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11/04/2023 | FRANCE | N°21VE01402

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 1ère chambre, 11 avril 2023, 21VE01402


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. et Mme B... C... ont demandé au tribunal administratif de Versailles de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles ils ont été assujettis au titre de l'année 2014 ainsi que des pénalités correspondantes.

Par un jugement n° 1903061 du 23 mars 2021, le tribunal administratif de Versailles a prononcé la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles ils ont été assu

jetti au titre de l'année 2014 à hauteur de la réduction de leurs bases d'imposition...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. et Mme B... C... ont demandé au tribunal administratif de Versailles de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles ils ont été assujettis au titre de l'année 2014 ainsi que des pénalités correspondantes.

Par un jugement n° 1903061 du 23 mars 2021, le tribunal administratif de Versailles a prononcé la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles ils ont été assujetti au titre de l'année 2014 à hauteur de la réduction de leurs bases d'imposition dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers d'un montant de 140 000 euros et a rejeté le surplus des conclusions de leur demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 18 mai 2021 et un mémoire enregistré le 13 décembre 2022, M. et Mme C..., représentés par Me Charpy, avocate, demandent à la cour :

1°) de réformer le jugement attaqué en tant qu'il ne fait pas intégralement droit à leur demande ;

2°) de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles ils ont été assujettis au titre de l'année 2014 restant à leur charge, ainsi que les pénalités ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 9 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- la proposition de rectifications ne répond pas aux exigences de motivation figurant à l'article L. 57 du livre des procédures fiscales, faute pour celle-ci de comporter le détail des sommes comptabilisées au crédit du compte courant d'associé de M. C... dans les écritures de la SAS SL Agro ;

- les rectifications correspondants à des écritures antérieures au 30 septembre 2013 sont prescrites et sont contraires au principe selon lequel une entreprise ne peut faire l'objet de deux contrôles portant sur les mêmes écritures comptables ;

- c'est à tort que les sommes portées au crédit du compte courant d'associé de M. C... ont été réintégrées à leur revenu imposable, dès lors qu'ils justifient des écritures et de l'origine de ces sommes, notamment dans des opérations antérieures à l'exercice vérifié, et qu'il s'agit d'apports en nature, en espèces ou des remboursements de frais que M. C... a engagé pour le compte de la SAS SL Agro ;

- la circonstance que le compte courant d'associé de M. C... n'était pas soldé au 31 décembre 2015 ne peut justifier un rehaussement dès lors qu'il était soldé avant les deux apports de 70 000 euros que la société n'était pas en mesure de rembourser et que l'administration fiscale n'a pas apporté la preuve, comme elle en a la charge, de l'appréhension effective des sommes correspondantes par M. C... ;

- ils justifient d'une somme de 19 500 euros intitulé " Ran Ran Ran VTES " sur le relevé de 2014 et " RAN RAN RAN VTES MOBILIER P/LR " sur le relevé de 2013 qui correspond au prix de vente de mobiliers de M. C... à la société, ce qui a été admis par l'administration fiscale lors d'un précédent contrôle.

Par un mémoire en défense et deux mémoires, enregistrés les 7 octobre 2021, 28 septembre 2022 et 16 décembre 2022, le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique conclut au non-lieu à statuer à hauteur du dégrèvement annoncé et au rejet du surplus des conclusions de la requête de M. et Mme C....

Il fait valoir que les sommes créditées au compte courant d'associé de M. C... sont justifiées à hauteur d'une somme de 30 068 euros et que pour le reste, les moyens que M. et Mme C... soulèvent ne sont pas fondés.

Par ordonnance du 14 décembre 2022, la clôture d'instruction a été fixée au 31 janvier 2023 à 12 heures en application de l'article R. 613-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. A...,

- les conclusions de Mme Bobko, rapporteure publique,

- et les observations de Me Charpy et de M. C....

Considérant ce qui suit :

1. Au cours d'une vérification de comptabilité de la SAS SL Agro, dont M. C... était gérant et associé, l'administration fiscale a constaté l'inscription de la somme globale de 295 862 euros, portée au crédit de son compte courant d'associé. Elle a alors notifié à M. et Mme C... un rehaussement de leur base imposable à l'impôt sur le revenu au titre de l'année 2014, correspondant notamment à la réintégration dans leur revenu imposable, dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers, de cette somme. M. et Mme C... relèvent appel du jugement du 23 mars 2021 par lequel le Tribunal administratif de Versailles les a déchargés des cotisations correspondantes à la réintégration d'une somme de 140 000 euros considérée justifiée et a rejeté le surplus des conclusions de leur demande.

