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17/11/2022 | FRANCE | N°20VE02624

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 3ème chambre, 17 novembre 2022, 20VE02624


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. et Mme C... D... B... ont demandé au tribunal administratif de Montreuil de prononcer la décharge des cotisations d'impôt sur le revenu et des contributions sociales auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2007 et 2008, ainsi que des pénalités correspondantes.

Par un jugement n° 1424364 du 7 juin 2016, le tribunal administratif de Montreuil a déchargé M. et Mme D... B... d'une partie des suppléments d'impôts en litige, en ce qui concerne des distributions occultes résultant, d

'une part, de la mise à disposition par la société Smartech de la maison située 54...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. et Mme C... D... B... ont demandé au tribunal administratif de Montreuil de prononcer la décharge des cotisations d'impôt sur le revenu et des contributions sociales auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2007 et 2008, ainsi que des pénalités correspondantes.

Par un jugement n° 1424364 du 7 juin 2016, le tribunal administratif de Montreuil a déchargé M. et Mme D... B... d'une partie des suppléments d'impôts en litige, en ce qui concerne des distributions occultes résultant, d'une part, de la mise à disposition par la société Smartech de la maison située 54, rue Moxouris au Chesnay au titre des années 2007 et 2008, et, d'autre part, des frais engagées par Mme B... pour le suivi de cette société à hauteur de 901,99 euros au titre de l'année 2008, et rejeté le surplus des conclusions de leur demande.

Par un arrêt n° 16VE02601 du 16 octobre 2018, faisant partiellement droit à l'appel formé par M. et Mme D... B... contre ce jugement, la cour administrative d'appel de Versailles les a déchargés de la majoration de 25 % appliquée sur l'assiette des prélèvements sociaux calculés sur les distributions occultes restant en litige et rejeté le surplus de leur requête.

Par une décision n° 426124 du 7 octobre 2020, le Conseil d'Etat a annulé cet arrêt en tant qu'il rejette le surplus des conclusions d'appel de M. et Mme D... B... et a renvoyé l'affaire, dans cette mesure, à la cour administrative d'appel de Versailles.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés les 6 août 2016 et 19 avril 2017, et après cassation, les 24 novembre 2020 et 8 décembre 2020, M. et Mme D... B..., représentés par Me Marshall, avocate, demandent à la cour :

1°) d'annuler le jugement du 7 juin 2016 du tribunal administratif de Montreuil en tant qu'il a rejeté le surplus de leur demande ;

2°) de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux restant en litige, au titre des années 2007 et 2008, ainsi que des pénalités correspondantes ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- la réponse de l'administration à leurs observations est insuffisamment motivée, en méconnaissance des dispositions de l'alinéa 5 de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales (LPF) ;

- leur domicile fiscal n'est pas en France au sens de l'article 4 B du code général des impôts (CGI) dès lors que ni leur foyer ou lieu de séjour principal, ni leur activité professionnelle ni le centre de leurs intérêts économiques ne sont en France ;

- ils sont résidents fiscaux belges au sens de la convention fiscale franco-belge dès lors qu'ils disposent d'un foyer d'habitation permanent en Belgique et qu'ils y ont le centre de leurs intérêts vitaux ;

- les dividendes qui leur ont été versés par la société Smartech ont fait l'objet d'une retenue à la source et ne peuvent donc être imposés une deuxième fois en France dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers ;

- l'administration n'apporte pas la preuve qui lui incombe de l'appréhension, de l'existence et du montant des distributions occultes ;

- l'assiette majorée des prélèvements sociaux sur les distributions occultes est anticonstitutionnelle ;

- la pénalité pour manquement délibéré n'est pas justifiée.

