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28/05/2024 | FRANCE | N°22VE01478

France | France, Cour administrative d'appel de VERSAILLES, 1ère chambre, 28 mai 2024, 22VE01478


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



La société par actions simplifiée (SAS) Style et Design Group a demandé au tribunal administratif de Versailles de prononcer la restitution d'un crédit d'impôt recherche au titre des années 2015 et 2016.



Par un jugement n° 2003494 du 19 avril 2022, le tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande.



Procédure devant la cour :



Par une requête et un mémoire en réplique, enregistrés les 20 juin et 18

octobre 2022, la SAS Style et Design Group, représentée par Me Rocard, avocat, demande à la cour :



1°) d'annuler ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société par actions simplifiée (SAS) Style et Design Group a demandé au tribunal administratif de Versailles de prononcer la restitution d'un crédit d'impôt recherche au titre des années 2015 et 2016.

Par un jugement n° 2003494 du 19 avril 2022, le tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire en réplique, enregistrés les 20 juin et 18 octobre 2022, la SAS Style et Design Group, représentée par Me Rocard, avocat, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement attaqué ;

2°) de prononcer la restitution du crédit d'impôt demandé pour des montants de 167 952 euros et 149 968 euros au titre des années 2015 et 2016 ;

3°) de mettre à la charge de l'État la somme de 10 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que c'est à tort que l'administration fiscale et le tribunal ont considéré que le projet de conception d'un poste de conduite automobile n'était pas éligible au crédit d'impôt recherche aux motifs que le dossier présenté ne présentait pas un état de l'art exhaustif, que les verrous scientifiques n'étaient pas identifiés, que les travaux en cause n'apportaient pas d'éléments nouveaux au regard de ce qui existe dans la littérature sur le sujet, que la mobilisation effective de personnels dans les différentes phases de l'opération n'était pas clairement identifiée et que les " personnels dont les dépenses sont prises en compte dans le calcul du CIR semblent n'avoir aucune compétence dans le domaine scientifique ".

Par des mémoires en défense enregistré les 30 août et 26 octobre 2022, le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique conclut au rejet de la requête.

Le ministre fait valoir que les moyens de la requête ne sont pas fondés.

Par une ordonnance du 18 mars 2024, la clôture de l'instruction a été fixée, en application de l'article R. 613-1 du code de justice administrative au 8 avril 2024.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Dorion,

- et les conclusions de M. Lerooy, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. La société par actions simplifiée (SAS) Style et Design Group, qui exerce son activité dans le secteur de l'ingénierie et des études techniques, a présenté les 31 octobre 2018 et 17 septembre 2019 des demandes de remboursement de crédit d'impôt pour dépenses de recherche exposées dans le cadre d'un projet de conception de poste de conduite automobile, pour des montants de 167 952 euros et 149 968 euros, au titre des années 2015 et 2016. Les experts désignés par le ministre de l'enseignement supérieur, de la recherche et de l'innovation (MESRI), ayant conclu, les 11 juillet 2019 et 24 février 2020, à l'inéligibilité de ce projet au crédit d'impôt recherche, la demande de restitution de la SAS Style et Design Group a été rejetée par l'administration fiscale, en dernier lieu, le 24 mars 2020. La société requérante relève appel du jugement du 19 avril 2022 par lequel le tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande.

