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14/11/2024 | FRANCE | N°23VE02802

France | France, Cour administrative d'appel de VERSAILLES, 2ème chambre, 14 novembre 2024, 23VE02802


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Cergy-Pontoise d'annuler l'arrêté du 3 octobre 2022 par lequel le préfet du Val-d'Oise a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination.



Par une ordonnance n° 2307734 du 21 novembre 2023, la présidente de la 9ème chambre du tribunal administratif de Cergy-Pontoise a prononcé un non-lie

u à statuer sur les conclusions à fin d'annulation, d'injonction et d'astreinte et a rejeté les conc...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Cergy-Pontoise d'annuler l'arrêté du 3 octobre 2022 par lequel le préfet du Val-d'Oise a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination.

Par une ordonnance n° 2307734 du 21 novembre 2023, la présidente de la 9ème chambre du tribunal administratif de Cergy-Pontoise a prononcé un non-lieu à statuer sur les conclusions à fin d'annulation, d'injonction et d'astreinte et a rejeté les conclusions présentées par M. A... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 21 décembre 2023, M. A..., représenté par Me Cardoso, avocate, demande à la cour :

1°) de l'admettre au bénéfice de l'aide juridictionnelle provisoire ;

2°) d'annuler cette ordonnance ;

3°) d'annuler l'arrêté du préfet du Val-d'Oise du 3 octobre 2022 ;

4°) d'enjoindre au préfet territorialement compétent de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale ", dans le délai d'un mois à compter de la notification de la décision à intervenir ou, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation, dans le même délai et, en tout état de cause, de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour, dans le délai de sept jours à compter de la notification de la décision à intervenir ;

5°) et de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros au titre des frais exposés en première instance, à verser à son conseil sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991, plus celle de 2 000 euros au titre des frais exposés en appel.

Il soutient que :

- la première juge a prononcé à tort le non-lieu à statuer sur ses conclusions à fin d'annulation, d'injonction et d'astreinte ;

- elle a méconnu le caractère contradictoire de l'instruction dès lors qu'elle ne l'a pas informé de son intention de prononcer ce non-lieu à statuer et ne l'a ainsi pas mis à même de présenter ses observations avant de prendre l'ordonnance attaquée ;

- l'arrêté contesté est entaché d'incompétence ;

- la décision portant refus de titre de séjour est entachée d'une erreur de fait ayant eu une incidence sur sa légalité, dès lors qu'elle ne mentionne pas la naissance de son enfant français, qui aurait dû entrainer la délivrance d'un titre de séjour de plein droit ;

- elle méconnaît les dispositions de l'article L. 423-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- elle méconnaît les dispositions de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation dans l'application des dispositions de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la décision portant obligation de quitter le territoire français est illégale par voie de conséquence de l'illégalité de la décision portant refus de titre de séjour ;

- elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la décision portant fixation du pays de destination est illégale par voie de conséquence de l'illégalité de la décision portant refus de titre de séjour ;

- elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- elle méconnaît les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

Un mémoire en défense présenté par le préfet du Val-d'Oise a été enregistré le 18 octobre 2024 et n'a pas été communiqué.

Par une décision de la présidente de la section du bureau d'aide juridictionnelle de Versailles du 19 mars 2024, confirmée par ordonnance de la présidente de la cour administrative d'appel de Versailles n° 24VE00939 du 12 août 2024, la demande d'aide juridictionnelle de M. A... a été rejetée.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. Even a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. A... a demandé au tribunal administratif de Cergy-Pontoise d'annuler l'arrêté du 3 octobre 2022 par lequel le préfet du Val-d'Oise a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination, d'enjoindre au préfet du Val-d'Oise de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " ou, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation, dans le délai d'un mois à compter de la notification de la décision, sous astreinte de 50 euros par jour de retard, et de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros à verser à son conseil sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991. Il fait appel de l'ordonnance n° 2307734 du 21 novembre 2023 par laquelle la présidente de la 9ème chambre du tribunal administratif de Cergy-Pontoise a prononcé le non-lieu à statuer sur ses conclusions à fin d'annulation et d'injonction sous astreinte et a rejeté ses conclusions tendant à l'application des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Sur la régularité de l'ordonnance attaquée :

2. Un recours pour excès de pouvoir dirigé contre un acte administratif n'a d'autre objet que d'en faire prononcer l'annulation avec effet rétroactif. Si, avant que le juge n'ait statué, l'acte attaqué est rapporté par l'autorité compétente et si le retrait ainsi opéré acquiert un caractère définitif faute d'être critiqué dans le délai du recours contentieux, il emporte alors disparition rétroactive de l'ordonnancement juridique de l'acte contesté, ce qui conduit à ce qu'il n'y ait plus lieu pour le juge de la légalité de statuer sur le mérite du recours dont il était saisi. Il en va ainsi, quand bien même l'acte rapporté aurait reçu exécution. Dans le cas où l'administration se borne à procéder à l'abrogation de l'acte attaqué, cette circonstance prive d'objet le recours formé à son encontre à la double condition que cet acte n'ait reçu aucune exécution pendant la période où il était en vigueur et que la décision procédant à son abrogation soit devenue définitive.

3. Il ressort des pièces du dossier que, par un arrêté du 26 septembre 2023, le préfet du Val-d'Oise a abrogé l'arrêté du 3 octobre 2022 par lequel il avait refusé de délivrer à M. A... un titre de séjour, lui avait fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et avait fixé le pays de destination. Toutefois, d'une part, la décision portant refus de séjour qu'il contenait a produit des effets pendant la période où elle était en vigueur. D'autre part, et en tout état de cause, l'arrêté procédant à cette abrogation n'était pas devenu définitif à la date de l'ordonnance attaquée du 21 novembre 2023. Dans ces conditions, la première juge n'a pu, sans entacher cette ordonnance d'irrégularité, constater que les conclusions présentées par M. A... à fin d'annulation de l'arrêté du 3 octobre 2022 et d'injonction sous astreinte étaient devenues sans objet et prononcer le non-lieu à statuer sur ces conclusions. Par suite, et sans qu'il soit besoin d'examiner l'autre moyen relatif à la régularité de l'ordonnance attaquée, cette dernière doit être annulée.

