Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Cergy-Pontoise d'annuler l'arrêté du 20 juin 2023 par lequel le préfet du Val-d'Oise a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination.
Par un jugement n° 2309437 du 23 avril 2024, le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 23 mai 2024, M. A..., représenté par Me Enam, avocat, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) d'annuler l'arrêté du 20 juin 2023 du préfet du Val-d'Oise en ce qu'il refuse de lui délivrer un titre de séjour et l'oblige à quitter le territoire français ;
3°) de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai de deux mois ou, à défaut, d'enjoindre au préfet du Val-d'Oise de réexaminer sa situation dans un délai de deux mois et de lui délivrer, sous un mois, une autorisation provisoire de séjour ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- le tribunal administratif a omis de répondre au moyen tiré du défaut de saisine de la commission du titre de séjour ;
- le refus de titre de séjour est entaché d'un vice de procédure, en l'absence de saisine de cette commission ;
- il est entaché d'une erreur de fait et d'une erreur manifeste d'appréciation dès lors qu'il justifiait bien, à la date de cette décision, d'une présence de plus de dix ans sur le territoire français ;
- il est entaché d'une erreur de droit, d'une erreur de fait et d'une erreur manifeste d'appréciation, dès lors que la réalité de la vie commune avec sa compagne est démontrée ;
- l'obligation de quitter le territoire français est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation, dès lors qu'il n'a plus aucune famille dans son pays d'origine.
Par un mémoire en défense enregistré le 12 juin 2024, le préfet du Val d'Oise conclut au rejet de la requête.
Il soutient qu'il maintient ses écritures de première instance.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative.
La présidente de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Bahaj,
- et les observations de Me Enam, représentant M. A....
Considérant ce qui suit :
1. M. A..., ressortissant congolais né le 5 octobre 1968 et entré en France en 2002 selon ses déclarations, a sollicité le 27 septembre 2022, auprès des services du préfet du Val-d'Oise, son admission au séjour au titre de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par un arrêté du 20 juin 2023, cette autorité a refusé de lui délivrer le titre de séjour sollicité et lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours. M. A... relève appel du jugement du 23 avril 2024 par lequel le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.
Sur les conclusions à fin d'annulation :
2. Aux termes des dispositions de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, au regard desquelles le préfet du Val-d'Oise a examiné d'office la demande de titre de séjour de M. A... : " (...) / Lorsqu'elle envisage de refuser la demande d'admission exceptionnelle au séjour formée par un étranger qui justifie par tout moyen résider habituellement en France depuis plus de dix ans, l'autorité administrative est tenue de soumettre cette demande pour avis à la commission du titre de séjour prévue à l'article L. 432-14. (...) ".
3. Pour rejeter la demande de titre de séjour du requérant, le préfet du Val-d'Oise a notamment considéré que les documents produits par l'intéressé n'étaient " pas de nature à justifier de façon probante sa présence habituelle en France depuis 10 ans, notamment pour la période de 2013 à 2015 et l'année 2018 " et a estimé en conséquence que la commission du titre de séjour n'avait pas à être saisie.
4. Toutefois, pour justifier de sa résidence habituelle en France durant les dix années ayant précédé l'édiction de l'arrêté en litige, soit de juin 2013 à juin 2023, M. A... verse au dossier, pour l'année 2013, un compte-rendu d'hospitalisation du 13 au 17 août, un certificat de vaccination du 13 août, des analyses sanguines du 15 août, quatre ordonnances médicales en date des 16 août, 30 septembre et 9 décembre, un avis d'impôt daté du 2 septembre ainsi qu'un avis des sommes à payer émis par un centre hospitalier pour des soins en date du 9 décembre. Pour l'année 2014, figurent au dossier des courriers de l'assurance maladie en date des 27 janvier et 10 février, des résultats de laboratoire du 2 juillet 2015 mentionnant des analyses antérieures du 22 février 2014, des résultats d'analyse et le reçu afférent du 3 mars, une ordonnance médicale du 14 mars, des résultats d'analyse du 12 avril, deux convocations à des consultations chirurgicales les 1er septembre et 2 juin, un compte-rendu de radiographies passées le 5 septembre ainsi qu'une attestation de droits à l'assurance maladie valable du 3 octobre au 2 avril 2014. Pour l'année 2015, M. A... verse aux débats une trentaine de pages de documents de nature essentiellement médicale tels que des ordonnances, des convocations à des consultations chirurgicales, des comptes-rendus d'échographie, d'IRM, d'échodoppler et de radiographies, des notes d'honoraires, une feuille de