La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

01/06/2023 | FRANCE | N°20VE00075

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 2ème chambre, 01 juin 2023, 20VE00075


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

I- Sous le n° 1705713, l'association des amis du fort de Cormeilles et M. K... D... ont demandé au tribunal administratif de Cergy-Pontoise d'annuler l'arrêté du 2 août 2016 par lequel le préfet du Val-d'Oise a autorisé la société Placoplatre à poursuivre l'exploitation d'une carrière de gypse sous talus sur le territoire des communes de Cormeilles-en-Parisis, Argenteuil et Franconville ou, à titre subsidiaire, d'en modifier les prescriptions en imposant une bande de recul de 50 mètres autour du front

de taille prévu au droit du fort et a minima à proximité des bâtiments " Of...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

I- Sous le n° 1705713, l'association des amis du fort de Cormeilles et M. K... D... ont demandé au tribunal administratif de Cergy-Pontoise d'annuler l'arrêté du 2 août 2016 par lequel le préfet du Val-d'Oise a autorisé la société Placoplatre à poursuivre l'exploitation d'une carrière de gypse sous talus sur le territoire des communes de Cormeilles-en-Parisis, Argenteuil et Franconville ou, à titre subsidiaire, d'en modifier les prescriptions en imposant une bande de recul de 50 mètres autour du front de taille prévu au droit du fort et a minima à proximité des bâtiments " Officiers " et " Casernements ", avec la mise en place d'un convoyeur de bande pour acheminer les matériaux extraits en souterrain et, en tout état de cause, de mettre à la charge de l'Etat une somme de 7 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

II- Sous le n° 1705712, l'association des amis du fort de Cormeilles et M. D... ont demandé au tribunal administratif de Cergy-Pontoise d'annuler l'arrêté du 14 novembre 2016 par lequel le préfet du Val-d'Oise a autorisé la société Placoplatre à poursuivre l'exploitation d'une carrière de gypse à ciel ouvert et à exploiter des installations de traitement, de transit de produits minéraux et de stockage des stériles d'extraction non inertes et non dangereux sur le territoire des communes de Cormeilles-en-Parisis, Argenteuil et Franconville ou, à titre subsidiaire, d'en modifier les prescriptions en imposant une bande de recul de 50 mètres autour du front de taille prévu au droit du fort et a minima à proximité des bâtiments " Officiers " et " Casernement ", avec la mise en place d'un convoyeur de bande pour acheminer les matériaux extraits en souterrain et, en tout état de cause, de mettre à la charge de l'Etat une somme de 7 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

III- Sous le n° 1704722, l'association des amis du fort de Cormeilles et M. D... ont demandé au tribunal administratif de Cergy-Pontoise d'annuler l'arrêté du 3 février 2017 par lequel le préfet du Val-d'Oise a autorisé la société Placoplatre à exploiter une carrière de gypse sous la butte de Cormeilles-en-Parisis ou, à titre subsidiaire, d'en modifier les prescriptions en imposant une bande de recul de 50 mètres autour du front de taille prévu au droit du fort et a minima à proximité des bâtiments " Officiers " et " Casernement ", avec la mise en place d'un convoyeur de bande pour acheminer les matériaux extraits en souterrain et, en tout état de cause, de mettre à la charge de l'Etat une somme de 7 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

IV- Sous le n° 1705226, l'association intercommunale de défense de la Butte du Parisis, Mme G..., M. E..., Mme H..., Mme C..., M. I..., Mme J..., Mme B... et M. B... ont demandé au tribunal administratif de Cergy-Pontoise d'annuler l'arrêté du 2 août 2016 par lequel le préfet du Val-d'Oise a autorisé la société Placoplatre à poursuivre l'exploitation d'une carrière de gypse sous talus sur le territoire des communes de Cormeilles-en-Parisis, Argenteuil et Franconville, d'annuler le contrat de fortage sur le domaine régional des Buttes du Parisis conclu entre la société Placoplatre et l'agence des espaces verts d'Ile-de-France le 28 novembre 2011, ainsi que 1'avenant à ce contrat daté du 5 juin 2015, d'annuler la convention relative aux conditions de mise à disposition de terrains régionaux à la société Placoplatre sur le domaine régional des Buttes du Parisis conclue entre la société Placoplatre et l'agence des espaces verts d'Ile-de-France le 3 mars 2011, ainsi que l'avenant à cette convention daté du 5 juin 2015 et de mettre à la charge de l'Etat une somme de 6 000 euros à verser à chaque requérant au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

V- Sous le n° 1705238, l'association intercommunale de défense de la Butte du Parisis, Mme G..., M. E..., Mme H..., Mme C..., M. I..., Mme J..., Mme B... et M. B... ont demandé au tribunal administratif de Cergy-Pontoise d'annuler l'arrêté du 14 novembre 2016 par lequel le préfet du Val-d'Oise a autorisé la société Placoplatre à poursuivre l'exploitation d'une carrière de gypse à ciel ouvert et à exploiter des installations de traitement, de transit de produits minéraux et de stockage des stériles d'extraction non inertes et non dangereux sur le territoire des communes de Cormeilles-en-Parisis, Argenteuil et Franconville, d'annuler le contrat de fortage sur le domaine régional des Buttes du Parisis conclu entre la société Placoplatre et l'agence des espaces verts d'Ile-de-France le 28 novembre 2011, ainsi que 1'avenant à ce contrat daté du 5 juin 2015, d'annuler la convention relative aux conditions de mise à disposition de terrains régionaux à la société Placoplatre sur le domaine régional des Buttes du Parisis conclue entre la société Placoplatre et l'agence des espaces verts d'Ile-de-France le 3 mars 2011, ainsi que l'avenant à cette convention daté du 5 juin 2015 et de mettre à la charge de l'Etat une somme de 6 000 euros à verser à chaque requérant au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

