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17/12/2024 | FRANCE | N°23VE00607

France | France, Cour administrative d'appel de VERSAILLES, 4ème chambre, 17 décembre 2024, 23VE00607


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Cergy-Pontoise d'annuler l'arrêté du 28 février 2022 par lequel le préfet du Val-d'Oise a prononcé son expulsion du territoire français.



Par un jugement n° 2205623 du 14 février 2023, le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande.



Procédure devant la cour :



Par une requête, enregistrée le 23 mars 2023, M. B..., représenté par Me Zekri, d

emande à la cour :



1°) de l'admettre au bénéfice de l'aide juridictionnelle provisoire ;



2°) d'annuler c...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Cergy-Pontoise d'annuler l'arrêté du 28 février 2022 par lequel le préfet du Val-d'Oise a prononcé son expulsion du territoire français.

Par un jugement n° 2205623 du 14 février 2023, le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 23 mars 2023, M. B..., représenté par Me Zekri, demande à la cour :

1°) de l'admettre au bénéfice de l'aide juridictionnelle provisoire ;

2°) d'annuler ce jugement ;

3°) d'annuler cet arrêté ;

4°) d'enjoindre au préfet territorialement compétent de procéder au réexamen de sa demande dans le délai d'un mois à compter de la notification de la décision à intervenir et de lui délivrer, pour la durée de ce réexamen, une autorisation provisoire de séjour assortie d'une autorisation de travail ;

5°) de mettre à la charge de l'État une somme de 2 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

- l'arrêté attaqué est insuffisamment motivé ;

- il est entaché d'un défaut d'examen complet sérieux de sa situation personnelle et familiale ;

- l'article L. 632-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile a été méconnu, dès lors qu'aucun de ses droits ne lui a été notifié ;

- l'arrêté attaqué méconnaît les dispositions de l'article L. 252-1, du 3° de l'article L. 631-2 et du 1° de l'article L. 631-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- il méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- il est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation.

La requête a été communiquée au préfet du Val-d'Oise qui n'a pas produit d'observations.

Par un courrier du 27 novembre 2024, les parties ont été informées, conformément aux dispositions de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, que l'arrêt était susceptible d'être fondé sur le moyen soulevé d'office tiré de ce qu'en application de la jurisprudence Intercopie, les moyens de légalité externe soulevés par M. B... sont irrecevables, celui-ci n'ayant soulevé qu'un moyen de légalité interne devant le tribunal administratif.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Ablard,

- et les conclusions de Mme Villette, rapporteure publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. B..., ressortissant ivoirien né le 11 janvier 1995 à Yopougon, est entré en France en 2008 selon ses déclarations. Par un arrêté du 28 février 2022, le préfet du Val-d'Oise a prononcé son expulsion du territoire français sur le fondement de l'article L. 631-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. M. B... relève appel du jugement du 14 février 2023 par lequel le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté ses conclusions tendant à l'annulation de cet arrêté.

Sur la demande d'admission au bénéfice de l'aide juridictionnelle provisoire :

2. M. B..., déjà représenté par un avocat, ne justifie pas du dépôt d'une demande d'aide juridictionnelle auprès du bureau d'aide juridictionnelle du tribunal judiciaire de Versailles, et n'a pas joint à son appel une telle demande. Dans ces conditions, ses conclusions tendant à être admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle provisoire doivent être rejetées.

Sur la légalité de l'arrêté attaqué :

3. En premier lieu, il ressort des pièces du dossier de première instance que, devant le tribunal administratif, M. B... n'a soulevé qu'un moyen tiré de l'illégalité interne de l'arrêté contesté. Si devant la cour, il soutient en outre que cet arrêté est insuffisamment motivé et que l'article L. 632-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile a été méconnu dès lors qu'aucun de ses droits ne lui a été notifié, ces moyens, fondés sur une cause juridique distincte de celle dont relevait le moyen de première instance, constituent une demande nouvelle irrecevable en appel qui doit, par suite, être rejetée.

4. En deuxième lieu, il ne ressort ni des pièces du dossier ni de l'arrêté contesté que le préfet du Val-d'Oise n'aurait pas procédé à un examen complet et sérieux de la situation personnelle du requérant.

5. En troisième lieu, M. B..., ressortissant ivoirien, ne peut utilement se prévaloir des dispositions de l'article L. 252-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, applicables aux seuls ressortissants de l'Union européenne.

