Vu les procédures suivantes :
I. Procédure contentieuse antérieure :
Le syndicat Force Ouvrière des industries caoutchouc et activités annexes à Bezons a demandé au tribunal administratif de Cergy-Pontoise d'annuler pour excès de pouvoir la décision du 11 octobre 2021 par laquelle le directeur régional et interdépartemental de l'économie, de l'emploi, du travail et des solidarités d'Île-de-France a homologué le document unilatéral portant plan de sauvegarde de l'emploi de la société Sealants Europe.
Par un jugement nos 2115415-2115416 du 8 mars 2022, le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête n° 22VE00783, enregistrée le 6 avril 2022, le syndicat Force Ouvrière des industries caoutchouc et activités annexes à Bezons, représenté par Me Bourhaba, avocat, demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Cergy-Pontoise ;
2°) d'annuler la décision du 11 octobre 2021 par laquelle le directeur régional et interdépartemental de l'économie, de l'emploi, du travail et des solidarités d'Île-de-France a homologué le document unilatéral portant plan de sauvegarde de l'emploi de la société Sealants Europe ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat, en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, le versement d'une somme de 5 000 euros.
Il soutient que :
- sa requête est recevable dès lors qu'il justifie d'un intérêt pour agir contre la décision d'homologation en litige ;
- c'est à tort que le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a écarté le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article L. 1224-1 du code du travail ;
- c'est également à tort que le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a écarté le moyen tiré de l'insuffisance des propositions de reclassement interne ;
- la seule circonstance que l'expert n'a pas pu rédiger et présenter un rapport suffit à démontrer qu'il a nécessairement été mis dans l'incapacité de disposer des éléments lui permettant d'accomplir sa mission ;
- il s'associe aux observations présentées devant le tribunal administratif par les salariés sur la régularité de la procédure d'information ;
- la décision d'homologation est entachée d'incompétence ;
- la procédure de négociation avec les syndicats a été irrégulière dès lors que l'employeur a méconnu son obligation de loyauté ; la nullité des négociations emporte la nullité de la procédure de consultation ;
- la procédure de consultation du comité social et économique est entachée d'irrégularité ; à cet égard, c'est à tort que la DRIEETS a considéré que la première réunion avait eu lieu le 27 novembre 2020 ; c'est par suite contradictoirement que la DRIEETS a retenu que le projet de licenciement avait été notifié à la suite de la réunion du 29 octobre 2020 alors qu'en application de l'article L. 1233-46 du code du travail la notification du projet de licenciement doit intervenir au plus tôt le lendemain de la 1ère réunion du comité social et économique au titre du plan de sauvegarde de l'emploi ; le délai de consultation du comité social et économique n'a pas été respecté puisque son avis a été rendu pour la première fois le 8 mars 2021, soit au-delà du délai légal et ce quelle que soit la date retenue pour la première réunion du comité ; les ordres du jour des réunions du comité social et économique ont été établis unilatéralement par l'employeur et les convocations du comité sont donc irrégulières ; en outre les ordres du jour ne contiennent pas tous les points pourtant soumis à des consultations légalement obligatoires, notamment les catégories professionnelles, les critères d'ordre des licenciements et le congé de reclassement ; les informations transmises au comité social et économique sur le volet santé-sécurité-conditions de travail étaient insuffisantes dès lors que le document unique d'évaluation des risques n'a pas été mis à jour dès le début de la procédure ; les informations relatives aux mesures de prévention étaient insuffisantes ; le contrôle de la DRIEETS sur ce point a été inexistant ; l'implication de la commission Santé, sécurité et conditions de travail a été insuffisante ; les informations transmises au comité social et économique concernant la recherche d'un repreneur ont été également insuffisantes ; la société Sealants Europe n'a pas respecté les dispositions de l'article L. 1233-57-9 du code du travail ; le comité social et économique n'a pas été associé à la procédure de recherche d'un repreneur ; s'agissant des informations économiques et financières, la société s'est contentée de produire une note d'information économique au mois d'octobre 2020 qui n'a pas été mise à jour au cours de la procédure alors qu'une reprise de l'activité aéronautique pouvait être constatée ; l'expert-comptable du comité social et économique n'a pas reçu les informations qu'il réclamait, ce qui n'a pas manqué d'entraver sa mission puisqu'il n'a pas été en mesure de transmettre un rapport ;
- les catégories professionnelles ont été irrégulièrement établies par l'employeur ;
- les critères d'ordre des licenciements devaient s'appliquer dès lors que les départs étaient décalés pour certains salariés ;
- la DRIEETS a manifestement omis de vérifier que l'employeur avait intégré le dispositif conventionnel en matière de reclassement tel que prévu par l'article 14 de la convention de branche ; le nombre de poste de reclassement proposé est insuffisant et inadapté au regard du nombre important de suppressions de poste et de la nature des emplois ; les salariés de la société ont tous reçu au même moment des propositions de reclassement sur le même poste alors que pour être valable l'offre de reclassement doit être telle que si elle rencontre l'accord du salarié, le reclassement est opéré ; le dossier fait par ailleurs clairement apparaître une carence patente de l'employeur dans son obligation d'adaptation des salariés à l'évolution de leur poste ; la DRIEETS ne pouvait pas se contenter des montants affichés par l'employeur dans son document unilatéral ; les mesures de reclassement externe sont également insuffisantes en l'absence de dispositif de départ volontaire ;
- l'application de l'article L. 1224-1 du code du travail aurait dû conduire la DRIEETS à refuser d'homologuer le document unilatéral de la société Sealants Europe.
Par un mémoire en défense enregistré le 5 mai 2022, la société Sealants Europe, représentée par Me Fiedler, avocate, conclut au rejet de la requête et à ce que le syndicat requérant soit condamné au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative à lui verser une somme de 2 000 euros.
Elle fait valoir que les moyens soulevés par le syndicat Force Ouvrière des industries caoutchouc et activités annexes à Bezons ne sont pas fondés.
Par un mémoire en défense enregistré le 13 mai 2022, la ministre du travail, de l'emploi et de l'insertion, conclut au rejet de la requête.
Elle fait valoir :
- à titre principal, que la requête du syndicat est irrecevable dès lors, d'une part, qu'aucune délibération du conseil syndical concernant une action devant la cour n'est produite et que, d'autre part, les conclusions du syndicat sont dirigées contre une décision de validation d'un accord majoritaire qui n'existe pas ;
- à titre subsidiaire, que les moyens soulevés par le syndicat ne sont pas fondés.