VI- Sous le n° 1705265, l'association intercommunale de défense de la Butte du Parisis, Mme G..., M. E..., Mme H..., Mme C..., M. I..., Mme J..., Mme B... et M. B... ont demandé au tribunal administratif de Cergy-Pontoise d'annuler l'arrêté du 3 février 2017 par lequel le préfet du Val-d'Oise a autorisé la société Placoplatre à exploiter une carrière de gypse sous la butte de Cormeilles-en-Parisis, d'annuler le contrat de fortage sur le domaine régional des Buttes du Parisis conclu entre la société Placoplatre et l'agence des espaces verts d'Ile-de-France le 28 novembre 2011, ainsi que 1'avenant à ce contrat daté du 5 juin 2015, d'annuler la convention relative aux conditions de mise à disposition de terrains régionaux à la société Placoplatre sur le domaine régional des Buttes du Parisis conclue entre la société Placoplatre et l'agence des espaces verts d'Ile-de-France le 3 mars 2011, ainsi que l'avenant à cette convention daté du 5 juin 2015 et de mettre à la charge de l'Etat une somme de 6 000 euros à verser à chaque requérant au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un jugement n° 1704722-1705712-1705713-1705226-1705238-1705265 du 29 août 2019, le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a, après avoir joint ces demandes :

1°) rejeté les conclusions aux fins d'annulation du contrat de fortage sur le domaine régional des Buttes du Parisis conclu entre la société Placoplatre et l'agence des espaces verts d'Ile-de-France le 28 novembre 2011, ainsi que 1'avenant à ce contrat daté du 5 juin 2015 ;

2°) rejeté les conclusions aux fins d'annulation de la convention relative aux conditions de mise à disposition de terrains régionaux à la société Placoplatre sur le domaine régional des Buttes du Parisis conclue entre la société Placoplatre et l'agence des espaces verts d'Ile-de-France le 3 mars 2011 ;

3°) dit qu'il n'y a pas lieu de saisir la Cour de Justice de l'Union européenne d'une question préjudicielle ;

4°) sursis à statuer sur les conclusions aux fins d'annulation des arrêtés des 3 août 2016, 14 novembre 2016 et 2 février 2017 jusqu'à l'expiration d'un délai de huit mois ou de quatorze mois en cas d'enquête publique à compter de la notification du présent jugement ;

5°) dit que le préfet du Val-d'Oise notifiera au tribunal les autorisations modificatives édictées après réalisation d'un nouvel avis de l'autorité environnementale avant l'expiration d'un délai de huit mois ;

6°) dit que le délai visé à l'article précédent est porté à quatorze mois en cas de réalisation d'une enquête publique complémentaire ;

7°) rejeté les conclusions tendant à la suspension des autorisations pendant ce délai ;

8°) réservé le surplus des conclusions.

Procédure devant la cour :

Par une requête et des mémoires, enregistrés le 7 janvier 2020, le 4 mai 2020, le 9 juillet 2021 et le 15 septembre 2021, l'association des amis du fort de Cormeilles et M. D..., représentés par Me Braud, avocat, demandent à la cour :

1°) d'annuler ce jugement en tant qu'il s'est contenté de surseoir à statuer dans l'attente d'une régularisation par arrêté modificatif, tout en refusant d'annuler les autorisations délivrées à l'issue d'une procédure substantiellement irrégulière ;

2°) d'annuler les autorisations d'exploiter accordées à la société Placoplatre par arrêtés du 2 août 2016, 14 novembre 2016 et 3 février 2017 ;

3°) à titre subsidiaire, d'annuler le jugement attaqué en ce qu'il a écarté les autres moyens développés en première instance et de renvoyer les instances devant le tribunal administratif pour qu'il statue au fond ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 7 000 euros à leur verser à chacun sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Les requérants soutiennent que :

- ils ont intérêt pour agir ;

- M. D... justifie de sa qualité lui permettant de représenter l'association en justice en première instance et l'association est représentée en appel par son président en exercice ;

- leur requête est recevable au regard des dispositions de l'article R. 811-6 du code de justice administrative ;

- le jugement attaqué est entaché d'irrégularité dès lors que les premiers juges ont omis de répondre au moyen tiré de l'inexistence de l'avis de l'autorité environnementale ;

- les conclusions à fin d'annulation du jugement du 29 août 2019 en tant qu'il met en œuvre les pouvoirs prévus par l'article L. 181-18 du code de l'environnement ne sont pas privées d'objet du seul fait de l'édiction de nouveaux arrêtés modificatifs le 30 avril 2021, dès lors que ceux-ci n'ont pas été notifiés au tribunal administratif dans le délai de 14 mois fixé par le jugement attaqué ;

- l'avis de l'autorité environnementale est entaché d'un vice substantiel et c'est donc à tort que les premiers juges ont estimé que ce vice pouvait être régularisé dès lors que l'absence d'indépendance constatée entre les services de l'autorité environnementale et ceux chargés de l'instruction des demandes d'autorisation au titre de la législation sur les installations classées pour la protection de l'environnement doit conduire à constater qu'aucun avis n'a été rendu par l'autorité environnementale, ce qui vicie à la fois le dossier de demande et la procédure d'enquête publique, a exercé une influence sur le sens de la décision et a privé les intéressés d'une garantie et supposait ainsi de reprendre la procédure d'enquête publique initiale ;

- l'avis rendu par la mission régionale de l'autorité environnementale le 12 décembre 2019 aurait dû être joint à l'enquête publique organisée en mai et juin 2016 ;

- le dossier soumis à l'enquête publique était insuffisant car il est fondé sur une expertise réalisée par M. F... qui ne correspond pas à la version initiale de ce rapport et ne justifie pas des qualifications de ce dernier ;

- la procédure d'enquête publique a été insuffisante et irrégulière dès lors qu'il n'a jamais été précisé que trois décisions distinctes pourraient être prises à son issue, ni que ces autorisations pourraient modifier l'arrêté du 21 octobre 1999 ;

- la circonstance que le préfet a édicté trois autorisations distinctes alors qu'il a soumis le projet à une enquête publique unique entache d'irrégularité et d'inintelligibilité la procédure suivie ;

