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21/06/2022 | FRANCE | N°20VE01789

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 3ème chambre, 21 juin 2022, 20VE01789


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société à responsabilité limitée (SARL) AD a demandé au tribunal administratif de Versailles de prononcer la décharge, en droits et majorations, des rappels de taxe sur la valeur ajoutée (TVA) restant à sa charge au titre des périodes du 1er janvier 2011 au 28 février 2014 et des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés restant à sa charge au titre des exercices 2011 et 2012, pour un montant global de 270 562 euros.

Par un jugement n° 1805506 du 23 juin 2020, le tribunal admin

istratif de Versailles a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société à responsabilité limitée (SARL) AD a demandé au tribunal administratif de Versailles de prononcer la décharge, en droits et majorations, des rappels de taxe sur la valeur ajoutée (TVA) restant à sa charge au titre des périodes du 1er janvier 2011 au 28 février 2014 et des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés restant à sa charge au titre des exercices 2011 et 2012, pour un montant global de 270 562 euros.

Par un jugement n° 1805506 du 23 juin 2020, le tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 28 juillet 2020, et des pièces complémentaires, enregistrées le 29 juillet 2020, la société à responsabilité limitée (SARL) AD, représentée par Me Baux, avocat, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement ;

2°) de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des impositions supplémentaires restant à sa charge ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- elle n'a pas eu l'intention de s'opposer au contrôle fiscal dont elle a été l'objet, son gérant se trouvant dans une situation d'impossibilité physique et morale de participer à celui-ci en raison de troubles dépressifs dont il souffrait depuis plus d'un an ; le mandataire qu'il a désigné le 21 mai 2014 pour représenter la société n'a pu assurer cette représentation du fait des nouvelles fonctions qu'il exerçait en province ;

- s'agissant du taux de taxe sur la valeur ajoutée, l'ensemble de ses activités étaient éligibles au taux réduit de taxe sur la valeur ajoutée de 5,5 % prévu par l'article 279-0 bis du code général des impôts, en tant que travaux d'embellissement et d'amélioration, et elle produit des attestations clients conformes pour chaque prestation réalisée ;

- s'agissant de la taxe sur la valeur ajoutée d'amont, elle justifie de montants déductibles à hauteur de 33 221 euros pour 2011, 50 912 euros pour 2012, 29 152 euros pour 2013 et 6 928 euros pour 2014, les factures produites n'étant pas celles qui ont été acceptées par le service ;

- les rappels de TVA n'étant pas justifiés, le " profit sur le Trésor " correspondant n'est pas fondé.

Par un mémoire en défense, enregistré le 28 janvier 2021, le ministre de l'économie, des finances et de la relance conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir que :

- à titre principal, la requête est irrecevable dès lors que la SARL AD était dépourvue de personnalité morale, suite à sa radiation du registre du commerce et des sociétés intervenue le 8 mars 2015, et ne pouvait dès lors donner mandat à Me Baux pour interjeter appel en son nom le 28 juillet 2020 ;

- à titre subsidiaire, les moyens soulevés ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme A...,

- et les conclusions de M. Huon, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. La SARL AD exerçait l'activité de réalisation de prestations de travaux pour les particuliers. A la suite d'une vérification de comptabilité dont elle a fait l'objet, portant sur les exercices clos en 2011 et 2012 et étendue au 28 février 2014 en matière de taxe sur la valeur ajoutée, l'administration, après avoir dressé un procès-verbal de défaut de comptabilité, lui a proposé, selon la procédure d'évaluation d'office pour opposition à contrôle fiscal prévue à l'article L. 74 du livre des procédures fiscales, des rectifications en matière de taxe sur la valeur ajoutée au titre des périodes du 1er janvier 2011 au 28 février 2014 et d'impôt sur les sociétés au titre des exercices 2011 et 2012. Par deux décisions faisant suite aux réclamations présentées par la SARL AD, l'administration a prononcé le dégrèvement partiel, en droits et pénalités, des rappels de taxe sur la valeur ajoutée mis à sa charge au titre des périodes 2011, 2012, 2013 et 2014. La SARL AD fait appel du jugement du 23 juin 2020 par lequel le tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande tendant à la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée et des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés et des pénalités afférentes restant à sa charge.

Sur la régularité de la procédure d'imposition:

2. Aux termes de l'article L. 74 du livre des procédures fiscales : " Les bases d'imposition sont évaluées d'office lorsque le contrôle fiscal ne peut avoir lieu du fait du contribuable ou de tiers. ".

