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11/10/2024 | FRANCE | N°23VE00064

France | France, Cour administrative d'appel de VERSAILLES, 2ème chambre, 11 octobre 2024, 23VE00064


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



Mme A... B... a demandé au tribunal administratif d'Orléans d'annuler l'arrêté du 20 mai 2022 par lequel le préfet du Loiret l'a obligée à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination, d'enjoindre audit préfet de réexaminer sa situation dans le délai d'un mois et, dans l'attente, de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour.



Par un jugement n° 2201894 du 29 septembre 2022, le tribunal admini

stratif d'Orléans a rejeté la demande.



Procédure devant la cour :



Par une requête ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A... B... a demandé au tribunal administratif d'Orléans d'annuler l'arrêté du 20 mai 2022 par lequel le préfet du Loiret l'a obligée à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination, d'enjoindre audit préfet de réexaminer sa situation dans le délai d'un mois et, dans l'attente, de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour.

Par un jugement n° 2201894 du 29 septembre 2022, le tribunal administratif d'Orléans a rejeté la demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 9 janvier 2023, Mme B..., représentée par Me Petit, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif d'Orléans du 29 septembre 2022 ;

2°) d'annuler l'arrêté du 20 mai 2022 du préfet du Loiret ;

3°) d'enjoindre au préfet du Loiret de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " dans le délai d'un mois, ou à défaut de réexaminer sa situation dans le même délai et de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour ;

4°) de mettre à la charge de l'État le versement de la somme de 1 500 euros à Me Petit en application des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Elle soutient que :

- le jugement attaqué n'est pas suffisamment motivé s'agissant de sa vie privée ;

- l'arrêté préfectoral contesté n'est pas suffisamment motivé ;

- le préfet n'a pas procédé à un examen sérieux de sa situation ;

- l'arrêté contesté porte une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale, en violation des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- il méconnaît les dispositions de l'article L. 511-4 6° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- il est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle ;

- il viole les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

Par un mémoire en défense enregistré le 13 juin 2024, le préfet du Loiret, représenté par Me Termeau, conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par la requérante ne sont pas fondés.

Le bureau d'aide juridictionnelle du tribunal judiciaire de Versailles a accordé l'aide juridictionnelle totale à Mme B... par une décision du 22 novembre 2022.

Vu les autres pièces du dossier.

La clôture de l'instruction a été fixée au 25 juillet 2024.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales,

- le code civil,

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile,

- le code des relations entre le public et l'administration,

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991,

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

La présidente de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Le rapport de Mme Mornet a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. Mme B..., ressortissante congolaise née le 27 mars 1993, déclare être entrée en France en avril 2017. Elle a sollicité son admission au séjour au titre de l'asile, et sa demande a été rejeté par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA) le 17 octobre 2017 ; la Cour nationale du droit d'asile (CNDA) a rejeté son recours contre cette décision le 7 juin 2018. Par un arrêté du 20 mai 2019, le préfet du Loiret a obligé Mme B... à quitter le territoire français, décision qu'elle n'a pas exécutée. Interpellée par les services de police d'Orléans pour défaut de permis de conduire et usage de faux documents, l'intéressée a de nouveau fait l'objet d'un arrêté l'obligeant à quitter le territoire français, pris par le préfet du Loiret le 9 mars 2021 ; elle n'a pas exécuté cette décision, et son recours tendant à son annulation a été rejeté par un jugement du 19 mai 2021 du tribunal administratif d'Orléans, confirmé par une ordonnance de la cour de céans du 20 juin 2023. Par un troisième arrêté du 20 mai 2022, le préfet du Loiret a obligé Mme B... à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination. L'appelante demande à la cour d'annuler le jugement du 29 septembre 2022 par lequel le tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande tendant à l'annulation de ce dernier arrêté.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Aux termes de l'article L. 9 du code de justice administrative : " Les jugements sont motivés ". Contrairement à ce que soutient Mme B..., le premier juge, qui n'était pas tenu de mentionner chacun des éléments du dossier ni de citer chacune des pièces versées, a suffisamment motivé son jugement, notamment en ce qui concerne la vie privée de l'intéressée. Le jugement attaqué n'est donc pas entaché d'irrégularité.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

3. En premier lieu, l'arrêté litigieux du 20 mai 2022 du préfet du Loiret vise les textes dont il fait application et indique les éléments de fait qui fondent la décision portant obligation de quitter le territoire français. Il est par suite suffisamment motivé.