6. En quatrième lieu, aux termes de l'article L. 631-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'autorité administrative peut décider d'expulser un étranger lorsque sa présence en France constitue une menace grave pour l'ordre public, sous réserve des conditions propres aux étrangers mentionnés aux articles L. 631-2 et L. 631-3 ". Aux termes de l'article L. 631-2 de ce code : " Ne peut faire l'objet d'une décision d'expulsion que si elle constitue une nécessité impérieuse pour la sûreté de l'Etat ou la sécurité publique et sous réserve que l'article L. 631-3 n'y fasse pas obstacle : (...) 3° L'étranger qui réside régulièrement en France depuis plus de dix ans, sauf s'il a été pendant toute cette période titulaire d'une carte de séjour temporaire ou pluriannuelle portant la mention " étudiant " ; (...) ". Aux termes de l'article L. 631-3 de ce code : " Ne peut faire l'objet d'une décision d'expulsion qu'en cas de comportements de nature à porter atteinte aux intérêts fondamentaux de l'Etat, ou liés à des activités à caractère terroriste, ou constituant des actes de provocation explicite et délibérée à la discrimination, à la haine ou à la violence contre une personne déterminée ou un groupe de personnes : 1° L'étranger qui justifie par tous moyens résider habituellement en France depuis qu'il a atteint au plus l'âge de treize ans ; (...) ".

7. D'une part, si le requérant soutient qu'il est entré en France en 2008, à l'âge de treize ans, et qu'il réside habituellement et régulièrement depuis lors sur le territoire national, il ne l'établit par aucune pièce. Dans ces conditions, l'intéressé n'est pas fondé à soutenir que les dispositions précitées des articles L. 631-2 et L. 631-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile auraient été méconnues.

8. D'autre part, pour prendre l'arrêté attaqué, le préfet du Val-d'Oise s'est notamment fondé sur la circonstance, non contestée, qu'entre 2013 et 2020 le requérant s'est rendu coupable de neuf délits, notamment de vol avec violence ayant entrainé une incapacité temporaire de travail n'excédant pas huit jours, de vols aggravés, d'usage illicite de stupéfiants et de détention non autorisée de stupéfiants et de violence sur personne dépositaire de l'autorité publique suivie d'incapacité n'excédant pas huit jours. En outre, l'intéressé ne conteste pas être connu des services de police pour des faits commis entre 2013 et 2020, en particulier du 1er janvier 2020 au 12 novembre 2020 pour extorsion en bande organisée et participation à une association de malfaiteurs en vue de la préparation d'un crime et le 26 octobre 2020 pour un vol en bande organisée avec arme. Comme l'ont relevé les premiers juges, eu égard au nombre, à la nature, à la gravité et, pour certains d'entre eux, au caractère récent des agissements de M. B..., c'est sans commettre d'erreur que le préfet du Val-d'Oise a considéré que la présence en France de l'intéressé constitue une menace grave pour l'ordre public. Par suite, le moyen tiré d'une méconnaissance des dispositions précitées de l'article L. 631-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit être écarté.

9. En dernier lieu, M. B... soutient que l'arrêté attaqué méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, aux termes duquel : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".

10. M. B... fait valoir qu'il vit en France depuis 2008, que ses parents et sa fratrie résident également sur le territoire national, qu'il a obtenu un brevet d'études professionnelles, qu'il entretient une relation amoureuse avec une ressortissante française, et qu'il est dépourvu d'attaches dans son pays d'origine. Toutefois, le requérant ne produit aucun élément de nature à établir l'ancienneté et le caractère habituel de sa présence en France. Il ne produit par ailleurs aucun élément concernant la situation administrative des membres de sa famille présents sur le territoire national. En outre, le requérant, sans charge de famille, n'établit pas être dépourvu d'attaches dans son pays d'origine. Par ailleurs, et alors qu'il déclare vivre chez sa mère, le requérant ne produit aucun élément concernant l'ancienneté et la stabilité de sa relation amoureuse. Enfin, et ainsi qu'il a été dit, sa présence en France constitue une menace grave pour l'ordre public. Dans ces conditions, et nonobstant la circonstance que la commission d'expulsion aurait émis un avis défavorable à son expulsion, l'arrêté attaqué ne porte pas une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale. Par suite, le moyen tiré d'une méconnaissance des stipulations précitées doit être écarté ainsi que celui tiré d'une erreur manifeste d'appréciation commise par le préfet du Val-d'Oise.

11. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande. Il y a lieu, par suite, de rejeter ses conclusions, y compris celles présentées au titre des frais liés à l'instance.

D É C I D E :

Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet du Val-d'Oise.

Délibéré après l'audience du 3 décembre 2024, à laquelle siégeaient :

M. Etienvre, président de chambre,

M. Pilven, président-assesseur,

M. Ablard, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe du 17 décembre 2024.

Le rapporteur,

T. Ablard

Le président,

F. Etienvre

La greffière,

S. Diabouga

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme

La greffière,

2

N° 23VE00607


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de VERSAILLES
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 23VE00607
Date de la décision : 17/12/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-02-03 Étrangers. - Expulsion. - Motifs.


Composition du Tribunal
Président : M. ETIENVRE
Rapporteur ?: M. Thierry ABLARD
Rapporteur public ?: Mme VILLETTE
Avocat(s) : BILLEL ZEKRI

Origine de la décision
Date de l'import : 22/12/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-12-17;23ve00607 ?
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