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29/09/2022 | FRANCE | N°20VE02414

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 3ème chambre, 29 septembre 2022, 20VE02414


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B... et Mme D... B... ont demandé au tribunal administratif de Montreuil de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2013 et 2014 ainsi que des pénalités correspondantes.

Par un jugement n° 1805746 du 4 juin 2020, le tribunal administratif de Montreuil a fait droit à leur demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 17 septembre 2020 et le 16 juin

2022, le ministre de l'économie, des finances et de la relance demande à la cour :

1°) d'annul...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B... et Mme D... B... ont demandé au tribunal administratif de Montreuil de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2013 et 2014 ainsi que des pénalités correspondantes.

Par un jugement n° 1805746 du 4 juin 2020, le tribunal administratif de Montreuil a fait droit à leur demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 17 septembre 2020 et le 16 juin 2022, le ministre de l'économie, des finances et de la relance demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) et de remettre à la charge de M. et Mme B... les impositions supplémentaires dont ils ont été déchargés par le tribunal.

Le ministre soutient que :

- c'est à tort que le tribunal a prononcé la décharge des impositions en litige au motif que les rectifications de l'impôt sur le revenu de M. et Mme B... ont été établies au regard des seules constatations issues des procédures de vérification de comptabilité des groupements forestiers de Grammont et de Lupy, lesquelles ne sont pas prévues par le code général des impôts en matière de bénéfices agricoles déterminés selon le régime du forfait ;

- le service a fondé ses rehaussements sur des motifs et des documents qui n'ont pas été recueillis dans le cadre de la vérification de comptabilité des groupements forestiers mais sur des éléments recueillis en amont, dont l'administration disposait déjà ;

- M. B... ne justifie pas qu'il remplit les conditions pour bénéficier du régime d'exonération des plus-values professionnelles prévu par les dispositions de l'article 151 septies du code général des impôts ;

- la quote-part de plus-value revenant à Mme B... ne relève pas de la catégorie des plus-values des particuliers.

Par des mémoires en défense, enregistrés les 16 février 2021, 16 juin 2022 et 30 juin 2022, M. et Mme B..., représentés par Me Lefeuvre, avocat, concluent :

1°) au rejet de la requête du ministre ;

2°) et à ce qu'une somme de 3 000 euros soit mise à la charge de l'État sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils font valoir que :

- le jugement du tribunal administratif doit être confirmé dès lors que la procédure d'imposition est irrégulière ;

- les propositions de rectification adressées aux groupements forestiers sont insuffisamment motivées et n'ont pu valablement interrompre la prescription ;

- M. B... remplit les conditions posées par l'article 151 septies du code général des impôts dès lors qu'il exerce, à titre professionnel depuis 2005, une activité dans le secteur de l'exploitation forestière et qu'il a accompli les actes caractérisant l'exercice de cette profession au regard de la doctrine fiscale ;

- la plus-value réalisée par Mme B... ne relève pas de la fiscalité des professionnels mais du régime des plus-values des particuliers, prévu par les dispositions des articles 150 U à 150 VH du code général des impôts ; une proposition de rectification portant sur ces seuls rehaussements aurait dû lui être adressée à titre personnel ; en conséquence, ils doivent être déchargés des suppléments d'impôt sur le revenu se rapportant à cette plus-value ;

- ils sont fondés à se prévaloir des énonciations des paragraphes n° 10 et n° 30 des commentaires administratifs publiés au Bulletin officiel des finances publiques (BOFiP) - impôts sous la référence BOI-BA-SECT-20.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. E... ;

- les conclusions de Mme Deroc, rapporteur public ;

- et les observations de Me Lefeuvre, représentant M. et Mme B....

Considérant ce qui suit :