II. Procédure contentieuse antérieure :
M. U... G..., M. L... S..., M. AB... F..., M. R... A..., M. X... AA..., M. N... O..., Mme Z... C..., M. D... Q..., M. E... K..., M. N... W..., M. J... T..., Mme B... V..., M. I... M... et Mme H... Y... ont demandé au tribunal administratif de Cergy-Pontoise d'annuler pour excès de pouvoir la décision du 11 octobre 2021 par laquelle le directeur régional et interdépartemental de l'économie, de l'emploi, du travail et des solidarités d'Île-de-France a homologué le document unilatéral portant plan de sauvegarde de l'emploi de la société Sealants Europe.
Par un jugement nos 2115415-2115416 du 8 mars 2022, le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté leur demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête n° 22VE01082, enregistrée le 6 mai 2022, M. G..., M. S..., M. F..., M. A..., M. AA..., M. O..., Mme C..., M. Q..., M. K..., M. W..., M. T..., Mme V..., M. M... et Mme Y..., représentés par Me Watrelot et Hamida, avocats, demandent à la cour :
1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Cergy-Pontoise ;
2°) d'annuler la décision du 11 octobre 2021 par laquelle le directeur régional et interdépartemental de l'économie, de l'emploi, du travail et des solidarités d'Île-de-France a homologué le document unilatéral portant plan de sauvegarde de l'emploi de la société Sealants Europe ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat, en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, le versement à chacun des requérants d'une somme de 1 000 euros.
Ils soutiennent que :
- c'est à tort que le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a écarté le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article L. 1224-1 du code du travail ;
- s'agissant de la procédure de consultation du comité social et économique, c'est à tort que le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a écarté les griefs relatifs aux irrégularités entachant la détermination de la date de la première réunion du comité social et économique, les modalités d'établissement des ordres du jour du comité social et économique, la teneur des informations transmises au comité, notamment en matière d'hygiène, santé et des conditions de travail des salariés, la déloyauté des négociations de l'accord relatif au plan de sauvegarde de l'emploi menées en parallèle de la procédure de consultation ;
- c'est à tort que le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a écarté le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article L. 1233-57-9 du code du travail ;
- la société Sealants Europe n'établit pas avoir saisi la commission paritaire de l'emploi instituée au niveau de la branche alors qu'elle était conventionnellement tenue de le faire ; elle n'a pas davantage, en méconnaissance de l'article L. 2323-32 du code du travail informé les entreprises sous-traitantes de son projet de restructuration ;
- les catégories professionnelles ont été irrégulièrement établies par l'employeur ;
- les critères d'ordre des licenciements devaient s'appliquer dès lors que les départs étaient décalés pour certains salariés ;
- le plan de sauvegarde de l'emploi est insuffisant dès lors qu'il ne prévoit aucune phase de départ volontaire ;
- le dossier fait par ailleurs clairement apparaître une carence patente de l'employeur dans son obligation d'adaptation des salariés à l'évolution de leur poste ; la DRIEETS ne pouvait pas se contenter des montants affichés par l'employeur dans son document unilatéral ;
- les salariés de la société ont tous reçu au même moment des propositions de reclassement sur le même poste alors que pour être valable l'offre de reclassement doit être telle que si elle rencontre l'accord du salarié, le reclassement est opéré ;
- le dispositif de soutien et d'écoute psychologique était insuffisant.
Par un mémoire en défense enregistré le 25 mai 2022, le ministre du travail, du plein-emploi et de l'insertion conclut au rejet de la requête.
Il fait valoir que les moyens soulevés par les salariés requérants ne sont pas fondés.
Par un mémoire en défense enregistré le 27 mai 2022, la société Sealants Europe, représentée par Me Fiedler, avocate, conclut au rejet de la requête et à ce que les requérants soient solidairement condamnés au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative à lui verser une somme de 2 000 euros.
Elle fait valoir que les moyens soulevés par les salariés ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces des dossiers.
Vu :
- le code du travail ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. P...,
- les conclusions de Mme Grossholz, rapporteure publique,
- et les observations de Me Hamida, pour M. G... et autres et le syndicat Force Ouvrière des industries caoutchouc et activités annexes à Bezons, et de Me Champetier de Ribes, pour la société Sealants Europe.
Considérant ce qui suit :
1. La société Sealants Europe, qui appartient au groupe PPG Industries, est spécialisée dans la production de mastics et d'adhésifs utilisés dans l'industrie aéronautique et automobile. Le 1er octobre 2020, la société a informé la direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi (devenue direction régionale et interdépartementale de l'économie, de l'emploi, du travail et des solidarités-DRIEETS) d'Ile-de-France du projet de cessation totale et définitive de son activité conduisant à la suppression de la totalité des 208 postes du site de Bezons. Du 8 octobre 2020 au 8 mars 2021 se sont tenues les réunions d'information et de consultation du comité social et économique portant sur la cessation d'activité projetée et ses modalités d'application, le projet de licenciement collectif pour motif économique, ainsi que sur les conséquences de ce projet de réorganisation en matière de santé, sécurité et de conditions de travail. Le comité social et économique a, lors de la réunion du 8 mars 2021, refusé de rendre un avis sur les documents présentés. Le 12 avril 2021, la DRIEETS d'Île-de-France a refusé d'homologuer le document unilatéral portant plan de sauvegarde de l'emploi de la société. La procédure d'information et de consultation du comité social et économique a été reprise par la société. Lors de la réunion du 16 septembre 2021 les représentants du personnel ont refusé d'émettre un avis sur le document unilatéral modifié. Ce nouveau document a été homologué par le directeur régional le 11 octobre 2021. Le syndicat Force Ouvrière des industries caoutchouc et activités annexes à Bezons, d'une part, M. U... G... et treize autres salariés de la société Sealants Europe, d'autre part, relèvent appel du jugement du 8 mars 2022 par lequel le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté leur demande respective tendant à l'annulation pour excès de pouvoir de cette décision.
Sur la jonction :
2. Les requêtes présentées sous les nos 22VE00783 et 22VE01082 sont dirigées contre le même jugement du tribunal administratif de Cergy-Pontoise et la même décision d'homologation et ont fait l'objet d'une instruction commune. Il y a lieu de les joindre pour y statuer par un seul arrêt.
