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19/11/2024 | FRANCE | N°23VE00620

France | France, Cour administrative d'appel de VERSAILLES, 2ème chambre, 19 novembre 2024, 23VE00620


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



La société civile immobilière (SCI) Moulin des fourneaux a demandé au tribunal administratif de Versailles d'annuler l'arrêté du 15 juin 2020 par lequel le maire de la commune de Beynes s'est opposé à la déclaration préalable déposée pour la réalisation d'un auvent, la décision implicite de rejet née le 18 octobre 2020 et la décision expresse du 2 novembre 2020 par lesquelles son recours gracieux a été rejeté, d'enjoindre au maire de la commune de Beynes de prendre u

n arrêté portant non opposition à la déclaration, dans un délai d'un mois à compter de la not...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société civile immobilière (SCI) Moulin des fourneaux a demandé au tribunal administratif de Versailles d'annuler l'arrêté du 15 juin 2020 par lequel le maire de la commune de Beynes s'est opposé à la déclaration préalable déposée pour la réalisation d'un auvent, la décision implicite de rejet née le 18 octobre 2020 et la décision expresse du 2 novembre 2020 par lesquelles son recours gracieux a été rejeté, d'enjoindre au maire de la commune de Beynes de prendre un arrêté portant non opposition à la déclaration, dans un délai d'un mois à compter de la notification du jugement à intervenir, sous astreinte de 200 euros par jour de retard, ou à titre subsidiaire de procéder à une nouvelle instruction de sa déclaration préalable dans les mêmes conditions de délais et d'astreinte, et enfin de mettre à la charge de la commune de Beynes la somme de 3 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un jugement n° 2008550 du 24 janvier 2023, le tribunal administratif de Versailles a rejeté cette demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 24 mars 2023, la SCI Moulin des fourneaux, représentée par Me Raison, avocat, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler l'arrêté du 15 juin 2020, la décision implicite du 18 octobre 2020, ainsi que la décision expresse du 2 novembre 2020 rejetant son recours gracieux ;

3°) d'enjoindre au maire de la commune de Beynes de prendre une décision de non-opposition sur sa déclaration préalable, dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 200 euros par jour de retard ;

4°) et de mettre à la charge de la commune de Beynes une somme de 3 000 euros à lui verser sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- les décisions en litige sont entachées d'une erreur de droit, dès lors que la construction projetée n'est pas interdite en zone verte du plan de prévention des risques d'inondation (PPRI) ; le PPRI vise les espaces verts, sans distinguer s'il s'agit d'espaces privés ou publics ; l'article 3 du PPRI autorise expressément les constructions, installations et voiries nécessaires aux équipements que sont les espaces verts ; la construction projetée, qui consiste en un simple local technique permettant de stocker une tondeuse autoportée et à l'outillage nécessaire à l'entretien des espaces verts, sera implantée sur un terrain d'assiette référencé 45 NGF ;

- les décisions en litige sont entachées d'une erreur de fait dès lors que la construction projetée doit bien être construite sur la base d'un mur de clôture existant.

Par un mémoire en défense, enregistré le 27 mars 2024, la commune de Beynes, représentée par Me Raison, avocat, conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge de la SCI Moulin des fourneaux la somme de 4 000 euros, en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- les moyens de la requête ne sont pas fondés ;

- par substitution, l'arrêté peut se fonder sur le motif tiré de la violation de l'article N2 du règlement du plan local d'urbanisme de la commune de Beynes, qui n'autorise que les constructions et aménagements en relation avec la protection ou la mise en valeur de la vallée de la Mauldre, ou avec la vocation agricole de la vallée.

Par une ordonnance du 14 août 2024, la clôture de l'instruction a été fixée au 1er octobre 2024, en application de l'article R. 613-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Cozic,

- les conclusions de M. Frémont, rapporteur public,

- et les observations de Me Metz, représentant la commune de Beynes.

Considérant ce qui suit :

1. La SCI Moulin des fourneaux a déposé en mairie de Beynes, le 12 mai 2020, une déclaration préalable pour la réalisation de travaux sur une construction concernant un " haut vent sur base de chenil et d'un mur de clôture existant ". Par un arrêté du 15 juin 2020, notifié le 23 juin 2020, le maire de la commune de Beynes s'est opposé à cette déclaration préalable. La SCI Moulin des fourneaux a formé un recours gracieux contre cet arrêté, par une lettre reçue par la commune de Beynes le 17 août 2020, qui a été rejeté d'abord implicitement, puis par une décision expresse du 2 novembre 2020. La SCI Moulin des fourneaux demande à la cour d'annuler le jugement n° 2008550 du 24 janvier 2023 par lequel le tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 15 juin 2020 et des décisions de rejet de son recours gracieux.

