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26/03/2024 | FRANCE | N°21VE02035

France | France, Cour administrative d'appel de VERSAILLES, 1ère chambre, 26 mars 2024, 21VE02035


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



M. A... C... a demandé au tribunal administratif de Cergy-Pontoise de condamner l'Assistance Publique-Hôpitaux de Paris (AP-HP) et l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales (ONIAM) à lui verser les sommes respectives de 30 000 euros et 300 000 euros en réparation des préjudices résultant de l'intervention réalisée le 1er décembre 2011.

Par un jugement n° 1202824 du 4 juin 2015, le tribun

al administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande.



Par un arrêt du 30 mars 20...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... C... a demandé au tribunal administratif de Cergy-Pontoise de condamner l'Assistance Publique-Hôpitaux de Paris (AP-HP) et l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales (ONIAM) à lui verser les sommes respectives de 30 000 euros et 300 000 euros en réparation des préjudices résultant de l'intervention réalisée le 1er décembre 2011.

Par un jugement n° 1202824 du 4 juin 2015, le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande.

Par un arrêt du 30 mars 2023, rectifié par une ordonnance du 5 avril 2023, la cour a rejeté les conclusions indemnitaires de M. C... dirigées contre l'AP-HP et ordonné, avant de statuer sur les conclusions indemnitaires dirigées contre l'ONIAM, une expertise médicale.

Procédure devant la cour après remise du rapport d'expertise :

Par des mémoires enregistrés les 19 novembre 2023, 6 janvier 2024, et 10 février 2024, M. C..., représenté par Me Carré-Paupart, avocate, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Cergy-Pontoise en tant qu'il rejette sa demande d'indemnisation au titre de la solidarité nationale ;

2°) de condamner l'ONIAM à lui verser la somme totale de 1 550 558,52 euros ;

3°) de mettre à la charge de l'ONIAM la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- les conditions prévues par les dispositions du II de l'article L. 1142-1 du code de la santé publique pour une indemnisation au titre de la solidarité nationale sont réunies, dès lors que le dommage qu'il subit du fait de l'intervention du 1er décembre 2011 est grave et anormal ; en effet, la survenance de ce dommage présentait une probabilité faible ;

- il demande la réparation intégrale des préjudices occasionnés par ce dommage, soit :

- la somme de 26 400 euros au titre de la perte de gains professionnels subie entre le 1er décembre 2011 et le 2 décembre 2013 ; ainsi que la somme de 364 293,33 euros au titre de la perte de gains professionnels subie depuis la consolidation de son état de santé ;

- la somme de 499 065,19 euros au titre des frais correspondant à l'assistance par une tierce personne à compter du 3 décembre 2013 ;

- la somme de 150 000 euros au titre de l'incidence professionnelle ;

- la somme de 10 800 euros au titre du déficit fonctionnel temporaire ;

- la somme de 35 000 euros au titre des souffrances endurées ;

- la somme de de 15 000 euros au titre du préjudice esthétique temporaire ainsi que la somme 30 000 euros au titre du préjudice esthétique permanent ;

- la somme de 350 000 euros au titre du déficit fonctionnel permanent ;

- la somme de 10 000 euros au titre du préjudice d'agrément ;

- la somme de 30 000 euros au titre du préjudice sexuel ;

- la somme de 30 000 euros au titre du préjudice d'établissement.

Par des mémoires en défense enregistrés les 21 décembre 2023, 2 et 8 février 2024, l'ONIAM, représenté par Me Welsch, avocate, demande à la cour de rejeter les conclusions d'appel de M. C....

Il soutient que :

- les conditions prévues par les dispositions du II de l'article L. 1142-1 du code de la santé publique pour une indemnisation au titre de la solidarité nationale ne sont pas réunies, faute pour le dommage de présenter un caractère d'anormalité ; en effet, d'une part, l'intervention litigieuse n'a pas entraîné de conséquences notablement plus graves que celles auxquelles le patient était exposé de manière suffisamment probable en l'absence de traitement ; d'autre part, le risque pour le patient d'être l'objet d'une complication du type de telle survenue n'était pas faible ;

- à titre subsidiaire, il y a lieu de tenir compte, pour l'évaluation des différents préjudices, de l'état antérieur de la victime, et de ne mettre à sa charge que 80% de l'indemnité qui pourrait être allouée à la victime ;

