Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
La société Union Technique du Bâtiment (UTB) a demandé au tribunal administratif de Cergy-Pontoise de condamner la région Ile-de-France à lui verser la somme de 2 125 864,81 euros hors taxes, assortie des intérêts au taux de la BCE majoré de sept points et de leur capitalisation, au titre du solde du macro-lot n° 3 " plomberie sanitaire, chauffage-ventilation, aspiration des copeaux et poussière de bois " pour la restructuration du lycée Prony à Asnières-sur-Seine.
Par un jugement n° 1810905 du 3 novembre 2020, le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande.
La société UTB a demandé à la cour d'annuler ce jugement et de condamner la région Ile-de-France à lui verser la somme de 2 125 864,81 euros hors taxes, assortie des intérêts au taux de la BCE majoré de sept points et de leur capitalisation, au titre du solde de ce marché.
Par un arrêt n° 20VE03370 du 9 novembre 2023, la cour administrative d'appel de Versailles a annulé ce jugement et condamné la région Ile-de-France à verser à la société UTB la somme de 264 699,84 euros TTC, assortie des intérêts moratoires au taux légal augmenté de deux points, à compter du 5 mai 2013 pour la somme de 208 239,02 euros, et à compter du 14 octobre 2013 pour la somme de 56 460,83 euros, les intérêts échus à la date du 19 octobre 2018 puis à chaque échéance annuelle à compter de cette date étant capitalisés à chacune de ces dates pour produire eux-mêmes intérêts.
Procédure devant la cour :
Par une requête et un mémoire, enregistrés respectivement les 30 novembre 2023 et 15 février 2024, la société UTB, représentée par Me Poux-Jalaguier, avocat, demande à la cour :
1°) de fixer, sur le fondement de l'article R. 833-1 du code de justice administrative, le taux des intérêts auxquels la région Ile-de-France a été condamnée par l'article 2 de l'arrêt n° 20VE03370 de la cour administrative d'appel de Versailles du 9 novembre 2023 à celui applicable aux marchés des collectivités territoriales dont la procédure d'appel d'offres a été publiée postérieurement au 1er janvier 2009 ;
2°) de mettre à la charge de la région Ile-de-France le versement de la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative dans l'hypothèse où elle s'opposerait à sa requête.
Elle soutient que l'arrêt est entaché d'une erreur matérielle dès lors que sa solution repose uniquement sur l'appréciation erronée de la date de publication de la procédure de passation des marchés, élément purement factuel n'impliquant par ailleurs aucune appréciation à caractère juridique ; cette erreur a directement influencé un chef de la décision ayant, d'ailleurs, une incidence non négligeable compte tenu de l'ancienneté de la dette.
Par un mémoire en défense, enregistré le 29 janvier 2024, la région Ile-de-France, représentée par Me Mokhtar, avocat, demande à la cour :
1°) de rejeter la requête de la société UTB ;
2°) de mettre à la charge de la société UTB le versement de la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que les moyens de la requête de la société UTB ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code des marchés publics ;
- le décret n° 2002-232 du 21 février 2002 ;
- le décret n° 2008-1355 du 19 décembre 2008 ;
- le décret n° 2008-1550 du 31 décembre 2008 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Après avoir entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Camenen, rapporteur,
- les conclusions de Mme Janicot, rapporteure publique,
- les observations de Me Poux-Jalaguier, pour la société UTB et celles de Me Grimault, pour la région Ile-de-France.
Considérant ce qui suit :
1. Aux termes du premier alinéa de l'article R. 833-1 du code de justice administrative : " Lorsqu'une décision d'une cour administrative d'appel (...) est entachée d'une erreur matérielle susceptible d'avoir exercé une influence sur le jugement de l'affaire, la partie intéressée peut introduire devant la juridiction qui a rendu la décision un recours en rectification. Ce recours (...) doit être introduit dans un délai de deux mois qui court du jour de la notification ou de la signification de la décision dont la rectification est demandée ".
