Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. A... a demandé au tribunal administratif d'Orléans d'annuler la décision du 19 février 2018 par laquelle la ministre des armées a rejeté sa demande d'attribution d'une pension militaire d'invalidité, pour des séquelles de blessures au cuir chevelu par plombs, de fixer son taux d'invalidité estimé sur la base du guide-barème des invalidités à hauteur de 35% et de le renvoyer vers la sous-direction des pensions du ministère des armées pour la liquidation de ses droits, d'enjoindre à la ministre des armées de lui accorder l'ouverture de ses droits au titre de la pension d'invalidité au taux de 35%, avec effet à compter du 13 janvier 2017, sous astreinte d'un montant de 1 000 euros par jour de retard, d'enjoindre à la ministre des armées de lui accorder l'aggravation de sa pension au titre de troubles visuels à type rétrécissement du champ visuel, indépendamment de l'infirmité résultant des blessures reçues, et de fixer le taux d'invalidité à hauteur de 5%, de dire que la valeur du point de pension sera fixée à 15,05 euros conformément aux conditions fixées par décret en Conseil d'Etat, en fonction de l'indice d'ensemble des traitements bruts de la fonction publique d'Etat tel qu'il a été défini par le ministre chargé de la fonction publique au 1er janvier 2022 et publié par l'institut national de la statistique et des études économiques (INSEE), de condamner l'Etat à lui verser la somme de 45 000 euros au titre du préjudice résultant de l'absence fautive de reconnaissance du lien d'imputabilité au service de l'infirmité subie en 1979 à l'occasion du service, de condamner l'Etat à lui verser, dans un délai d'un mois à compter de la notification du jugement à intervenir, la somme de 15 000 euros assortie des intérêts au taux légal, le tout au titre des souffrances physiques endurées, du préjudice esthétique et du préjudice d'agrément résultant des blessures subies en 1979 et de mettre à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 3 500 euros au profit de son conseil en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Par un jugement n° 1904406 du 24 mai 2022, le tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête et des mémoires enregistrés le 21 juillet 2022, le 25 janvier 2023, le 23 mai 2024 et le 24 juillet 2024, M. A..., représenté par Me Rochefort, avocate, demande à la Cour, dans le dernier état de ses écritures :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) d'annuler la décision du 19 février 2018 ;
3°) à ce qu'il soit enjoint au ministre des armées de lui accorder une pension militaire d'invalidité ou, à titre subsidiaire, à ce qu'il soit enjoint à la même autorité de procéder à une nouvelle instruction de sa demande, en application des dispositions des articles L. 911-1 et suivants du code de justice administrative ;
4°) et de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 3 000 euros à Me Rochefort sur le fondement des articles 37 de la loi du 10 juillet 1991 et L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- les premiers juges ont omis de statuer sur le moyen tiré de ce qu'il aurait dû bénéficier d'une présomption d'imputabilité au service ;
- le jugement et la décision attaqués sont entachés d'erreur de droit et d'erreur manifeste d'appréciation dès lors que l'agression par arme à feu qu'il a subie, alors qu'il était soldat en tenue militaire, l'a été dans le cadre du service, avec les moyens du service, et du fait du service ;
- cet accident a eu lieu sur son itinéraire normal entre son domicile et la caserne et il ne peut être regardé comme ayant quitté cet itinéraire ;
- aucune faute ne peut lui être reprochée.
Par des mémoires en défense, enregistrés le 31 mars 2023 et le 19 juillet 2024, le ministre des armées conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens du requérant ne sont pas fondés.
Un mémoire, présenté par le ministre des armées, enregistré le 22 août 2024, n'a pas été communiqué.
Un courrier a été adressé le 4 juillet 2024 aux parties en application des dispositions de l'article R. 611-11-1 du code de justice administrative, les informant de la période à laquelle il est envisagé d'appeler l'affaire à l'audience et précisant la date à partir de laquelle l'instruction pourra être close dans les conditions prévues par les derniers alinéas des articles R. 613-1 et R. 613-2 du code de justice administrative.
Un avis d'audience a été adressé le 22 août 2024 aux parties portant clôture immédiate de l'instruction en application des dispositions de l'article R. 613-2 du code de justice administrative.
M. A... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du bureau de l'aide juridictionnelle près le tribunal judiciaire de Versailles du 25 octobre 2022.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Aventino,
- les conclusions de M. Frémont, rapporteur public,
- et les observations de Me Rochefort pour M. A....
Considérant ce qui suit :
1. M. B... A..., engagé volontaire, affecté au 21ème régiment d'infanterie de marine à la caserne de Laon-Sissonne dans l'Aisne entre le 5 juin 1979 et le 29 mars 1980, a sollicité le 19 avril 2017 le bénéfice d'une pension militaire d'invalidité pour une infirmité liée à des séquelles de blessures d'un accident survenu en novembre 1979. La ministre des armées a, par une décision du 19 février 2018, rejeté sa demande au motif que son infirmité n'était pas imputable au service. M. A... fait appel du jugement par lequel le tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cette décision.