- la réalité de la perte de gains professionnels n'étant pas démontrée, elle ne saurait être indemnisée ;

- il en va de même s'agissant de l'incidence professionnelle ;

- il y a lieu de déduire du montant de l'indemnité qui pourrait être versée au titre de l'assistance à domicile par une tierce personne le montant des aides de même nature perçues par la victime ;

- l'indemnité accordée au titre du déficit fonctionnel temporaire ne saurait excéder la somme de 8 784 euros ;

- l'indemnité accordée au titre des souffrances endurées ne saurait excéder la somme de 16 080 euros ;

- l'indemnité accordée au titre du préjudice esthétique temporaire ne saurait excéder la somme de 12 000 euros ;

- l'indemnité accordée au titre du déficit fonctionnel permanent ne saurait excéder la somme de 190 173,60 euros ;

- l'indemnité accordée au titre du préjudice d'agrément ne saurait excéder la somme de 4 000 euros ;

- l'indemnité accordée au titre du préjudice esthétique permanent ne saurait excéder la somme de 12 000 euros

- le préjudice sexuel ne résultant pas de l'accident médical, il ne saurait donner lieu à une indemnité ; en tout état de cause, l'indemnité qui pourrait être accordée à ce titre ne saurait excéder la somme de 4 000 euros ;

- l'indemnité accordée au titre du préjudice d'établissement ne saurait excéder la somme de 4 000 euros.

M. C... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 13 décembre 2021.

Vu :

- l'ordonnance du 23 mai 2023 par laquelle le président de la cour a désigné le docteur B... en qualité d'expert ;

- le rapport d'expertise enregistré le 13 novembre 2023 ;

- l'ordonnance du 23 janvier 2024 par laquelle le président de la cour a taxé les frais de l'expertise réalisée par le docteur B... ;

- les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de la santé publique ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Troalen ;

- les conclusions de M. Lerooy, rapporteur public ;

- et les observations de Me Carré-Paupart, représentant M. C....

Considérant ce qui suit :

1. Par un arrêt du 30 mars 2023, rectifié par une ordonnance du 5 avril 2023, la cour a rejeté les conclusions indemnitaires de M. C... dirigées contre l'Assistance publique-hôpitaux de Paris et ordonné, avant de statuer sur les conclusions indemnitaires présentées sur le fondement des dispositions du II de l'article L. 1142-1 du code de la santé publique, une expertise médicale. L'expert neurochirurgien désigné par la cour a rendu son rapport le 13 novembre 2023.

Sur l'application du régime d'indemnisation au titre de la solidarité nationale :

2. Aux termes du II de l'article L. 1142-1 du code de la santé publique : " Lorsque la responsabilité (...) d'un établissement (...) mentionné au I (...) n'est pas engagée, un accident médical (...) ouvre droit à la réparation des préjudices du patient, (...) au titre de la solidarité nationale, lorsqu'ils sont directement imputables à des actes de prévention, de diagnostic ou de soins et qu'ils ont eu pour le patient des conséquences anormales au regard de son état de santé comme de l'évolution prévisible de celui-ci et présentent un caractère de gravité, fixé par décret, apprécié au regard de la perte de capacités fonctionnelles et des conséquences sur la vie privée et professionnelle mesurées en tenant notamment compte du taux d'atteinte permanente à l'intégrité physique ou psychique, de la durée de l'arrêt temporaire des activités professionnelles ou de celle du déficit fonctionnel temporaire."

3. Il résulte de ces dispositions que l'ONIAM doit assurer, au titre de la solidarité nationale, la réparation de dommages résultant directement d'actes de prévention, de diagnostic ou de soins à la double condition qu'ils présentent un caractère d'anormalité au regard de l'état de santé du patient comme de l'évolution prévisible de cet état et que leur gravité excède le seuil défini à l'article D. 1142-1. La condition d'anormalité du dommage prévue par ces dispositions doit toujours être regardée comme remplie lorsque l'acte médical a entraîné des conséquences notablement plus graves que celles auxquelles le patient était exposé de manière suffisamment probable en l'absence de traitement. Lorsque les conséquences de l'acte médical ne sont pas notablement plus graves que celles auxquelles le patient était exposé par sa pathologie en l'absence de traitement, elles ne peuvent être regardées comme anormales sauf si, dans les conditions où l'acte a été accompli, la survenance du dommage présentait une probabilité faible. Pour apprécier le caractère faible ou élevé du risque dont la réalisation a entraîné le dommage, il y a lieu de prendre en compte la probabilité de survenance d'un événement du même type que celui qui a causé le dommage et entraînant une invalidité grave ou un décès.