Sur la fin de non-recevoir opposée par la ministre du travail, de l'emploi et des solidarités dans l'instance n° 22VE00783 :
3. Ainsi que la ministre du travail, de l'emploi et de l'insertion le fait valoir, il ne ressort pas des pièces du dossier que le conseil syndical du Syndicat Force Ouvrière des industries caoutchouc et activités annexes à Bezons a autorisé Mme F..., sa secrétaire générale, à interjeter appel du jugement du tribunal administratif de Cergy-Pontoise, la seule délibération produite, en date du 6 décembre 2021, autorisant uniquement l'intéressée à représenter le syndicat devant le tribunal administratif en vue de contester la décision du 11 octobre 2011. Il suit de là que la fin de non-recevoir de la ministre, tirée du défaut de qualité pour agir de Mme F..., doit être accueillie. La requête n° 22VE00783 du Syndicat Force Ouvrière des industries caoutchouc et activités annexes à Bezons doit, par suite, être rejetée pour irrecevabilité.
Sur les conclusions de la requête n° 22VE01082 aux fins d'annulation de la décision d'homologation du 11 octobre 2021 :
4. Il résulte des dispositions des articles L. 1235-10, L. 1235-11 et L. 1235-16 du code du travail que, pour les entreprises qui ne sont pas en redressement ou en liquidation judiciaire, le législateur a attaché à l'annulation pour excès de pouvoir d'une décision d'homologation ou de validation d'un plan de sauvegarde de l'emploi, des effets qui diffèrent selon le motif pour lequel cette annulation est prononcée. Par suite, lorsque le juge administratif est saisi d'une requête dirigée contre une décision d'homologation ou de validation d'un plan de sauvegarde de l'emploi d'une entreprise qui n'est pas en redressement ou en liquidation judiciaire, il doit, si cette requête soulève plusieurs moyens, toujours commencer par se prononcer, s'il est soulevé devant lui, sur le moyen tiré de l'absence ou de l'insuffisance du plan, même lorsqu'un autre moyen est de nature à fonder l'annulation de la décision administrative, compte tenu des conséquences particulières qui, en application de l'article L. 1235-11 du code du travail, sont susceptibles d'en découler pour les salariés. En outre, compte tenu de ce que l'article L. 1235-16 de ce code, dans sa rédaction issue de la loi du 6 août 2015, prévoit désormais que l'annulation d'une telle décision administrative, pour un autre motif que celui tiré de l'absence ou de l'insuffisance du plan, est susceptible d'avoir des conséquences différentes selon que cette annulation est fondée sur un moyen tiré de l'insuffisance de la motivation de la décision en cause ou sur un autre moyen, il appartient au juge administratif de se prononcer ensuite sur les autres moyens éventuellement présentés à l'appui des conclusions aux fins d'annulation pour excès de pouvoir de cette décision, en réservant, à ce stade, celui tiré de l'insuffisance de la motivation de la décision administrative. Enfin, lorsqu'aucun de ces moyens n'est fondé, le juge administratif doit se prononcer sur le moyen tiré de l'insuffisance de la motivation de la décision administrative lorsqu'il est soulevé.
En ce qui concerne le moyen tiré de l'insuffisance des mesures prévues par le plan de sauvegarde de l'emploi :
5. Aux termes de l'article L. 1233-61 du code du travail : " Dans les entreprises d'au moins cinquante salariés, lorsque le projet de licenciement concerne au moins dix salariés dans une même période de trente jours, l'employeur établit et met en œuvre un plan de sauvegarde de l'emploi pour éviter les licenciements ou en limiter le nombre. ". Les articles L. 1233-24-1 et L. 1233-24-4 du même code prévoient que le contenu de ce plan de sauvegarde de l'emploi peut être déterminé par un accord collectif d'entreprise et qu'à défaut d'accord, il est fixé par un document élaboré unilatéralement par l'employeur.
6. Aux termes de l'article L. 1233-57-3 du code du travail : " En l'absence d'accord collectif ou en cas d'accord ne portant pas sur l'ensemble des points mentionnés aux 1° à 5° de l'article L. 1233-24-2, l'autorité administrative homologue le document élaboré par l'employeur mentionné à l'article L. 1233-24-4, après avoir vérifié la conformité de son contenu aux dispositions législatives et aux stipulations conventionnelles relatives aux éléments mentionnés aux 1° à 5° de l'article L. 1233-24-2, la régularité de la procédure d'information et de consultation du comité social et économique, le respect, le cas échéant, des obligations prévues aux articles L. 1233-57-9 à L. 1233-57-16, L. 1233-57-19 et L. 1233-57-20 et le respect par le plan de sauvegarde de l'emploi des articles L. 1233-61 à L. 1233-63 en fonction des critères suivants : / 1° Les moyens dont disposent l'entreprise, l'unité économique et sociale et le groupe ; / 2° Les mesures d'accompagnement prévues au regard de l'importance du projet de licenciement ; / 3° Les efforts de formation et d'adaptation tels que mentionnés aux articles L. 1233-4 et L. 6321-1. / Elle s'assure que l'employeur a prévu le recours au contrat de sécurisation professionnelle mentionné à l'article L. 1233-65 ou la mise en place du congé de reclassement mentionné à l'article L. 1233-71. ".
7. Aux termes de l'article L. 1233-62 du code du travail : " Le plan de sauvegarde de l'emploi prévoit des mesures telles que : / 1° Des actions en vue du reclassement interne sur le territoire national, des salariés sur des emplois relevant de la même catégorie d'emplois ou équivalents à ceux qu'ils occupent ou, sous réserve de l'accord exprès des salariés concernés, sur des emplois de catégorie inférieure ; / 1° bis Des actions favorisant la reprise de tout ou partie des activités en vue d'éviter la fermeture d'un ou de plusieurs établissements ; / 2° Des créations d'activités nouvelles par l'entreprise ; / 3° Des actions favorisant le reclassement externe à l'entreprise, notamment par le soutien à la réactivation du bassin d'emploi ; / 4° Des actions de soutien à la création d'activités nouvelles ou à la reprise d'activités existantes par les salariés ; / 5° Des actions de formation, de validation des acquis de l'expérience ou de reconversion de nature à faciliter le reclassement interne ou externe des salariés sur des emplois équivalents ; / (...) ".