Par des mémoires en défense, enregistrés les 13 janvier 2017 et 1er octobre 2018, et après cassation, les 16 novembre 2020, 3 décembre 2020 et 11 juin 2021, le ministre de l'action et des comptes publics conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par M. et Mme D... B... ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. A...,

- et les conclusions de Mme Deroc, rapporteure publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. et Mme D... B... ont fait l'objet d'un examen contradictoire de leur situation fiscale personnelle portant sur les années 2007 et 2008. Estimant que la résidence fiscale des contribuables était située en France et non en Belgique comme ils le soutenaient, l'administration fiscale a mis à leur charge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux, au titre de ces deux années, à raison de dividendes et de distributions occultes versés par la société française Smartech. M. et Mme D... B... ont porté le litige devant le tribunal administratif de Montreuil qui, par un jugement du 7 juin 2016, a prononcé une décharge partielle de ces impositions procédant des distributions occultes s'agissant, d'une part, de la mise à disposition par la société Smartech de la maison située 54, rue Moxouris au Chesnay au titre des années 2007 et 2008, et, d'autre part, des frais engagées par Mme B... pour le suivi de cette société à hauteur de 901,99 euros au titre de l'année 2008. Par un arrêt du 16 octobre 2018, faisant partiellement droit à l'appel formé par M. et Mme D... B... contre ce jugement, la cour administrative d'appel de Versailles les a déchargés de la majoration de 25 % appliquée sur l'assiette des prélèvements sociaux calculés sur les distributions occultes restant en litige et rejeté le surplus de leur requête. Par une décision n° 426124 du 7 octobre 2020, le Conseil d'Etat a annulé cet arrêt en tant qu'il rejette le surplus des conclusions d'appel de M. et Mme D... B... et a renvoyé l'affaire, dans cette mesure, à la cour.

Sur la régularité de la procédure d'imposition :

2. Aux termes de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales, dans sa version applicable au litige : " L'administration adresse au contribuable une notification de redressement qui doit être motivée de manière à lui permettre de formuler ses observations ou de faire connaître son acceptation. (...) Lorsque l'administration rejette les observations du contribuable sa réponse doit également être motivée ".

3. En premier lieu, la notification de redressement adressée au contribuable, en application de ces dispositions, a pour objet de porter à sa connaissance les motifs de droit et de fait des redressements envisagés afin qu'il puisse utilement les contester et n'a pas pour but de lui permettre d'engager un débat sur la procédure d'imposition suivie. S'il est loisible au contribuable, dans les observations qu'il fait connaître en réponse à la notification du redressement qui lui a été adressée, d'invoquer tout argument de fait ou de droit, l'administration n'est tenue de motiver sa réponse que sur les éléments relatifs au bien-fondé des impositions supplémentaires. Ainsi, l'administration n'était pas tenue de répondre à l'argumentation des requérants relative à la régularité de l'exercice du droit de communication, qui relève de la régularité de la procédure d'imposition.

4. En second lieu, lorsqu'un contribuable s'est référé, dans la réponse à la proposition de rectification que lui a adressée l'administration fiscale, aux observations formulées par un autre contribuable en les joignant à ses propres observations, l'administration est tenue, en application de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales, de répondre à de telles observations.

5. Il résulte de l'instruction que, dans leurs observations du 18 février 2011 en réponse à la proposition de rectification que leur avait adressée l'administration fiscale le 16 décembre 2010, M. et Mme D... B... ont contesté avoir appréhendé les sommes qualifiées de distributions occultes par la société Smartech. A l'appui de leur contestation sur ce chef de redressement, ils ont joint à leurs observations celles formulées par la société en réponse à la proposition de rectification que l'administration avait adressée à celle-ci et s'y sont expressément référés. Toutefois, contrairement à ce que soutient le ministre en défense, il ressort des termes de la réponse aux observations du contribuable du 2 mai 2011 que l'administration n'a pas répondu sur ce point. Ce défaut de réponse a ainsi privé les requérants de la possibilité de connaître les motifs sur lesquels l'administration s'est appuyée pour justifier le bien-fondé des rectifications maintenues en dépit de leurs observations. En revanche, l'administration fiscale a suffisamment motivé sa réponse, tant en ce qui concerne le bien-fondé des rectifications relatives à la distribution de dividendes, dans la partie de ses développements portant sur la domiciliation fiscale, que les pénalités pour manquement délibéré. Dès lors, M. et Mme D... B... sont fondés à soutenir que la procédure d'imposition est irrégulière en ce qui concerne les sommes qualifiées de distributions occultes par la société Smartech correspondant à des remboursements de frais de forfait téléphonique et, par suite, à demander la décharge, en droits et pénalités, des cotisations d'impôt sur le revenu et des prélèvements sociaux auxquels ils ont été assujettis à raison de ces frais pour un montant restant en litige de 9 000 euros au titre de l'année 2007 et de 6 298,01 euros au titre de l'année 2008.