1. M. A... B... est cogérant et associé du groupement forestier de Grammont, dont il détient 56,9 % des parts, et associé du groupement forestier de Lupy à hauteur de 50% des parts. Mme D... C... épouse B... est associée du groupement forestier de Grammont, dont elle détient 14,37 % des parts. Ces deux groupements, sociétés civiles relevant du régime fiscal des sociétés de personnes en vertu des dispositions de l'article 238 ter du code général des impôts, ont chacun fait l'objet d'une vérification de comptabilité portant sur la période du 1er janvier 2013 au 31 décembre 2015. Par une proposition de rectification en date du 20 décembre 2016, le service a déterminé, au titre de l'année 2013, une plus-value à court terme d'un montant de 409 646 euros résultant de la cession par le groupement forestier de Grammont de la totalité de ses biens immobiliers. M. et Mme B... ont, en conséquence, en leur qualité d'associés, été assujettis à des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu au titre de cette même année, dans la catégorie des bénéfices agricoles, en proportion de leur quote-part dans le groupement. Par une proposition de rectification en date du 30 janvier 2017, l'administration a estimé que le groupement forestier de Lupy avait dégagé une plus-value à court terme d'un montant de 250 000 euros, au titre de l'année 2014, résultant de la cession de ses biens. M. et Mme B... ont ainsi été assujettis à des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu pour cette même année, au titre la quote-part de la plus-value de M. B.... Ils ont demandé au tribunal administratif de Montreuil de prononcer la décharge de ces impositions au titre des années 2013 et 2014 ainsi que des pénalités correspondantes. Le ministre de l'économie, des finances et de la relance relève appel du jugement du 4 juin 2020 par lequel le tribunal administratif de Montreuil a fait droit à leur demande. .

Sur le moyen d'annulation retenu par le tribunal administratif :

2. Aux termes du I de l'article L. 13 du livre des procédures fiscales : " Les agents de l'administration des impôts vérifient sur place, en suivant les règles prévues par le présent livre, la comptabilité des contribuables astreints à tenir et à présenter des documents comptables ". Aux terme de l'article 63 du code général des impôts : " Sont considérés comme bénéfices de l'exploitation agricole pour l'application de l'impôt sur le revenu, les revenus que l'exploitation de biens ruraux procure soit aux fermiers, métayers, soit aux propriétaires exploitant eux-mêmes./ Ces bénéfices comprennent notamment ceux qui proviennent de la production forestière, même si les propriétaires se bornent à vendre les coupes de bois sur pied ". Aux termes du 1 de l'article 64 du même code, applicable aux années d'imposition en litige : " Sous réserve des dispositions des articles 69 à 74 B, le bénéfice imposable des exploitations situées en France est déterminé forfaitairement conformément aux prescriptions des 2 à 5 ". Aux termes de l'article 76 du même code : " 1. En ce qui concerne les bois, oseraies, aulnaies et saussaies situés en France, le bénéfice agricole imposable est fixé à une somme égale au revenu ayant servi de base à la taxe foncière établie sur ces propriétés au titre de l'année de l'imposition. / (...) ".

3. Pour décharger les requérants des impositions en litige, le tribunal administratif a considéré que les rectifications d'impôt sur le revenu de M. et Mme B... avaient été établies au regard des seules constatations issues des procédures de vérification de comptabilité des groupements forestiers de Grammont et de Lupy, lesquelles n'étaient pas applicables à la catégorie des bénéfices agricoles déterminés selon le régime du forfait, et que les rehaussements devaient en conséquence être regardés comme irréguliers.

4. Si aucune procédure de vérification de comptabilité n'est prévue par le code général des impôts en matière de bénéfices agricoles déterminés selon le régime du forfait, et si, par suite, le vérificateur ne pouvait rectifier les déclarations concernant cette catégorie de revenus en se fondant sur des documents recueillis au cours de la vérification, il résulte toutefois de l'instruction que l'administration n'a pas rectifié les déclarations concernant cette catégorie de revenus, lesquels se limitent, s'agissant du forfait forestier, aux bénéfices provenant de l'exploitation des bois en vue de la vente des coupes sans transformation, mais uniquement celles relatives aux plus-values professionnelles à court terme réalisées par les groupements forestiers de Grammont et de Lupy après la cession de leurs parcelles, sur le fondement des dispositions de l'article 39 duodecies du code général des impôts. En tout état de cause, l'administration s'est fondée principalement sur des actes soumis à publicité foncière, tels que les actes d'acquisition, d'augmentation du capital et de vente, dont elle disposait déjà par ailleurs et qui laissaient supposer l'existence de revenus excédant le périmètre du forfait, ainsi que sur des éléments permettant d'apprécier la situation personnelle de chacun des associés, qui ne trouvaient pas leur origine dans des documents recueillis au cours de la vérification. Ainsi, le ministre est fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Montreuil a retenu le moyen tiré de l'irrégularité de la procédure de vérification de comptabilité pour décharger M. et Mme B... des impositions litigieuses.

5. Toutefois, il appartient à la cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par les requérants devant le tribunal administratif et la cour administrative d'appel.

