Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme A... B... a demandé au tribunal administratif de Cergy-Pontoise d'annuler l'arrêté du recteur de l'académie de Versailles du 1er septembre 2016 et la décision du directeur des services départementaux de l'éducation nationale des Hauts-de-Seine du 16 mars 2017 prononçant sa radiation des cadres à compter du 1er septembre 2016.
Par un jugement n° 1704134 du 9 juillet 2020, le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a annulé l'arrêté du 1er septembre 2016, a annulé la décision du 16 mars 2017 en tant qu'elle fixe une date d'entrée en vigueur antérieure au 10 mars 2017 et a rejeté le surplus des conclusions de sa demande.
Par un arrêt n° 20VE02339 du 15 décembre 2022, la cour administrative d'appel de Versailles a rejeté l'appel formé par Mme B... contre ce jugement en tant qu'il lui est défavorable.
Par une décision n° 471382 du 16 février 2024, le Conseil d'Etat statuant au contentieux sur le pourvoi formé par Mme B..., a annulé cet arrêt et renvoyé l'affaire à la cour.
Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 9 septembre 2020, sous le numéro 20VE02339, ainsi qu'un mémoire enregistré le 11 juillet 2024, sous le numéro 24VE00432, Mme A... B..., représentée par Me Adeline-Delvolvé, avocat, demande à la cour, dans le dernier état de ces écritures :
1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Cergy-Pontoise en tant qu'il rejette le surplus des conclusions de sa demande ;
2°) d'annuler en totalité la décision du 16 mars 2017 ;
3°) d'enjoindre au recteur de l'académie de Versailles de la réintégrer et de la placer en position régulière, en la plaçant rétroactivement en position d'activité et en lui proposant un nouveau poste d'affectation ;
4°) et de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, ainsi que les entiers dépens de l'instance comprenant une somme de 13 euros au titre du droit de plaidoirie.
Elle soutient que :
- le jugement attaqué doit être annulé dès lors qu'il est entaché d'erreurs de droit, d'erreurs d'appréciation et d'une dénaturation des pièces du dossier ;
- le tribunal administratif a insuffisamment motivé sa décision en ce qu'il a écarté, par des motifs inopérants, le moyen tiré de ce qu'elle pouvait légalement refuser l'affectation qui lui était proposée sans que ce refus conduise à enclencher la procédure afférente à l'abandon de poste ; ce refus était motivé par une raison légitime, son affectation dans le département des Hauts-de-Seine n'étant pas compatible avec sa vie familiale dans le département de la Marne depuis le 1er septembre 2016 ;
- la décision attaquée étant fondée sur l'arrêté du 1er septembre 2016 qui a été annulé par le tribunal administratif, elle devait être annulée par voie de conséquence de cette annulation ;
- ayant formulé une demande de réintégration en temps utile, elle devait être maintenue en disponibilité tant qu'elle n'avait pas refusé successivement trois postes ; ayant refusé un premier poste comme elle en avait le droit, elle devait se voir proposer un nouveau poste conformément aux dispositions de l'article 49 du décret du 16 septembre 1985 et ne pouvait faire l'objet d'une mise en demeure de rejoindre le poste refusé ;
- compte tenu de ce qui précède, c'est à tort que la procédure de l'article 49 de ce décret ne lui a pas été appliquée et qu'elle a été privée des garanties y afférentes, alors qu'elle était en droit de refuser le premier poste proposé et de bénéficier de deux autres propositions de poste ;
- si l'administration devait effectivement la placer dans une position régulière, elle devait lui proposer deux autres postes qui ne devaient pas nécessairement être situés dans le département des Hauts-de-Seine ; elle devait être regardée comme toujours placée en disponibilité dans l'attente de la proposition d'un nouveau poste.
Par un mémoire en défense, enregistré le 14 février 2022, la rectrice de l'académie de Versailles conclut au rejet de la requête.
Elle soutient que les moyens de la requête ne sont pas fondés.