8. Aux termes de l'article D. 1233-2-1 du code du travail : " I. - Pour l'application de l'article L. 1233-4, l'employeur adresse des offres de reclassement de manière personnalisée ou communique la liste des offres disponibles aux salariés, et le cas échéant l'actualisation de celle-ci, par tout moyen permettant de conférer date certaine. / (...) / III. - En cas de diffusion d'une liste des offres de reclassement interne, celle-ci comprend les postes disponibles situés sur le territoire national dans l'entreprise et les autres entreprises du groupe dont l'entreprise fait partie. / La liste précise les critères de départage entre salariés en cas de candidatures multiples sur un même poste, ainsi que le délai dont dispose le salarié pour présenter sa candidature écrite. / Ce délai ne peut être inférieur à quinze jours francs à compter de la publication de la liste, sauf lorsque l'entreprise fait l'objet d'un redressement ou d'une liquidation judiciaire. / (...) / L'absence de candidature écrite du salarié à l'issue du délai mentionné au deuxième alinéa vaut refus des offres ".
9. Il résulte des dispositions de l'article L. 1233-57-3 du code du travail qu'il appartient à l'administration, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, d'apprécier, au regard de l'importance du projet de licenciement, si les mesures contenues dans le plan sont précises et concrètes et si, à raison, pour chacune, de sa contribution aux objectifs de maintien dans l'emploi et de reclassement des salariés, elles sont, prises dans leur ensemble, propres à satisfaire à ces objectifs compte tenu, d'une part, des efforts de formation et d'adaptation déjà réalisés par l'employeur et, d'autre part, des moyens dont disposent l'entreprise et, le cas échéant, l'unité économique et sociale et le groupe. Dans ce cadre, il revient notamment à l'autorité administrative de s'assurer que le plan de reclassement intégré au plan de sauvegarde de l'emploi est de nature à faciliter le reclassement des salariés dont le licenciement ne pourrait être évité. L'employeur doit, à cette fin, avoir identifié dans le plan l'ensemble des possibilités de reclassement des salariés dans l'entreprise. En outre, lorsque l'entreprise appartient à un groupe, l'employeur, seul débiteur de l'obligation de reclassement, doit avoir procédé à une recherche sérieuse des postes disponibles pour un reclassement dans les autres entreprises du groupe. Pour l'ensemble des postes de reclassement ainsi identifiés, l'employeur doit avoir indiqué dans le plan leur nombre, leur nature et leur localisation.
10. En premier lieu, il ressort des pièces du dossier que le document unilatéral fixant le contenu du plan de sauvegarde de l'emploi de la société Sealants Europe prévoit au point 3.1 intitulé " propositions de reclassement à l'initiative de la société " que la société Sealants Europe adressera à chaque salarié dont le licenciement est projeté les offres de reclassement interne en France ou diffusera par tout moyen une liste des postes disponibles en France. Le document unilatéral précise, dans le cas où les offres de reclassement seront diffusées par liste, que le salarié disposera pour présenter sa candidature écrite d'un délai de quinze jours francs à compter de la publication de la liste et que si plusieurs salariés acceptent une même proposition de reclassement interne, le départage sera fait selon des critères définis en annexe 1 bis du Livre 1. Il ressort en outre des pièces du dossier que le Livre 1 comportait en annexe 2 une liste de 65 postes alors à pourvoir au sein des sociétés et entités faisant partie du Groupe PPG en France et qui avait vocation à être régulièrement actualisée. Contrairement à ce que soutiennent les requérants, en diffusant simultanément à l'ensemble des salariés concernés une liste de postes offerts au reclassement interne, ainsi que les dispositions précitées de l'article D. 1233-2-1 du code du travail l'y autorisaient, la société Sealants Europe n'a pas manqué à son obligation de reclassement.
11. En deuxième lieu, pour contester le caractère suffisant des mesures prévues par le plan de sauvegarde de l'emploi au titre du reclassement externe, les salariés requérants soutiennent qu'aucun dispositif de départ volontaire n'était prévu. Toutefois, il ne résulte ni des dispositions du code du travail, ni des stipulations de l'accord national interprofessionnel que l'employeur ait l'obligation de prévoir dans les mesures du plan de sauvegarde de l'emploi un dispositif de départ volontaire. En outre, il ressort des pièces du dossier que le projet de restructuration de la société Sealants Europe prévoyait la fermeture complète du site de Bezons et, par suite, le licenciement de tous les salariés de ce site, qui étaient ainsi susceptibles de bénéficier des mesures prévues par le plan de sauvegarde de l'emploi. Dans ces conditions, l'absence de tout dispositif de départ volontaire est insuffisante pour caractériser une insuffisance des mesures de reclassement externe prévues par le document unilatéral homologué par la décision du 11 octobre 2021.
12. En dernier lieu, il ressort des pièces du dossier que la société Sealants Europe a notamment prévu au point 3.3.5 du Livre 1, au titre des actions de formation et d'adaptation des salariés ayant accepté une proposition de reclassement interne, la prise en charge de ces formations, en principe dans la limite de 6 000 euros, des dépassements pouvant être autorisés après examen au cas par cas par la commission de suivi, ainsi que des frais de transport exposés à cette fin, dans la limite de plafonds de 250 ou 500 euros. Une prise en charge financière des actions de validation des acquis et de l'expérience est également prévue. En outre, les moyens financiers alloués aux actions de formation sont renforcés pour les salariés dits fragilisés. Enfin, le Livre 1 prévoyait que l'employeur financerait, dans la limite de 3 000 euros, les formations visant à acquérir ou consolider des savoirs et compétences de base, notamment linguistiques. Il ressort également des pièces du dossier que, s'agissant des salariés n'ayant pas pu bénéficier d'un reclassement interne, le point 4.3.3. du Livre 1 prévoyait également la prise en charge d'actions de formation et de validation des acquis et de l'expérience similaires à celles qui viennent d'être énoncée. Enfin, en vertu des points 4.4 et 4.5 des aides à la formation étaient prévues s'agissant des salariés engagés dans un projet de création ou de reprise d'entreprise ou pour ceux engagés dans un cycle long de formation en vue d'une reconversion professionnelle. Si les requérants soutiennent que la société Sealants Europe a structurellement manqué à son obligation d'adaptation des salariés à l'évolution de leur poste en n'allouant pas les budgets de formation suffisants, une telle circonstance, à la supposer établie, ne permet pas, eu égard aux mesures prévues par le Livre 1 et précédemment rappelées, de considérer que la DRIEETS aurait inexactement apprécié les efforts de formation et d'adaptation prévus par la société Sealants Europe en homologuant son document unilatéral.