Sur la régularité de la procédure d'imposition :

6. Aux termes de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales : " L'administration adresse au contribuable une proposition de rectification qui doit être motivée de manière à lui permettre de formuler ses observations ou de faire connaître son acceptation (...) ". Aux termes de l'article R. 57-1 du même livre : " La proposition de rectification prévue par l'article L. 57 fait connaître au contribuable la nature et les motifs de la rectification envisagée. (...) ".

7. Il résulte de ces dispositions que l'administration doit indiquer au contribuable, dans la proposition de rectification, les motifs et le montant des rehaussements envisagés, leur fondement légal et la catégorie de revenus dans laquelle ils sont opérés, ainsi que les années d'imposition concernées. L'administration peut satisfaire à cette obligation en se référant à un document qu'elle joint à la proposition de rectification ou à la réponse aux observations du contribuable, ou encore en se bornant à se référer aux motifs retenus dans une proposition de rectification, ou une réponse aux observations du contribuable, consécutive à un précédent contrôle et qui a été régulièrement notifiée au contribuable, à la condition qu'elle identifie précisément la proposition ou la réponse en cause et que celle-ci soit elle-même suffisamment motivée.

8. Il résulte de l'instruction que les propositions de rectification adressées à M. et Mme B... comportent le montant et la catégorie de revenus dans laquelle sont opérés les rehaussements, les années d'imposition concernées et les motifs sur lesquels l'administration s'est fondée pour justifier les redressements envisagés. Elle se réfèrent expressément aux propositions de rectification qui ont été notifiées, le même jour, au représentant légal de chaque groupement forestier, et qui y sont annexées. Ces dernières indiquent, contrairement à ce que soutiennent les requérants, le fondement légal des rectifications en précisant que les plus-values sont imposables à l'impôt sur le revenu en tant que plus-values réalisées à titre professionnel et qu'elles relèvent des plus-values à court terme, en vertu de l'article 39 duodecies, à moins qu'elles ne remplissent les conditions auxquelles est subordonné le bénéfice de l'exonération instituée à l'article 151 septies du même code. Par suite, les propositions de rectification satisfont aux exigences de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales.

Sur le bien-fondé des impositions :

9. En premier lieu, aux termes de l'article 238 ter du code général des impôts : " Les groupements forestiers constitués dans les conditions prévues par les articles L. 241-1 à L. 246-2 du code forestier ne sont pas assujettis à l'impôt sur les sociétés ; mais chacun de leurs membres est personnellement passible, pour la part des bénéfices sociaux correspondant à ses droits dans le groupement, soit de l'impôt sur le revenu, déterminé d'après les règles prévues pour la catégorie de revenus à laquelle ces bénéfices se rattachent, soit, s'il s'agit de personnes morales assujetties à l'impôt sur les sociétés, de l'impôt sur les sociétés ". Aux termes de l'article L. 241-2 du code forestier : " Les groupements forestiers doivent avoir un objet exclusivement civil et sont régis par les articles 1832 et suivants du code civil sauf modifications résultant du présent titre ". Aux termes de l'article L. 241-3 du même code : " Les groupements forestiers ont pour objet la constitution, l'amélioration, l'équipement, la conservation ou la gestion d'un ou plusieurs massifs forestiers, et généralement toutes opérations quelconques pouvant se rattacher à cet objet ou en dérivant normalement, pourvu que ces opérations ne modifient pas le caractère civil du groupement. En particulier, la transformation des produits forestiers qui ne constituerait pas un prolongement normal de l'activité agricole ne peut être pratiquée par le groupement ". Aux termes de l'article 38 du code général des impôts : " 1. Sous réserve des dispositions des articles 33 ter, 40 à 43 bis et 151 sexies, le bénéfice imposable est le bénéfice net, déterminé d'après les résultats d'ensemble des opérations de toute nature effectuées par les entreprises, y compris notamment les cessions d'éléments quelconques de l'actif, soit en cours, soit en fin d'exploitation (...) " Aux termes de l'article 39 duodecies du code général des impôts : " 1. Par dérogation aux dispositions de l'article 38, les plus-values provenant de la cession d'éléments de l'actif immobilisé sont soumises à des régimes distincts suivant qu'elles sont réalisées à court ou à long terme (...) ".

10. Il résulte de l'instruction que les parcelles de bois acquises en 2012 et revendues en 2013 par le groupement forestier de Grammont, dont M. et Mme B... sont associés, ainsi que celles acquises en 2013 et revendues en 2014 par le groupement forestier de Lupy, dont M. B... est associé, ont été acquises puis cédées par ces groupements sans que les actes de cession, ni aucun autre document comptable, ne distinguent la valeur du sol forestier de celle des bois susceptibles de constituer des stocks. Dans ces conditions, l'administration a pu à bon droit imposer dans la catégorie des plus-values réalisées à titre professionnel, et non dans celle des bénéfices agricoles, les produits tirés des cessions de massifs précitées, sans qu'y fasse obstacle la circonstance que les groupements forestiers ne soient pas soumis à la tenue d'une comptabilité commerciale.

