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28/01/2022 | FRANCE | N°19VE04278

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 2ème chambre, 28 janvier 2022, 19VE04278


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La SCI DDJR Jardy, M. F... C... et Mme D... B... ont demandé au tribunal administratif de Cergy-Pontoise d'annuler l'arrêté du 9 août 2017 par lequel le maire de Marnes-la-Coquette a délivré, à M. E... A..., un permis de construire valant démolition pour procéder à la démolition d'un commerce et à la construction d'un immeuble à usage mixte de commerces et de bureaux situés 33 boulevard de Jardy et d'annuler l'arrêté du 20 juillet 2018 par lequel le maire de Marnes-la-Coquette a délivré, à la SCI

33 Jardy, un permis de construire portant sur le même projet et le même terrain ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La SCI DDJR Jardy, M. F... C... et Mme D... B... ont demandé au tribunal administratif de Cergy-Pontoise d'annuler l'arrêté du 9 août 2017 par lequel le maire de Marnes-la-Coquette a délivré, à M. E... A..., un permis de construire valant démolition pour procéder à la démolition d'un commerce et à la construction d'un immeuble à usage mixte de commerces et de bureaux situés 33 boulevard de Jardy et d'annuler l'arrêté du 20 juillet 2018 par lequel le maire de Marnes-la-Coquette a délivré, à la SCI 33 Jardy, un permis de construire portant sur le même projet et le même terrain d'assiette que celui délivré précédemment à M. A....

Par un jugement n° 1708418-1809594-1811994 du 22 octobre 2019, le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a annulé ces deux arrêtés.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire en réplique enregistrés le 18 décembre 2019 et le 7 mai 2021, la SCI 33 Jardy, représentée par Me Prieur, avocat, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) de rejeter la demande de première instance ;

3°) de mettre à la charge de M. C..., de Mme B... et de la SCI DDJR Jardy la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

La SCI 33 Jardy soutient que :

- le jugement est insuffisamment motivé quant à l'interprétation de l'article UEa 12 du plan local d'urbanisme et la séparation cloisonnée des espaces de stationnement des automobiles et deux-roues ;

- c'est à tort que les premiers juges n'ont pas tenu compte de la production d'une note en délibéré indiquant qu'un dossier de demande de permis modificatif substituant une surface de bureaux à la surface commerciale initialement prévue avait été déposée ;

- contrairement à ce qu'ont jugé les premiers juges, le terrain d'assiette du projet ne se trouve pas dans la zone UEa mais dans la zone UEaa correspondant au quartier des terrasses où aucune disposition n'interdit la construction d'un immeuble de bureaux ;

- aucune disposition de l'article UEa 12 du règlement du plan local d'urbanisme n'impose que le local sécurisé prévu pour les deux-roues non motorisés soit séparé des emplacements de stationnement des autres véhicules ;

- un prétendue irrégularité du permis litigieux sur ce point pouvait faire l'objet d'une régularisation en application des articles L. 600-5-1 et L. 600-5 du code de l'urbanisme ;

- c'est à tort que les premiers juges ont estimé que la méconnaissance de l'article UEa 2 qui n'affecte que la destination d'une partie mineure du projet ne pouvait être régularisée, méconnaissant ainsi l'article L. 600-5 du code de l'urbanisme ;

- le tribunal a commis une erreur de droit et de fait en jugeant que le projet était situé dans le domaine de la Marche où s'appliquent des règles plus strictes en matière de construction de bureaux ;

- l'article UEa 12 du règlement du plan local d'urbanisme n'impose pas que le local réservé au stationnement des deux roues soit séparé du stationnement des véhicules motorisés ;

- les autres moyens soulevés en première instance doivent être écartés.

.....................................................................................................................

Vu :

- les autres pièces du dossier ;

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Colrat,

- les conclusions de Mme Margerit, rapporteure publique,

- les observations de Me Tremouilles, substituant Me Prieur, pour la SCI 33 Jardy, de Me Tonani, substituant Me Coutin, pour la commune de Marnes-la-Coquette, et de Me Estellon, substituant Me Lamorlette, pour la SCI DDJR Jardy, M. C... et Mme B....

Une note en délibéré présentée pour la commune de Marnes-la-Coquette a été enregistrée le 14 janvier 2022.