- les exigences posées par les autorisations attaquées ne sont pas suffisamment claires, précises et susceptibles d'un contrôle objectif et dépourvu d'ambigüité en raison de l'édiction de trois autorisations distinctes ;

- l'article L. 512-1 du code de l'environnement exige la délivrance d'une autorisation unique pour les installations dont le fonctionnement est intrinsèquement lié ;

- la commission d'enquête a insuffisamment justifié sa position sur la circulation des poids-lourds et les risques d'affaissement ;

- l'étude d'impact est insuffisante, en méconnaissance de l'article R. 122-5 du code de l'environnement ; elle ne mentionne pas toutes les espèces protégées présentes sur le site ; elle est insuffisante sur l'évaluation de l'ensemble des impacts liés au trafic généré par l'activité de la société Placoplatre ; elle ne justifie pas l'augmentation du remblaiement et du trafic que cela induit ;

- l'étude d'impact n'a pas suffisamment pris en compte le plan de prévention des risques de mouvements de terrains en ce qu'elle se fonde sur un zonage différent de celui du plan approuvé en 2015 et n'identifie pas correctement les zones de ce plan, qu'il n'existe qu'une connaissance partielle de l'emplacement des anciennes carrières et qu'il existe un risque d'affaissement dans la zone d'exploitation ;

- l'arrêté du 3 février 2017 méconnaît les dispositions des articles L. 511-1 et L. 512-1 du code de l'environnement dès lors que l'exploitation d'une carrière souterraine porte atteinte au fort de Cormeilles, qu'aucune mesure de conservation du bâti n'a été envisagée pour le fort de Cormeilles et que les prescriptions imposées au pétitionnaire sur ce point sont insuffisantes ;

- les visas des trois arrêtés du 30 avril 2021 mentionnent, à tort, avoir tenu compte des remarques portées dans les délibérations des conseils municipaux.

Par des mémoires en défense, enregistrés le 5 mai 2021, le 10 septembre 2021 et le 12 octobre 2021, la société Placoplatre, représentée par Me Herschtel, avocate, conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge solidaire des requérants une somme de 7 000 euros à lui verser sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- l'association requérante et M. D... ne justifient pas d'un intérêt leur donnant qualité pour agir à l'encontre de l'arrêté autorisant la poursuite de l'exploitation de la carrière à ciel ouvert du 14 novembre 2016, ni de l'arrêté autorisant l'exploitation de la carrière sous talus du 2 août 2016 ;

- M. D... ne justifie pas de sa qualité à représenter l'association des amis du fort de Cormeilles en appel ;

- les conclusions aux fins d'annulation du jugement avant-dire-droit en tant qu'il a sursis à statuer sur le fondement de l'article L. 181-18 du code de l'environnement sont privées d'objet depuis l'intervention des arrêtés modificatifs du 30 avril 2021 ; le moyen tiré de ce que les premiers juges ne pouvaient surseoir à statuer est devenu sans objet ;

- le moyen tiré de l'absence de prise en compte de l'opposition locale lors de l'édiction des arrêtés modificatifs du 30 avril 2021 est dépourvu de pertinence dès lors qu'il est dirigé contre les arrêtés modificatifs et non les arrêtés initiaux visés par le jugement attaqué ;

- les autres moyens de la requête ne sont pas fondés.

Par des mémoires en défense, enregistrés le 9 juillet 2021 et le 15 octobre 2021, le ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires conclut au rejet de la requête.

Il soutient que :

- il n'y a plus lieu de statuer sur les conclusions aux fins d'annulation du jugement attaqué en tant qu'il met en œuvre les pouvoirs que le juge tient de l'article L. 181-18 du code de l'environnement dès lors que, par trois arrêtés du 30 avril 2021, les arrêtés attaqués ont été modifiés ;

- les autres moyens de la requête ne sont pas fondés.

Par une ordonnance du 21 juin 2022, la clôture de l'instruction a été fixée, en dernier lieu, au 7 juillet 2022, en application de l'article R. 613-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'environnement ;

- l'ordonnance n° 2014-355 du 20 mars 2014 ;

- l'ordonnance n° 2017-80 du 26 janvier 2017 ;

- le décret n° 2017-81 du 26 janvier 2017 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Houllier,

- les conclusions de M. Frémont, rapporteur public,

- les observations de M. A... pour le ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires et de Me Herschtel pour la société Placoplatre.

Considérant ce qui suit :

1. La société Placoplatre a sollicité, le 19 juillet 2015, la délivrance d'une autorisation en vue de la poursuite d'une activité d'exploitation de carrière à ciel ouvert et de l'extension de l'exploitation en carrière souterraine. Une enquête publique s'est déroulée du 2 mai 2016 au 2 juin 2016. Par un arrêté du 2 août 2016, le préfet du Val-d'Oise a autorisé la société Placoplatre à exploiter une carrière de gypse sous talus sur le territoire des communes de Cormeilles-en-Parisis, Argenteuil et Franconville. Par un arrêté du 14 novembre 2016, le préfet a autorisé cette même société à poursuivre l'exploitation d'une carrière de gypse à ciel ouvert et à exploiter des installations de traitement, de transit de produits minéraux et de stockage des stériles d'extraction non inertes et non dangereux sur le territoire des communes de Cormeilles-en-Parisis, Argenteuil et Franconville. Enfin, par un arrêté du 3 février 2017, il l'a autorisée à exploiter une carrière de gypse sous la butte de Cormeilles-en-Parisis.

2. Par un jugement n° 1704722-1705712-1705713-1705226-1705238-1705265 du 29 août 2019, le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a sursis à statuer sur les demandes tendant à l'annulation de ces trois arrêtés dans l'attente de la notification de la régularisation du vice relevé par les premiers juges, tiré de l'irrégularité de l'avis de l'autorité environnementale, et a écarté les autres moyens des demandes de première instance. L'association des amis du fort de Cormeilles et M. D... demandent à la cour d'annuler ce jugement en tant qu'il a sursis à statuer et qu'il a écarté comme non fondés leurs autres moyens de première instance.