Sur le bien-fondé des impositions assises sur les dividendes :

En ce qui concerne la domiciliation fiscale des requérants au titre de l'année 2007 :

6. Si une convention bilatérale conclue en vue d'éviter les doubles impositions peut, en vertu de l'article 55 de la Constitution, conduire à écarter, sur tel ou tel point, la loi fiscale nationale, elle ne peut pas, par elle-même, directement servir de base légale à une décision relative à l'imposition. Il incombe au juge de l'impôt, lorsqu'il est saisi d'une contestation relative à une telle convention, de se placer d'abord au regard de la loi fiscale nationale pour rechercher si, à ce titre, l'imposition contestée a été valablement établie et, dans l'affirmative, sur le fondement de quelle qualification. Il lui appartient ensuite, le cas échéant, en rapprochant cette qualification des stipulations de la convention, de déterminer - en fonction des moyens invoqués devant lui ou même, s'agissant de déterminer le champ d'application de la loi, d'office - si cette convention fait ou non obstacle à l'application de la loi fiscale. Il en est ainsi à l'égard de toute convention ayant cet objet, telle que la convention conclue le 10 mars 1964 entre la France et la Belgique, alors même qu'elle définit directement les critères de la résidence fiscale à prendre en compte pour les besoins de son application.

S'agissant de la loi fiscale française :

7. Aux termes de l'article 4 A du code général des impôts : " Les personnes qui ont en France leur domicile fiscal sont passibles de l'impôt sur le revenu en raison de l'ensemble de leurs revenus. / Celles dont le domicile fiscal est situé hors de France sont passibles de cet impôt en raison de leurs seuls revenus de source française ". Aux termes de l'article 4 B du même code dans sa rédaction applicable au litige : " 1. Sont considérées comme ayant leur domicile fiscal en France au sens de l'article 4 A : / a. Les personnes qui ont en France leur foyer ou le lieu de leur séjour principal ; / b. Celles qui exercent en France une activité professionnelle, salariée ou non, à moins qu'elles ne justifient que cette activité y est exercée à titre accessoire ; / c. Celles qui ont en France le centre de leurs intérêts économiques. (...) ".

8. Lorsqu'une personne dispose d'un patrimoine en France, il y a lieu, pour déterminer le centre de ses intérêts économiques au sens du c du 1 de l'article 4 B du code général des impôts, de rechercher si ce patrimoine est productif de revenus et de comparer

ceux-ci aux revenus perçus dans les autres pays avec lesquels elle présente des liens. L'appréciation du centre des intérêts économiques d'un contribuable s'opère au regard des éléments de fait de l'année d'imposition.

9. Il résulte de l'instruction que la société Smartech, dans laquelle M. et Mme D... B... sont associés à hauteur de 99,48 %, a procédé, à la suite l'assemblée générale ordinaire du 30 juin 2007, à une distribution de dividendes au profit des requérants d'un montant de 348 180 euros au titre de l'année 2007. La société Smartech a déclaré une retenue à la source de 15 % sur ce montant et a versé au Trésor un montant de 52 227 euros. Les requérants ont ensuite déclaré à l'impôt sur le revenu en Belgique la somme de 295 953 euros, correspondant au montant des dividendes après retenue à la source. L'administration fiscale a estimé que la résidence fiscale des requérants était située en France et non en Belgique. Elle a en conséquence procédé à la réintégration du montant des dividendes, en application du 3° de l'article 158 du code général des impôts, dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers au titre de l'année 2007.

10. Les requérants soutiennent que leur domicile fiscal n'est pas en France dès lors qu'ils n'y ont pas leur foyer ou le lieu de leur séjour principal, qu'ils n'y exercent pas d'activité professionnelle et qu'ils n'y ont pas le centre de leurs intérêts économiques. S'il est constant que M. et Mme D... B... n'ont pas leur foyer ou le lieu de leur séjour principal en France et n'y exercent pas d'activité professionnelle, l'administration fiscale a estimé en revanche qu'ils avaient le centre de leurs intérêts économiques et, par suite, leur domicile fiscal, en France.

11. Pour contester l'appréciation de l'administration, M. et Mme D... B... font valoir que le patrimoine qu'ils détiennent en France n'est pas productif de revenus, que les dividendes perçus de la société française Smartech sont imposables en Belgique, lieu de leur domicile, et qu'ils ont acquitté l'impôt belge sur ces dividendes.