Sur la légalité de l'arrêté du 15 juin 2020 et des décisions de rejet du recours gracieux :

2. L'arrêté en litige fait opposition à la déclaration préalable présentée par la SCI Moulin des fourneaux au motif, en particulier, que cette demande a été présentée en vue de régulariser la construction non d'un " auvent " mais d'un " petit bâtiment ouvert, composé de trois murs en parpaings, d'une charpente et d'une couverture en tuiles, de 2,5 mètres de hauteur ", situé au droit d'un bâtiment à usage d'habitation. Ce même arrêté dénie certains des éléments de présentation énoncés dans la déclaration préalable, rédigés par le pétitionnaire en vue de caractériser le projet en cause. L'arrêté souligne en particulier que le projet n'est pas édifié sur la base d'un chenil mais " à côté " de l'emplacement d'un ancien chenil, qui n'était en tout état de cause qu'une plateforme entourée d'un grillage et ne pourrait donc être qualifié de " bâtiment ou de surface de plancher existant dont la reconstruction ou l'aménagement serait autorisé par le règlement du PPRI ". Il précise également que le " mur de clôture existant ", mentionné dans le dossier de déclaration préalable, est en réalité inexistant, dès lors qu'il n'apparaît ni sur des photographies anciennes ni sur des photographies récentes. Enfin, l'arrêté en litige relève que le projet en cause est édifié en zone verte du plan de prévention des risques d'inondation (PPRI) de la vallée de la Mauldre et du Lieutel et qu'il ne peut être autorisé, dès lors qu'il ne respecte pas les prescriptions édictées par les articles 2 et 3 du chapitre 3 du titre II dudit plan de prévention.

3. En premier lieu, le règlement du plan de prévention des risques d'inondations de la vallée de la Mauldre et du Lieutel, adopté en septembre 2006, définit un ensemble de prescriptions applicables dans différentes zones de la vallée, notamment en " zone verte ", qui couvre les secteurs inondables bâtis en dehors des centres urbains, non bâtis ou au bâti dispersé, permettant l'écoulement et l'expansion des crues, et qui concerne principalement les zones agricoles, les espaces verts, le terrains perméables, les zones humides. Le chapitre 3 du titre II du règlement du plan, applicable à cette zone verte, prévoit que, " à part quelques cas particuliers, les nouveaux aménagements y sont interdits ". L'article 1er de ce chapitre prévoit que tout ce qui n'est pas prévu aux articles 2 et 3 dudit chapitre sont interdits. L'article 2 de ce même chapitre prévoit ce qui est autorisé, en particulier l'entretien des voiries, réseaux, installations et constructions existants, les travaux de mise en conformité des établissements recevant du public, ainsi que les équipements publics et/ou d'intérêt général dont la présence en zone inondable est indispensable pour des raisons techniques ou fonctionnelles. L'article 3 de ce même chapitre autorise, sous condition, certains aménagements, en particulier " (...) - les espaces verts, les aires de jeux, ainsi que les constructions, installations et voiries nécessaires à ces équipements (sanitaires, locaux techniques...) à l'exclusion des hôtels et restaurants (...) ".

4. La société requérante soutient que l'arrêté du 15 juin 2020 est entaché d'une erreur de droit, dès lors que la construction pour laquelle elle avait présenté une déclaration préalable n'est pas interdite par le plan de prévention des risques d'inondation de la vallée de la Mauldre et du Lieutel. Si elle ne conteste plus en appel la circonstance que la construction en litige se situe bien en " zone verte " du plan de prévention des risques d'inondation, elle fait valoir en revanche que la construction projetée constitue une installation nécessaire à un " espace vert ", au sens des dispositions de l'article 3 citées au point précédent, puisque ladite construction a vocation à abriter du matériel d'entretien du jardin entourant la propriété de la société.