Sur la régularité du jugement :

3. L'article L. 9 du code de justice administrative dispose que : " Les jugements sont motivés ". Le juge doit ainsi se prononcer, par une motivation suffisante au regard de la teneur de l'argumentation qui lui est soumise, sur tous les moyens expressément soulevés par les parties, à l'exception de ceux qui, quel que soit leur bien-fondé, seraient insusceptibles de conduire à l'adoption d'une solution différente de celle qu'il retient.

4. En estimant, aux points 57 et 58 du jugement attaqué, que l'avis émis par l'autorité environnementale était irrégulier en l'absence d'autonomie réelle de cette dernière à l'égard de l'autorité décisionnaire et en décidant, pour cette raison, de surseoir à statuer sur les demandes de première instance jusqu'à la régularisation de ce vice après réalisation, le cas échéant, d'une enquête publique complémentaire, les premiers juges ont implicitement mais nécessairement répondu au moyen tiré de l'insuffisance du dossier d'enquête publique et de l'irrégularité de la procédure suivie en raison de l'inexistence alléguée de l'avis de l'autorité environnementale du fait du vice ainsi constaté. Par suite, le moyen de régularité tiré de l'omission des premiers juges à répondre à ce moyen doit être écarté.

Sur les conclusions tendant à l'annulation du jugement attaqué en tant qu'il prononce un sursis à statuer :

5. En demandant à la cour de faire droit aux moyens tirés de l'inexistence de l'avis de l'autorité environnementale du 23 mars 2016 et des conséquences de cette inexistence sur la procédure d'enquête publique et de constater que les premiers juges ne pouvaient prononcer un sursis à statuer pour permettre la régularisation de ce vice, les requérants doivent être regardés comme concluant à l'annulation du jugement attaqué en tant qu'il prononce un sursis à statuer.

6. Aux termes de l'article L. 181-18 du code de l'environnement, dans sa rédaction issue de l'ordonnance du 26 janvier 2017 : " I.- Le juge administratif qui, saisi de conclusions dirigées contre une autorisation environnementale, estime, après avoir constaté que les autres moyens ne sont pas fondés : / 1° Qu'un vice n'affecte qu'une phase de l'instruction de la demande d'autorisation environnementale, ou une partie de cette autorisation, peut limiter à cette phase ou à cette partie la portée de l'annulation qu'il prononce et demander à l'autorité administrative compétente de reprendre l'instruction à la phase ou sur la partie qui a été entachée d'irrégularité ; / 2° Qu'un vice entraînant l'illégalité de cet acte est susceptible d'être régularisé par une autorisation modificative peut, après avoir invité les parties à présenter leurs observations, surseoir à statuer jusqu'à l'expiration du délai qu'il fixe pour cette régularisation. Si une telle autorisation modificative est notifiée dans ce délai au juge, celui-ci statue après avoir invité les parties à présenter leurs observations. (...) ".

7. Les dispositions du 2° du I de l'article L. 181-18 permettent au juge, lorsqu'il constate un vice qui entache la légalité de la décision mais qui peut être régularisé par une décision modificative, de rendre un jugement avant dire droit par lequel il fixe un délai pour cette régularisation et sursoit à statuer sur le recours dont il est saisi. Le juge peut préciser, par son jugement avant dire droit, les modalités de cette régularisation. Ces dispositions peuvent trouver à s'appliquer, que le vice constaté entache d'illégalité l'ensemble de l'autorisation environnementale, y compris s'agissant d'un vice d'incompétence, ou seulement une partie divisible de celle-ci.

8. Lorsque les juges du fond, après avoir écarté comme non fondés des moyens de la requête, ont cependant retenu l'existence d'un ou de plusieurs vices entachant la légalité d'une autorisation environnementale dont l'annulation leur était demandée et ont alors décidé de surseoir à statuer en faisant usage des pouvoirs qu'ils tiennent de l'article L. 181-18 du code de l'environnement pour inviter l'administration à régulariser ce ou ces vices, l'auteur du recours formé contre le jugement ou l'arrêt avant dire droit peut contester ce jugement ou cet arrêt en tant qu'il a écarté comme non fondés les moyens dirigés contre l'autorisation environnementale initiale et également en tant qu'il a fait application des dispositions de l'article L. 181-18. Toutefois, à compter de la délivrance de l'autorisation modificative en vue de régulariser le ou les vices relevés, les conclusions dirigées contre le jugement ou l'arrêt avant dire droit, en tant qu'il met en œuvre les pouvoirs que le juge tient de l'article L. 181-18 du code de l'environnement, sont privées d'objet.

9. En outre, il résulte de ces dispositions que, d'une part, si, à l'issue du délai qu'il a fixé dans sa décision avant dire droit pour que lui soient adressées la ou les mesures de régularisation, le juge peut à tout moment statuer sur la demande d'annulation de l'autorisation initiale et, le cas échéant, y faire droit si aucune mesure de régularisation ne lui a été notifiée, il ne saurait se fonder sur la circonstance que ces mesures lui ont été adressées alors que le délai qu'il avait fixé dans sa décision avant dire droit était échu pour ne pas en tenir compte dans son appréciation de la légalité de l'autorisation attaquée.

10. Trois arrêtés, qui modifient et complètent les arrêtés litigieux, ont été édictés le 30 avril 2021, après un nouvel avis de l'autorité environnementale du 12 décembre 2019 et la réalisation d'une enquête publique complémentaire, pour permettre la régularisation du vice relevé dans le jugement avant-dire droit attaqué. Par suite, il résulte de ce qui a été dit au point 8 qu'il n'y a plus lieu de statuer sur les conclusions de la requête dirigées contre le jugement avant dire droit en tant qu'il met en œuvre les pouvoirs que le juge tient de l'article L. 181-18 du code de l'environnement, sans qu'y fasse obstacle, contrairement à ce que soutiennent les requérants, la circonstance que les autorisations modificatives ont été produites postérieurement à l'expiration du délai accordé par le tribunal administratif, ce retard étant au demeurant dû aux difficultés d'organisation d'une enquête publique pendant les périodes de confinement résultant de la pandémie de Covid-19 et a fait l'objet d'une information régulière du président du tribunal administratif.

