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16/06/2023 | FRANCE | N°21VE03282

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 2ème chambre, 16 juin 2023, 21VE03282


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. et Mme C... B... ont demandé au tribunal administratif de Versailles d'annuler l'arrêté du 5 août 2019 par lequel le maire de la commune de Port-Marly a refusé d'accorder le permis de construire sollicité par la société IN'LI pour la réalisation de 32 logements sur un terrain situé 26 route de Versailles à Port-Marly, d'enjoindre à la commune de Port-Marly de délivrer l'autorisation sollicitée, ou à titre subsidiaire, de procéder à une nouvelle instruction de la demande, dans les quinze jours su

ivant la notification de la décision à intervenir, et de mettre à la charge de ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. et Mme C... B... ont demandé au tribunal administratif de Versailles d'annuler l'arrêté du 5 août 2019 par lequel le maire de la commune de Port-Marly a refusé d'accorder le permis de construire sollicité par la société IN'LI pour la réalisation de 32 logements sur un terrain situé 26 route de Versailles à Port-Marly, d'enjoindre à la commune de Port-Marly de délivrer l'autorisation sollicitée, ou à titre subsidiaire, de procéder à une nouvelle instruction de la demande, dans les quinze jours suivant la notification de la décision à intervenir, et de mettre à la charge de la commune de Port Marly une somme de 3 600 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un jugement n° 1907648 du 8 octobre 2021, le tribunal administratif de Versailles a rejeté leur demande et les conclusions de la commune de Port-Marly tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire complémentaire, enregistrés le 8 décembre 2021 et le 4 mai 2023, M. et Mme B..., représentés par Me Rochefort, avocate, demandent à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler cet arrêté

3°) d'enjoindre à la commune de Port-Marly de délivrer l'autorisation d'urbanisme demandée ou, à titre subsidiaire, de procéder à une nouvelle instruction de la demande dans un délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ;

4°) de mettre à la charge de la commune de Port-Marly une somme de 3 600 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- le maire ne pouvait plus opposer le motif tiré de l'implantation des bacs de collecte des déchets dès lors que ce motif n'avait pas été opposé dans l'arrêté du 8 mars 2018 par lequel le maire de la commune de Port-Marly a refusé, une première fois, le permis de construire sollicité par la société IN'LI ;

- le maire ne pouvait pas se fonder sur le caractère incomplet du dossier de demande dès lors qu'il comportait bien le dossier spécifique sollicité par la direction des routes d'Ile-de-France (DiRIF) au sujet des accès ;

- c'est à tort que les premiers juges ont estimé qu'il n'était pas possible de réduire les risques créés par le projet par de simples prescriptions ;

- la création de la voie de décélération réduit le risque pour la sécurité publique et un aménagement ou une simple prescription aurait permis de délivrer le permis de construire ;

- il n'est pas établi que le projet porterait atteinte à la sécurité publique au sens de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme ; une prescription spéciale, un aménagement léger ou une adaptation mineure aurait suffi à remédier à la difficulté ;

- l'arrêté attaqué est entaché d'incompétence, en ce que l'acte de délégation de compétence au maire adjoint de la commune n'est pas suffisamment précis ;

- le maire de Port-Marly n'est pas compétent pour interdire la modification de la bordure de la RN 186 et la suppression des places de stationnement qui en sont l'accessoire ; ce vice de compétence révèle un détournement de procédure ;

- l'arrêté attaqué est insuffisamment motivé ;

- le maire de Port-Marly ne pouvait, conformément à l'article R. 423-38 du code de l'urbanisme, exiger des pièces autres que celles limitativement énumérées par l'article R. 431-16 du code de l'urbanisme ; le dossier était complet ; la commune n'ayant sollicité aucun complément d'information, elle ne peut plus opposer le caractère incomplet du dossier ; la seule circonstance que le projet est situé dans une zone de risque identifiée par un plan de prévention des risques ne peut suffire à justifier un refus de permis de construire ;

- le permis de construire sollicité ne méconnaît pas les dispositions de l'article UAa 3-2 du règlement du plan local d'urbanisme de la commune de Port-Marly ;

- le maire ne pouvait refuser la suppression des places de stationnement en bordure de la RN 186.