Sur l'étendue du litige :

2. Par un avis de dégrèvement du 28 septembre 2022, postérieur à l'introduction de la requête, l'administration fiscale a prononcé le dégrèvement de la somme de 25 768 euros en droits et pénalités d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux correspondant à une réduction en bases d'imposition de 30 068 euros dont l'inscription au crédit du compte courant d'associé de M. C... a été justifié par la production de trois chèques bancaires. Les conclusions de la requête sont, dans cette mesure, devenues sans objet. Il n'y a plus lieu d'y statuer.

Sur la régularité de la procédure d'imposition :

3. Aux termes du premier alinéa de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales : "'L'administration adresse au contribuable une proposition de rectification qui doit être motivée de manière à lui permettre de formuler ses observations ou de faire connaître son acceptation. "'et aux termes de l'article R 57-1 du même livre : "'La proposition de rectification prévue par l'article L 57 fait connaître au contribuable la nature et les motifs de la rectification envisagée. (...)'". Il résulte de ces dispositions que l'administration doit indiquer au contribuable, dans la proposition de rectification, les motifs et le montant des rehaussements envisagés, leur fondement légal et la catégorie de revenus dans laquelle ils sont opérés, ainsi que les années d'imposition concernées.

4. M. et Mme C... soutiennent que la proposition de rectification du 17 novembre 2017 serait insuffisamment motivée au vu des exigences des articles précités, faute pour elle de comporter le détail des sommes comptabilisées au compte courant d'associé de M. C... qui ont été réintégrées à leur revenu imposable. Toutefois, comme l'ont à juste titre relevé les premiers juges, cette proposition indique les motifs, à savoir l'absence de justification de l'inscription au crédit du compte courant, le montant global, à savoir 295 862 euros en base, que l'administration n'avait pas à détailler, le fondement légal, à savoir le 2° du 1 de l'article 109 du code général des impôts et la catégorie de revenus, à savoir les revenus de capitaux mobiliers " RCM ". Le moyen tiré de l'insuffisance de motivation de la proposition de rectification doit être écarté.

5. M. et Mme C... soutiennent que la procédure d'imposition aurait méconnu le principe selon lequel " une entreprise ne peut faire l'objet de deux contrôles fiscaux portant sur les mêmes écritures comptables ". Toutefois, en tout état de cause, le contrôle précédent dont ils se prévalent portait sur une période allant du 1er avril 2011 au 30 septembre 2013, tandis que le contrôle dont il s'agit porte sur la période allant du 1er octobre 2013 au 30 septembre 2015. La circonstance que, lors du contrôle en litige dans la présente espèce, l'administration ait pris connaissance de pièces comptables justificatives datées d'années antérieures à celles de ce contrôle n'est pas de nature à caractériser un nouveau contrôle de ces années antérieures. Par ailleurs, aucun principe d'aucun texte n'interdit à l'administration fiscale de prendre connaissance des mêmes écritures comptables au cours de deux contrôles successifs. Le moyen doit être écarté.

Sur le bien-fondé des impositions :

6. Aux termes de l'article 109 du code général des impôts : " 1. Sont considérés comme revenus distribués : (...) / 2° Toutes les sommes ou valeurs mises à la disposition des associés, actionnaires ou porteurs de part et non prélevées sur les bénéfices. / (...) ".

7. M. et Mme C... soutiennent que les écritures en date du 1er octobre 2014 sur lesquelles se fonde la rectification sont des écritures d'à nouveau qui ont été passées initialement lors d'un exercice prescrit. Les rectifications contestées trouvent leur origine dans la réintégration, comme somme non prélevée sur les bénéfices, d'écritures d'inscription, au crédit du compte courant d'associé de M. C... et au passif de la société, de sommes qui n'ont pas été considérées comme justifiées. Aucune disposition relative au délai de reprise de l'administration fiscale, ni aucun principe de droit, ne fait obstacle à ce que l'administration fiscale demande au contribuable de justifier des écritures qui figurent sur la comptabilité d'exercices non-prescrits, quand bien même les écritures initiales ont été passées au cours d'exercices prescrits. Le moyen doit dès lors être écarté.