3. Il résulte de l'instruction qu'après avoir régulièrement adressé à la SARL AD le 2 avril 2014 un avis de vérification de comptabilité, le vérificateur s'est présenté au siège de la société le 6 mai 2014, sans que le gérant de celle-ci, M. B..., n'y soit présent. Le service vérificateur a convenu avec M. C..., salarié de la société dûment mandaté par le gérant pour le représenter lors des opérations de contrôle, d'un nouveau rendez-vous, fixé au 21 mai 2014, date à laquelle s'est tenue une première intervention. Toutefois, le représentant désigné ne s'est pas présenté au second rendez-vous, pourtant fixé d'un commun accord avec lui à la date du 3 juin 2014. Les deux mises en garde avant opposition à contrôle fiscal notifiées à la société les 5 et 24 juin 2014 étant restées sans effet, un constat d'opposition à contrôle fiscal a été dressé par le vérificateur le 8 juillet suivant, et notifié à la société et à son gérant le 17 juillet. En se bornant à produire un certificat médical établi en juin 2016, soit dix-huit mois après la fin des opérations de contrôle, selon lequel M. B... était suivi pour un syndrome anxio-dépressif entre 2013 et 2015, et à alléguer que le mandataire désigné par le gérant pour le représenter n'avait pu honorer les rendez-vous avec l'administration en raison de fonctions exercées en province, la société requérante, qui n'allègue pas avoir alors pris l'attache du service pour lui faire part de difficultés à être représentée lors des opérations de contrôle, ne justifie pas de l'inertie dont elle a fait preuve, laquelle caractérise une situation d'opposition à contrôle fiscal. Par suite, c'est à bon droit que l'administration, qui a accompli toutes les diligences nécessaires afin de mener à bien la vérification, a, suivant la procédure l'article L. 74 du livre des procédures fiscales, évalué d'office les bases des impositions à l'impôt sur les sociétés et à la taxe sur la valeur ajoutée en litige.

Sur le bien-fondé des impositions en litige :

4. Les impositions litigieuses ayant régulièrement été déterminées d'office, il incombe à la SARL AD d'en établir le caractère exagéré, en application des dispositions des articles L. 193 et R. 193-1 du livre des procédures fiscales.

En ce qui concerne le taux de taxe sur la valeur ajoutée applicable :

5. Aux termes de l'article 279-0 bis du code général des impôts, dans sa rédaction applicable à la période 2011 : " 1. La taxe sur la valeur ajoutée est perçue au taux réduit sur les travaux d'amélioration, de transformation, d'aménagement et d'entretien portant sur des locaux à usage d'habitation, achevés depuis plus de deux ans, à l'exception de la part correspondant à la fourniture d'équipements ménagers ou mobiliers ou à l'acquisition de gros équipements fournis dans le cadre de travaux d'installation ou de remplacement du système de chauffage, des ascenseurs, de l'installation sanitaire ou de système de climatisation dont la liste est fixée par arrêté du ministre chargé du budget. (...) / 3. Le taux réduit prévu au 1 est applicable aux travaux facturés au propriétaire ou, le cas échéant, au syndicat de copropriétaires, au locataire, à l'occupant des locaux ou à leur représentant à condition que le preneur atteste que ces travaux se rapportent à des locaux d'habitation achevés depuis plus de deux ans et ne répondent pas aux conditions mentionnées au 2. Le prestataire est tenu de conserver cette attestation à l'appui de sa comptabilité. Le preneur doit conserver copie de cette attestation, ainsi que les factures ou notes émises par les entreprises ayant réalisé des travaux jusqu'au 31 décembre de la cinquième année suivant la réalisation de ces travaux. / Le preneur est solidairement tenu au paiement du complément de taxe si les mentions portées sur l'attestation s'avèrent inexactes de son fait. ". Il résulte de ces dispositions que l'application du taux réduit est soumise à la double condition que le preneur établisse, à la date du fait générateur de la taxe, ou au plus tard à celle de la facturation, une attestation selon laquelle les travaux effectués remplissent les conditions posées par cet article et que la personne qui réalise ces travaux, et qui établit la facturation, conserve cette attestation à l'appui de sa comptabilité. Toutefois, lorsque, pour ces travaux, l'entreprise a perçu un acompte, la taxe sur la valeur ajoutée est exigible, à raison de cette prestation de service, en vertu du 2 de l'article 269 du code général des impôts, à la date de l'encaissement de cet acompte. Dans ce cas, elle ne peut faire application du taux réduit que si, au moment où elle encaisse cet acompte, elle est en possession de l'attestation établie par le preneur et portant sur ces travaux.