Par un mémoire en défense, enregistré le 19 octobre 2022, la commune de Port-Marly, représentée par Me Ghaye, avocat, conclut au rejet de la requête et à ce que soit mis à la charge des requérants le versement d'une somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le permis de construire aurait pu être fondé sur la méconnaissance des dispositions de l'article R. 431-16 f) du code de l'urbanisme ;

- les autres moyens soulevés par M. et Mme B... ne sont pas fondés.

Un mémoire, présenté le 25 mai 2023 pour la commune de Port-Marly, ne comportant pas d'éléments nouveaux, n'a pas été communiqué.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Houllier,

- les conclusions de M. Frémont, rapporteur public,

- et les observations de Me Rochefort, pour M. et Mme B..., et D..., substituant Me Ghaye, pour la commune du Port-Marly.

Considérant ce qui suit :

1. M. et Mme B... sont propriétaires de deux parcelles contigües cadastrées AH 10 et AH 261, situées 26 route de Versailles à Port-Marly. Ils ont conclu une promesse unilatérale de vente de ces parcelles avec la société IN'LI, le 1er juillet 2016, qui a été renouvelée jusqu'au 31 décembre 2019. La société bénéficiaire a déposé une demande de permis de construire pour 38 logements sur lesdites parcelles le 14 décembre 2017. Par un avis rendu le 19 février 2018, la direction des routes d'Île-de-France (DiRIF) a émis un avis favorable au projet à condition qu'un accès routier sécurisé soit prévu afin de permettre l'entrée et la sortie des véhicules de la future résidence sur la voie routière RN 186. Par un premier arrêté du 8 mars 2018, le maire de la commune de Port-Marly a refusé la demande de permis de construire.

2. La société IN'LI a déposé une nouvelle demande de permis de construire sur les mêmes parcelles pour un ensemble immobilier de 32 logements, le 12 mars 2019. Par un arrêté du 5 août 2019, le maire de la commune de Port-Marly a refusé de faire droit à cette demande. Par un jugement n° 1907648 du 8 octobre 2021 le tribunal administratif de Versailles a rejeté la demande de M. et Mme B... tendant à l'annulation de cet arrêté après avoir procédé à une substitution de motifs sur le fondement de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme. M. et Mme B... demandent à la cour d'annuler ce jugement.

Sur la légalité de l'arrêté attaqué :

3. Pour fonder l'arrêté attaqué du 5 août 2019, le maire de la commune de Port-Marly s'est fondé sur plusieurs motifs tirés de l'absence d'accès adapté depuis la voie publique et de la méconnaissance de l'article UAa 3-2 qui en découle, de l'absence d'un dossier spécifique proposant un aménagement de l'accès des véhicules au projet, de l'absence de précisions techniques sur les moyens mis en œuvre pour protéger les avoisinants compte tenu de la forte déclivité du terrain et de l'inscription des parcelles en zone d'aléa fort sur le plan de prévention des risques naturels, ainsi que des risques pour la sécurité routière causés par la localisation de l'espace de collecte des déchets.

4. Les premiers juges, après avoir retenus les moyens soulevés par les requérants, ont rejeté leur demande en faisant droit à une substitution de motifs demandée par la commune sur le fondement de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme.

En ce qui concerne les moyens soulevés par les demandeurs en première instance non abandonnés en appel :

5. En premier lieu, les arrêtés du maire consentant, en application des dispositions de l'article L. 2122-18 du code général des collectivités territoriales, des délégations aux adjoints doivent définir avec une précision suffisante les limites de ces délégations.

6. Il ressort des pièces du dossier que l'arrêté attaqué a été signé par M. A... E... qui a reçu délégation à cet effet par arrêté du maire de Port-Marly du 9 juillet 2019 lui conférant pouvoir pour signer, du 3 au 16 août 2019, toute décision relative, notamment, à l'urbanisme. Cette délégation doit être regardée comme étant suffisamment précise eu égard aux exigences rappelées au point précédent. Par suite, le moyen tiré de l'incompétence de l'auteur de l'arrêté attaqué doit être écarté.

7. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 424-3 du code de l'urbanisme : " Lorsque la décision rejette la demande ou s'oppose à la déclaration préalable, elle doit être motivée. / Cette motivation doit indiquer l'intégralité des motifs justifiant la décision de rejet ou d'opposition, notamment l'ensemble des absences de conformité des travaux aux dispositions législatives et réglementaires mentionnées à l'article L. 421-6. (...) ".

8. En l'espèce, l'arrêté attaqué, qui vise les dispositions pertinentes, notamment les articles applicables du code de l'urbanisme et du règlement du plan local d'urbanisme, et fait référence aux caractéristiques de la construction et à la configuration du terrain, à l'avis de la direction des routes d'Ile-de-France et à l'étude géotechnique, énonce toutes les considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement. Par suite, cet arrêté est suffisamment motivé.

9. En troisième lieu, les moyens, invoqués par voie d'exception, tirés de l'illégalité de la décision du 9 mai 2019 par laquelle le maire de la commune de Port-Marly a rejeté la demande d'aménagement de la voirie déposée par la société IN'LI doivent être écartés comme inopérants dès lors que cette décision ne constitue pas la base légale de l'arrêté attaqué du 5 août 2019 refusant de délivrer un permis de construire et que ce dernier n'a pas été pris pour son application. Par suite, les moyens tirés de l'incompétence du maire de Port-Marly pour refuser la modification de la RN 186, et du détournement de procédure qui en découlerait, doivent être écartés comme inopérants.

10. En quatrième lieu, aux termes de l'article R. 431-4 du code de l'urbanisme : " La demande de permis de construire comprend : / a) Les informations mentionnées aux articles R. 431-5 à R. 431-12 ; / b) Les pièces complémentaires mentionnées aux articles R. 431-13 à R. * 431-33-1 ; / c) Les informations prévues aux articles R. 431-34 et R. 431-34-1. / Pour l'application des articles R. 423-19 à R. 423-22, le dossier est réputé complet lorsqu'il comprend les informations mentionnées au a et au b ci-dessus. / Aucune autre information ou pièce ne peut être exigée par l'autorité compétente ".

11. D'une part, c'est à bon droit que les premiers juges ont estimé, aux points 3 et 4 du jugement attaqué, qu'il n'était pas nécessaire de consulter à nouveau la direction des routes d'Ile-de-France. Il y a lieu d'écarter ce moyen par adoption du motif retenu par le tribunal administratif de Versailles.

12. D'autre part, selon l'article R. 431-16 du code de l'urbanisme, dans sa version applicable à la date de l'arrêté attaqué : " Le dossier joint à la demande de permis de construire comprend en outre, selon les cas : (...) / f) Lorsque la construction projetée est subordonnée par un plan de prévention des risques naturels prévisibles ou un plan de prévention des risques miniers approuvés, ou rendus immédiatement opposables en application de l'article L. 562-2 du code de l'environnement, ou par un plan de prévention des risques technologiques approuvé, à la réalisation d'une étude préalable permettant d'en déterminer les conditions de réalisation, d'utilisation ou d'exploitation, une attestation établie par l'architecte du projet ou par un expert certifiant la réalisation de cette étude et constatant que le projet prend en compte ces conditions au stade de la conception ; (...) ".

13. Il appartient au juge, saisi d'un moyen tiré de la méconnaissance de ces dispositions, de s'assurer de la production, par le pétitionnaire, d'un document établi par l'architecte du projet ou par un expert attestant qu'une étude a été menée conformément aux exigences de la règlementation et que ses résultats ont été pris en compte au stade de la conception du projet. Il ne saurait en revanche, dans ce cadre, porter une appréciation sur le contenu de l'étude et son caractère suffisant au regard des exigences des plans de prévention des risques qui en imposent la réalisation.