11. En deuxième lieu, aux termes de l'article 151 septies du code général des impôts dans sa rédaction applicable au présent litige : " I. Les dispositions du présent article s'appliquent aux activités commerciales, industrielles, artisanales, libérales ou agricoles, exercées à titre professionnel. II. Les plus-values de cession soumises au régime des articles 39 duodecies à 39 quindecies, à l'exception de celles afférentes aux biens entrant dans le champ d'application du A de l'article 1594-0 G, et réalisées dans le cadre d'une des activités mentionnées au I sont, à condition que l'activité ait été exercée pendant au moins cinq ans, exonérées (...) ". Aux termes de l'article 155 du même code : " IV. - 1. Sous réserve du 2, l'exercice à titre professionnel implique la participation personnelle, directe et continue à l'accomplissement des actes nécessaires à l'activité ".

12. Il résulte des dispositions de l'article 151 septies du code général des impôts que les exonérations totales ou partielles de plus-values qu'elles prévoient sont notamment subordonnées à la condition qu'à la date de la cession, l'activité ait été exercée pendant au moins cinq ans. En revanche, lorsque cette activité a été exercée, successivement ou simultanément, dans plusieurs fonds ou établissements, elles n'imposent pas, en outre, que ceux-ci aient été eux-mêmes détenus ou exploités pendant au moins cinq ans à la date de leur cession. Seule est prise en compte la période au cours de laquelle l'activité est exercée à titre professionnel.

13. Pour remettre en cause le bénéfice du régime d'exonération prévu par ces dispositions, le service vérificateur a estimé que la condition relative à l'exercice de l'activité depuis au moins 5 ans n'était pas remplie par les groupements forestiers de Grammont et de Lupy et qu'elle n'était pas davantage remplie au regard de la situation de chaque associé.

14. Il résulte de l'instruction que le groupement forestier de Grammont, créé le 17 novembre 2011, a revendu le 5 décembre 2013 un massif forestier acquis les 8 janvier et 12 décembre 2012, et que le groupement de Lupy, créé le 11 octobre 2013, a revendu le 15 octobre 2014 un massif forestier qu'il avait acquis le 14 novembre 2013. Ainsi, il n'est pas contesté que la condition relative à l'exercice de l'activité professionnelle depuis au moins 5 ans n'était pas remplie pour chacun des groupements forestiers.

15. Les requérants soutiennent cependant que M. B... remplissait les conditions pour bénéficier de l'exonération dès lors qu'il exerçait, à titre individuel, une activité d'exploitant forestier depuis 2005 et qu'il a accompli les actes caractérisant l'exercice de cette profession à titre professionnel. Toutefois, ainsi que le soutient l'administration en appel, M. B... ne démontre pas avoir exercé une activité agricole à titre professionnel depuis au moins 5 ans à la date de réalisation de la plus-value. Si les requérants font valoir l'acquisition par M. B..., le 28 septembre 2009, de deux parcelles ayant fait l'objet ultérieurement d'un apport au groupement forestier de Grammont, cette acquisition est intervenue moins de 5 ans avant la cession. Ils produisent également, pour la première fois en appel, un extrait d'une recherche sur Internet montrant que le nom de M. B... est associé à huit groupements forestiers, des avis d'imposition sur les revenus des années 2008 à 2013 mentionnant des revenus agricoles d'un montant oscillant entre 830 euros et 1720 euros, ainsi que des extraits des agendas de M. B... au titre des années 2012 et 2013. Cependant, ces documents ne permettent pas de caractériser une participation personnelle, directe et continue de M. B... à l'accomplissement des actes nécessaires à l'activité d'exploitant agricole qu'il prétend exercer à titre professionnel depuis au moins 5 ans. La seule circonstance qu'il serait le gérant du groupement forestier Les Pins Douglas depuis 2005, à la supposer établie, n'est pas suffisante par elle-même pour caractériser l'exercice d'une telle activité professionnelle. En outre, les avis d'imposition produits sont incomplets, le nom de M. B... figurant uniquement sur l'avis d'imposition des revenus de l'année 2013, et les extraits des agendas sont parcellaires et ne permettent pas, à leur seule lecture, d'en tirer des conclusions sur la nature de l'activité exercée. Par suite, c'est à bon droit que l'administration a refusé aux requérants le bénéfice de l'exonération prévue à l'article 151 septies du code général des impôts.