4. Il résulte de l'instruction qu'au cours de l'intervention d'embolisation du 1er décembre 2011, destinée à traiter par voie endovasculaire la malformation artérioveineuse médullaire dont souffrait M. C..., un vasospasme mécanique a rendu impossible le retrait sans danger d'un micro cathéter et que cette complication non fautive a entraîné une thrombose, à l'origine de la paraplégie complète et flasque des membres inférieurs dont est atteint de manière définitive M. C.... Ainsi, le dommage dont il demande réparation, lequel, eu égard au taux d'incapacité permanente de 70% retenu par les différents experts, présente un caractère de gravité au sens des dispositions précitées, résulte directement de l'intervention du 1er décembre 2011.

5. En outre, le rapport du neurochirurgien du 13 novembre 2023, lequel précise que la malformation artérioveineuse médullaire est une pathologie rare, indique que la survenue d'un vasospasme à l'occasion d'une embolisation par voie endovasculaire est exceptionnelle, aucune description d'une telle complication n'ayant été retrouvée dans la littérature scientifique, et ajoute que ce type d'intervention présente un risque pour le patient de subir une aggravation de son état neurologique, estimé entre 4% et 20% selon les articles cités. Or, parmi ces études, la seule faisant état, selon l'expert, d'un risque de dégradations neurologiques qualifiées de sévères ou importantes, et donc comparables à celles subies par M. C..., évalue ce risque à 4%. Il y a donc lieu d'estimer qu'en l'espèce, la probabilité de survenance d'une complication du même type que celle qui a causé le dommage et entraînant une aggravation sévère de l'état neurologique du patient présentait le caractère d'une probabilité faible.

6. Le dommage subi par M. C... satisfait ainsi à l'ensemble des conditions prévues par les dispositions du II de l'article L. 1142-1 du code de la santé publique pour bénéficier d'une réparation au titre de la solidarité nationale.

Sur la perte de chance :

7. Il résulte de l'instruction, en particulier du rapport du 13 novembre 2023, que, compte tenu de l'ancienneté des troubles neurologiques occasionnés par sa pathologie, M. C... pouvait espérer, dans l'hypothèse d'un traitement endovasculaire sans complication, une probable stabilisation de son état de santé. Eu égard aux estimations de cette probabilité faites par l'expert, qui oscillent entre 25 et 60%, il y a lieu d'estimer que l'accident médical survenu au cours de l'intervention du 1er décembre 2011 lui a fait perdre une chance, estimée à 50%, d'éviter l'aggravation de son état neurologique. La réparation qui incombe à l'ONIAM correspond ainsi à la moitié des différents chefs de préjudice ayant résulté de la paraplégie dont est atteint M. C....

Sur les préjudices :

En ce qui concerne les frais correspondant à l'assistance par une tierce personne pour les besoins de la vie quotidienne :

8. Lorsque, au nombre des conséquences dommageables d'un accident engageant la responsabilité d'une personne publique, figure la nécessité pour la victime de recourir à l'assistance d'une tierce personne à domicile pour les actes de la vie courante, la victime ne peut obtenir l'indemnisation de la nécessité dans laquelle elle s'est trouvée de recourir à une telle aide, durant la période écoulée à la date de la décision fixant son indemnisation, qu'à la condition que cette aide lui ait effectivement été apportée.