6. La SARL AD ne produit ni la facture des travaux correspondant à l'attestation établie le 15 juin 2011 par l'un de ses clients, ni aucune autre facture et attestation qui justifierait l'application du taux réduit de taxe sur la valeur ajoutée conformément aux dispositions précitées de l'article 279-0 bis du code général des impôts, alors au demeurant que par une décision du 21 juin 2018, le service a admis de faire application du taux de taxe sur la valeur ajoutée de 5,5 % au vu des justificatifs produits par la société. Dans ces conditions, la société requérante n'établit pas qu'elle était en droit d'appliquer le taux réduit de taxe sur la valeur ajoutée aux prestations encaissées et que les rappels de taxe ainsi mis à sa charge seraient excessifs.

En ce qui concerne la taxe sur la valeur ajoutée déductible :

7. Aux termes de l'article 271 du code général des impôts, dans sa rédaction applicable : " I. 1. La taxe sur la valeur ajoutée qui a grevé les éléments du prix d'une opération imposable est déductible de la taxe sur la valeur ajoutée applicable à cette opération. (...) ". L'article L. 177 du livre des procédures fiscales dispose : " En ce qui concerne la taxe sur la valeur ajoutée déductible dans les conditions fixées par l'article 271 du code général des impôts, les redevables doivent justifier du montant de la taxe déductible et du crédit de taxe dont ils demandent à bénéficier, par la présentation de documents même établis antérieurement à l'ouverture de la période soumise au droit de reprise de l'administration. (...) ".

8. Il résulte de l'instruction qu'après avoir rappelé des montants de taxe sur la valeur ajoutée de 40 980 euros, 57 390 euros, 29 238 euros et 2 543 euros au titre de chacune des quatre périodes contrôlées entre 2011 et 2014, l'administration a finalement admis, par une décision du 21 juin 2018, des déductions de taxe à hauteur respectivement de 8 352 euros, 14 138 euros, 9 644 euros et 1 393 euros au vu des justificatifs produits par la SARL AD. Si la requérante soutient avoir droit à la déduction de taxe sur la valeur ajoutée à hauteur de 33 221 euros, 50 912 euros, 29 152 euros et 6 928 euros au titre respectivement de chacune de ces périodes, elle ne justifie pas, ainsi qu'il lui incombe, du bien-fondé de ses prétentions dans la mesure où elle n'indique pas, parmi les milliers de factures, tickets de caisse et copies de chèques, qu'elle produit sans les commenter et dont la plupart ne sont pas mêmes réguliers en la forme, quels seraient les justificatifs supplémentaires à ceux produits dans le cadre de ses réclamations et déjà admis par le vérificateur, qui auraient été rejetés à tort par l'administration. Dans ces conditions, la SARL AD, qui ne met pas à même la cour d'apprécier l'étendue de ses droits à déduction compte tenu des dégrèvements intervenus, n'est pas fondée à demander la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée mis à sa charge.

En ce qui concerne le profit sur le Trésor :

9. Si la SARL AD conteste les sommes rappelées au titre du profit sur le Trésor au seul motif du caractère non fondé des rappels de taxe sur la valeur ajoutée mis à sa charge, il y a lieu d'écarter ce moyen par voie de conséquence de ce qui a été dit aux points 6. et 8.

10. Il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur la fin de

non-recevoir opposée en défense par le ministre, que la SARL AD n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, les conclusions qu'elle présente en décharge et au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de la SARL AD est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la société à responsabilité limitée AD et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.

Délibéré après l'audience du 8 juin 2022, à laquelle siégeaient :

Mme Danielian, présidente,

Mme Bonfils, première conseillère,

Mme Deroc, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 21 juin 2022.

La rapporteure,

M.-G. A...La présidente,

I. DanielianLa présidente,

I. I. DanielianLa greffière,

C. Fourteau

La greffière,

A. Audrain FoulonLa République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme

La greffière,

2

N° 20VE01789


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 20VE01789
Date de la décision : 21/06/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

Contributions et taxes - Généralités - Règles générales d'établissement de l'impôt - Contrôle fiscal.

Contributions et taxes - Taxes sur le chiffre d'affaires et assimilées - Taxe sur la valeur ajoutée - Liquidation de la taxe - Déductions - Conditions de la déduction.

Contributions et taxes - Taxes sur le chiffre d'affaires et assimilées - Taxe sur la valeur ajoutée - Calcul de la taxe - Taux.


Composition du Tribunal
Président : Mme DANIELIAN
Rapporteur ?: Mme Marie-Gaëlle BONFILS
Rapporteur public ?: M. HUON
Avocat(s) : CABINET FIDAL

Origine de la décision
Date de l'import : 28/06/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2022-06-21;20ve01789 ?
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