En ce qui concerne les mesures prévues pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs :
13. Aux termes de l'article L. 4121-1 du code du travail : " L'employeur prend les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs. / Ces mesures comprennent : / 1° Des actions de prévention des risques professionnels, y compris ceux mentionnés à l'article L. 4161-1 ; / 2° Des actions d'information et de formation ; / 3° La mise en place d'une organisation et de moyens adaptés. / L'employeur veille à l'adaptation de ces mesures pour tenir compte du changement des circonstances et tendre à l'amélioration des situations existantes. ".
14. Dans le cadre d'une réorganisation qui donne lieu à élaboration d'un plan de sauvegarde de l'emploi, il appartient à l'autorité administrative de vérifier le respect, par l'employeur, de ses obligations en matière de prévention des risques pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs. A cette fin, elle doit contrôler, dans le cadre de l'article L. 1233-57-3 du code du travail, tant la régularité de l'information et de la consultation des institutions représentatives du personnel que les mesures auxquelles l'employeur est tenu en application de l'article L. 4121-1 du code du travail au titre des modalités d'application de l'opération projetée.
15. Il ressort des pièces du dossier que la société Sealants Europe, pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale de ses salariés dans le cadre de la mise en œuvre de son projet, a distingué trois phases constituées de la phase de poursuite de l'activité, de la phase de nettoyage et de mise en sécurité des équipements et enfin de la phase de démantèlement du site. Dans ce cadre, la société a notamment prévu l'élaboration d'un plan d'évaluation du risque psychosocial et d'un plan d'action réalisé avec l'aide du cabinet " réseau 127 ", la création d'une cellule d'assistance psychologique dans la prévention des risques psycho-sociaux accessible par téléphone 7j/7 et 24h/24, la formation des managers aux risques psychosociaux, une campagne de communication et d'information des salariés sur les mesures d'accompagnement proposées et l'avancement du projet, la présence sur site d'un psychologue, la mise à disposition d'une assistante sociale mandatée et d'une antenne emploi accompagnant les salariés licenciés dans leurs démarches de recherche d'emploi, ou encore la mise en place de mesures spécifiques pour les huit salariés demeurant sur le site jusqu'à sa fermeture. Il ressort également des pièces du dossier, et en particulier de la note d'information soumise au comité social et économique le 23 juillet 2021, que la charge de travail des salariés en poste lors des différentes phases du projet de cessation d'activité a été quantifiée et prise en compte par l'employeur dans l'élaboration des mesures destinées à assurer la santé et la sécurité des salariés. Ainsi, le document unilatéral comporte les mesures auxquelles l'employeur était tenu en application de l'article L. 4121-1 du code du travail au titre des modalités d'application de l'opération projetée.
16. Contrairement à ce que soutiennent les requérants, il ressort de ce qui a été dit au point précédent, que la société Sealants Europe a procédé à une analyse des risques et prévu des mesures de prévention pour les différentes phases du projet. Si les requérants soutiennent qu'une partie des mesures visées par la DRIEETS dans sa décision d'homologation avaient été prévues par l'employeur avant même la décision de refus d'homologation du 12 avril 2021 et, par ailleurs, que certaines mesures, relatives à l'accompagnement managérial, ont été mises en œuvre dès le début de la procédure, cette double circonstance est insuffisante pour entacher d'inexactitude l'appréciation portée par l'administration sur les mesures prévues par l'employeur en matière de prévention des risques professionnels dans le cadre de l'opération de restructuration. Contrairement à ce que soutiennent les salariés requérants, il ne ressort pas des pièces du dossier que la ligne d'écoute téléphonique aurait consisté uniquement en une ligne permettant de prendre un rendez-vous. Il ne ressort pas davantage des pièces du dossier que le dispositif de soutien et d'écoute mis en place n'aurait été effectif qu'en octobre 2020 et avril 2021 pour une durée totale de 18 jours.
17. Il résulte de ce qui vient d'être dit que le moyen tiré de ce que la décision d'homologation en litige serait entachée d'une erreur d'appréciation quant au caractère suffisant au regard des dispositions de l'article L. 4121-1 du code du travail du plan de sauvegarde de l'emploi de la société Sealants Europe doit être écarté.
En ce qui concerne le moyen de l'irrégularité de la procédure de négociation :
18. Si les salariés requérants soutiennent que l'employeur n'aurait pas respecté son obligation de loyauté dans le cadre des négociations engagées en vue de parvenir à un accord collectif, une telle circonstance, qui n'a pas affecté la procédure d'information et de consultation du comité social et économique, est inopérante au soutien de conclusions tendant à l'annulation d'une décision d'homologation d'un document unilatéral.
En ce qui concerne le moyen tiré de l'irrégularité de la procédure d'information et de consultation du comité social et économique central :
19. Aux termes de l'article L. 1233-28 du code du travail : " L'employeur qui envisage de procéder à un licenciement collectif pour motif économique d'au moins dix salariés dans une même période de trente jours réunit et consulte le comité social et économique dans les conditions prévues par le présent paragraphe ". Aux termes de l'article L. 1233-30 du même code : " I. - Dans les entreprises ou établissements employant habituellement au moins cinquante salariés, l'employeur réunit et consulte le comité social et économique sur : / 1° L'opération projetée et ses modalités d'application, conformément à l'article L. 2323-31 ; / 2° Le projet de licenciement collectif : le nombre de suppressions d'emploi, les catégories professionnelles concernées, les critères d'ordre et le calendrier prévisionnel des licenciements, les mesures sociales d'accompagnement prévues par le plan de sauvegarde de l'emploi et, le cas échéant, les conséquences des licenciements projetés en matière de santé, de sécurité ou de conditions de travail. / Les éléments mentionnés au 2° du présent I qui font l'objet de l'accord mentionné à l'article L. 1233-24-1 ne sont pas soumis à la consultation du comité social et économique prévue au présent article. / Le comité social et économique tient au moins deux réunions espacées d'au moins quinze jours. / II. - Le comité social et économique rend ses deux avis dans un délai qui ne peut être supérieur, à compter de la date de sa première réunion au cours de laquelle il est consulté sur les 1° et 2° du I, à : / (...) 2° Trois mois lorsque le nombre des licenciements est au moins égal à cent et inférieur à deux cent cinquante ; / (...) / Une convention ou un accord collectif de travail peut prévoir des délais différents. / En l'absence d'avis du comité social et économique dans ces délais, celui-ci est réputé avoir été consulté. (...) ". Aux termes de l'article L. 1233-31 du même code : " L'employeur adresse aux représentants du personnel, avec la convocation à la première réunion, tous renseignements utiles sur le projet de licenciement collectif. / Il indique : / 1° La ou les raisons économiques, financières ou techniques du projet de licenciement ; / 2° Le nombre de licenciements envisagé ; / 3° Les catégories professionnelles concernées et les critères proposés pour l'ordre des licenciements ; / 4° Le nombre de salariés, permanents ou non, employés dans l'établissement ; / 5° Le calendrier prévisionnel des licenciements ; / 6° Les mesures de nature économique envisagées ; / 7° Le cas échéant, les conséquences de la réorganisation en matière de santé, de sécurité ou de conditions de travail ".