12. Il résulte de l'instruction que les requérants sont propriétaires d'un appartement situé 11, boulevard Franck Pilate à Nice, occupé à titre gratuit par les parents de Mme D... B..., et d'un appartement sur l'île de Saint-Barthélemy, dont il n'est pas établi qu'il leur procurerait des revenus. Ils disposent également d'un appartement situé 34, rue Jean Médecin à Nice, acquis dans le cadre d'un bail emphytéotique n'ayant généré aucun revenu et mis en vente en septembre 2007. Enfin, si la société Smartech est propriétaire d'un bien immobilier situé 54, rue Moxouris au Chesnay, inscrit à l'actif de son bilan, l'administration ne démontre pas, ainsi que l'ont au demeurant relevé les premiers juges, que ces locaux auraient été mis gratuitement et à titre permanent à disposition des requérants et que ces derniers auraient ainsi bénéficié d'avantages occultes. M. et Mme D... B... sont donc fondés à soutenir que ces biens immobiliers n'étaient pas productifs de revenus.

13. Les requérants ont perçu en revanche, au titre de l'année 2007, des revenus de capitaux mobiliers de source française, constitués exclusivement de dividendes versés par la société Smartech pour un montant total de 348 180 euros. Ils soutiennent avoir déjà acquitté l'impôt belge pour ces dividendes, dès lors qu'ils résident en Belgique et devaient déclarer leurs revenus dans ce pays. Si M. et Mme D... B... ont effectivement régularisé leur déclaration belge pour l'année 2007 en y faisant figurer les dividendes perçus le 21 décembre 2007 pour 295 653 euros, après soustraction d'un montant de 52 227 euros correspondant à la retenue à la source payée en France par la société Smartech sur les revenus distribués à des

non-résidents, ces sommes déclarées procèdent exclusivement de revenus de source française constitués des dividendes versés par la société Smartech à l'exclusion de tout autre revenu, notamment de source belge. produits au dossier. A la suite d'une demande de l'administration fiscale belge, Mme B... a d'ailleurs justifié l'absence de revenus de source belge, au titre de cette année, par un retrait momentané de la vie active, après avoir été mise en disponibilité de la société Smartech en 2007, et par les problèmes de santé de son époux. En outre, ils ne justifient pas davantage de revenus perçus en Espagne. Les déclarations produites attestent de dividendes perçus uniquement au titre des années 2009 et 2010 et les requérants ne justifient pas, par ailleurs, de revenus issus des nouvelles activités qu'ils soutiennent avoir développée dans ce pays. Enfin, s'ils produisent une attestation de leur avocat en Espagne mentionnant l'existence d'un patrimoine immobilier dans ce pays supérieur à trois millions d'euros, elle n'est corroborée par un aucun autre élément, alors au demeurant qu'il n'est pas démontré que ce patrimoine serait productif de revenus. Ainsi, les requérants ne justifient pas, au titre de l'année 2007, de l'existence de revenus ou d'un patrimoine productif de revenus de source étrangère supérieurs à ceux dont ils disposent en France, constitués des dividendes perçus de la société Smartech. Par suite, M. et Mme D... B... doivent être regardés comme ayant en France le centre de leurs intérêts économiques au sens du c du 1 de l'article 4 B du code général des impôts.

14. Il résulte de ce qui précède que, en application des dispositions combinées des articles 4 A et 4 B du code général des impôts, M. et Mme D... B... étaient en principe, pour l'année en cause, passible de l'impôt sur le revenu en France, à moins qu'ils établissent leur droit de se prévaloir de la qualité de résidents de Belgique au sens de la convention fiscale franco-belge.