5. Si l'article 3 du chapitre 3 du titre II du plan de prévention des risques d'inondation de la vallée de la Mauldre et du Lieutel emploie le terme générique d'" espaces vert " pour l'un des cas particuliers d'aménagements qu'il autorise sous conditions, ce même article associe ces " espaces verts " aux " aires de jeux ", les qualifie tous deux d'" équipements ", auxquels sont corrélés d'autres constructions et installations, tels des " sanitaires ", " locaux techniques " ou " voiries ", tout en excluant de cette réglementation particulière les espaces verts et aires de jeux des hôtels et des restaurants. En outre, ce même article 3 prévoit par ailleurs d'autres cas particuliers d'aménagements et travaux autorisés sous conditions, notamment " les abris de jardin, même ceux édifiés au niveau du sol, à condition qu'ils aient une surface hors œuvre brute inférieure ou égale à 8 m2 ". La lecture croisée de l'ensemble des dispositions de l'article 3 révèle que les auteurs du plan de prévention des risques d'inondation ont entendu exclure de la notion d' " espaces verts ", employée dans cet article, les jardins privatifs, pour lesquels des dispositions spécifiques sont par ailleurs expressément prévues, ainsi qu'il vient d'être relevé. Il en résulte que la société requérante n'est pas fondée à soutenir que les travaux qu'elle a déclarés relèveraient des constructions et installations nécessaires à des " espaces verts " dont la réalisation est autorisée sous condition, ainsi que le prévoient les dispositions l'article 3 du chapitre 3 du titre II du plan de prévention des risques d'inondation de la vallée de la Mauldre et du Lieutel. Par suite, le moyen que la société invoque, tiré de l'erreur de droit, doit être écarté.

6. En second lieu, la société requérante souligne qu'il existait bien un mur de clôture à l'endroit de la construction projetée, ainsi qu'elle l'avait mentionné dans son dossier de déclaration préalable. Elle fait en particulier valoir que ce mur figure dans le dossier annexé à l'arrêté de non opposition à déclaration préalable du 14 avril 2009 pour la restauration de la toiture d'un des bâtiments de la propriété. Il ne ressort toutefois pas des pièces du dossier que ce mur était encore existant à la date du dépôt de dossier de déclaration préalable. Au contraire, la photographie versée au dossier par la commune de Beynes, datant de 2017, montre qu'il n'existe pas de mur au droit ou dans le prolongement du bâtiment principal à fin d'habitation, alors que des travaux de construction sont en cours. De même, les autres photographies plus récentes, versées au dossier en appel, dont l'authenticité et l'exactitude ne sont pas contestées par la SCI Moulin des fourneaux, donnent à voir une petite construction constituée de trois murs en parpaings, de couleur et d'apparence homogènes, dont les deux murs latéraux comportent des ouvertures similaires, et qui sont recouverts d'une charpente et d'un toit de tuiles. Aucun des documents versés au dossier ne permet de constater la présence d'un mur de clôture préexistant. Dès lors, les décisions en litige ne sont pas entachées d'une erreur de fait sur ce point.

7. Il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'examiner la demande de substitution de motifs présentée par la commune de Beynes, que la SCI Moulin des fourneaux n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 15 juin 2020 par lequel le maire de la commune de Beynes s'est opposé à sa déclaration préalable, et des décisions implicite et expresse de rejet de son recours gracieux contre ledit arrêté.

Sur les conclusions à fin d'injonction :

8. Le présent arrêt rejette les conclusions en annulation présentées par l'appelant. Il n'implique donc aucune mesure d'exécution au sens des articles L. 911-1 et suivants du code de justice administrative. Par suite, les conclusions en injonction présentées par la SCI Moulin des fourneaux ne peuvent qu'être rejetées.

Sur les frais liés au litige :

9. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que la commune de Beynes qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, soit condamnée à verser une quelconque somme à la SCI Moulin des fourneaux. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu, en revanche, de mettre à la charge la SCI Moulin des fourneaux la somme de 2 000 euros à verser à la commune de Beynes à ce titre.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de la SCI Moulin des fourneaux est rejetée.

Article 2 : La SCI Moulin des fourneaux versera à la commune de Beynes la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la SCI Moulin des fourneaux et à la commune de Beynes.

Délibéré après l'audience du 24 octobre 2024 à laquelle siégeaient :

M. Even, président,

Mme Aventino, première conseillère,

M. Cozic, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 19 novembre 2024.

Le rapporteur,

H. CozicLe président,

B. Even

La greffière,

I. Szymanski

La République mande et ordonne au préfet des Yvelines en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme

La greffière,

2

N° 23VE00620


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de VERSAILLES
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 23VE00620
Date de la décision : 19/11/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

68-04 Urbanisme et aménagement du territoire. - Autorisations d`utilisation des sols diverses.


Composition du Tribunal
Président : M. EVEN
Rapporteur ?: M. Hervé COZIC
Rapporteur public ?: M. FREMONT
Avocat(s) : CABINET ADAES AVOCATS

Origine de la décision
Date de l'import : 08/12/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-11-19;23ve00620 ?
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