Par ordonnance du 25 septembre 2024, la clôture de l'instruction a été fixée avec effet immédiat en application des articles R. 611-11-1 et R. 613-1 du code de justice administrative.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;
- la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ;
- le décret n°85-986 du 16 septembre 1985 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Aventino,
- les conclusions de M. Frémont, rapporteur public,
- et les observations de Me Adeline-Delvolvé pour Mme B....
Considérant ce qui suit :
1. Mme B..., institutrice affectée dans le département des Hauts-de-Seine, a été placée en disponibilité, sur le fondement du 2° de l'article 47 du décret du 16 septembre 1985 relatif au régime particulier de certaines positions des fonctionnaires de l'Etat, à la mise à disposition, à l'intégration et à la cessation définitive de fonctions, jusqu'au 31 août 2015 puis jusqu'au 31 août 2016, par arrêtés du recteur de l'académie de Versailles des 24 juin 2014 et 1er septembre 2015. Par un arrêté du 1er septembre 2016, ce même recteur a radié Mme B... des cadres à compter du même jour au motif qu'elle n'aurait pas fait connaître, dans les délais impartis, sa décision de renouveler sa mise à disposition ou de réintégrer son corps d'origine. Par décision du 16 mars 2017, le directeur des services départementaux de l'éducation nationale des Hauts-de-Seine a de nouveau radié Mme B... des cadres pour un motif distinct, tiré de ce qu'elle se serait placée en situation d'abandon de poste. Par un jugement du 9 juillet 2020, le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a annulé l'arrêté du 1er septembre 2016 et la décision du 16 mars 2017 en tant qu'elle fixe une date d'entrée en vigueur antérieure au 10 mars 2017. Par une décision n° 471382 du 16 février 2024, le Conseil d'Etat a annulé l'arrêt n° 20VE02339 du 15 décembre 2022 par lequel la Cour a rejeté l'appel formé par Mme B... à l'encontre de ce jugement en tant qu'il n'a que partiellement fait droit à ses conclusions tendant à l'annulation de la décision du 16 mars 2017.
Sur les conclusions tendant à l'annulation de la décision du 16 mars 2017 :
2. Aux termes de l'article 47 du décret du 16 septembre 1985 relatif au régime particulier de certaines positions des fonctionnaires de l'Etat, à la mise à disposition, à l'intégration et à la cessation définitive de fonctions : " La mise en disponibilité est accordée de droit au fonctionnaire, sur sa demande : / (...) / 2° Pour suivre son conjoint ou le partenaire avec lequel il est lié par un pacte civil de solidarité lorsque celui-ci est astreint à établir sa résidence habituelle, à raison de sa profession, en un lieu éloigné du lieu d'exercice des fonctions du fonctionnaire (...) ". Aux termes des quatrième et cinquième alinéas de l'article 49 du même décret, dans sa version applicable au litige : " A l'issue de sa disponibilité, l'une des trois premières vacances dans son grade doit être proposée au fonctionnaire. S'il refuse successivement trois postes qui lui sont proposés, il peut être licencié après avis de la commission administrative paritaire. / A l'issue de la disponibilité prévue aux 1° et 2° de l'article 47 du présent décret, le fonctionnaire est, par dérogation aux dispositions de l'alinéa précédent, obligatoirement réintégré à la première vacance dans son corps d'origine et affecté à un emploi correspondant à son grade. S'il refuse le poste qui lui est assigné, les dispositions du précédent alinéa lui sont appliquées ". Aux termes de l'alinéa suivant du même article : " Le fonctionnaire qui a formulé avant l'expiration de la période de mise en disponibilité une demande de réintégration est maintenu en disponibilité jusqu'à ce qu'un poste lui soit proposé dans les conditions fixées aux deux alinéas précédents ".