14. Pour refuser le permis de construire sollicité, le maire de la commune de Port-Marly s'est fondé sur la circonstance que le dossier de demande ne justifiait pas suffisamment des moyens mis en œuvre pour tenir compte des conclusions de l'étude géotechnique. En première instance, comme en appel, la commune soutient également que le maire de Port-Marly aurait pu se fonder sur le caractère incomplet du dossier dès lors que l'étude géotechnique réalisée par GEOLIA ne correspond pas à l'étude prévue par les dispositions précitées du f) de l'article R. 431-16 du code de l'urbanisme.

15. Toutefois, d'une part, il ressort des termes mêmes de l'arrêté attaqué et des pièces du dossier qu'une étude géotechnique, réalisée par le cabinet GEOLIA le 7 mai 2019, a été jointe au dossier de demande du permis de construire, de même que l'attestation établie par l'architecte du projet certifiant que le projet prend en compte les conditions liées au plan de prévention des risques naturels de mouvement de terrains, sans qu'il n'appartienne au juge de porter une appréciation sur le contenu de cette étude. D'autre part, dès lors que le dossier de demande comportait, sans que le contraire ne soit allégué, l'ensemble des autres pièces requises par le code de l'urbanisme, le maire de Port-Marly n'aurait pu se fonder sur l'insuffisance du dossier de demande pour fonder sa décision de refus, conformément au dernier alinéa de l'article R. 431-4 du code de l'urbanisme. Par suite, c'est à bon droit que les premiers juges ont estimé que le maire ne pouvait se fonder sur l'insuffisance du dossier de demande et n'ont pas fait droit à la substitution de motif sollicitée par la commune de Port-Marly sur ce point.

16. Enfin, à supposer même que la commune puisse être regardée comme soutenant, pour la première fois en appel, que le maire aurait pu refuser le permis de construire sur le fondement de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme eu égard à la localisation du terrain d'assiette du projet en zone B1 2 du plan de prévention des risques naturels liés aux mouvements de terrain, la seule identification d'un aléa fort lié aux mouvements de terrain et risques d'inondations par remontée de nappe ne peut, à elle seule, justifier le refus d'un permis de construire en l'absence de tout autre élément concret relatif aux caractéristiques propres du projet. Cette demande ne pourrait donc, en tout état de cause, qu'être écartée.

17. En dernier lieu, l'article UAa 3-2 du règlement du plan local d'urbanisme de la commune de Port-Marly prévoit que : " Tout terrain enclavé est inconstructible à moins que son propriétaire ne produise la preuve d'une servitude de passage suffisante instituée par acte authentique ou par voie judiciaire, en application de l'article 682 du Code Civil. / Lorsque le terrain est riverain de deux ou plusieurs voies publiques, l'accès sur celle de ces voies qui présenterait une gêne ou un risque pour la circulation peut être interdit. / Toute opération doit prendre le minimum d'accès sur les voies publiques. / Les accès doivent être adaptés à l'opération et aménagés de façon à ne pas apporter la moindre gêne à la circulation publique ".

18. En l'espèce, le projet litigieux porte sur la réalisation de 32 logements et 43 places de stationnement sur un terrain desservi par la route nationale (RN) 186. La parcelle d'assiette du projet présente une configuration en drapeau ne permettant un accès direct à la voie publique que sur une largeur limitée à 8,30 mètres, cet accès devant permettre le passage des véhicules et des piétons.

19. Par un avis du 19 février 2018, la direction des routes d'Ile-de-France a, après avoir rappelé les caractéristiques de la RN 186, les conditions de l'accès " partiellement masqué par la rangée de stationnement " et la " configuration géométrique en courbe " de la voie, émis un avis favorable au projet compte tenu de l'enclavement du terrain et sous réserve d'une proposition d'aménagement spécifique. Si, pour répondre à cette demande et sécuriser l'accès des véhicules, la société pétitionnaire a sollicité de la commune du Port-Marly la réalisation de plusieurs aménagements sur la voirie, dont la suppression de plusieurs places de stationnement au droit de la parcelle afin permettre la réalisation d'une voie de décélération, cette demande, qui avait fait l'objet d'un avis favorable de la direction des routes d'Ile-de-France, a fait l'objet d'un refus du maire par courrier du 9 mai 2019. Compte tenu de ce refus, des caractéristiques de la voie de desserte, configurée en quatre voies, séparées par un terre-plein central, et empruntée par plus de 12 000 véhicules par jour dont 9% de poids-lourds et du nombre de logements créés par le projet litigieux, ce dernier est susceptible de créer des flux importants de véhicules de nature à accroître le risque pour la sécurité des usagers de la voie publique.