S'agissant de la convention fiscale franco-belge :

15. Aux termes du paragraphe 2 de l'article 1er de la convention fiscale conclue entre la France et la Belgique le 10 mars 1964 : " 1. La présente convention a pour but de protéger les résidents de chacun des Etats contractants contre les doubles impositions qui pourraient résulter de l'application simultanée de la législation fiscale de ces Etats. 2. Une personne physique est réputée résident de l'Etat contractant où elle dispose d'un foyer permanent d'habitation. / a. Lorsqu'elle dispose d'un foyer permanent d'habitation dans chacun des Etats contractants, elle est considérée comme un résident de l'Etat contractant avec lequel ses liens personnels et économiques sont les plus étroits, c'est-à-dire de l'Etat contractant où elle a le centre de ses intérêts vitaux ; b. Si l'Etat contractant où cette personne a le centre de ses intérêts vitaux ne peut être déterminé, elle est considérée comme un résident de l'Etat contractant où elle séjourne de façon habituelle ; c. Si cette personne séjourne de façon habituelle dans chacun des Etats contractants ou qu'elle ne séjourne de façon habituelle dans aucun d'eux, elle est considérée comme un résident de l'Etat contractant dont elle possède la nationalité ; d. Si cette personne possède la nationalité de chacun des Etats contractants ou qu'elle ne possède la nationalité d'aucun d'eux, les autorités compétentes des Etats contractants tranchent la question d'un commun accord ". Aux termes de l'article 18 de cette convention : " Dans la mesure où les articles précédents de la présente convention n'en disposent pas autrement, les revenus des résidents de l'un des Etats contractants ne sont imposables que dans cet Etat ". Il résulte de ces stipulations que, lorsqu'une personne qui entre dans leur champ d'application a un foyer d'habitation permanent à la fois en France et en Belgique, elle est imposable dans celui de ces deux États où elle a, en outre, le centre de ses intérêts vitaux ou bien, si ce centre n'est situé dans aucun d'eux, dans celui où elle séjourne habituellement.

16. Toute résidence dont une personne dispose de manière durable est pour elle, au sens de la convention, un foyer permanent d'habitation. Il résulte de l'instruction que M. et Mme D... B... ont produit un contrat de bail, signé le 12 octobre 2006, pour la location d'une maison située 21, avenue Alexandre Galopin à Etterbeek, dont l'authenticité n'est pas remise en cause par le ministre. Si l'administration se prévaut de la réponse du 18 juillet 2011 des autorités belges à la demande d'assistance administrative, laquelle fait état d'une visite de domicile effectuée le 7 janvier 2011 par un agent du service public fédéral des finances à l'issue de laquelle il a été constaté que les requérants ne résidaient pas en Belgique, cette visite, très postérieure à la période en litige, ne saurait constituer un élément probant au titre de l'année 2007. Ainsi, dès lors qu'il est constant que les requérants étaient locataires, au cours de l'année en litige, d'une résidence en Belgique dont ils avaient la disposition, ils doivent être regardés comme ayant eu dans cet Etat un foyer permanent d'habitation.

17. Par ailleurs, ainsi qu'il a été dit au point 12., les requérants étaient propriétaires en France en 2007 de plusieurs biens immobiliers. Il résulte de l'instruction qu'au cours de l'année en litige, si leur appartement situé 11, boulevard Franck Pilate à Nice était occupé, ils disposaient de manière durable de l'appartement situé 34, rue Jean Médecin à Nice, malgré sa mise en vente en septembre 2007, ainsi que de l'appartement situé sur l'île de Saint-Barthélemy. Dès lors, ils doivent être regardés comme ayant eu également un foyer permanent d'habitation en France au cours de l'année en litige. Ainsi, conformément aux stipulations précitées de la convention fiscale franco-belge, il y a lieu de rechercher l'Etat où se situe le centre de leurs intérêts vitaux.

18. Si M. et Mme D... B... font valoir qu'ils ont établi leur lieu de vie en Belgique en développant dans cet Etat des relations amicales, sportives et professionnelles, ils n'apportent pas d'éléments probants au soutien de leurs allégations. Il résulte en outre de l'instruction que leur fils n'a pas été scolarisé en Belgique mais à Marbella, en Espagne, au cours des années 2000 à 2008. Par ailleurs, ainsi qu'il a été dit au point 13., les requérants, qui sont associés de la société française Smartech, ont perçu de cette dernière, au titre de l'année 2007, des dividendes pour un montant total de 348 180 euros, seule source de revenus des intéressés au titre de cette année. S'ils soutiennent que Mme D... B... travaillait en Belgique au développement d'une ligne de produits et, son époux, au développement de modèles mathématiques et informatiques, ils n'apportent pas de documents de nature à en justifier.. Enfin, ainsi qu'il a été exposé au point précédent, les requérants disposaient également de nombreux biens immobiliers en France. Ainsi, M. et Mme D... B... doivent être regardés comme ayant eu en France, au cours de l'année 2007, leurs liens personnels et économiques les plus étroits et, par suite, le centre de leurs intérêts vitaux. Par suite, les stipulations précitées de la convention fiscale franco-belge ne font pas obstacle à l'application des dispositions des articles 4 A et 4 B du code général des impôts au regard desquelles ils sont considérés comme résidents fiscaux français.