20. Lorsqu'elle est saisie par un employeur d'une demande d'homologation d'un document élaboré en application de l'article L. 1233-24-4 du code du travail et fixant le contenu d'un plan de sauvegarde de l'emploi, il appartient à l'administration de s'assurer, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, que la procédure d'information et de consultation du comité d'entreprise a été régulière. Elle ne peut légalement accorder l'homologation demandée que si le comité a été mis à même d'émettre régulièrement un avis, d'une part, sur l'opération projetée et ses modalités d'application et, d'autre part, sur le projet de licenciement collectif et le plan de sauvegarde de l'emploi. Il appartient en particulier à ce titre à l'administration de s'assurer que l'employeur a adressé au comité d'entreprise, avec la convocation à sa première réunion, ainsi que, le cas échéant, en réponse à des demandes exprimées par le comité, tous les éléments utiles pour qu'il formule ses deux avis en toute connaissance de cause.
21. En premier lieu, les salariés requérants soutiennent que la procédure d'information et de consultation du comité social et économique est entachée d'irrégularité en raison du recours illégal de l'employeur aux suspensions de séances lors de la première réunion du comité. Il ressort des pièces du dossier que la société Sealants Europe, qui avait réuni le comité social et économique le 8 octobre 2020 pour la première réunion marquant le début de la procédure d'information et de consultation, a organisé, le 29 octobre 2020, à la demande de l'administration, une nouvelle réunion " R1 ". L'ordre du jour de cette réunion n'ayant pu être traité ni à cette date, ni le 10 novembre suivant, la séance a été suspendue par l'employeur à deux reprises et la réunion " R1 " a été achevée seulement le 27 novembre 2020. Contrairement à ce que soutiennent les requérants, ni la durée de cette première réunion, ni la circonstance que les suspensions de séances n'aient pas recueilli l'accord des représentants du personnel ne permettent de caractériser une irrégularité dans la procédure d'information et de consultation du comité social et économique sur le projet de restructuration de la société Sealants Europe.
22. En deuxième lieu, il résulte des dispositions de l'article L. 1233-30 du code du travail citées ci-dessus, éclairées par les travaux préparatoires de la loi du 14 juin 2013 de sécurisation de l'emploi de laquelle elles sont issues, que la circonstance que le comité social et économique ait rendu ses avis au-delà des délais qu'elles prévoient est par elle-même sans incidence sur la régularité de la procédure d'information et de consultation du comité. Le moyen tiré par les salariés requérants que le comité social et économique a rendu son avis plus de trois mois après la première réunion du comité doit, par suite, être écarté.
23. En troisième lieu, aux termes de l'article L. 2315-29 du code du travail : " L'ordre du jour de chaque réunion du comité social et économique est établi par le président et le secrétaire. / Les consultations rendues obligatoires par une disposition législative ou réglementaire ou par un accord collectif de travail sont inscrites de plein droit à l'ordre du jour par le président ou le secrétaire. ". Si les requérants soutiennent que la procédure d'information et de consultation du comité social et économique est entachée d'irrégularité dès lors que les ordres du jour des réunions ont été établis unilatéralement par l'employeur, ce moyen ne peut qu'être écarté dès lors que les consultations en cause revêtaient un caractère obligatoire. Si les requérants soutiennent que la société n'établirait pas l'existence d'un désaccord entre le président et le secrétaire, cette circonstance, à la supposer établie, est sans incidence sur la régularité des ordres du jour en cause.
24. En quatrième lieu, les salariés soutiennent que le contenu des ordres du jour du comité social et économique est irrégulier dès lors que ces derniers ne comporteraient pas tous les points pourtant soumis à des consultations légalement obligatoires, notamment les catégories professionnelles, les critères d'ordre des licenciements et le congé de reclassement. Toutefois, l'obligation de consultation des membres du comité social et économique qui découle de l'article L. 1233-30 du code du travail précédemment cité, n'implique pas que les différents points soumis à consultation apparaissent spécifiquement sur les ordres du jour des réunions du comité. Les requérants ne contestant pas que les points en cause ont été débattus lors des réunions elles-mêmes, ce moyen doit, par suite, être écarté.
25. En cinquième lieu, si les salariés soutiennent qu'en méconnaissance de l'article L. 1233-46 du code du travail, la société Sealants Europe a notifié à l'autorité administrative son projet de licenciement avant la tenue de la première réunion du comité social et économique, cette circonstance est sans incidence sur la régularité de la procédure d'information et de consultation du comité social et économique.