16. En troisième et dernier lieu, aux termes de l'article 76 A du code général des impôts : " Les plus-values réalisées lors de la cession de terres à usage forestier ou de peuplements forestiers sont passibles de l'impôt sur le revenu dans les conditions prévues aux articles 150 U à 150 VH lorsque l'activité d'exploitation ou de gestion de ces terres et peuplements n'est pas exercée à titre professionnel par le cédant au sens du IV de l'article 155 ".

17. Les requérants soutiennent à titre subsidiaire, pour la première fois en appel, qu'ils doivent être déchargés des suppléments d'impôt sur le revenu se rapportant à la plus-value de Mme B... dès lors que cette dernière, qui n'exerce pas d'activité professionnelle au sein du groupement de Grammont dont elle est associée à hauteur de 14,37 %, ne relève pas de la fiscalité des professionnels mais du régime des plus-values des particuliers, prévu par les dispositions des articles 150 U à 150 VH du code général des impôts. Il résulte cependant des dispositions précitées que le régime d'imposition applicable aux plus-values réalisées est déterminé en considération de la seule situation du cédant. Or, les groupements forestiers, qui ont cédé les parcelles en litige, ont déclaré ne pas être soumis à l'application des dispositions concernant les plus-values des particuliers, les mutations étant réalisées dans le cadre de leur activité professionnelle. La circonstance que Mme B... n'exerce pas d'activité professionnelle au sein des groupements n'a, ainsi, aucune incidence sur le régime applicable aux plus-values. Par suite, les requérants ne sont pas fondés à soutenir que la quote-part de plus-value de Mme B... dans le groupement de Grammont relevait du régime des plus-values des particuliers et qu'une proposition de rectification aurait dû lui être adressée personnellement.

18. Enfin, M. et Mme B... ne sont pas fondés à se prévaloir, sur le fondement de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales, des énonciations des paragraphes n° 10 et n° 30 des commentaires administratifs publiés au Bulletin officiel des finances publiques (BOFiP) - impôts sous la référence BOI-BA-SECT-20, dès lors que ceux-ci ne comportent pas une interprétation différente de la loi fiscale dont il est fait application dans le présent arrêt.

19. Il résulte de ce qui précède que le ministre de l'économie, des finances et de la relance est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montreuil a prononcé la décharge des cotisations d'impôt sur le revenu auxquelles M. et Mme B... ont été assujettis au titre des années 2013 et 2014, ainsi que des pénalités correspondantes, et a mis à la charge de l'État la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il y a lieu d'annuler le jugement attaqué et de rétablir M. et Mme B... aux rôles de l'impôt sur le revenu et des prélèvements sociaux au titre des années 2013 et 2014.

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

20. Ces dispositions font obstacle à ce que l'État, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, soit condamné à verser à M. et Mme B... une somme au titre de ces dispositions.

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement n° 1805746 rendu par le tribunal administratif de Montreuil le 4 juin 2020 est annulé.

Article 2 : Les cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu au titre des années 2013 et 2014, ainsi que les pénalités correspondantes, dont le tribunal administratif de Montreuil a prononcé la décharge par le jugement visé à l'article 1er de l'arrêt, sont remises à la charge de M et Mme B....

Article 3 : Les conclusions présentées par M. et Mme B... en appel au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. et Mme B... et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.

Délibéré après l'audience du 13 septembre 2022, à laquelle siégeaient :

M. Olson, président de la cour,

Mme Besson-Ledey, présidente,

M. Lerooy, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 29 septembre 2022.

Le rapporteur,

D. E...Le président,

T. Olson

La greffière,

A. Audrain-FoulonLa République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme

Le greffier,

2

N° 20VE02414


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 20VE02414
Date de la décision : 29/09/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

19-01-03-01-02-05 Contributions et taxes. - Généralités. - Règles générales d'établissement de l'impôt. - Contrôle fiscal. - Vérification de comptabilité. - Pouvoirs de l'administration.


Composition du Tribunal
Président : M. OLSON
Rapporteur ?: M. David LEROOY
Rapporteur public ?: Mme DEROC
Avocat(s) : LEFEUVRE

Origine de la décision
Date de l'import : 02/10/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2022-09-29;20ve02414 ?
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