Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Cergy-Pontoise de condamner le recteur de l'académie de Versailles à lui verser la somme de 88 000 euros, à assortir des intérêts au taux légal, en réparation des préjudices qu'il affirme avoir subis en raison de l'illégalité de la décision du 19 août 2015 par laquelle sa demande tendant à ce qu'il soit maintenu en fonction au-delà de la limite d'âge a été rejetée, et de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Par un jugement n° 1905229 du 22 septembre 2022, le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté cette demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête et un mémoire complémentaire, enregistrés le 22 novembre 2022 et le 30 décembre 2022, M. B... A..., représenté par Me Colmant, avocat, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) de condamner l'Etat à lui verser la somme de 88 000 euros en réparation des préjudices subis ;
3°) et de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros à lui verser sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- sa requête en appel est recevable ;
- le jugement en litige est entaché d'irrégularité en raison de son insuffisante motivation ;
- il est entaché d'une erreur de droit et d'une erreur d'appréciation ;
- contrairement à ce qu'ont retenu les premiers juges, sa demande n'était pas irrecevable.
La requête a été communiquée au rectorat de l'académie de Versailles, qui n'a produit aucun mémoire en défense.
Par une ordonnance du 14 novembre 2023, la clôture de l'instruction a été fixée au 4 décembre 2023, en application de l'article R. 613-1 du code de justice administrative.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Cozic,
- et les conclusions de M. Frémont, rapporteur public.
Considérant ce qui suit :
1. M. A..., professeur de lycée professionnel, enseignant les lettres et l'histoire-géographie au Lycée Vassily Kandisky de Neuilly-sur-Seine, a sollicité une première prolongation d'activité au-delà de la limite d'âge de 65 ans, qui lui a été accordée par un arrêté du 13 octobre 2014. Il a sollicité une seconde prolongation d'activité, mais cette demande a été rejetée par une décision du recteur de l'académie de Versailles du 19 août 2015, qui a été annulée par un jugement du tribunal administratif de Cergy-Pontoise n° 1600767 du 3 juillet 2018. M. A... a alors adressé au recteur de l'académie de Versailles une demande indemnitaire préalable, par un courrier reçu le 18 juillet 2018, en vue de la réparation des préjudices subis du fait de la décision illégale du 19 août 2015. Cette demande ayant été implicitement rejetée, M. A... a demandé au tribunal administratif de Cergy-Pontoise de condamner de l'Etat à lui verser la somme de 88 000 euros en réparation des préjudices subis du fait de l'illégalité de la décision du 19 août 2015. M. A... demande à la cour d'annuler le jugement n° 1905229 du 22 septembre 2022 par lequel le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande.
Sur la régularité du jugement attaqué :
2. Aux termes de l'article L. 9 du code de justice administrative : " Les jugements sont motivés ". Le juge doit ainsi se prononcer, par une motivation suffisante au regard de la teneur de l'argumentation qui lui est soumise, sur tous les moyens expressément soulevés par les parties, à l'exception de ceux qui, quel que soit leur bien-fondé, seraient insusceptibles de conduire à l'adoption d'une solution différente de celle qu'il retient.
3. M. A... se borne à soutenir dans sa requête que le jugement du tribunal est " entaché d'une insuffisance de motivation ", dès lors que " le tribunal administratif de Cergy-Pontoise n'a pas suffisamment analysé les arguments des parties ". Il ressort toutefois des termes mêmes du jugement attaqué qu'après avoir notamment cité les dispositions des articles L. 112-2, L. 112-3, L. 112-6, L. 231-1 et L. 231-4 du code des relations entre le public et l'administration, ainsi que celles des articles R. 421-2 et R. 421-3 du code de justice administrative, les premiers juges ont explicité de manière précise et détaillée les raisons pour lesquelles la demande de M. A... apparaissait tardive et devait être rejetée en raison de son irrecevabilité. Ils n'étaient alors pas tenus de répondre aux moyens invoqués par le demandeur dans sa demande. Par suite, le moyen tiré de l'insuffisante motivation du jugement doit être écarté.
