du 8 février 2024 par lequel le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet de l'Essonne du 28 octobre 2023 portant obligation de quitter le territoire français sans délai, fixation du pays de renvoi et interdiction de retour sur le territoire français pour une durée d'un an.
Sur la régularité du jugement attaqué :
2. En premier lieu, M. C... ne peut utilement soutenir, pour contester la régularité du jugement attaqué, que ce jugement serait entaché d'erreur de droit.
3. En second lieu, le jugement attaqué mentionne notamment dans son point 17 que M. C... a été interpellé le 27 octobre 2023 pour des faits de vol à l'étalage et recel de biens provenant d'un vol et qu'il a fait l'objet de onze signalements, notamment pour des faits de vol en réunion sans violence, faux et usage de faux, conduite sans permis, recel et détention de faux, escroquerie et abus de confiance. Le jugement attaqué est ainsi suffisamment motivé s'agissant du rejet du moyen tiré de l'absence de menace à l'ordre public invoqué à l'appui des conclusions dirigées contre l'interdiction de retour sur le territoire français.
Sur la légalité de l'arrêté contesté :
4. En premier lieu, M. C... reprend en appel sans apporter de précisions nouvelles et pertinentes, ses moyens tirés de l'incompétence du signataire des décisions litigieuses et de leur insuffisante motivation. Il reprend également son moyen tiré du défaut d'information complète quant à son enregistrement aux fins de non-admission dans l'espace Schengen. Il y a lieu d'écarter ces moyens par adoption des motifs retenus par le juge de première instance aux points 2, 3 et 15 du jugement attaqué.
5. En deuxième lieu, il ressort des pièces du dossier, en particulier de l'extrait du fichier automatisé des empreintes digitales produit par le préfet en première instance, que M. C... a fait l'objet entre 2009 et 2023, de onze signalements pour escroquerie et abus de confiance, recels, recels et détention de faux, conduite sans permis et détention de faux, aide à l'entrée, à la circulation et au séjour irréguliers d'un étranger en bande organisée, faux et usage d'un faux document administratif, vol en réunion sans violence et vol à l'étalage et recel de bien provenant d'un vol. En outre, il est connu des services de police ou gendarmerie sous plusieurs identités. Dans ces conditions, les signalements évoqués par l'arrêté contesté suffisent à établir que la présence en France de M. C... représente une menace pour l'ordre public.
6. En troisième lieu, aux termes de l'article L. 611-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dans sa rédaction alors applicable : " Ne peuvent faire l'objet d'une décision portant obligation de quitter le territoire français : (...) 5° L'étranger qui est père ou mère d'un enfant français mineur résidant en France, à condition qu'il établisse contribuer effectivement à l'entretien et à l'éducation de l'enfant dans les conditions prévues par l'article 371-2 du code civil depuis la naissance de celui-ci ou depuis au moins deux ans (...). ".
7. M. C... fait valoir qu'il est père de trois enfants français nés en 2011, 2013 et 2014 et qu'il vit avec son fils, également ressortissant français, né en 2022. S'il justifie avoir versé quelques sommes à la mère de ses trois premiers enfants, ces transferts d'argent, qui ne sont en tout état de cause pas suffisamment réguliers, ne suffisent pas à établir qu'il contribue effectivement à l'entretien et à l'éducation de ses enfants dans les conditions prévues par l'article 371-2 du code civil depuis la naissance de ceux-ci ou depuis au moins deux ans. Cette preuve n'est pas davantage apportée par la courte attestation établie par la mère des enfants le 18 avril 2023 qui est dépourvu d'éléments suffisamment précis et circonstanciés ou par celle du directeur de leur école indiquant qu'il a suivi régulièrement leur scolarité ou qu'il a réglé les frais d'une sortie scolaire ainsi que par l'attestation non signée selon laquelle il est associé au travail médico-psycho-pédagogique réalisé avec l'un de ses enfants. En outre, s'il produit des justificatifs d'achats pour établir qu'il contribue effectivement à l'entretien et l'éducation de son fils né en 2022, il ne produit aucun élément en ce sens pour 2023 et n'établit pas partager une communauté de vie avec la mère de cet enfant par les seules attestation et facture d'électricité versées au dossier. Ainsi, le moyen tiré de la violation des dispositions de l'article L. 611-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit être écarté.
8. En quatrième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. ". Aux termes de l'article 3-1 de la convention relative aux droits de l'enfant : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait des institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale. ".
9. Il ressort des pièces du dossier que M. C... a déclaré lors de son audition par la gendarmerie, sans toutefois en justifier, être entré en France une quinzaine d'années avant l'intervention de l'arrêté contesté, être père de cinq enfants et vivre avec sa compagne et ses deux plus jeunes enfants à B.... Toutefois, dans les circonstances de l'espèce, dès lors notamment qu'il n'est pas établi qu'il contribue effectivement à l'éducation et l'entretien de ses enfants et compte tenu notamment de la menace pour l'ordre public que représente sa présence en France ainsi qu'il a été dit, il n'est pas fondé à soutenir que l'arrêté contesté porte une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale ou qu'il méconnaît l'intérêt supérieur de ses enfants. Les moyens tirés de la violation des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant doivent donc être écartés. En outre, M. C... n'est pas davantage fondé à soutenir que l'obligation de quitter le territoire français serait entachée d'une erreur manifeste d'appréciation quant à ses conséquences sur sa situation personnelle telle que précédemment décrite.
10. En cinquième lieu, il résulte de ce qui précède que M. C... n'est pas fondé à soutenir que l'interdiction de retour sur le territoire français doit être annulée par voie de conséquence de l'annulation de l'obligation de quitter le territoire français. Il en va de même s'agissant de la décision refusant d'accorder un délai de départ volontaire, en l'absence de tout moyen invoqué à son encontre.
11. Enfin, aux termes de l'article L. 612-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Pour fixer la durée des interdictions de retour mentionnées aux articles L. 612-6 (...), l'autorité administrative tient compte de la durée de présence de l'étranger sur le territoire français, de la nature et de l'ancienneté de ses liens avec la France, de la circonstance qu'il a déjà fait l'objet ou non d'une mesure d'éloignement et de la menace pour l'ordre public que représente sa présence sur le territoire français (...). ".
12. Il ressort des pièces du dossier que M. C... ne justifie ni de l'ancienneté de sa présence en France ni de l'existence de liens suffisamment intenses et stables qu'il y entretiendrait. Compte tenu de la menace à l'ordre public que représente sa présence en France, il n'est pas fondé à soutenir qu'en lui faisant interdiction de retour sur le territoire français pour une durée d'un an, le préfet a méconnu les dispositions précitées de l'article L. 612-10 du code de l'entrée en du séjour des étrangers et du droit d'asile. Cette décision n'est pas davantage entachée d'une erreur manifeste d'appréciation quant à ses conséquences sur sa situation personnelle.
13. Il résulte de tout ce qui précède que M. C... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction et celles présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées.
DECIDE :
Article 1er : La requête de M. C... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... C... et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet de l'Essonne.
Délibéré après l'audience du 5 décembre 2024, à laquelle siégeaient :
Mme Signerin-Icre, présidente,
M. Camenen, président assesseur,
Mme Florent, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 19 décembre 2024.
Le rapporteur,
G. CAMENEN
La présidente,
C. SIGNERIN-ICRE
La greffière,
V. MALAGOLILa République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition conforme
La greffière,
N° 24VE00647 2