8. Les sommes inscrites au crédit d'un compte courant d'associé ont, sauf preuve contraire apportée par l'associé titulaire du compte, le caractère de revenus imposables dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers. M. et Mme C... soutiennent que la somme globale de 125 794 euros, correspondant à la différence entre, d'une part, le total de 295 862 euros porté au crédit du compte courant d'associé de M. C... et, d'autre part, des sommes de 140 000 euros dont ils ont justifié devant les premiers juges et de 30 068 dont ils ont justifié en cours d'instance, seraient des écritures de report à nouveau qui correspondraient à des apports en nature (vente de mobilier), à des remises de chèques ou encore à des remboursements de frais que M. C... aurait engagés pour le compte de la SAS SL Agro, à savoir taxi, restaurant, greffe, SNCF, stationnement, la poste, URSSAF, note de frais. Toutefois, ils ne produisent pas d'autre pièce susceptible de justifier de la réalité de ces apports en numéraire que les chèques qui ont donné lieu à dégrèvement, ni aucune pièce susceptible de justifier les apports en nature ou ces frais. Dès lors, le moyen tiré de ce que la somme de 125 794 euros correspondrait à des apports de M. C... doit être écarté.

9. M. et Mme C... soutiennent qu'ils justifient de l'inscription au crédit du compte courant d'associé de M. C... d'une somme de 19 500 euros qui correspondrait à la mise à disposition de mobilier à la SAS SL Agro par celui-ci. Toutefois, faute pour M. et Mme C... de produire le moindre élément de nature à justifier la mise à disposition effective de ces meubles et leur prix d'acquisition, ils n'apportent pas la preuve, qui leur incombe, que cette somme correspondrait à un apport en nature.

10. En application des dispositions précitées de l'article 109 du code général des impôts, les sommes mises à disposition des associés, actionnaires ou porteurs de part, sont présumées distribuées à la date de clôture de l'exercice au terme duquel leur existence a été constatée, sauf si la société, l'associé, l'actionnaire ou le porteur de parts, ou l'administration, apportent des éléments de nature à établir que la distribution a été, en fait, opérée à une autre date.

11. M. et Mme C... soutiennent que M. C... ne peut être regardé comme ayant effectivement appréhendé la somme de 125 794 euros, alors que son compte courant était soldé le 1er octobre 2014 avant deux apports de 70 000 euros effectués ce même jour par deux remises de chèque. M. et Mme C... se bornent à faire état de ces circonstances, sans produire d'élément de nature à établir la date à laquelle la somme de 125 794 euros aurait été appréhendée. Ils font également état de ce que la SAS SL AGRO était déficitaire et aurait fait face à des difficultés financières ayant conduit à sa liquidation, sans expliquer le devenir de ces apports lors de la liquidation qu'ils évoquent, ni apporter d'élément de nature à établir le caractère indisponible des sommes inscrites en compte-courant. Dans ces conditions, l'administration fiscale pouvait à bon droit présumer distribuée la somme de 125 794 euros au cours de l'année 2014.

12. Il résulte de ce qui précède que M. et Mme C... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Versailles a rejeté le surplus de leur demande. Par suite, leur requête doit être rejetée, y compris leurs conclusions présentées au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DECIDE :

Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions de la requête aux fins de décharge à hauteur des sommes de 16 914 euros de droits d'impôt sur le revenu et 3 653 euros de pénalités et de 4 660 euros de prélèvements sociaux et 541 euros de pénalités au titre de l'année 2014.

Article 2 : Le surplus des conclusions de la requête de M. et Mme C... est rejeté.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. et à Mme B... C... et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.

Délibéré après l'audience du 28 mars 2023, à laquelle siégeaient :

M. Beaujard, président de chambre,

Mme Dorion, présidente assesseure,

M. Tar, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 11 avril 2023.

Le rapporteur,

G. A...Le président,

P. BEAUJARDLa greffière,

S. LOUISERE

La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme,

La greffière,

2

N° 21VE01402


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 21VE01402
Date de la décision : 11/04/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

Contributions et taxes - Généralités - Règles générales d'établissement de l'impôt - Prescription.

Contributions et taxes - Impôts sur les revenus et bénéfices - Règles générales - Impôt sur le revenu - Détermination du revenu imposable - Revenus à la disposition.


Composition du Tribunal
Président : M. BEAUJARD
Rapporteur ?: M. Gabriel TAR
Rapporteur public ?: Mme BOBKO
Avocat(s) : SELARL ADDECIMA

Origine de la décision
Date de l'import : 16/04/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2023-04-11;21ve01402 ?
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