soins, des résultats d'analyses, un bulletin de situation et un compte-rendu attestant d'une hospitalisation, des avis de sommes à payer et une facture de pharmacie, lesquels se rapportent aux mois de janvier, mars, mai, juin, juillet, octobre et décembre. Pour l'année 2016, sont produits des documents de même nature, couvrant l'ensemble de l'année à l'exception des mois d'août et d'octobre. Pour l'année 2017, M. A... produit une quittance de soins du 6 février, une attestation de droits à l'assurance maladie pour la période du 26 février au 25 février 2018, une ordonnance médicale du 16 mars, des résultats d'analyses des 18 et 19 juillet, une convocation à une IRM les 13 et 27 juillet, un reçu d'honoraires du 26 juillet, un courrier de la banque postale du 5 octobre ainsi qu'un compte-rendu d'échographie du 14 décembre. Pour l'année 2018, sont produits de nombreux documents, tels que des relevés bancaires attestant de mouvements réguliers sur le livret A de l'intéressé sur l'ensemble de l'année à l'exception des mois de janvier et décembre, ou encore de nombreuses pièces de nature médicale telles que des ordonnances, résultats d'analyses et compte-rendu ou bulletin d'hospitalisation. Pour l'année 2019, sont produites des factures de gaz et d'électricité concernant un domicile partagé avec la ressortissante française avec laquelle il s'est ultérieurement pacsé. Pour l'année 2020, M. A... produit une facture de résiliation d'électricité, une attestation d'hébergement émanant de sa compagne, des relevés de compte faisant apparaître des mouvements réguliers sur son livret A, divers courriers de la banque postale, une facture de gaz et des courriers de l'institut national du cancer. Pour l'année 2021, M. A... verse de nombreux documents tels que des factures, ordonnances, certificat de vaccination, relevés bancaires, résultats d'analyses et attestation de droits à l'assurance maladie. Pour l'année 2022, figurent au dossier, une attestation de droits à l'assurance maladie, un certificat de vaccination, un courrier de l'institut national du cancer, un certificat de non pacte civil de solidarité, un avis d'impôt, des courriers de la banque postale et de l'assurance maladie, le récépissé d'enregistrement de la déclaration conjointe des partenaires du pacte civil de solidarité en date du 21 juin ainsi qu'une quittance de loyer du domicile commun. Enfin, pour l'année 2023, le requérant produit un calendrier de paiement de la société Engie, de nombreuses quittances de loyer ainsi que l'arrêté attaqué. Dans ces conditions, eu égard au nombre, à la nature et à la valeur probante des documents produits en appel, M. A... doit être regardé comme justifiant de sa résidence habituelle en France depuis plus dix ans à la date de la décision en litige. Il est, par suite, fondé à soutenir qu'en s'abstenant de consulter la commission du titre de séjour préalablement à sa décision, le préfet du Val-d'Oise a entaché le refus de séjour contesté d'un vice de procédure.
5. Il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur les autres moyens de la requête, que M. A... est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 20 juin 2023 du préfet du Val-d'Oise lui refusant la délivrance d'un titre de séjour, ainsi que, par voie de conséquence, de celle lui faisant obligation de quitter le territoire français.
Sur les conclusions à fin d'injonction :
6. Eu égard au motif d'annulation retenu, le présent arrêt implique seulement qu'il soit enjoint au préfet du Val-d'Oise de réexaminer la situation administrative de M. A..., après avoir recueilli l'avis de la commission du titre de séjour. Il y a lieu, par suite, d'enjoindre à cette autorité d'y procéder, dans un délai de trois mois à compter de la notification du présent arrêt.
Sur les frais de l'instance :
7. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros à verser à M. A... en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
DÉCIDE :
Article 1er : Le jugement n° 2309437 du 23 avril 2024 du tribunal administratif de Cergy-Pontoise et l'arrêté du 20 juin 2023 du préfet du Val-d'Oise sont annulés.
Article 2 : Il est enjoint au préfet du Val-d'Oise de procéder, après saisine de la commission du titre de séjour, au réexamen de la demande de M. A..., dans un délai de trois mois à compter de la notification du présent arrêt.
Article 3 : L'Etat versera à M. A... une somme de 1 500 euros en application des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.
Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A..., au préfet du Val-d'Oise et au ministre de l'intérieur.
Délibéré après l'audience du 22 novembre 2024, à laquelle siégeaient :
Mme Signerin-Icre, présidente de chambre,
M. Camenen, président-assesseur,
Mme Bahaj, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 5 décembre 2024.
La rapporteure,
C. BAHAJ
La présidente,
C. SIGNERIN-ICRE
La greffière,
C. RICHARD
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition conforme
La greffière,
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N° 24VE01411