20. Par suite, le maire de Port-Marly a légalement pu se fonder sur ce motif pour refuser d'accorder le permis de construire sollicité. Il résulte de l'instruction que le maire de Port-Marly aurait pris la même décision en se fondant uniquement sur ce motif.

En ce qui concerne les motifs substitués par les premiers juges contestés en appel :

21. Aux termes de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme : " Le projet peut être refusé ou n'être accepté que sous réserve de l'observation de prescriptions spéciales s'il est de nature à porter atteinte à la salubrité ou à la sécurité publique du fait de sa situation, de ses caractéristiques, de son importance ou de son implantation à proximité d'autres installations ".

22. En vertu de ces dispositions, lorsqu'un projet de construction est de nature à porter atteinte à la salubrité ou à la sécurité publique, le permis de construire ne peut être refusé que si l'autorité compétente estime, sous le contrôle du juge, qu'il n'est pas légalement possible, au vu du dossier et de l'instruction de la demande de permis, d'accorder le permis en l'assortissant de prescriptions spéciales qui, sans apporter au projet de modification substantielle nécessitant la présentation d'une nouvelle demande, permettraient d'assurer la conformité de la construction aux dispositions législatives et réglementaires dont l'administration est chargée d'assurer le respect. En outre, il appartient à l'autorité d'urbanisme compétente et au juge de l'excès de pouvoir, pour apprécier si les risques d'atteinte à la salubrité ou à la sécurité publique justifient un refus de permis de construire sur le fondement de ces dispositions, de tenir compte tant de la probabilité de réalisation de ces risques que de la gravité de leurs conséquences, s'ils se réalisent.

23. Les premiers juges ont fait droit à la demande de substitution de motif présentée par la commune de Port-Marly qui soutenait son maire aurait pu refuser le permis de construire sollicité en se fondant sur les dispositions précitées de l'article R. 111-2 compte tenu de la dangerosité des accès et de l'implantation des bacs de collecte.

24. Sauf dispositions législatives contraires, les riverains d'une voie publique ont le droit d'accéder librement à leur propriété, et notamment, d'entrer et de sortir des immeubles à pied ou avec un véhicule. Dans le cas d'une voie communale, le maire ne peut refuser d'accorder un tel accès, qui constitue un accessoire du droit de propriété, que pour des motifs tirés de la conservation et de la protection du domaine public ou de la sécurité de la circulation sur la voie publique. Lorsque l'accès à la voie publique avec un véhicule est de nature à mettre en cause la sécurité de la circulation, le maire n'est pas tenu de permettre l'accès en modifiant l'emprise de la voie publique. Toutefois, il ne peut refuser un tel accès sans rechercher si un aménagement léger sur le domaine public, qui serait légalement possible, ne serait pas de nature à permettre de faire droit à la demande dans de bonnes conditions de sécurité. La réalisation et l'entretien de cet aménagement destiné à assurer la sécurité de la circulation sur la voie publique incombent à la commune, mais l'autorisation peut être subordonnée à la condition que le pétitionnaire accepte de prendre à sa charge tout ou partie du coût de la réalisation et de l'entretien de l'aménagement en cause, compte tenu de son utilité éventuelle pour des besoins généraux de la circulation sur la voie publique.

25. D'une part, il résulte de ce qui a été exposé aux points 18 et 19 que le projet litigieux, compte tenu des conditions de desserte de la parcelle et de son ampleur, est susceptible de créer des flux importants de véhicules de nature à accroître le risque pour la sécurité des usagers de la voie publique.

