La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

28/01/2022 | FRANCE | N°20VE02514

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 2ème chambre, 28 janvier 2022, 20VE02514


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

MM. Alain Le Saux et François David ont demandé au tribunal administratif de Versailles d'annuler l'arrêté du 13 juillet 2018 par lequel le maire de la commune de Savigny-sur-Orge a délivré, au bénéfice de l'association culturelle des musulmans de Savigny-sur-Orge, un permis de construire précaire pour l'installation de deux bungalows.

Par un jugement n° 1806371 du 16 juillet 2020, le tribunal administratif de Versailles a annulé cet arrêté.

Procédure devant la cour :

Par une re

quête et un mémoire en réplique, enregistrés les 16 septembre 2020 et 25 août 2021, l'associat...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

MM. Alain Le Saux et François David ont demandé au tribunal administratif de Versailles d'annuler l'arrêté du 13 juillet 2018 par lequel le maire de la commune de Savigny-sur-Orge a délivré, au bénéfice de l'association culturelle des musulmans de Savigny-sur-Orge, un permis de construire précaire pour l'installation de deux bungalows.

Par un jugement n° 1806371 du 16 juillet 2020, le tribunal administratif de Versailles a annulé cet arrêté.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire en réplique, enregistrés les 16 septembre 2020 et 25 août 2021, l'association culturelle musulmane de Savigny-sur-Orge (ACMS), représentée par Me Julié, avocat, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) de rejeter la demande de MM. Le Saux et David présentée en première instance ;

3°) de mettre à la charge de MM. Le Saux et David la somme de 4 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le jugement est irrégulier en ce qu'il n'a pas répondu à sa fin de non-recevoir tirée du défaut d'intérêt à agir des requérants ;

- le jugement est irrégulier en ce que le tribunal a soulevé d'office un moyen qui n'est pas d'ordre public ;

- le jugement est irrégulier en ce qu'il s'est fondé sur une pièce qui n'a pas été communiquée ;

- le jugement est irrégulier en ce que le tribunal n'a pas communiqué le moyen d'ordre public dans un délai suffisant pour permettre aux parties d'y répondre utilement ;

- l'information communiquée n'était en outre pas suffisamment précise ;

- la demande de première instance est irrecevable au motif que MM. Le Saux et David n'ont pas d'intérêt à agir ;

- c'est à tort que les premiers juges ont accueilli le moyen tiré de la méconnaissance du champ d'application de l'article L. 433-1 du code de l'urbanisme.

.....................................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Orio,

- les conclusions de Mme Margerit, rapporteure publique,

- et les observations de Me Julié pour l'association culturelle musulmane de Savigny-sur-Orge.

Considérant ce qui suit :

1. Le maire de la commune de Savigny-sur-Orge a, par un arrêté du 13 juillet 2018, délivré un permis de construire à titre précaire, au bénéfice de l'association culturelle des musulmans de Savigny-sur-Orge (ACMS), pour l'installation de deux bungalows. MM. Le Saux et David ont demandé au tribunal administratif de Versailles d'annuler cet arrêté. L'ACMS fait appel du jugement n° 1806371 du 16 juillet 2020 par lequel ce tribunal a annulé cet arrêté.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Aux termes de l'article R. 611-7 du code de justice administrative : " Lorsque la décision lui paraît susceptible d'être fondée sur un moyen relevé d'office, le président de la formation de jugement ou le président de la chambre chargée de l'instruction en informe les parties avant la séance de jugement et fixe le délai dans lequel elles peuvent, sans qu'y fasse obstacle la clôture éventuelle de l'instruction, présenter leurs observations sur le moyen communiqué. (...) ".

3. Il ressort du dossier de première instance que, par un courrier du 25 juin 2020, le tribunal administratif a communiqué aux parties un moyen d'ordre public tiré de la méconnaissance du champ d'application de l'article L. 433-1 du code de l'urbanisme, soit quatre jours seulement, week-end compris, avant la tenue de l'audience. Eu égard au délai laissé aux parties pour répondre à ce moyen et au fait que le tribunal s'est fondé sur ce moyen pour annuler l'arrêté en litige, l'ACMS est fondé à soutenir que les premiers juges ne lui ont pas laissé un délai suffisant pour répondre utilement à ce moyen. Par suite, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de régularité soulevés, l'ACMS est fondée à soutenir que le jugement est irrégulier et à demander son annulation.

4. Il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par MM. Le Saux et David devant le tribunal administratif de Versailles.