4. Il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par M. A... devant le tribunal administratif de Cergy-Pontoise.

Sur la demande présentée par M. A... devant le tribunal administratif de Cergy-Pontoise :

En ce qui concerne les conclusions à fin de non-lieu à statuer présentées par le préfet du Val-d'Oise :

5. Ainsi qu'il a été dit au point 3 du présent arrêt, la circonstance que le préfet du Val-d'Oise ait procédé à l'abrogation, par un arrêt du 26 septembre 2023, de l'arrêté du 3 octobre 2022 litigieux, ne saurait avoir pour effet de priver d'objet la demande présentée par M. A... d'annulation de la décision portant refus de séjour contenue dans cet arrêté, dès lors que cette décision a produit des effets pendant la période où elle était en vigueur.

6. En revanche, à la date du présent arrêt, l'arrêté du 26 septembre 2023 portant abrogation de l'arrêté du 3 octobre 2022 litigieux est devenu définitif. Dans ces conditions, et dès lors qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que les décisions portant obligation de quitter le territoire français et fixation du pays de destination contenues dans l'arrêté du 3 octobre 2022 aient reçu exécution, les conclusions présentées par M. A... dirigées contre ces décisions sont devenues sans objet. Il n'y a, par suite, pas lieu d'y statuer.

En ce qui concerne la légalité de la décision portant refus de séjour contenue dans l'arrêté du préfet du Val-d'Oise du 3 octobre 2022 :

7. L'arrêté contesté du préfet du Val-d'Oise du 3 octobre 2022 a été signé par Mme D... C..., cheffe de section. Il ressort toutefois des pièces du dossier, et notamment des termes de l'arrêté du 26 septembre 2023 portant abrogation de l'arrêté du 3 octobre 2022, produit par le préfet du Val-d'Oise en première absence, qu'elle n'avait pas, à la date de la décision contestée, reçu délégation pour ce faire. Par suite, M. A... est fondé à soutenir que la décision portant refus de séjour contenue dans l'arrêté du préfet du Val-d'Oise du 3 octobre 2022 est entachée d'incompétence.

8. Il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur les autres moyens présentés à l'appui des conclusions tendant à l'annulation de la décision portant refus de titre de séjour, que M. A... est fondé à demander l'annulation de cette décision.

Sur les conclusions à fin d'injonction :

9. L'exécution du présent arrêt implique seulement que la demande de titre de séjour de M. A... soit réexaminée. Il y a lieu, par suite, d'enjoindre au préfet du Val-d'Oise de procéder à ce réexamen dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt et de lui délivrer, dans le délai de sept jours à compter de cette notification, une autorisation provisoire de séjour pendant la durée de ce réexamen.

Sur les frais du litige :

10. Par l'ordonnance attaquée, la présidente de la 9ème chambre du tribunal administratif de Cergy-Pontoise a estimé qu'il n'y avait pas lieu de statuer sur l'ensemble des conclusions à fin d'annulation et d'injonction et a rejeté ses conclusions présentées au titre des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991. Par voie de conséquence de ce qui vient d'être dit, il y a lieu d'annuler également l'ordonnance sur ce point et de mettre à la charge de l'Etat le versement au conseil de M. A..., sous réserve qu'il renonce au bénéfice de l'aide juridictionnelle, de la somme de 1 500 euros en application de ces dispositions, au titre des frais exposés par lui en première instance.

11. M. A... n'ayant pas obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle en appel, il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros à lui verser directement, en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DÉCIDE :

Article 1er : L'ordonnance de la présidente de la 9ème chambre du tribunal administratif de Cergy-Pontoise n° 2307734 du 21 novembre 2023 est annulée.

Article 2 : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions de M. A... tendant à l'annulation des décisions portant obligation de quitter le territoire français et fixation du pays de destination contenues dans l'arrêté du préfet du Val-d'Oise du 3 octobre 2022.

Article 3 : La décision portant refus de titre de séjour contenue dans l'arrêté du préfet du Val-d'Oise du 3 octobre 2022 est annulée.

Article 4 : Il est enjoint au préfet du Val-d'Oise de réexaminer la demande de titre de séjour de M. A..., dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt, et de lui délivrer, dans l'attente, une autorisation provisoire de séjour, dans un délai de sept jours à compter de cette notification.

Article 5 : L'Etat versera la somme de 1 500 euros au conseil de M. A..., sous réserve que celui-ci renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat, au titre des frais exposés en première instance, en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, plus la somme de 1 500 euros à M. A... au titre des frais exposés en appel, en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A..., au ministre de l'intérieur et au préfet du Val-d'Oise.

Délibéré après l'audience du 24 octobre 2024, à laquelle siégeaient :

M. Even, président de chambre,

Mme Aventino, présidente assesseure,

M. Cozic, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 14 novembre 2024.

Le président-rapporteur,

B. Even

L'assesseure la plus ancienne,

B. Aventino

La greffière,

I. Szymanski

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 23VE02802


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de VERSAILLES
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 23VE02802
Date de la décision : 14/11/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. EVEN
Rapporteur ?: M. Bernard EVEN
Rapporteur public ?: M. FREMONT
Avocat(s) : CARDOSO

Origine de la décision
Date de l'import : 21/11/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-11-14;23ve02802 ?
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