3. Il résulte des dispositions citées au point 2, d'une part, que l'agent qui sollicite sa réintégration à l'issue d'une période de mise en disponibilité accordée en application du 2° de l'article 47 du décret du 16 septembre 1985 a droit d'obtenir celle-ci à la première vacance dans son corps d'origine et d'être affecté à un emploi correspondant à son grade. En cas de refus du premier poste assigné, il doit s'en voir proposer deux autres, avant, le cas échéant, d'être licencié, après avis de la commission administrative paritaire, en cas de refus successivement des trois postes proposés et, d'autre part, qu'il est maintenu en disponibilité jusqu'au terme de cette procédure.
4. Il ressort des pièces du dossier que Mme B... a sollicité sa réintégration à l'issue d'une période de mise en disponibilité accordée en application du 2° de l'article 47 du décret du 16 septembre 1985. Le recteur de l'académie de Versailles, à laquelle elle était rattachée, l'a alors affectée à l'école Louis Hachette au Plessis-Robinson par une décision du 7 février 2017. Mme B... a, par un courrier du 17 février 2017, refusé cette affectation. En radiant des cadres de l'éducation nationale pour abandon de poste Mme B..., après mise en demeure de rejoindre cette affectation, sans qu'elle ne dispose du droit de se voir proposer successivement trois postes, le directeur des services départementaux de l'éducation nationale des Hauts-de-Seine a entaché sa décision d'une erreur de droit. En outre, ni les termes de son courrier du 17 février 2017, ni les demandes parallèles et réitérées de mutation dans un autre département, ne permettent de considérer que Mme B... avait rompu tout lien avec son administration et que le recteur de Versailles pouvait dès lors s'affranchir de la mise en œuvre de la procédure décrite au point 2 du présent arrêt. Par suite, et sans qu'il soit besoin de se prononcer sur la régularité du jugement ni de statuer sur les autres moyens de la requête, Mme B... est fondée à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande tendant à l'annulation totale de la décision du 16 mars 2017 par laquelle le directeur des services départementaux de l'éducation nationale des Hauts-de-Seine l'a radiée des cadres pour un motif tiré de ce qu'elle se serait placée en situation d'abandon de poste. Cet arrêté et les articles 2 et 3 du jugement du tribunal administratif de Cergy-Pontoise du 9 juillet 2020 doivent donc être annulés.
Sur les conclusions à fin d'injonction :
5. Aux termes de l'article L. 911-1 du code de justice administrative : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution. ".
6. L'exécution du présent arrêt, qui annule la radiation des cadres de Mme B..., implique nécessairement, compte tenu de son motif, sa réintégration rétroactive et la reconstitution de sa carrière à la date de son éviction. Il est enjoint au recteur d'y procéder, dans un délai de deux mois suivant la notification du présent arrêt.
Sur les frais liés au litige :
7. Il y a lieu dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros incluant les droits de plaidoirie à verser à Mme B... au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
DÉCIDE :
Article 1er : Les articles 2 et 3 du jugement du tribunal administratif de Cergy-Pontoise n° 1704134 du 9 juillet 2020 sont annulés.
Article 2 : La décision du directeur des services départementaux de l'éducation nationale des Hauts-de-Seine du 16 mars 2017 est annulée.
Article 3 : Il est enjoint au recteur de Versailles de réintégrer Mme B... dans les cadres de l'éducation nationale et de reconstituer sa carrière à la date de son éviction, dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt.
Article 4 : L'Etat versera la somme de 2 000 euros à Mme B... en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 5 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.
Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B..., au recteur de l'académie de Versailles et à la ministre de l'éducation nationale.
Délibéré après l'audience du 14 novembre 2024, à laquelle siégeaient :
M. Even, président de chambre,
Mme Mornet, présidente-assesseure,
Mme Aventino, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 28 novembre 2024.
La rapporteure,
B. AventinoLe président,
B. Even
La greffière,
I. Szymanski
La République mande et ordonne à la ministre de l'éducation nationale en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition conforme
La greffière,
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N° 24VE00432