Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme B... A... a demandé au tribunal administratif de Versailles de condamner la commune d'Athis-Mons à lui verser la somme de 109 318, 97 euros HT en réparation des préjudices résultant du harcèlement moral dont elle estime avoir été victime, du refus de la commune de lui accorder la protection fonctionnelle et de l'absence de versement des primes auxquelles elle estime avoir droit, assortie des intérêts de droit à compter de la notification sa demande préalable indemnitaire.
Par un jugement n° 2002587 du 18 juillet 2022, le tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête et un mémoire, enregistrés les 12 septembre 2022 et 27 février 2023, Mme A..., représentée par Me Coll, avocate, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) de condamner la commune d'Athis-Mons à lui verser la somme de 109 318,97 euros HT, assortie des intérêts de droit à compter de la notification de sa demande préalable indemnitaire ;
3°) de mettre à la charge de la commune d'Athis-Mons la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- le jugement du tribunal administratif est entaché d'erreurs de droit et de dénaturation des pièces du dossier ;
- elle a été victime de faits de harcèlement moral se matérialisant par la détérioration de ses conditions de travail, les affirmations calomnieuses sur ses compétences professionnelles et sa personne, les diverses mesures traduisant des excès dans les relations contractuelles portant atteinte à sa personne, tels que l'isolement, les pressions psychologiques diverses, les accès de colère à son égard ainsi que les menaces et l'absence de protection et de diligences suite à des agressions subies dans le cadre de son travail ;
- elle a été placée en congé pour accident de service du fait de l'absence de mesure prise par l'administration face aux agressions dont elle était victime ; compte tenu de la faute de l'administration à l'origine de son arrêt de travail, elle est en droit de solliciter le versement de son régime indemnitaire sans que puisse lui être opposée l'absence de service fait ; en outre, l'absence de motivation du retrait de ses primes alors même que l'absence de service découle d'une faute de l'administration constitue une illégalité fautive tirée de l'absence de motivation en fait et en droit ;
- elle a subi un préjudice du fait du harcèlement moral dont elle a été victime justifiant une indemnisation à hauteur respectivement de 50 000 euros au titre de son préjudice moral et 19 318,97 euros au titre de la perte de son régime indemnitaire ; elle a subi également une perte de chance dans la construction de sa carrière et quant au montant de sa future retraite, ainsi qu'un préjudice lié à l'atteinte à sa réputation professionnelle pouvant être évalués à la somme totale de 40 000 euros.
Par un mémoire en défense, enregistré le 16 novembre 2022, la commune d'Athis-Mons, représentée par Me Peyrical, avocat, conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge de Mme A... la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que la requête est irrecevable dès lors qu'elle ne comporte aucune contestation du jugement attaqué et que les moyens soulevés par la requérante ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;
- la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Florent,
- et les conclusions de Mme Janicot, rapporteure publique.
Considérant ce qui suit :
1. Mme A..., agent de maîtrise titulaire, exerce depuis 2016 les fonctions de responsable du service propreté urbaine de la commune d'Athis-Mons. A la suite de menaces verbales de deux de ses subordonnés, Mme A... a demandé et obtenu de la commune l'octroi de la protection fonctionnelle le 26 mars 2018. Estimant être victime de harcèlement moral de la part de ses deux mêmes subordonnés, Mme A... a également adressé à la commune, le 2 décembre 2019, une demande indemnitaire préalable puis, face au silence de l'administration, a saisi le tribunal administratif de Versailles d'une demande de condamnation de la commune d'Athis-Mons à lui verser la somme de 109 318,97 euros HT en réparation de ses préjudices. Elle relève appel du jugement du 18 juillet 2022 par lequel le tribunal administratif a rejeté sa demande.
2. Aux termes du premier alinéa de l'article 6 quinquies de la loi du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires : " Aucun fonctionnaire ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel. ". Il appartient à un agent public qui soutient avoir été victime d'agissements constitutifs de harcèlement moral, de soumettre au juge des éléments de fait susceptibles de faire présumer l'existence d'un tel harcèlement. Il incombe ensuite à l'administration de produire, en sens contraire, une argumentation de nature à démontrer que les agissements en cause sont justifiés par des considérations étrangères à tout harcèlement. La conviction du juge, à qui il revient d'apprécier si les agissements de harcèlement sont ou non établis, se détermine au vu de ces échanges contradictoires, qu'il peut compléter, en cas de doute, en ordonnant toute mesure d'instruction utile. Par ailleurs pour apprécier si des agissements dont il est allégué qu'ils sont constitutifs d'un harcèlement moral revêtent un tel caractère, le juge administratif doit tenir compte des comportements respectifs de l'agent auquel il est reproché d'avoir exercé de tels agissements et de l'agent qui estime avoir été victime d'un harcèlement moral. En revanche, la nature même des agissements en cause exclut, lorsque l'existence d'un harcèlement moral est établie, qu'il puisse être tenu compte du comportement de l'agent qui en a été victime pour atténuer les conséquences dommageables qui en ont résulté pour lui. Le préjudice résultant de ces agissements pour l'agent victime doit alors être intégralement réparé.