26. En sixième lieu, les requérants soutiennent que la procédure d'information et de consultation est irrégulière dès lors que les informations transmises au comité social et économique relatives, d'une part, aux raisons économiques et financières du projet de réorganisation et, d'autre part, aux mesures de prévention concernant la santé, la sécurité et les conditions de travail des salariés étaient insuffisantes. Il ressort toutefois des pièces du dossier que le comité social et économique a été informé et consulté sur la cessation d'activité projetée et ses modalités d'application (livre II), sur le projet de licenciement collectif pour motif économique (livre I), ainsi que sur les conséquences de ce projet de réorganisation en matière de santé, sécurité et de conditions de travail. Les membres du comité social et économique ont notamment été rendus destinataires en octobre 2020 des documents relatifs au " projet de cessation d'activités de la société Sealants Europe " (livre II) présentant les raisons économiques et financières de l'opération projetée, et de la note relative aux conséquences du projet sur les conditions de travail et portant " description du soutien et des mesures de prévention des risques psychosociaux ". Il ressort également des pièces du dossier que le document unique d'évaluation des risques professionnels a été réactualisé concomitamment à la mise en œuvre du PSE et communiqué au comité social et économique le 18 février 2021, en temps utile pour émettre ses avis. A la suite de la décision de refus d'homologation du 12 avril 2021, la procédure d'information et de consultation s'est poursuivie et une note complétée sur l'impact du projet sur la santé, la sécurité et les conditions de travail des salariés a notamment été présentée aux membres du comité social et économique lors des réunions qui se sont tenues les 23 juillet et 16 septembre 2021. Les circonstances relevées par les requérants que, d'une part, la note d'information économique n'a pas été actualisée au cours du déroulement de la procédure de consultation du comité et que le document unique d'évaluation des risques professionnels n'a pas été mis à jour après le 5 mars 2021 sont insuffisantes pour établir que l'information donnée par l'employeur au comité social et économique aurait été insuffisante. Il suit de là que l'autorité administrative, qui, contrairement à ce que les requérants soutiennent, n'a pas omis d'examiner si les obligations qui incombent à l'employeur en matière d'information et de consultation du comité social et économique avaient été respectées, n'a pas entaché sa décision d'une erreur d'appréciation en estimant que le comité avait disposé des éléments lui permettant d'émettre ses avis en toute connaissance de cause.
27. En septième lieu, aux termes de l'article L. 1233-57-9 du code du travail : " Lorsqu'elle envisage la fermeture d'un établissement qui aurait pour conséquence un projet de licenciement collectif, l'entreprise mentionnée à l'article L. 1233-71 réunit et informe le comité social et économique, au plus tard à l'ouverture de la procédure d'information et de consultation prévue à l'article L. 1233-30 ". Aux termes de l'article L. 1233-57-14 du même code : " L'employeur ayant informé le comité social et économique du projet de fermeture d'un établissement recherche un repreneur. Il est tenu : 1° D'informer, par tout moyen approprié, des repreneurs potentiels de son intention de céder l'établissement ; / 2° De réaliser sans délai un document de présentation de l'établissement destiné aux repreneurs potentiels ; (...) ". Aux termes de l'article L. 1233-57-15 de ce code : " Le comité social et économique est informé des offres de reprise formalisées, au plus tard huit jours après leur réception. Les informations qui lui sont communiquées à ce titre sont réputées confidentielles dans les conditions prévues à l'article L. 2325-5. Il peut émettre un avis, dans les délais prévus à l'article L. 1233-30, participer à la recherche d'un repreneur et formuler des propositions. ". Aux termes de l'article L. 1233-57-16 de ce même code : " Si le comité social et économique souhaite participer à la recherche d'un repreneur, l'employeur lui donne accès, à sa demande, aux informations mentionnées aux 4° à 6° de l'article L. 1233-57-14 ". Aux termes de l'article L. 1233-57-20 du même code : " Avant la fin de la procédure d'information et de consultation prévue à l'article L. 1233-30, si aucune offre de reprise n'a été reçue ou si l'employeur n'a souhaité donner suite à aucune des offres, celui-ci réunit le comité social et économique et lui présente un rapport, qui est communiqué à l'autorité administrative. Ce rapport indique : 1° Les actions engagées pour rechercher un repreneur ; 2° Les offres de reprise qui ont été reçues ainsi que leurs caractéristiques ; 3° Les motifs qui l'ont conduit, le cas échéant, à refuser la cession de l'établissement ".
28. D'une part, si les requérants soutiennent que la procédure est irrégulière dès lors que le comité social et économique n'a pas été consulté sur le choix du cabinet missionné par la société Sealants Europe pour l'assister dans sa recherche de repreneur, aucune disposition légale ou réglementaire n'impose une telle consultation du comité social et économique.
29. D'autre part, il ne ressort pas des pièces du dossier que le comité social et économique ait souhaité participer à la recherche d'un repreneur. Les requérants ne peuvent donc pas utilement se prévaloir de la circonstance que le comité n'a pas été associé au processus de recherche pour contester la régularité de la procédure.
30. Enfin, il ressort des pièces du dossier que le comité social et économique a bien été informé du déroulement des opérations de recherche d'un repreneur. La circonstance que le document de présentation de l'établissement, destiné aux éventuels repreneurs, n'ait pas été communiqué dans son intégralité au comité social et économique n'entache pas d'irrégularité la procédure dès lors, ainsi qu'il a été dit, que le CSE n'a pas demandé à être associé à la recherche d'un repreneur.
31. En dernier lieu, les requérants soutiennent qu'il appartenait à la DRIEETS de s'assurer que le plan de sauvegarde de l'emploi de la société Sealants Europe était conforme non seulement aux exigences légales mais également aux stipulations conventionnelles et qu'en l'espèce la société Sealants Europe a méconnu l'article 14 de la convention collective nationale du caoutchouc du 6 mars 1953 et l'accord national interprofessionnel du 10 février 1969 en s'abstenant de saisir la commission paritaire de l'emploi. Ce moyen doit toutefois être écarté dès lors, d'une part, qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que l'administration aurait omis de contrôler ce point et, d'autre part, qu'il ressort également des pièces du dossier que la société a procédé à cette saisine par courrier du 1er décembre 2020.
En ce qui concerne le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article L. 2312-58 du code du travail :
32. Aux termes de ces dispositions du code du travail : " A défaut d'accord, lorsque le projet de restructuration et de compression des effectifs soumis au comité social et économique est de nature à affecter le volume d'activité ou d'emploi d'une entreprise sous-traitante, l'entreprise donneuse d'ordre en informe immédiatement l'entreprise sous-traitante. / Le comité social et économique de cette dernière, en est immédiatement informé et reçoit toute explication utile sur l'évolution probable de l'activité et de l'emploi. ".
33. La circonstance que la société Sealants Europe n'a pas informé " l'entreprise sous-traitante " de son projet de restructuration, est sans incidence sur la légalité de la décision d'homologation en litige dès lors que le respect des dispositions de L. 2312-58 du code du travail n'entre pas dans le champ du contrôle de l'autorité administrative définie par les dispositions précédemment citées de l'article L. 1233-57-3 de ce même code.