26. D'autre part, le projet prévoit l'implantation de l'espace de collecte des déchets sur le terrain d'assiette du projet, entre l'accès piéton et l'accès véhicule, sans aménagement d'espace de stationnement pour les services de collecte. Dans ces conditions, eu égard aux caractéristiques de la voie de desserte, rappelées aux points 18 et 19, et à l'absence d'espace de stationnement pour les véhicules de collecte, cette configuration est de nature à créer un risque pour la sécurité publique.

27. Si les requérants soutiennent que le maire aurait néanmoins pu leur accorder le permis de construire sollicité au bénéfice d'une prescription spéciale, l'administration ne peut assortir une autorisation d'urbanisme de prescriptions qu'à la condition que celles-ci, entraînent des modifications sur des points précis et limités et ne nécessitent pas la présentation d'un nouveau projet. En l'espèce, il ressort des pièces du dossier qu'eu égard à la configuration du terrain, une telle prescription n'aurait pas porté sur un point précis et limité ne nécessitant pas la présentation d'un nouveau projet. En outre, il ne ressort pas des pièces du dossier qu'un simple aménagement léger aurait suffi. Dans ces conditions, compte tenu de l'implantation du projet, de ses conditions de desserte et du nombre de logements créés, le maire de Port-Marly aurait pu se fonder sur les dispositions de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme pour refuser la délivrance du permis sollicité.

28. Les requérants se prévalent également des dispositions de l'article L. 152-3 du code de l'urbanisme, anciennement L. 123-1-9, aux termes duquel : " Les règles et servitudes définies par un plan local d'urbanisme : / 1° Peuvent faire l'objet d'adaptations mineures rendues nécessaires par la nature du sol, la configuration des parcelles ou le caractère des constructions avoisinantes ; (...) ". Toutefois, ces dispositions n'autorisent des adaptations mineures qu'aux règles prévues par le plan local d'urbanisme et non celles du règlement national d'urbanisme telles que l'article R. 111-2 précité.

29. Par suite, c'est à bon droit que les premiers juges ont fait droit aux substitutions de motifs demandées par la commune de Port-Marly en première instance, sans qu'y fasse obstacle la circonstance que le maire de Port-Marly n'avait pas opposé ce motif lors de l'instruction d'une précédente demande de permis de construire par le même pétitionnaire sur le même terrain. Le moyen tiré de l'insuffisante motivation de l'arrêté du 8 mars 2018 opposant ce premier refus doit ainsi être écarté comme inopérant.

30. Il résulte de tout ce qui précède que M. et Mme B... ne sont pas fondés à se plaindre de ce que le tribunal administratif de Versailles a rejeté leur demande. Par voie de conséquence, leurs conclusions à fin d'injonction doivent être rejetées.

Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

31. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de la commune de Port-Marly, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement de la somme que M. et Mme B... demandent à ce titre. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de M. et Mme B... la somme que la commune de Port-Marly réclame sur le fondement des mêmes dispositions.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. et Mme B... est rejetée.

Article 2 : Les conclusions de la commune du Port-Marly tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. et Mme C... B... et à la commune de Por-Marly.

Délibéré après l'audience du 1er juin 2023, à laquelle siégeaient :

M. Even, président de chambre,

Mme Houllier, première conseillère,

Mme Liogier, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 16 juin 2023.

La rapporteure,

S. HOULLIER

Le président,

B. EVEN

La greffière,

C. RICHARD

La République mande et ordonne au préfet des Yvelines, en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme

La greffière,

2

N° 21VE03282


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 21VE03282
Date de la décision : 16/06/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

68-03-025-03 Urbanisme et aménagement du territoire. - Permis de construire. - Nature de la décision. - Refus du permis.


Composition du Tribunal
Président : M. EVEN
Rapporteur ?: Mme Sarah HOULLIER
Rapporteur public ?: M. FREMONT
Avocat(s) : ROCHEFORT

Origine de la décision
Date de l'import : 10/08/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2023-06-16;21ve03282 ?
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