9. En l'espèce, tant le rapport d'expertise du 3 janvier 2014 que celui du 19 mai 2017 ont estimé que l'état de santé de M. C... était de nature à justifier l'assistance d'une tierce personne pour les besoins de la vie quotidienne, à hauteur d'une heure par jour, depuis le 1er décembre 2011. Toutefois, l'intéressé a été hospitalisé à l'hôpital Beaujon jusqu'au 4 décembre 2012, puis en service de soins et de rééducation à Asnières du 4 décembre 2012 au 3 juillet 2013, avant d'être à nouveau hospitalisé à l'hôpital Beaujon du 3 au 9 juillet 2013, puis du 18 au 26 juillet 2013. Le rapport d'expertise du 13 novembre 2013 indique qu'il a ensuite regagné le centre de rééducation et d'adaptation d'Asnières, où il était encore présent du 24 décembre 2013 au 5 février 2014. Le rapport du 19 mai 2017 fait état de plusieurs séjours dans des centres de rééducation au cours de l'année 2016. Au cours de ces différentes périodes auxquelles il n'avait donc pas rejoint un domicile privé, M. C... n'a pas eu besoin de recourir à l'assistance d'une tierce personne pour les actes de la vie courante et ne peut prétendre à une indemnisation à ce titre. S'agissant des années 2015 et 2017 au cours desquelles le rapport du 13 novembre 2013 mentionne un hébergement précaire en hôtel ou en foyer, il n'est ni établi, ni même allégué qu'une telle aide lui aurait effectivement été apportée. M. C... ne saurait donc davantage se voir indemnisé de la nécessité d'une telle aide.

10. En revanche, M. C..., qui a indiqué lors des opérations d'expertise réalisées à la demande de la cour qu'il disposait d'un appartement depuis le mois de février 2018 et bénéficiait désormais d'une aide-ménagère à domicile, est en droit de se voir indemnisé des frais correspondants. En retenant un taux horaire de 14 euros, pour une aide non spécialisée, correspondant au salaire minimum interprofessionnel de croissance augmenté des cotisations sociales et d'une année de 412 jours afin de tenir compte des congés payés et des jours fériés prévus par l'article L. 3133-1 du code du travail, les frais liés à cette assistance peuvent être estimés sur la période du 1er janvier 2024 à la date du présent arrêt à la somme de 35 000 euros. Il ne résulte pas de l'instruction que M. C... percevrait des aides de même nature dont le montant devrait être déduit de cette indemnité.

11. Les frais liés à cette assistance s'élèvent à la somme de 5 768 euros pour l'année 2024. Ce montant pourra être capitalisé en se fondant sur l'euro de rente viagère tel qu'il est fixé dans le barème publié par la Gazette du Palais 2022, soit 49,81 pour un homme âgé de 31 ans en décembre 2013, date de la consolidation de l'état de santé de M. C.... Le montant des frais liés à l'assistance par une tierce personne capitalisés s'élève ainsi à la somme de 287 304,08 euros, soit 143 652,04 euros après application du coefficient de perte de chance.

En ce qui concerne les préjudices professionnels :

12. Si M. C... soutient que son état de santé résultant de l'intervention du 1er décembre 2011 l'a empêché de reprendre son activité professionnelle de maçon, il ne fournit aucun document de nature à justifier l'exercice effectif d'une telle activité en Algérie avant cette intervention et à déterminer le montant des revenus qui auraient pu être perçus dans ce cadre. L'intéressé, qui avait en outre vocation à retourner dans son pays d'origine à l'issue de cette intervention, ne saurait donc prétendre à une indemnisation d'une perte de revenus professionnels calculée sur la base du montant du salaire minimum interprofessionnel de croissance applicable en France, qu'il s'agisse de la période antérieure à la consolidation de son état de santé ou de la période postérieure à celle-ci.

13. En revanche, il est constant que M. C..., qui produit la traduction de deux diplômes de maçonnerie et d'ouvrier et agent qualifié en " électricité bâtiment " établis en Algérie, ne pourra à l'avenir exercer un tel emploi compte tenu de son handicap et présente des possibilités de reconversion professionnelle limitées. Il sera ainsi fait une juste appréciation du préjudice d'incidence professionnelle subi en l'évaluant à la somme de 10 000 euros avant application du coefficient de perte de chance.

En ce qui concerne le déficit fonctionnel temporaire :

14. Il résulte de l'instruction que M. C... a été hospitalisé en service de neuroradiologie pendant une durée d'un an après l'intervention du 1er décembre 2011, puis dans un centre de rééducation au cours de l'année 2013. Il ressort néanmoins des termes non contestés du rapport d'expertise du 19 mai 2017 que l'hospitalisation de M. C... a été prolongée en partie en raison de difficultés administratives en lien avec le rapatriement de ce dernier qui était normalement prévu. Il sera ainsi fait une juste appréciation du déficit fonctionnel temporaire subi jusqu'à la date de consolidation de l'état de santé en l'évaluant à la somme de 12 500 euros avant application du coefficient de perte de chance.