Sur la régularité du jugement attaqué :
2. En premier lieu, il résulte des motifs mêmes du jugement que le tribunal administratif d'Orléans a expressément répondu aux moyens contenus dans les écritures produites par le requérant. En particulier, les premiers juges, qui n'étaient pas tenus de répondre à tous les arguments avancés par les parties, n'ont pas omis de répondre au moyen tiré de ce que les faits dont il a été victime au cours d'un accident de trajet sont présumés imputables au service. Par suite, le moyen tiré de ce que le jugement serait entaché d'une omission à statuer ne peut qu'être écarté.
3. En second lieu, hormis le cas où le juge de première instance a méconnu les règles de compétence, de forme ou de procédure qui s'imposaient à lui et a ainsi entaché son jugement d'une irrégularité, il appartient au juge d'appel, non d'apprécier le bien-fondé des motifs par lesquels le juge de première instance s'est prononcé sur les moyens qui lui étaient soumis, mais de se prononcer directement sur les moyens dirigés contre la décision administrative contestée dont il est saisi dans le cadre de l'effet dévolutif de l'appel. Le requérant ne peut donc utilement se prévaloir des erreurs de droit et des erreurs manifestes d'appréciation qu'auraient commises les premiers juges pour demander l'annulation du jugement attaqué.
Sur la légalité de la décision du 19 février 2018 :
4. Aux termes des dispositions applicables de l'article L. 121-1 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre : " Ouvrent droit à pension : 1° Les infirmités résultant de blessures reçues par suite d'événements de guerre ou d'accidents éprouvés par le fait ou à l'occasion du service ; (...) ". Aux termes des dispositions applicables de l'article L. 121-2 de ce code : " Lorsque la preuve que l'infirmité ou l'aggravation résulte d'une des causes mentionnées à l'article L. 121-1 ne peut être apportée, ni la preuve contraire, la présomption d'imputabilité au service bénéficie à l'intéressé à condition : 1° S'il s'agit de blessure, qu'elle ait été constatée : a) Soit avant la date du renvoi du militaire dans ses foyers ; (...) La présomption définie au présent article s'applique exclusivement, soit aux services accomplis en temps de guerre, au cours d'une expédition déclarée campagne de guerre ou en opération extérieure, soit au service accompli par les militaires pendant la durée légale du service national, les constatations étant faites dans les délais prévus aux précédents alinéas. Dans tous les cas, la filiation médicale doit être établie entre la blessure ou la maladie ayant fait l'objet de la constatation et l'infirmité invoquée. ".
5. Il résulte de ces dispositions que, si les conditions sont réunies pour que l'intéressé puisse bénéficier du régime de présomption légale d'imputabilité, cette présomption ne peut être écartée que lorsque l'administration apporte une preuve contraire établissant qu'une cause étrangère au service est à l'origine de façon directe et certaine de l'infirmité invoquée ou de son aggravation. Une telle preuve contraire ne saurait résulter d'une simple hypothèse médicale, ni d'une vraisemblance, ni d'une probabilité, aussi forte soit-elle.
6. En outre, est réputé constituer un accident de trajet tout accident dont est victime un militaire qui se produit sur le parcours habituel entre le lieu où s'accomplit son service et le lieu où il a été autorisé à se rendre en permission et pendant la durée normale pour l'effectuer, sauf si un fait personnel de cet agent ou toute autre circonstance particulière est de nature à détacher l'accident du service.
7. A supposer même, ainsi que M. A... le soutient, qu'il ait été victime, fin novembre 1979, d'un tir de plusieurs plombs de chasse dans le cuir chevelu alors qu'il se rendait, vêtu de son uniforme, à l'issue d'une permission, à la caserne où il était affecté, il ressort des énonciations concordantes de l'intéressé que cet accident a eu lieu alors qu'il se rendait à pied de la gare d'Austerlitz au domicile d'un ami, pendant le délai d'attente de sa correspondance entre les deux trains le conduisant de son domicile à sa caserne d'affectation. Dès lors, compte tenu du lieu de survenance de l'accident et du mobile du détour qu'il aurait ainsi effectué, lequel ne saurait en l'espèce se rattacher à une nécessité de la vie courante, cet accident ne peut, en tout état de cause, être regardé comme s'étant produit à l'occasion du service. La ministre des armées n'a donc entaché sa décision ni d'une erreur de droit au regard des dispositions précitées, ni commis d'erreur d'appréciation en refusant à M. A... l'attribution d'une pension militaire d'invalidité pour l'infirmité consécutive à l'accident prétendu.
8. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 19 février 2018. Par voie de conséquence, les conclusions présentées à fin d'injonction et celles présentées au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ne peuvent qu'être rejetées.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... et au ministre des armées et des anciens combattants.
Délibéré après l'audience du 12 septembre 2024, à laquelle siégeaient :
M. Even, président de chambre,
Mme Mornet, présidente assesseure,
Mme Aventino, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 30 septembre 2024.
La rapporteure,
B. AventinoLe président,
B. Even
La greffière,
I. Szymanski
La République mande et ordonne au ministre des armées et des anciens combattants en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition conforme
La greffière,
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N° 22VE01764