2. Aux termes de l'article 244 quater B du code général des impôts : " I. - Les entreprises industrielles et commerciales ou agricoles imposées d'après leur bénéfice réel (...) peuvent bénéficier d'un crédit d'impôt au titre des dépenses de recherche qu'elles exposent au cours de l'année. (...) / II. - Les dépenses de recherche ouvrant droit au crédit d'impôt sont : / a) Les dotations aux amortissements des immobilisations, créées ou acquises à l'état neuf et affectées directement à la réalisation d'opérations de recherche scientifique et technique, y compris la réalisation d'opérations de conception de prototypes ou d'installations pilotes. (...) / b) Les dépenses de personnel afférentes aux chercheurs et techniciens de recherche directement et exclusivement affectés à ces opérations. (...) ". Aux termes de l'article 49 septies F de l'annexe III du même code, dans sa rédaction applicable aux années en litige : " Pour l'application des dispositions de l'article 244 quater B du code général des impôts, sont considérées comme opérations de recherche scientifique ou technique : / a. Les activités ayant un caractère de recherche fondamentale, qui pour apporter une contribution théorique ou expérimentale à la résolution des problèmes techniques, concourent à l'analyse des propriétés, des structures, des phénomènes physiques et naturels, en vue d'organiser, au moyen de schémas explicatifs ou de théories interprétatives, les faits dégagés de cette analyse ; / b. Les activités ayant le caractère de recherche appliquée qui visent à discerner les applications possibles des résultats d'une recherche fondamentale ou à trouver des solutions nouvelles permettant à l'entreprise d'atteindre un objectif déterminé choisi à l'avance. / Le résultat d'une recherche appliquée consiste en un modèle probatoire de produit, d'opération ou de méthode ; / c. Les activités ayant le caractère d'opérations de développement expérimental effectuées, au moyen de prototypes ou d'installations pilotes, dans le but de réunir toutes les informations nécessaires pour fournir les éléments techniques des décisions, en vue de la production de nouveaux matériaux, dispositifs, produits, procédés, systèmes, services ou en vue de leur amélioration substantielle. Par amélioration substantielle, on entend les modifications qui ne découlent pas d'une simple utilisation de l'état des techniques existantes et qui présentent un caractère de nouveauté ". Enfin, aux termes de l'article 49 septies G de cette même annexe : " Le personnel de recherche comprend : / 1. Les chercheurs qui sont les scientifiques ou les ingénieurs travaillant à la conception ou à la création de connaissances, de produits, de procédés, de méthodes ou de systèmes nouveaux. Sont assimilés aux ingénieurs les salariés qui, sans posséder un diplôme, ont acquis cette qualification au sein de leur entreprise. "

3. Il résulte de l'instruction, notamment du dossier technique de l'entreprise et des deux rapports d'expertise établis à la demande du ministre de l'enseignement supérieur, de la recherche et de l'innovation, que la SAS Style et Design Group a développé, à la demande d'un constructeur automobile souhaitant se démarquer de ses concurrents, un projet de conception d'un poste de conduite automobile ergonomique, afin que " le conducteur se consacre à l'environnement (route, autres usagers, météo, ...) grâce à un nouveau concept d'interaction entre un conducteur et sa voiture, tenant compte des interactions avec l'environnement : l'HEI (Human Environment Interface) ". Si l'interface entre un conducteur automobile et son environnement conçue par la SAS Style et Design Group peut présenter un caractère innovant, les documents produits, à défaut de recenser les connaissances scientifiques disponibles sur le sujet, ne permettent pas de déterminer l'état de l'art, ni d'identifier les verrous technologiques. Ainsi, en se bornant à citer quelques normes et un article de presse, et à faire valoir par des considérations générales que l'état de l'art ne peut être exhaustif, la société requérante n'établit pas que le projet permet une amélioration substantielle de l'état de l'art. De même, le constat empirique de problèmes à résoudre et de contraintes à prendre en compte, qui figure au dossier, ne fait pas apparaître les verrous technologiques que les travaux réalisés ont permis de lever. Les éléments fournis ne permettent pas davantage d'établir la démarche de recherche scientifique mise en œuvre et la mobilisation effective des personnels, alors que la société revendique une méthode empirique. Enfin, les experts désignés par le ministre ont relevé l'absence d'indicateurs de recherche et développement et qu'aucun document de référence ne permettait de rendre compte de la méthodologie et de la formalisation des résultats. En outre, l'affectation des personnels dont les rémunérations ont été incluses dans la base de calcul du crédit d'impôt recherche demandé n'est pas justifiée. Par suite, la société requérante n'est pas fondée à soutenir que ce projet était éligible au crédit d'impôt recherche.

4. Il résulte de ce qui précède que la SAS Style et Design Group n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande. Par suite, la requête doit être rejetée, y compris ses conclusions tendant à application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DECIDE :

Article 1er : La requête de la SAS Style et Design Group est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la SAS Style et Design Group et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.

Délibéré après l'audience du 7 mai 2024, à laquelle siégeaient :

Mme Versol, présidente de chambre,

Mme Dorion, présidente-assesseure,

M. Tar, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 28 mai 2024.

La rapporteure,

O. DORION La présidente,

F. VERSOLLa greffière,

A. GAUTHIER

La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme,

La greffière,

2

N° 22VE01478


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de VERSAILLES
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 22VE01478
Date de la décision : 28/05/2024
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

19-04-02-01-08-01-01 Contributions et taxes. - Impôts sur les revenus et bénéfices. - Revenus et bénéfices imposables - règles particulières. - Bénéfices industriels et commerciaux. - Calcul de l'impôt.


Composition du Tribunal
Président : Mme VERSOL
Rapporteur ?: Mme Odile DORION
Rapporteur public ?: M. LEROOY
Avocat(s) : CABINET ACHILLE AVOCATS

Origine de la décision
Date de l'import : 02/06/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-05-28;22ve01478 ?
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