En ce qui concerne la double imposition des dividendes :

19. En premier lieu, dès lors que l'imposition française est fondée et que M. et Mme D... B... ne peuvent être regardés comme résidents fiscaux en Belgique, ils ne sont pas fondés à soutenir que les revenus de capitaux mobiliers perçus au titre de l'année 2007 auraient fait l'objet d'une double imposition en France et en Belgique.

20. En second lieu, il résulte de l'instruction que la société Smartech a acquitté la retenue à la source de 15 % sur les revenus distribués à des non-résidents prévue au 2 de l'article 119 bis du code général des impôts. Il appartient donc à cette dernière de solliciter, le cas échéant, la restitution de cette somme à l'administration et d'en contester l'éventuel refus. La société Smartech constituant un contribuable distinct des requérants, les requérants n'ont pu subir de double imposition, ainsi que l'ont relevé à bon droit les premiers juges.

Sur les pénalités :

21. Aux termes de l'article 1729 du code général des impôts : " Les inexactitudes ou les omissions relevées dans une déclaration ou un acte comportant l'indication d'éléments à retenir pour l'assiette ou la liquidation de l'impôt ainsi que la restitution d'une créance de nature fiscale dont le versement a été indûment obtenu de l'Etat entraînent l'application d'une majoration de : / a. 40 % en cas de manquement délibéré ".

22. Pour justifier de l'application de la majoration de 40 % prévue par le a. de l'article 1729 du code général des impôts s'agissant des rehaussements maintenus, l'administration fiscale a relevé que M. et Mme D... B... ont indûment prétendu avoir leur résidence fiscale en Belgique, le choix de la domiciliation fiscale dans ce pays coïncidant avec la mise en paiement de dividendes importants émanant de la société française et répondant ainsi à un objectif purement fiscal. Ce faisant, et alors que les requérants sont imposables en France, l'administration doit, par suite, ainsi que l'ont retenu les premiers juges, être regardée comme apportant la preuve, qui lui incombe, de l'intention délibérée des époux D... B... d'éluder l'impôt.

23. Il résulte de tout ce qui précède que M. et Mme D... B... sont seulement fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montreuil a rejeté leur demande de décharge des cotisations d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux auxquels ils ont été assujettis à raison de distributions occultes versés par la société française Smartech pour un montant de 9 000 euros au titre de l'année 2007 et de 6 298,01 euros au titre de l'année 2008.

Sur les conclusions au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

24. Les dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise, à ce titre, à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante pour l'essentiel dans la présente instance.

DÉCIDE :

Article 1er : M. et Mme D... B... sont déchargés, en droits et pénalités, des cotisations d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux auxquels ils ont été assujettis à raison de distributions occultes versés par la société française Smartech pour un montant de 9 000 euros au titre de l'année 2007 et de 6 298,01 euros au titre de l'année 2008.

Article 2 : Le jugement du tribunal administratif de Montreuil du 7 juin 2016 est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.

Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. et Mme C... D... B... et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.

Délibéré après l'audience du 2 novembre 2022, à laquelle siégeaient :

Mme Danielian, présidente,

Mme Liogier, première conseillère,

M. Lerooy, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 17 novembre 2022.

Le rapporteur,

D. A...La présidente,

I. DanielianLa greffière,

C. FourteauLa République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme

Le greffier,

2

N° 20VE02624


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 20VE02624
Date de la décision : 17/11/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

19-04-01-02-02 Contributions et taxes. - Impôts sur les revenus et bénéfices. - Règles générales. - Impôt sur le revenu. - Lieu d'imposition.


Composition du Tribunal
Président : Mme DANIELIAN
Rapporteur ?: M. David LEROOY
Rapporteur public ?: Mme DEROC
Avocat(s) : MARSHALL

Origine de la décision
Date de l'import : 20/11/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2022-11-17;20ve02624 ?
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