Sur les conclusions tendant à l'annulation des arrêtés modificatifs du 30 avril 2021 :

11. Si les requérants soutiennent que les arrêtés modificatifs du 30 avril 2021 sont entachés d'illégalité dès lors qu'ils n'ont pas tenu compte des oppositions locales au projet, il résulte de l'instruction que le tribunal administratif de Cergy-Pontoise n'a pas, à la date du présent arrêt, statué au fond. Par suite, les requérants, parties à l'instance ayant donné lieu à un jugement avant-dire droit sur le fondement de l'article L. 181-18 du code de l'environnement, ne peuvent contester la légalité des mesures de régularisation que dans le cadre de l'instance toujours en cours devant le tribunal administratif. La circonstance qu'ils aient formé appel contre le jugement avant dire droit est sans incidence à cet égard.

Sur les conclusions tendant à l'annulation du jugement attaqué en tant qu'il écarté les autres moyens de première instance comme non-fondés :

En ce qui concerne le cadre juridique :

12. Les dispositions de l'ordonnance du 26 janvier 2017, codifiées aux articles L. 181-1 et suivants du code de l'environnement, instituent une autorisation environnementale dont l'objet est de permettre qu'une décision unique tienne lieu de plusieurs décisions auparavant distinctes dans les conditions qu'elles précisent.

13. L'article 15 de l'ordonnance du 26 janvier 2017 précise les conditions d'entrée en vigueur de ces dispositions : " Les dispositions de la présente ordonnance entrent en vigueur le 1er mars 2017, sous réserve des dispositions suivantes : / 1° Les autorisations délivrées au titre du chapitre IV du titre Ier du livre II ou du chapitre II du titre Ier du livre V du code de l'environnement dans leur rédaction antérieure à la présente ordonnance, ou au titre de l'ordonnance n° 2014-355 du 20 mars 2014 ou de l'ordonnance n° 2014-619 du 12 juin 2014, avant le 1er mars 2017, sont considérées comme des autorisations environnementales relevant du chapitre unique du titre VIII du livre Ier de ce code, avec les autorisations, enregistrements, déclarations, absences d'opposition, approbations et agréments énumérés par le I de l'article L. 181-2 du même code que les projets ainsi autorisés ont le cas échéant nécessités ; les dispositions de ce chapitre leur sont dès lors applicables, notamment lorsque ces autorisations sont contrôlées, modifiées, abrogées, retirées, renouvelées, transférées, contestées ou lorsque le projet autorisé est définitivement arrêté et nécessite une remise en état ; / (...) ". Sous réserve des dispositions de son article 15 précité, l'article 16 de la même ordonnance abroge les dispositions de l'ordonnance du 20 mars 2014 relatives à l'expérimentation d'une autorisation unique en matière d'installations classées pour la protection de l'environnement.

14. Il résulte de ces dispositions que l'ordonnance du 26 janvier 2017 n'a ni pour objet, ni pour effet de modifier rétroactivement les dispositions régissant la procédure de délivrance des autorisations uniques prévue par l'ordonnance du 20 mars 2014.

15. En vertu de l'article L. 181-17 du code de l'environnement, issu de l'article 1er de l'ordonnance du 26 janvier 2017 et applicable depuis le 1er mars 2017, l'autorisation environnementale est soumise, comme l'autorisation l'unique l'était avant elle ainsi que les autres autorisations mentionnées au 1° de l'article 15 de cette même ordonnance, à un contentieux de pleine juridiction. Il appartient, dès lors, au juge du plein contentieux d'apprécier le respect des règles de procédure régissant la demande d'autorisation au regard des circonstances de fait et de droit en vigueur à la date de délivrance de l'autorisation et celui des règles de fond régissant l'installation au regard des circonstances de fait et de droit en vigueur à la date à laquelle il se prononce, sous réserve du respect des règles d'urbanisme qui s'apprécie au regard des circonstances de fait et de droit applicables à la date de l'autorisation.

16. Si, en application du 1° de l'article 15 de l'ordonnance du 26 janvier 2017, les autorisations uniques délivrées au titre de l'ordonnance du 20 mars 2014 sont considérées, depuis le 1er mars 2017, comme des autorisations environnementales, il résulte de ce qui a été dit aux points précédents qu'il revient au juge administratif, lorsqu'il est saisi d'une contestation contre une autorisation unique, d'en apprécier la légalité au regard des règles de procédure relatives aux autorisations uniques applicables à la date de sa délivrance.

En ce qui concerne la procédure d'enquête publique :

17. En premier lieu, les requérants soutiennent que l'avis de la mission régionale d'autorité environnementale du 12 décembre 2019 aurait dû être joint au dossier de l'enquête publique réalisée en mai et juin 2016, plus de trois ans auparavant. A supposer que ce moyen puisse être regardé comme tiré de la nécessité d'organiser une nouvelle enquête publique, il résulte de l'instruction qu'une enquête publique complémentaire a été organisée du 16 septembre 2020 au 15 octobre 2020. Par suite, ce moyen doit, en tout état de cause, être écarté.

18. En deuxième lieu, en se bornant à citer les points 19 et 20 du jugement attaqué, qui se prononcent sur la composition du dossier d'enquête publique, sans indiquer en quoi l'analyse des premiers juges serait erronée, les requérants ne soulèvent pas de moyen dont la cour pourrait apprécier le bien-fondé. Si les requérants soutiennent également que le dossier soumis à l'enquête publique était insuffisant dès lors qu'il ne mentionnait pas les qualifications de M. F..., auteur de plusieurs expertises annexées à l'étude d'impact, les dispositions du R. 122-5 du code de l'environnement dans leur version applicable au litige n'imposaient pas la mention de telles qualifications alors, au demeurant, qu'il ressort de ces annexes que M. F... est " expert en maçonnerie du patrimoine, membre de l'ICOMOS [Conseil international des monuments et des sites], membre expert du conseil scientifique international de la pierre et référent français pour l'association mondiale des chaux dans la construction ". Par suite, le moyen tiré de l'insuffisance du dossier soumis à l'enquête publique doit être écarté.