Sur la fin de non-recevoir opposée par la commune et l'ACMS :

5. Aux termes de l'article L. 600-1-2 du code l'urbanisme : " Une personne autre que l'Etat, les collectivités territoriales ou leurs groupements ou une association n'est recevable à former un recours pour excès de pouvoir contre une décision relative à l'occupation ou à l'utilisation du sol régie par le présent code que si la construction, l'aménagement ou le projet autorisé sont de nature à affecter directement les conditions d'occupation, d'utilisation ou de jouissance du bien qu'elle détient ou occupe régulièrement ou pour lequel elle bénéficie d'une promesse de vente, de bail, ou d'un contrat préliminaire mentionné à l'article L. 261-15 du code de la construction et de l'habitation. (...) ". Aux termes de l'article L. 600-1-3 du même code : " Sauf pour le requérant à justifier de circonstances particulières, l'intérêt pour agir contre un permis de construire, de démolir ou d'aménager s'apprécie à la date d'affichage en mairie de la demande du pétitionnaire. "

6. Il résulte de ces dispositions qu'il appartient, en particulier, à tout requérant qui saisit le juge administratif d'un recours pour excès de pouvoir tendant à l'annulation d'un permis de construire, de démolir ou d'aménager, de préciser l'atteinte qu'il invoque pour justifier d'un intérêt lui donnant qualité pour agir, en faisant état de tous éléments suffisamment précis et étayés de nature à établir que cette atteinte est susceptible d'affecter directement les conditions d'occupation, d'utilisation ou de jouissance de son bien. Il appartient au défendeur, s'il entend contester l'intérêt à agir du requérant, d'apporter tous éléments de nature à établir que les atteintes alléguées sont dépourvues de réalité. Le juge de l'excès de pouvoir apprécie la recevabilité de la requête au vu des éléments ainsi versés au dossier par les parties, en écartant le cas échéant les allégations qu'il jugerait insuffisamment étayées mais sans pour autant exiger de l'auteur du recours qu'il apporte la preuve du caractère certain des atteintes qu'il invoque au soutien de la recevabilité de celui-ci. Eu égard à sa situation particulière, le voisin immédiat justifie, en principe, d'un intérêt à agir lorsqu'il fait état devant le juge, qui statue au vu de l'ensemble des pièces du dossier, d'éléments relatifs à la nature, à l'importance ou à la localisation du projet de construction.

7. MM. Le Saux et David, déclarant résider respectivement au 37 et 25 rue des Prés Saint Martin à Savigny-sur-Orge, soutiennent que l'installation de deux bungalows à titre précaire, au 29 rue des Prés Saint Martin, entraînerait des nuisances dues au bruit et au stationnement, ainsi que la perte de valeur de leur bien. Il est constant que, malgré les demandes réitérées de l'association requérante, MM. Le Saux et David n'ont jamais produit de titre de nature à établir qu'ils étaient bien, à la date de l'affichage en mairie de la demande du pétitionnaire, détenteurs ou occupants réguliers des biens situés rue des Prés Saint Martin. D'autre part, si les intéressés produisent des photos de voitures mal stationnées, ces éléments ne suffisent ni à imputer ces nuisances à l'association, ni à établir que de telles nuisances seraient liés à la construction elle-même destinée à accueillir une salle de prière, des salles de soutien scolaire, un bureau et des sanitaires et non à un mauvais usage de cette construction. En outre, il ressort des pièces du dossier que tous les voisins immédiats, dont ne font pas partie MM. Le Saux et David, ont attesté ne subir " aucune nuisance de bruit comme de stationnement ". Enfin, il n'est pas établi que le projet contesté, au demeurant de faible importance et faisant l'objet d'une autorisation d'urbanisme à titre précaire, pourrait avoir une incidence sur la valeur vénale de leurs biens. Il résulte de l'ensemble de ces éléments que la demande présentée par MM. Le Saux et David devant le tribunal administratif de Versailles est irrecevable en l'absence d'intérêt pour agir à l'encontre de la décision en litige.

Sur l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

8. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de MM. Le Saux et David la somme que l'ACMS demande au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Versailles du 16 juillet 2020 est annulé.

Article 2 : La demande présentée par MM. Le Saux et David devant le tribunal administratif de Versailles est rejetée.

Article 3 : Le surplus des conclusions de l'ACMS est rejeté.

N° 20VE02514 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 20VE02514
Date de la décision : 28/01/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Procédure - Voies de recours - Appel - Effet dévolutif et évocation - Évocation.

Urbanisme et aménagement du territoire - Règles de procédure contentieuse spéciales - Introduction de l'instance - Intérêt à agir.


Composition du Tribunal
Président : M. EVEN
Rapporteur ?: Mme Eugénie ORIO
Rapporteur public ?: Mme MARGERIT
Avocat(s) : JULIE

Origine de la décision
Date de l'import : 15/02/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2022-01-28;20ve02514 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award