3. Mme A... invoque une série de faits qu'elle estime constitutifs de harcèlement moral de la part de deux de ses subordonnés, parmi lesquels un défaut répété d'obéissance, une attitude générale d'hostilité, des propos calomnieux ainsi que des menaces. Elle fait valoir, par ailleurs, que, malgré ses nombreuses alertes, la commune d'Athis-Mons n'a pas mis en œuvre les diligences nécessaires pour la protéger.
4. En premier lieu, Mme A... fait état du manque de sérieux et de l'insubordination hiérarchique de deux agents du service propreté, se traduisant par des refus d'exécuter certaines tâches, de se justifier sur leurs horaires ainsi que, plus globalement, une absence de respect des horaires de travail dans le service, un refus de se rendre à leur entretien d'évaluation annuel et un usage non professionnel du véhicule de service. Toutefois, ces comportements, s'ils sont répréhensibles et de nature à engendrer des difficultés de management pour Mme A..., ne sont pas constitutifs d'agissements de harcèlement moral. Il résulte, par ailleurs, de l'instruction que Mme A... a été systématiquement appuyée par sa hiérarchie qui a notamment mis les intéressés en demeure de se présenter à leur entretien professionnel sous peine de sanctions disciplinaires, les a reçus en entretien et les a rappelés à l'ordre par un courrier écrit lorsque Mme A... a signalé un usage non professionnel du véhicule de service. Enfin, si la requérante fait valoir qu'elle a également dénoncé un état d'imprégnation alcoolique au travail de l'un des agents concernés le 13 mars 2018, cette situation, pour difficile qu'elle soit à gérer pour un responsable de service, n'est pas constitutive d'un agissement de harcèlement à son encontre. Là encore, la commune par ailleurs a immédiatement réagi en soumettant le conducteur du camion à un test d'alcoolémie.
5. En deuxième lieu, Mme A... fait état d'un comportement irrespectueux, de propos calomnieux et de menaces proférées à son encontre les 12 décembre 2017 et 15 mars 2018. Ces menaces verbales, pour regrettables qu'elles soient, n'ont toutefois été proférées qu'à deux reprises, dans un contexte de vive tension entre la requérante et ces deux membres de l'équipe et alors que la direction des ressources humaines menait à cette époque une enquête administrative visant à démêler les accusations de chacune des parties, les agents faisant notamment grief à Mme A... de pratiquer une inégalité de traitement en faveur de son fils, recruté depuis novembre 2016 au sein du service. Si, contrairement à ce que soutient la commune d'Athis-Mons, il ne résulte pas de l'instruction, au regard notamment des attestations produites, que Mme A... aurait fait preuve de partialité et davantage ménagé son fils que les autres membres de l'équipe et s'il est en revanche établi que l'un des agents qu'encadrait la requérante présentait un comportement anormal et avait déjà posé des difficulté à ses supérieurs en raison de son insubordination et de propos menaçants, force est de constater que la hiérarchie de Mme A... a, à l'époque des faits, soutenu la requérante. Ainsi, la directrice générale des services a, dès le 12 décembre 2017, demandé la tenue d'un entretien disciplinaire en raison des propos tenus à l'encontre de Mme A.... Il est constant par ailleurs que le maire de la commune a octroyé à la requérante la protection fonctionnelle en raison de ces menaces à la suite de la demande formulée par l'intéressée. Dans ces conditions, ces menaces et propos calomnieux, tenus sur un court laps de temps, dans un contexte de relations dégradées, ne sont pas suffisants pour caractériser des agissements répétés de harcèlement moral. Il s'ensuit que les conclusions indemnitaires présentées par Mme A... en raison de faits de harcèlement moral doivent être rejetées.
6. Enfin, il résulte de ce qui a été énoncé au point précédent que le placement en congé de maladie de Mme A... pour accident de service à la suite des menaces proférées le 15 mars 2018 ne résulte pas d'un manque de diligence de la commune d'Athis-Mons pour protéger l'agent des difficultés qu'elle pouvait rencontrer avec certains membres de son équipe. Par suite, Mme A... n'est pas fondée à solliciter le versement d'une indemnité correspondant au régime indemnitaire dont elle a été privée au motif que son placement en congé de maladie serait imputable à un comportement fautif de l'administration. Par ailleurs, le régime indemnitaire de l'intéressée n'ayant fait l'objet d'aucune décision de retrait mais ayant été uniquement suspendu durant ses congés de maladie du fait de l'absence de service fait, la requérante n'est pas fondée à soutenir qu'une telle décision de retrait, inexistante, serait de nature à engager la responsabilité de la commune.
7. Il résulte de tout ce qui précède que, sans qu'il soit besoin d'examiner la fin de non-recevoir opposée en défense, Mme A... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande. Par conséquent, ses conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées. Par ailleurs, il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de Mme A... la somme que sollicite la commune d'Athis-Mons sur le fondement de ces mêmes dispositions.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de Mme A... est rejetée.
Article 2 : Les conclusions de la commune d'Athis-Mons présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... A... et à la commune de d'Athis-Mons.
Délibéré après l'audience du 7 novembre 2024, à laquelle siégeaient :
Mme Signerin-Icre, présidente de chambre,
M. Camenen, président assesseur,
Mme Florent, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 22 novembre 2024.
La rapporteure,
J. FLORENT
La présidente,
C. SIGNERIN-ICRE
La greffière,
C. RICHARD
La République mande et ordonne au préfet de l'Essonne en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition conforme
La greffière,
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N° 22VE02226