2. Par ailleurs, aux termes de l'article 5 du décret du 21 février 2002, alors en vigueur, relatif à la mise en œuvre du délai maximum de paiement dans les marchés publics, dans sa version modifiée par le décret du 31 décembre 2008 susvisé : " II. (...) 2° Pour les organismes soumis aux délais de paiement mentionnés aux 1° et 2° de l'article 98 du code des marchés publics, qu'il soit ou non indiqué dans le marché, le taux des intérêts moratoires est égal au taux d'intérêt de la principale facilité de refinancement appliquée par la Banque centrale européenne (...), majoré de sept points ". Aux termes de l'article 4 de ce décret du 31 décembre 2008 : " Le présent décret est applicable aux marchés dont (...) l'avis d'appel public à la concurrence est envoyé à la publication postérieurement à sa date d'entrée en vigueur ", soit le 1er janvier 2009.
3. Il résulte de l'instruction que l'avis d'appel public à la concurrence relatif au marché litigieux a été publié le 7 janvier 2009, soit postérieurement à la date d'entrée en vigueur des dispositions précitées du décret du 31 décembre 2008 modifiant le taux des intérêts moratoires. Ainsi, pour ce marché, le taux des intérêts moratoires est égal au taux d'intérêt de la principale facilité de refinancement appliquée par la Banque centrale européenne à son opération de refinancement principal la plus récente effectuée avant le premier jour de calendrier du semestre de l'année civile au cours duquel les intérêts moratoires ont commencé à courir, majoré de sept points. Ce taux remplace celui résultant des stipulations de l'article 3.3.9 du cahier des clauses administratives particulières applicable au marché litigieux.
4. Cette erreur n'est pas imputable à la requérante qui a sollicité l'application de ce taux en première instance et en appel, présente un caractère matériel et a exercé une influence sur le jugement de l'affaire. Ainsi, la requête en rectification d'erreur matérielle de la société UTB est recevable. Par suite, il y a lieu de modifier les points 14, 15, 16, 17 et 18 de l'arrêt n° 20VE03370 du 9 novembre 2023 et l'article 2 de son dispositif dans le sens de ce qui a été exposé au point 3 ci-dessus.
5. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que la société UTB qui n'est pas la partie perdante, verse une somme à la région Ile-de-France au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. En revanche, il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la région Ile-de-France le versement à la société UTB de la somme de 2 000 euros sur ce fondement.
DÉCIDE :
Article 1er : Le point 14 de l'arrêt n° 20VE03370 de la cour administrative d'appel de Versailles du 9 novembre 2023 est ainsi modifié : " Aux termes de l'article 5 du décret du 21 février 2002 relatif à la mise en œuvre du délai maximum de paiement, dans sa version applicable aux marchés dont la procédure a été engagée après le 1er janvier 2009 : " I. - Le défaut de paiement dans les délais prévus par l'article 98 du code des marchés publics fait courir de plein droit, et sans autre formalité, des intérêts moratoires au bénéfice du titulaire ou du sous-traitant payé directement. / Les intérêts moratoires courent à partir du jour suivant l'expiration du délai global jusqu'à la date de mise en paiement du principal incluse. / Les intérêts moratoires appliqués aux acomptes ou au solde sont calculés sur le montant total de l'acompte ou du solde toutes taxes comprises, diminué de la retenue de garantie, et après application des clauses d'actualisation, de révision et de pénalisation. / Les intérêts moratoires ne sont pas assujettis à la taxe sur la valeur ajoutée. II. - 1° Le taux des intérêts moratoires est référencé dans le marché. / 2° Pour les organismes soumis aux délais de paiement mentionnés aux 1° et 2° de l'article 98 du code des marchés publics, qu'il soit ou non indiqué dans le marché, le taux des intérêts moratoires est égal au taux d'intérêt de la principale facilité de refinancement appliquée par la Banque centrale européenne à son opération de refinancement principal la plus récente effectuée avant le premier jour de calendrier du semestre de l'année civile au cours duquel les intérêts moratoires ont commencé à courir, majoré de sept points (...) " ".