En ce qui concerne l'étude d'impact :

19. Aux termes de l'article R. 512-8 du code de l'environnement, encore en vigueur à la date des arrêtés attaqués : " I. - Le contenu de l'étude d'impact mentionnée à l'article R. 512-6 doit être en relation avec l'importance de l'installation projetée et avec ses incidences prévisibles sur l'environnement, au regard des intérêts mentionnés aux articles L. 211-1 et L. 511-1. / II. - Le contenu de l'étude d'impact est défini à l'article R. 122-5. (...) ". Selon l'article R. 122-5 du même code : " I. - Le contenu de l'étude d'impact est proportionné à la sensibilité environnementale de la zone susceptible d'être affectée par le projet, à l'importance et la nature des travaux, ouvrages et aménagements projetés et à leurs incidences prévisibles sur l'environnement ou la santé humaine. / II. - L'étude d'impact présente : (...) / 2° Une analyse de l'état initial de la zone et des milieux susceptibles d'être affectés par le projet, portant notamment sur la population, la faune et la flore, les habitats naturels, les sites et paysages, les biens matériels, les continuités écologiques telles que définies par l'article L. 371-1, les équilibres biologiques, les facteurs climatiques, le patrimoine culturel et archéologique, le sol, l'eau, l'air, le bruit, les espaces naturels, agricoles, forestiers, maritimes ou de loisirs, ainsi que les interrelations entre ces éléments ; / 3° Une analyse des effets négatifs et positifs, directs et indirects, temporaires (y compris pendant la phase des travaux) et permanents, à court, moyen et long terme, du projet sur l'environnement, en particulier sur les éléments énumérés au 2° et sur la consommation énergétique, la commodité du voisinage (bruits, vibrations, odeurs, émissions lumineuses), l'hygiène, la santé, la sécurité, la salubrité publique, ainsi que l'addition et l'interaction de ces effets entre eux ; (...) ".

20. Les éventuelles inexactitudes, omissions ou insuffisances d'une étude d'impact ne sont susceptibles de vicier la procédure, et donc d'entraîner l'illégalité de la décision prise au vu de cette étude, que si elles ont pu avoir pour effet de nuire à l'information complète de la population ou si elles ont été de nature à exercer une influence sur la décision de l'autorité administrative.

21. En premier lieu, il ressort de l'annexe 7 de l'étude d'impact, qui présente une évaluation écologique du périmètre du site d'exploitation de la carrière tant souterraine qu'à ciel ouvert, que le pétitionnaire a fait réaliser un inventaire des chiroptères sur l'ensemble du site concerné par l'exploitation, à l'exception de l'intérieur du fort de Cormeilles, et a constaté la présence de la seule Pipistrelle commune avant de conclure que le site ne constituait pas un habitat favorable, ni une aire de nourrissage prioritaire. Si les requérants produisent une étude ayant constaté, à partir d'un point d'écoute situé immédiatement à l'extérieur du fort, que d'autres espèces, notamment la Pipistrelle de Kuhl et la Noctule commune, étaient présentes dans ou à proximité immédiate du fort, il résulte de l'instruction qu'au droit du fort l'exploitation de la carrière sera uniquement souterraine. En outre, l'arrêté du 3 février 2017 prévoit plusieurs mesures tendant à réduire les impacts sur ces espèces en prévoyant, notamment, une exploitation par abattage mécanique ne créant pas de vibrations susceptibles de nuire à ces espèces protégées lorsque le niveau des vibrations provoquées par un tir de mine serait trop important et dans une bande de 200 mètres à l'horizontale du fort de Cormeilles. Dans ces conditions, l'étude d'impact, qui mentionne expressément la protection dont font l'objet les chiroptères, ainsi que cela a en outre été indiqué dans la demande de " dérogation espèces protégées ", ne saurait être regardée comme ayant insuffisamment pris en compte ces espèces, ni omis de prendre des mesures de nature à limiter l'impact de l'exploitation.

22. En deuxième lieu, contrairement à ce que soutiennent les requérants, l'étude d'impact analyse de façon précise et détaillée les conditions d'accès au site, notamment s'agissant des poids-lourds, ainsi que l'évolution du trafic routier engendrée par l'extension de l'exploitation. A cet égard, la situation de l'usine plâtrière, localisée sur le même site que la carrière, et la question du trafic qu'elle occasionne sont clairement explicitées et prises en compte dans le calcul présenté. En outre, l'étude d'impact présente clairement les mesures prévues pour réduire les nuisances et les risques liés à cette circulation, en particulier l'interdiction d'accéder au site aux heures de pointe pour éviter de surcharger le réseau routier.

23. En troisième lieu, si les requérants doivent être regardés comme soutenant que l'étude d'impact ne justifie pas suffisamment l'augmentation du remblaiement total et du trafic qui en découle, il résulte de l'instruction qu'il est au contraire prévu de réduire le tonnage du remblaiement.

24. En dernier lieu, s'il résulte de l'instruction que la nomenclature du plan de prévention des risques de mouvement de terrain figurant dans l'étude d'impact correspond à un plan antérieur, cette seule circonstance n'est pas de nature à entacher l'étude d'impact d'insuffisance dès lors que l'appréciation des risques et des aléas est demeurée inchangée. En outre, l'étude d'impact, qui analyse la compatibilité du projet avec le plan de prévention des risques, mentionne également, dans l'étude de danger, les risques d'effondrement liés à l'exploitation souterraine de la carrière et les mesures permettant de limiter ce risque. Enfin, la circonstance que le plan de prévention des risques mentionne des incertitudes quant au périmètre de certaines anciennes carrières ne suffit pas à établir que l'étude d'impact aurait insuffisamment apprécié le risque d'affaissement. Dans ces conditions, le moyen tiré de ce que l'étude d'impact n'aurait pas suffisamment pris en compte les risques d'affaissement, notamment illustré par l'adoption d'un plan de prévention des risques, doit être écarté.

