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24/02/2022 | FRANCE | N°21VE02056

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 2ème chambre, 24 février 2022, 21VE02056


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société par action simplifiée Vitaris et l'association française de téléassistance (AFRATA) ont demandé au tribunal administratif d'Orléans d'annuler le titre exécutoire n° 1852 d'un montant de 211 euros émis le 13 novembre 2019 par le service départemental d'incendie et de secours (SDIS) du Loiret et de décharger la société Vitaris de l'obligation de payer cette somme.

Par un jugement n° 2000109 du 4 mai 2021, le tribunal administratif d'Orléans a rejeté leurs demandes.

Procéd

ure devant la cour :

Par une requête, un mémoire complémentaire et un mémoire en réplique, e...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société par action simplifiée Vitaris et l'association française de téléassistance (AFRATA) ont demandé au tribunal administratif d'Orléans d'annuler le titre exécutoire n° 1852 d'un montant de 211 euros émis le 13 novembre 2019 par le service départemental d'incendie et de secours (SDIS) du Loiret et de décharger la société Vitaris de l'obligation de payer cette somme.

Par un jugement n° 2000109 du 4 mai 2021, le tribunal administratif d'Orléans a rejeté leurs demandes.

Procédure devant la cour :

Par une requête, un mémoire complémentaire et un mémoire en réplique, enregistrés respectivement le 2 juillet 2021, le 10 septembre 2021 et le 23 novembre 2021, la SAS Vitaris et l'AFRATA, représentées par Me Marchand, avocat, demandent à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler ce titre exécutoire ;

3°) de décharger la société Vitaris de l'obligation de payer la somme mise à sa charge par ce titre exécutoire ;

4°) de mettre à la charge du service départemental d'incendie et de secours du Loiret la somme de 1 500 euros à verser à la société Vitaris en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elles soutiennent que :

- le jugement attaqué est insuffisamment motivé ;

- le titre exécutoire n'est pas signé, seul le bordereau de titres de recette s'y rapportant ayant été signé électroniquement ;

- le nom de la signataire de ce bordereau n'apparaît pas sur le titre litigieux ;

- ce bordereau ne permet pas d'identifier les titres de recette qu'il concerne ;

- le titre exécutoire n'indique pas les bases de la liquidation ;

- il n'est pas adressé au bon débiteur ;

- l'intervention litigieuse fait partie des missions de service public dévolues au service départemental d'incendie et de secours en application des articles L. 1424-2 et L. 1424-42 du code général des collectivités territoriales, de sorte que le SDIS ne pouvait demander à la société Vitaris une participation aux frais pour cette intervention ;

- la société Vitaris n'est pas la bénéficiaire de l'intervention au sens de l'article L. 1424-42 du code général des collectivités territoriales ;

- il y a rupture d'égalité devant les charges publiques.

.....................................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des collectivités territoriales ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- l'arrêté du 24 avril 2009 relatif à la mise en œuvre du référentiel portant sur l'organisation du secours à la personne et de l'aide médicale urgente ;

- le décret n° 2012-1246 du 7 novembre 2012 relatif à la gestion budgétaire et comptable publique ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendues au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Even,

- les conclusions de Mme Margerit, rapporteure publique,

- les observations de Me Lathoud, substituant Me Azan, pour la société Vitaris et l'association française de téléassistance, et de Me Margineau, substituant Me Poput, pour le service départemental d'incendie et de secours du Loiret.

Considérant ce qui suit :

1. La société par action simplifiée Vitaris et l'association française de téléassistance (AFRATA) font appel du jugement du 4 mai 2021 par lequel le tribunal administratif d'Orléans a rejeté leurs demandes tendant à l'annulation du titre exécutoire n° 1852 d'un montant de 211 euros émis par le service départemental d'incendie et de secours (SDIS) du Loiret à l'encontre de cette société le 13 novembre 2019 au titre d'une intervention au domicile d'une personne âgée ayant conclu un contrat de téléassistance avec elle, qui avait déclenché son alarme de téléassistance, s'étant révélée inutile, ainsi qu'à la décharge de l'obligation de payer cette somme.

2. L'annulation d'un titre exécutoire pour un motif de régularité en la forme n'implique pas nécessairement, compte tenu de la possibilité d'une régularisation par l'administration, l'extinction de la créance litigieuse, à la différence d'une annulation prononcée pour un motif mettant en cause le bien-fondé du titre. Il en résulte que, lorsque le requérant choisit de présenter, outre des conclusions tendant à l'annulation d'un titre exécutoire, des conclusions à fin de décharge de la somme correspondant à la créance de l'administration, il incombe au juge administratif d'examiner prioritairement les moyens mettant en cause le bien-fondé du titre qui seraient de nature, étant fondés, à justifier le prononcé de la décharge. Dans le cas où il ne juge fondé aucun des moyens qui seraient de nature à justifier le prononcé de la décharge mais retient un moyen mettant en cause la régularité formelle du titre exécutoire, le juge n'est tenu de se prononcer explicitement que sur le moyen qu'il retient pour annuler le titre. Statuant ainsi, son jugement écarte nécessairement les moyens qui assortissaient la demande de décharge de la somme litigieuse.