Article 2 : Au point 15 de l'arrêt n° 20VE03370 de la cour administrative d'appel de Versailles du 9 novembre 2023, les termes " dans sa version en vigueur du 30 avril 2008 au 21 décembre 2008 " sont remplacés par les termes " dans sa rédaction issue du décret du 19 décembre 2008 de mise en œuvre du plan de relance économique dans les marchés publics ".
Article 3 : Le point 16 de l'arrêt n° 20VE03370 de la cour administrative d'appel de Versailles du 9 novembre 2023 est ainsi modifié : " 16. Et aux termes de l'article 4 du décret du 31 décembre 2008 modifiant le décret du 21 février 2002 : " Le présent décret est applicable aux marchés dont (...) l'avis d'appel public à la concurrence est envoyé à la publication postérieurement à sa date d'entrée en vigueur ", soit le 1er janvier 2009 " ".
Article 4 : Le point 17 de l'arrêt n° 20VE03370 de la cour administrative d'appel de Versailles du 9 novembre 2023 est ainsi modifié : " 17. Il résulte de l'instruction que l'appel public à la concurrence relatif au marché litigieux a été publié le 7 janvier 2009, soit postérieurement à la date d'entrée en vigueur du décret du 31 décembre 2008 modifiant le décret du 21 février 2002 relatif à la mise en œuvre du délai maximum de paiement dans les marchés publics. Ainsi, le taux des intérêts moratoires est égal au taux d'intérêt de la principale facilité de refinancement appliquée par la Banque centrale européenne à son opération de refinancement principal la plus récente effectuée avant le premier jour de calendrier du semestre de l'année civile au cours duquel les intérêts moratoires ont commencé à courir, majoré de sept points. Ce taux remplace celui résultant des stipulations de l'article 3.3.9 du cahier des clauses administratives particulières applicable au marché litigieux ".
Article 5 : Au point 18, les mots " pour les contrats dont la procédure de passation a été engagée avant le 1er janvier 2009 " sont supprimés.
Article 6 : L'article 2 de l'arrêt n° 20VE03370 de la cour administrative d'appel de Versailles du 9 novembre 2023 est ainsi modifié : " La région Ile-de-France est condamnée à verser à la société UTB la somme de 264 699,84 euros toutes taxes comprises, assortie des intérêts moratoires au taux d'intérêt de la principale facilité de refinancement appliquée par la Banque centrale européenne à son opération de refinancement principal la plus récente effectuée avant le premier jour de calendrier du semestre de l'année civile au cours duquel les intérêts moratoires ont commencé à courir, majoré de sept points, à compter du 5 mai 2013 pour la somme 208 239,02 euros, et à compter du 14 octobre 2013 pour la somme de 56 460,83 euros. Les intérêts échus à la date du 19 octobre 2018 puis à chaque échéance annuelle à compter de cette date seront capitalisés à chacune de ces dates pour produire eux-mêmes intérêts ".
Article 7 : La région Ile-de-France versera la somme de 2 000 euros à la société UTB au titre de l'article L. 761-1 du code justice administrative.
Article 8 : Les conclusions présentées par la région Ile-de-France au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 9 : Le présent arrêt sera notifié à la société UTB et à la région Ile-de-France.
Copie en sera adressée au président de la Section du contentieux du Conseil d'Etat.
Délibéré après l'audience du 4 avril 2024, à laquelle siégeaient :
Mme Signerin-Icre, présidente de chambre,
M. Camenen, président assesseur,
Mme Houllier, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 2 mai 2024.
Le rapporteur,
G. CamenenLa présidente,
C. Signerin-IcreLa greffière,
C. FourteauLa République mande et ordonne au préfet de la région Ile-de-France en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition conforme
La greffière,
N° 23VE02629 2