4. En deuxième lieu, il ne ressort ni des termes de l'arrêté contesté, ni des autres pièces du dossier, que le préfet du Loiret n'aurait pas procédé à un examen sérieux de la situation de Mme B....

5. En troisième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale (...). / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. ". Et aux termes de l'article L. 611-3, dans sa version applicable au litige, du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Ne peuvent faire l'objet d'une décision portant obligation de quitter le territoire français : / (...) 5° L'étranger qui est père ou mère d'un enfant français mineur résidant en France, à condition qu'il établisse contribuer effectivement à l'entretien et à l'éducation de l'enfant dans les conditions prévues par l'article 371-2 du code civil depuis la naissance de celui-ci ou depuis au moins deux ans ; (...) ".

6. Mme B... soutient qu'elle est intégrée sur le territoire français et fait valoir qu'elle vit en concubinage avec un ressortissant français depuis décembre 2020, avec lequel elle envisageait de se marier en mai 2023, après la mainlevée de l'opposition à mariage sollicitée par le procureur de la République. Elle indique en outre qu'elle est mère de deux enfants nés respectivement en 2015 à São Paulo, et en 2017 à Orléans, et elle se prévaut de la nationalité française de son dernier enfant. Toutefois, comme l'a relevé le premier juge, la relation de concubinage dont Mme B... se prévaut est très récente, ayant débuté seize mois avant l'édiction de l'arrêté litigieux. Par ailleurs, l'intéressée ne peut se prévaloir des dispositions précitées du 5° de l'article L. 611-3, dans sa version applicable au litige, du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dès lors qu'elle n'établit pas que son second enfant aurait la nationalité française par la seule production d'une copie du livret de famille du père de cet enfant, alors que le préfet du Loiret soutient sans être contredit que la carte d'identité de ce dernier a été invalidée et détruite en mai 2019, le certificat de nationalité française lui ayant été refusé par une décision du 11 janvier 2019 du tribunal d'instance de Montmorency. Dans ces conditions, et eu égard au jeune âge de ses enfants, dont il n'est pas établi qu'ils entretiendraient des liens avec leurs pères respectifs, le préfet du Loiret n'a pas porté au droit au respect de la vie privée et familiale de Mme B... une atteinte disproportionnée au regard des buts poursuivis par la mesure litigieuse, ni méconnu les dispositions du 5° de l'article L. 611-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Il n'a pas davantage, pour les mêmes motifs, commis d'erreur manifeste d'appréciation des conséquences de sa décision sur la situation personnelle de l'intéressée.

7. En dernier lieu, aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou des traitements inhumains ou dégradants ". Si Mme B... soutient que le préfet du Loiret a méconnu ces stipulations en prenant l'arrêté litigieux, elle ne précise ni n'établit les risques qu'elle encourrait en cas de retour dans son pays d'origine, la République démocratique du Congo. Elle n'est donc pas fondée à soutenir que le préfet du Loiret aurait, en prenant la décision l'éloignant à destination de ce pays ou de tout autre pays susceptible de l'accueillir légalement, méconnu les stipulations précitées.

8. Il résulte de tout ce qui précède que Mme B... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 20 mai 2022 par lequel le préfet du Loiret l'a obligée à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination. Ses conclusions à fin d'annulation ainsi que, par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction et celles tendant à l'application des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, doivent donc être rejetées.

D É C I D E :

Article 1er : La requête de Mme B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A... B... et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet du Loiret.

Délibéré après l'audience du 26 septembre 2024, à laquelle siégeaient :

- Mme Mornet, présidente de la formation de jugement en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative,

- Mme Aventino, première conseillère,

- M. Cozic, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 11 octobre 2024.

La présidente rapporteure,

G. MornetL'assesseure la plus ancienne,

B. Aventino

La greffière,

I. Szymanski

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur, en ce qui le concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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N° 23VE00064


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de VERSAILLES
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 23VE00064
Date de la décision : 11/10/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme MORNET
Rapporteur ?: Mme Gaëlle MORNET
Rapporteur public ?: M. FREMONT
Avocat(s) : SCP PETIT

Origine de la décision
Date de l'import : 20/10/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-10-11;23ve00064 ?
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