3. Aux termes de l'article L. 1424-2 du code général des collectivités territoriales : " Les services d'incendie et de secours sont chargés de la prévention, de la protection et de la lutte contre les incendies. / Ils concourent, avec les autres services et professionnels concernés, à la protection et à la lutte contre les autres accidents, sinistres et catastrophes, à l'évaluation et à la prévention des risques technologiques ou naturels ainsi qu'aux secours d'urgence. / Dans le cadre de leurs compétences, ils exercent les missions suivantes : / 1° La prévention et l'évaluation des risques de sécurité civile ; / 2° La préparation des mesures de sauvegarde et l'organisation des moyens de secours ; / 3° La protection des personnes, des biens et de l'environnement ; / 4° Les secours d'urgence aux personnes victimes d'accidents, de sinistres ou de catastrophes ainsi que leur évacuation. " Et aux termes de l'article L. 1424-42 du même code : " Le service départemental d'incendie et de secours n'est tenu de procéder qu'aux seules interventions qui se rattachent directement à ses missions de service public définies à l'article L. 1424-2. / S'il a procédé à des interventions ne se rattachant pas directement à l'exercice de ses missions, il peut demander aux personnes bénéficiaires une participation aux frais, dans les conditions déterminées par délibération du conseil d'administration. (...) ".

4. Il résulte de ces dispositions combinées que les interventions des services départementaux d'incendie et de secours qui sont réalisées au titre de leurs missions obligatoires de service public au sens de l'article L. 1424-2 du code général des collectivités territoriales, au nombre desquelles figurent notamment celles qui relèvent des secours d'urgence aux personnes, lesquelles sont financées par leur budget propre alloué par les collectivités locales, doivent être assurés gratuitement et ne sont pas facturables aux usagers. En revanche, leurs interventions ne relevant pas de l'exercice de leurs missions de service public peuvent donner lieu à une participation aux frais des personnes qui en sont bénéficiaires, dont ces services déterminent les conditions.

5. Il résulte de l'instruction que la facturation litigieuse est fondée sur la délibération du conseil d'administration du SDIS du Loiret n° 2018-D10 du 26 novembre 2018, produite en première instance, à laquelle est annexé un tableau intitulé " tarification des activités opérationnelles relevant des missions facultatives au 1er janvier 2019 " lequel prévoit un forfait de 211 euros pour un " déclenchement téléassistance ".

6. Il résulte également de l'instruction que le 15 juillet 2019 à 12h18, le dispositif personnel d'alarme d'une cliente de la société Vitaris, spécialisée dans les activités de téléassistance, a émis un signal d'alerte auprès de cette société. Après avoir vainement tenté de contacter l'abonnée à trois reprises, l'agent de cette société a fait appel, de manière infructueuse, au réseau de proches désignés par l'abonnée. L'agent a alors ensuite contacté la régulation médicale du service d'aide médicale d'urgence, qui a décidé de faire intervenir le service départemental d'incendie et de secours du Loiret au domicile de l'abonnée. Sur place, le service départemental d'incendie et de secours du Loiret a constaté que l'abonnée ne nécessitait aucun secours, celle-ci ayant déclenché son alarme par inadvertance.

7. Il est constant que lorsque le SDIS a lancé cette intervention il a agi au titre de sa mission de service public de secours aux personnes au sens de l'article L. 1424-2 du code général des collectivités territoriales, sa nature étant exclusivement liée à son objet et non à la personne qui sollicite cette prestation. Si cette intervention a été sollicitée en l'espèce par une société de téléassistance, en application du contrat de droit privé conclu entre cette société et l'un de ses abonnés, lequel prévoit qu'en cas de déclenchement de l'alarme et en l'absence de levée de doute il est fait appel aux services de secours, cet abonnement se bornant à offrir une aide au déclenchement des secours mais non un accès privilégié ou plus rapide à ces services, la circonstance que cette intervention s'est finalement révélée inutile ne permet pas de déqualifier sa nature a postériori comme étant extérieure aux missions de service public dévolues aux SDIS, et de la considérer par suite comme facturable.

8. En outre, ladite société de téléassistance ne pourrait en tout état de cause être regardée comme étant le bénéficiaire de l'intervention de secours du SDIS qui n'est réalisée qu'au profit de la personne physique.

9. Il résulte de ce qui précède que la société Vitaris est fondée à obtenir la décharge de l'obligation de payer la somme litigieuse, et par voie de conséquence l'annulation du titre exécutoire contesté émis par le service départemental d'incendie et de secours du Loiret n° 1852 du 13 novembre 2019, sans qu'il soit besoin de statuer sur les autres moyens portant sur la régularité en la forme de ce titre. Par suite, sans qu'il soit besoin de statuer sur le moyen de régularité invoqué, la société Vitaris et l'AFRATA sont fondées à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif d'Orléans a rejeté leurs demandes.

10. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de la société Vitaris, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement de la somme que le SDIS du Loiret demande à ce titre. Il y a lieu en revanche de mettre à la charge du SDIS du Loiret une somme de 1 500 euros à verser à la société Vitaris et à l'AFRATA sur le fondement des mêmes dispositions.

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif d'Orléans n° 2000109 du 4 mai 2021 est annulé.

Article 2 : Le titre de recette n° 1852 émis le 13 novembre 2019 par le service départemental d'incendie et de secours du Loiret à l'encontre de la société Vitaris est annulé.

Article 3 : Il est accordé à la société Vitaris la décharge de l'obligation de payer la somme litigieuse.

Article 4 : Une somme de 1 500 euros est mise à la charge du service départemental d'incendie et de secours du Loiret au profit de la société Vitaris et de l'association française de téléassistance au titre des frais de justice en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

2

N° 21VE02056


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 21VE02056
Date de la décision : 24/02/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Collectivités territoriales - Dispositions générales - Services publics locaux - Dispositions particulières - Services d'incendie et secours.

Comptabilité publique et budget - Créances des collectivités publiques - Recouvrement - Procédure - État exécutoire.

Santé publique - Protection générale de la santé publique - Transports sanitaires.


Composition du Tribunal
Président : M. EVEN
Rapporteur ?: M. Bernard EVEN
Rapporteur public ?: Mme MARGERIT
Avocat(s) : CABINET BAZIN et ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 01/03/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2022-02-24;21ve02056 ?
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