En ce qui concerne le moyen tiré de l'irrégularité des catégories professionnelles :
34. Il appartient à l'administration, lorsqu'elle est saisie d'une demande d'homologation d'un document qui fixe les catégories professionnelles mentionnées au 4° de l'article L. 1233-24-2 du code du travail, de se prononcer, sous le contrôle du juge administratif, sur la légalité de ces catégories professionnelles. A ce titre, elle doit s'assurer, au vu de l'ensemble des éléments qui lui sont soumis, notamment des échanges avec les représentants du personnel au cours de la procédure d'information et de consultation ainsi que des justifications qu'il appartient à l'employeur de fournir, de ce que ces catégories regroupent, en tenant compte des acquis de l'expérience professionnelle qui excèdent l'obligation d'adaptation qui incombe à l'employeur, l'ensemble des salariés qui exercent, au sein de l'entreprise, des fonctions de même nature supposant une formation professionnelle commune. Au terme de cet examen, l'administration refuse l'homologation demandée s'il apparaît que les catégories professionnelles concernées par le licenciement ont été déterminées par l'employeur en se fondant sur des considérations, telles que l'organisation de l'entreprise ou l'ancienneté des intéressés, qui sont étrangères à celles qui permettent de regrouper, compte tenu des acquis de l'expérience professionnelle, les salariés par fonctions de même nature supposant une formation professionnelle commune, ou s'il apparaît qu'une ou plusieurs catégories ont été définies dans le but de permettre le licenciement de certains salariés pour un motif inhérent à leur personne ou en raison de leur affectation sur un emploi ou dans un service dont la suppression est recherchée.
35. Comme en première instance, les salariés requérants se bornent à affirmer sans plus de précisions que les catégories professionnelles définies par la société Sealants Europe " sont beaucoup trop nombreuses pour pouvoir être homologuées en l'état ". Ce faisant, les requérants n'assortissent pas leur moyen des précisions suffisantes pour permettre à la cour d'en apprécier le bien-fondé.
En ce qui concerne le moyen tiré de l'absence de critères d'ordre des licenciements :
36. il résulte des dispositions de l'article L. 1233-57-3 du code du travail citées au point 6 qu'il appartient à l'autorité administrative, avant de pouvoir homologuer le document unilatéral élaboré par l'employeur, de vérifier la conformité de son contenu aux dispositions législatives et aux stipulations conventionnelles relatives aux éléments mentionnés aux 1° à 5° de l'article L. 1233-24-2 du même code, au nombre desquels figurent notamment la pondération et le périmètre d'application des critères d'ordre des licenciements mentionnés à l'article L. 1233-5 de ce même code. Toutefois, les règles relatives à l'ordre des licenciements prononcés pour motif économique ne s'appliquent que si l'employeur doit opérer un choix parmi les salariés à licencier, ce qui n'est pas le cas lorsque le licenciement projeté concerne l'ensemble des salariés des établissements d'une entreprise situés dans une même zone d'emploi.
37. En l'espèce, il est constant que le projet de restructuration de la société Sealants Europe doit conduire à la fermeture totale du site de Bezons et, par suite, au licenciement de tous les salariés de l'entreprise affectés sur cet établissement. Il suit de là que l'employeur n'avait pas à définir de critère d'ordre des licenciements, sans qu'y fasse obstacle la circonstance que les notifications des licenciements ne seront pas simultanées en raison du maintien de quelques salariés jusqu'à la fermeture complète du site.
En ce qui concerne le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article L. 1224-1 du code du travail :
38. Les requérants soutiennent que les salariés de la société Sealants Europe pour lesquels l'activité a été transférée vers d'autres sociétés du groupe PPG auraient dû voir leur contrat de travail repris par ces différentes entités sur le fondement des dispositions de l'article L. 1224-1 du code du travail et que l'administration a omis d'exercer son contrôle sur ce point. Toutefois, il n'appartient pas à l'administration, dans le cadre de l'examen de la demande d'homologation, d'apprécier la nécessité, la régularité ou l'opportunité de la mise en œuvre de l'article L. 1224-1 du code du travail, et ce alors même que l'application de ces dispositions serait susceptible de réduire le nombre de licenciements résultant du plan de sauvegarde de l'emploi. Par suite, les moyens invoqués par les requérants tirés de la méconnaissance des dispositions précitées du code du travail et de ce que l'administration aurait omis d'exercer son contrôle sur ce point ne peuvent qu'être écartés.
39. Il résulte de tout ce qui précède que M. G... et autres ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté leur demande.
Sur les conclusions présentées au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
40. L'Etat n'étant pas partie perdante dans la présente instance, les conclusions présentées par M. G... et autres au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent être que rejetées. Il y a lieu, en revanche, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge du syndicat Force Ouvrière des industries caoutchouc et activités annexes à Bezons le versement à la société Sealants Europe d'une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens dans l'instance n° 22VE00783. Il n'y a pas lieu, en revanche, dans les circonstances de l'espèce de faire droit aux conclusions présentées par la société Sealants Europe dans l'instance n° 22VE01082 à l'encontre des salariés requérants.
DÉCIDE :
Article 1er : Les requêtes du syndicat Force Ouvrière des industries caoutchouc et activités annexes à Bezons et de M. G... et autres sont rejetées.
Article 2 : Le syndicat Force Ouvrière des industries caoutchouc et activités annexes à Bezons versera à la société Sealants Europe une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le surplus des conclusions présentées par la société Sealants Europe au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative est rejeté.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié au syndicat Force Ouvrière des industries caoutchouc et activités annexes à Bezons, à Mme AB... F..., représentant unique pour l'ensemble des salariés requérants, au ministre du travail, du plein emploi et de l'insertion et à la société Sealants Europe.
Copie en sera adressée au directeur régional et interdépartemental de l'économie, de l'emploi, du travail et des solidarités d'Île-de-France.
Délibéré après l'audience du 17 juin 2022, à laquelle siégeaient :
M. Brotons, président,
Mme Le Gars, présidente assesseure,
M. Coudert, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 5 juillet 2022.
Le rapporteur,
B. P...Le président,
S. BROTONSLa greffière,
S. de SOUSA
La République mande et ordonne au ministre du travail, du plein emploi et de l'insertion en ce qui la concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition conforme
La greffière,
Nos 22VE00783-22VE01082 2