25. Il résulte de ce qui précède que l'étude d'impact soumise au public était suffisante au regard des exigences précitées de l'article R. 122-5 du code de l'environnement, sans que les observations formulées par la mission régionale d'autorité environnementale le 12 décembre 2019 ne suffisent, eu égard à la portée des moyens soulevés par les requérants, à remettre en cause cette appréciation.

En ce qui concerne les conclusions de la commission d'enquête publique :

26. Aux termes de l'article R. 123-19 du code de l'environnement : " Le commissaire enquêteur ou la commission d'enquête établit un rapport qui relate le déroulement de l'enquête et examine les observations recueillies. / Le rapport comporte le rappel de l'objet du projet, plan ou programme, la liste de l'ensemble des pièces figurant dans le dossier d'enquête, une synthèse des observations du public, une analyse des propositions produites durant l'enquête et, le cas échéant, les observations du responsable du projet, plan ou programme en réponse aux observations du public. / Le commissaire enquêteur ou la commission d'enquête consigne, dans une présentation séparée, ses conclusions motivées, en précisant si elles sont favorables, favorables sous réserves ou défavorables au projet. (...) ".

27. Il résulte de ces dispositions que si la commission d'enquête n'est pas tenue de répondre à chacune des observations présentées lors de l'enquête publique, elle doit présenter au moins sommairement une analyse sur toutes les questions soulevées par ces observations et émettre un avis personnel sur le projet soumis à enquête, en exposant les raisons qui déterminent le sens de cet avis.

28. En l'espèce, la commission d'enquête a émis un avis personnel et circonstancié sur l'ensemble des sujets dont elle était saisie. La circonstance que sa réponse ne correspondrait pas aux observations des requérants n'est pas, par elle-même, de nature à faire regarder ses conclusions comme insuffisamment motivées.

En ce qui concerne l'édiction de trois arrêtés distincts :

29. Il résulte de l'instruction que la société Placoplatre a déposé un dossier unique portant à la fois sur l'extension de l'autorisation d'exploiter une carrière à ciel ouvert et sur l'autorisation d'une carrière souterraine sur un même site. Ces différentes demandes ont fait l'objet d'une seule enquête publique, compte tenu, ainsi que le rappellent d'ailleurs les requérants, des effets cumulés de ces autorisations et de la nécessité d'appréhender globalement leurs impacts.

30. En premier lieu, aux termes de l'article R. 512-13 du code de l'environnement, encore en vigueur à la date des arrêtés attaqués : " Si plusieurs installations classées doivent être exploitées par le même exploitant sur le même site, une seule demande d'autorisation peut être présentée pour l'ensemble de ces installations. / Il est procédé à une seule enquête et un seul arrêté peut statuer sur l'ensemble et fixer les prescriptions prévues à l'article R. 512-28 ".

31. Si les requérants soutiennent qu'une autorisation unique devait être accordée dans le cas d'installations dont le fonctionnement est intrinsèquement lié, il résulte des dispositions précitées, seules en vigueur à la date des arrêtés attaqués, que le préfet pouvait légalement décider, après avoir soumis les demandes à une enquête publique unique pour tenir compte de leurs impacts cumulés, d'édicter trois arrêtés d'autorisation distincts, sans que cela n'entache la procédure d'inintelligibilité ou conduise à une dilution du contrôle des prescriptions imposées à la société pétitionnaire dès lors que les trois autorisations portent sur des activités dissociables. Par suite, en choisissant d'édicter trois arrêtés distincts pour autoriser, respectivement, l'exploitation d'une carrière souterraine sous talus, la poursuite de l'exploitation à ciel ouvert et l'extension de l'exploitation en souterrain, le préfet n'a pas entaché la procédure d'irrégularité à raison de son inintelligibilité, ni plus largement entaché ces arrêtés d'illégalité.

32. En second lieu si, à l'issue de l'enquête publique, il a été décidé de statuer sur ces demandes par trois arrêtés distincts, cette possibilité, au demeurant prévue par les dispositions précitées ainsi qu'il a été dit au point précédent, n'a pas été de nature à nuire à l'information du public dès lors que le dossier, notamment son résumé non-technique, fait clairement état d'une demande relative à l'exploitation d'une carrière à ciel ouvert, d'une part, et d'une demande relative à l'exploitation d'une carrière souterraine, d'autre part, cette dernière étant composée de deux volets - l'exploitation sous talus et l'exploitation souterraine - mentionnés et détaillés par le dossier de demande, notamment grâce aux différentes cartes jointes. En outre, il ressort de ce résumé non-technique que ces demandes s'inscrivent dans le contexte d'une autorisation en cours de validité, délivrée par arrêté du 21 octobre 1999, pour l'exploitation d'une carrière à ciel ouvert, dont il était expressément demandé le renouvellement et l'extension. Par suite, le dossier de demande fait clairement apparaître le lien entre les demandes ayant fait l'objet des arrêtés attaqués et l'arrêté initial du 21 octobre 1999, sans que la modification de cet arrêté par les arrêtés du 14 novembre 2016 et du 3 février 2017 ne suffise à caractériser une confusion ou un manque d'intelligibilité, ni à faire obstacle à un contrôle objectif des différentes prescriptions. En outre, il résulte de l'instruction que les membres de la commission départementale de la nature, des paysages et des sites, qui s'est réunie le 20 juillet 2016, a été informée, contrairement à ce que soutiennent les requérants, de l'éventualité que ces activités seraient autorisées par trois arrêtés distincts alors, au demeurant, que l'arrêté du 2 août 2016 autorisant l'exploitation d'une carrière souterraine sous talus précise les raisons qui ont conduit le préfet à dissocier cette exploitation du reste des activités souterraines. Par suite, la présentation d'un dossier de demande unique soumis à une enquête publique unique n'a pas été de nature à nuire à l'information du public ou des personnes chargées d'émettre un avis sur les demandes d'autorisation.