En ce qui concerne les souffrances endurées :

15. Le rapport d'expertise du 3 janvier 2014 a évalué les souffrances endurées par M. C... du fait de l'intervention du 1er décembre 2011 à 3/7, tandis que le celui du 19 mai 2017 les a évaluées à 6/7, en prenant en compte le retentissement psychologique des séquelles de cette intervention. Il sera fait une juste appréciation de ce préjudice en l'évaluant à la somme de 20 000 euros avant application du coefficient de perte de chance.

En ce qui concerne le préjudice esthétique :

16. Le rapport d'expertise du 3 janvier 2014 a évalué le préjudice esthétique temporaire de M. C... à 3/7, tandis que le celui du 19 mai 2017 a évalué tant le préjudice temporaire que permanent à 6/7. Il sera fait une juste appréciation du préjudice esthétique global de M. C... en l'évaluant à la somme de 20 000 euros avant application du coefficient de perte de chance.

En ce qui concerne le déficit fonctionnel permanent :

17. Les différents experts ont estimé que le taux d'incapacité permanente de M. C... pouvait être fixé à 70%. En tenant compte de l'âge de ce dernier à la date de la consolidation de son état de santé, 31 ans, et de la circonstance qu'il aurait probablement conservé en l'absence de complications les troubles neurologiques qu'il présentait avant l'intervention, correspondant selon le rapport du 13 novembre 2023 à un taux d'incapacité permanente de 15 à 20%, il sera fait une juste appréciation du préjudice subi par M. C... à raison du déficit fonctionnel permanent en l'évaluant à la somme de 230 000 euros avant application du coefficient de perte de chance.

En ce qui concerne le préjudice d'agrément :

18. M. C..., qui a déclaré au cours des différentes opérations d'expertise, qu'il n'avait pas d'activités sportives ou de loisirs particulières avant l'intervention du 1er décembre 2011, ne justifie pas de la réalité d'un préjudice d'agrément.

En ce qui concerne les préjudices sexuels et d'établissement :

19. Le préjudice sexuel de M. C... a été qualifié de majeur par le rapport du 3 janvier 2014. Eu égard à son jeune âge, ce préjudice ainsi que le préjudice d'établissement seront évalués à la somme de 20 000 euros chacun avant application du coefficient de perte de chance.

20. Il résulte de tout ce qui précède que M. C... est donc fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, les premiers juges ont écarté sa demande d'indemnisation présentée sur le fondement des dispositions du II de l'article L. 1142-1 du code de la santé publique. Compte tenu du taux de perte de chance de 50%, l'évaluation globale des préjudices de M. C... s'élève à la somme de 327 402 euros, qu'il y a lieu de mettre à la charge de l'ONIAM.

Sur les frais liés à l'instance :

21. M. C... n'allègue pas avoir exposé d'autres frais que ceux pris en charge par l'Etat au titre de l'aide juridictionnelle totale qui lui a été accordée par une décision du 13 décembre 2021. En outre, son avocate n'a pas demandé que lui soit versée la somme correspondant aux frais exposés qu'elle aurait réclamée à son client s'il n'avait pas bénéficié de l'aide juridictionnelle totale. Dans ces conditions, les conclusions de la requête tendant à ce qu'il soit mis à la charge de l'ONIAM une somme au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées.

Sur les dépens :

22. Les frais et honoraires de l'expertise du docteur B... ont été liquidés et taxés à la somme de 2 400 euros. Il y a lieu de mettre ces frais à la charge définitive de l'ONIAM.

DÉCIDE :

Article 1er : L'ONIAM est condamné à verser à M. C... la somme de 327 402 euros.

Article 2 : Le jugement du 4 juin 2015 est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.

Article 3 : Les frais d'expertise, d'un montant total de 2 400 euros, sont mis à la charge définitive de l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales.

Article 4 : Le surplus des conclusions présentées par M. C... est rejeté.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... C..., à l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales, à l'Assistance publique - Hôpitaux de Paris et à la caisse primaire d'assurance maladie de Paris.

Délibéré après l'audience du 12 mars 2024, à laquelle siégeaient :

Mme Versol, présidente de chambre,

Mme Dorion, présidente assesseure,

Mme Troalen, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 26 mars 2024.

La rapporteure,

E. TROALEN La présidente,

F. VERSOLLa greffière,

S. LOUISERE

La République mande et ordonne au ministre de la santé et de la prévention en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme

La greffière,

No 21VE02035002


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