Sur les conclusions indemnitaires :
4. D'une part, aux termes de l'article R. 421-1du code de justice administrative, dans sa version applicable au présent litige : " La juridiction ne peut être saisie que par voie de recours formé contre une décision, et ce, dans les deux mois à partir de la notification ou de la publication de la décision attaquée. / Lorsque la requête tend au paiement d'une somme d'argent, elle n'est recevable qu'après l'intervention de la décision prise par l'administration sur une demande préalablement formée devant elle ". Aux termes de l'article R. 421-2 du même code : " Sauf disposition législative ou réglementaire contraire, dans les cas où le silence gardé par l'autorité administrative sur une demande vaut décision de rejet, l'intéressé dispose, pour former un recours, d'un délai de deux mois à compter de la date à laquelle est née une décision implicite de rejet. (...) ". D'autre part, aux termes de l'article L. 231-1 du code des relations entre le public et l'administration : " Le silence gardé pendant deux mois par l'administration sur une demande vaut décision d'acceptation ". L'article L. 231-4 du même code prévoit en outre que : " Par dérogation à l'article L. 231-1, le silence gardé par l'administration pendant deux mois vaut décision de rejet : / (...) 5° Dans les relations entre l'administration et ses agents. ". Enfin, les dispositions des articles L. 112-3 à L. 112-6 du code des relations entre le public et l'administration, relatives à l'accusé de réception de toute demande adressée à l'administration, dont le défaut rend les délais de recours inopposables à l'auteur de la demande, sont inapplicables aux relations entre l'administration et ses agents, ainsi que le prévoit expressément l'article L. 112-2 de ce même code. Ces relations doivent s'entendre comme visant les relations du service tant avec les agents en activité qu'avec ceux ayant été admis à la retraite.
5. Il résulte de l'instruction que, par une lettre du 17 juillet 2018, M. A... a demandé au recteur de l'académie de Versailles l'indemnisation des préjudices résultant de l'illégalité fautive entachant la décision du 19 août 2015 refusant de lui accorder la prolongation d'activité dont il sollicitait le bénéfice, à hauteur de 88 000 euros. Ce courrier ayant été reçu par le rectorat le 18 juillet 2018, la demande indemnitaire préalable de M. A... a été implicitement rejetée le 18 septembre 2018. S'il est constant qu'aucun accusé de réception n'a été adressé à l'intéressé, et que les voies et délais de recours contre la décision implicite de rejet du 18 septembre 2018 ne lui ont pas été indiquées, cette circonstance est sans incidence dès lors que les dispositions de la sous-section 2 de la section 1 du chapitre II du titre Ier du livre Ier du code des relations entre le public et l'administration ne sont pas applicables aux relations entre l'administration et ses agents. M. A... ne disposait donc que d'un délai de deux mois à compter de la naissance de la décision implicite de rejet de sa demande indemnitaire préalable pour saisir la juridiction de conclusions à fin d'indemnisation. La demande de M. A... n'ayant été enregistrée par le tribunal administratif de Cergy-Pontoise que le 24 avril 2019, elle était tardive et par suite irrecevable.
6. Il résulte de ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande tendant à la condamnation de l'Etat à lui verser la somme de 88 000 euros en réparation des préjudices qu'il allègue avoir subis du fait de l'illégalité de la décision du 19 août 2015. Par voie de conséquence, ses conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et à la ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse. Copie en sera adressée au recteur de l'académie de Versailles.
Délibéré après l'audience du 4 juillet 2024 à laquelle siégeaient :
M. Even, président,
Mme Aventino, première conseillère,
M. Cozic, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 12 juillet 2024.
Le rapporteur,
H. CozicLe président,
B. Even
La greffière,
I. Szymanski
La République mande et ordonne au ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition conforme
La greffière,
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N° 22VE02659