En ce qui concerne la méconnaissance de l'article L. 511-1 du code de l'environnement :

33. Le fort de Cormeilles-en-Parisis, qui est un ancien fort militaire, construit entre 1874 et 1877, faisant partie intégrante du camp retranché de Paris, non classé ou inscrit mais ayant cependant un intérêt historique, architectural et patrimonial certain, présente des éléments de fragilité à la fois intrinsèques, liés à sa conception, et faisant suite au passage du temps, notamment l'apparition de fissures. Or, il résulte de l'instruction que l'exploitation souterraine de la carrière autorisée par l'arrêté du 3 février 2017 sous l'emprise du fort pourrait conduire à un tassement maximum de 2 cm ce qui, selon les requérants, est susceptible nuire à la solidité des structures du fort et à la conservation des façades plaquées, des voutes et des tunnels.

34. Toutefois, il résulte de l'instruction que l'impact de l'exploitation sur le fort, notamment ses tunnels et ses façades, a fait l'objet de plusieurs rapports d'expertise dont les conclusions ont été reprises dans l'étude d'impact qui reprend expressément la mesure d'un tassement de 2 cm envisagée par les expertises. Il en résulte que les tassements résultant de l'exploitation de la carrière souterraine ne devraient engendrer qu'un risque très faible pour le fort compte tenu à la fois de l'ampleur maximale envisagée de 2 cm, de la capacité d'adaptation de tout bâtiment à des tassements limités, clairement exposée dans les expertises jointes au dossier de demande, et des mesures d'évitement et de réduction prises. L'arrêté attaqué prévoit ainsi de ne pas réaliser d'extraction au droit des principaux bâtiments du fort, notamment les bâtiments " Casernement " et " Officier ", de mesurer les vibrations pour chaque tir de mines réalisé à moins de 200 mètres du fort, d'adapter, le cas échéant, la méthode d'extraction à partir d'un certain seuil de vibration et de mettre en place des mesures de suivi des tassements et des vibrations et de leur impact sur le bâtiment. Il est également prévu que les bâtiments actuellement habités à proximité du fort seront évacués lorsque le front de l'exploitation arrivera à une distance de 200 mètres. Si les requérants estiment que ces mesures sont insuffisantes à réduire le risque, ils ne produisent aucune étude sérieuse permettant d'établir que le risque aurait été sous-estimé par le pétitionnaire, ni de contredire l'appréciation de ce risque après application des mesures d'évitement et de réduction prévues. La seule circonstance que le fort ait été identifié en 2020, au titre de la mission menée par Stéphane Bern, en vue de sa rénovation ne suffit pas à établir qu'il serait fragilisé au point de ne pouvoir résister au tassement prévu. En outre, s'il est vrai qu'une première version du rapport d'expertise du fort établi par M. F... indiquait que ce dernier devrait faire l'objet de mesures de consolidation avant toute exploitation, cette version, qui n'est pas la version finale annexée à l'étude d'impact, ne tenait pas compte des mesures d'évitement et de réduction envisagées ultérieurement qui aboutissent à réduire le risque pour le fort à un niveau faible.

35. Par ailleurs, les requérants soutiennent que les calculs réalisés par le pétitionnaire quant au dimensionnement de la carrière et la hauteur du levage sont insuffisants ou erronés et ne démontrent ainsi pas que la carrière peut être exploitée sans causer de dommages irréversibles au fort. Toutefois, il ressort de l'arrêté du 3 février 2017 que la hauteur maximale du levage sera limitée à 12,5 mètres, conformément aux recommandations de la tierce-expertise. Dans ces conditions, il ne résulte pas de l'instruction que les prescriptions imposées au pétitionnaire seraient insuffisantes pour garantir la stabilité du fort.

36. En outre, si la tierce-expertise procède à quelques remarques méthodologiques sur le nombre de sondages et la qualité du gypse, elle conclut, par ses propres constatations, à la bonne qualité du gypse du site de Cormeilles.

37. Par suite, les moyens tirés de la méconnaissance de l'article L. 511-1 du code de l'environnement doit être écarté et de l'insuffisance des prescriptions imposées à l'exploitant pour assurer la conservation du fort doivent être écartés.

38. Il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'examiner les fins de non-recevoir soulevées par la société Placoplatre, que les requérants ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a sursis à statuer pour permettre la régularisation des arrêtés du 2 août 2016, 14 novembre 2016 et 3 février 2017 et a écarté comme non-fondés les autres moyens de leurs demandes de première instance.

Sur l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

39. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement de la somme que les requérants à ce titre. Par ailleurs, il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge des requérants le versement de la somme que la société Placoplatre demande sur le fondement des mêmes dispositions.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de l'association des amis du fort de Cormeilles et de M. D... est rejetée.

Article 2 : Les conclusions de la société Placoplatre présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à l'association des amis du fort de Cormeilles, à M. K... D..., au ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires et à la société Placoplatre.

Copie en sera adressée au préfet du Val d'Oise

Délibéré après l'audience du 9 mai 2023, à laquelle siégeaient :

M. Even, président de chambre,

M. Camenen, président-assesseur,

Mme Houllier, première conseillère,

Rendu public par mise à disposition au greffe le 1er juin 2023.

La rapporteure,

S. HOULLIERLe président,

B. EVENLa greffière,

C. RICHARD

La République mande et ordonne au ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme

La greffière,

2

N° 20VE00075


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 20VE00075
Date de la décision : 01/06/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

44-02 Nature et environnement. - Installations classées pour la protection de l'environnement.


Composition du Tribunal
Président : M. EVEN
Rapporteur ?: Mme Sarah HOULLIER
Rapporteur public ?: M. FREMONT
Avocat(s) : SELARL ATMOS AVOCATS

Origine de la décision
Date de l'import : 11/06/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2023-06-01;20ve00075 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award