Une note en délibéré présentée pour la SCI 33 Jardy a été enregistrée le 17 janvier 2022.

Considérant ce qui suit :

1. La SCI 33 Jardy et la commune de Marnes-la-Coquette font appel du jugement du 22 octobre 2019 par lequel le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a annulé le permis de construire accordé à M. A... le 9 août 2017 et le permis de construire accordé le 20 juillet 2018 à la SCI 33 Jardy pour un projet identique de construction d'un bâtiment à usage de commerces et de bureaux, situé 33 boulevard de Jardy sur la parcelle cadastrée AB n°399.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. En premier lieu, aux termes de l'article R. 741-7 du code de justice administrative : " Dans les tribunaux administratifs et les cours administratives d'appel, la minute de la décision est signée par le président de la formation du jugement, le rapporteur et le greffier d'audience. " Il ressort des pièces du dossier de première instance que la minute du jugement attaqué comporte la signature du président de la formation de jugement, celle du rapporteur et celle du greffier d'audience. La circonstance que l'ampliation du jugement notifiée au requérant ne comporte pas la signature des magistrats qui l'ont rendu est sans incidence sur sa régularité. Par suite, le moyen tiré de ce que ce jugement serait irrégulier, faute d'avoir été signé, manque en fait et doit être écarté.

3. En second lieu, il ressort de la note en délibéré produite pour la SCI 33 Jardy le 26 septembre 2019 visée par les premiers juges, qu'elle comportait une demande de mise en œuvre des dispositions des articles L. 600-5 et L. 600-5-1 du code de l'urbanisme. Mais dès lors que cette note ne faisait pas état de circonstances de droit ou de fait nouvelles dont les parties n'étaient pas en mesure de faire état avant la clôture de l'instruction, la formation du jugement du tribunal administratif de Cergy-Pontoise n'était pas tenue de procéder à la réouverture de l'instruction, ni de motiver le rejet des conclusions qui y étaient exposées. Par suite, la SCI 33 Jardy et la commune ne sont pas fondées à soutenir que le jugement serait irrégulier faute d'avoir tenu compte de cette note en délibéré ou de ne pas avoir motivé le refus de faire droit à la demande de la SCI fondée sur l'article L. 600-5-1 du code de l'urbanisme.

Sur le fond du litige :

4. En premier lieu, aux termes de l'article UEa 2 du règlement du plan local d'urbanisme de la commune de Marnes-la-Coquette relatif aux occupations et utilisations des sols admises sous conditions : " 2.1. Les locaux à usage de commerce sont admis s'ils respectent les conditions suivantes : / - qu'ils soient destinés au commerce ; / à concurrence de 80m2 de surface hors d'œuvre nette par parcelle d'une surface supérieure ou égale à 500m2 ; / que les parcelles aient une façade sur la RD 907 ou RD 182 ; / - que les locaux soient intégrés dans la construction à usage d'habitation. / 2.2. Dans le Domaine de la Marche, les locaux à usage de bureaux sont admis à condition : / -qu'ils soient situés sur les parcelles donnant sur les RD182 (Bd de Jardy) et 907 (Bd de la République), / - que la surface hors oeuvre nette ne dépasse pas 50m² par tranche de 500m² de terrain, / - et que ces locaux soient intégrés dans la construction à usage d'habitation (...) ".

5. Il ressort des pièces du dossier que la parcelle d'assiette du projet est située non pas, comme l'ont affirmé les premiers juges, dans le domaine de la Marche mais dans le quartier des Terrasses. Ainsi, la SCI 33 Jardy et la commune sont fondées à soutenir que le jugement est entaché d'une erreur de fait sur ce point. Toutefois, il ressort du 2.1 des dispositions précitées que dans le secteur où est situé le terrain de la SCI 33 Jardy, la construction de locaux de commerces n'est admise que s'ils sont intégrés dans la construction d'immeuble à usage majoritaire de logements. Par suite, les requérantes, qui ne contestent pas ce point ne sont pas fondées à se plaindre de ce que le tribunal administratif a retenu le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions précitées du règlement du plan local d'urbanisme pour annuler les permis de construire litigieux.

6. En second lieu, aux termes de l'article UEa 12 du règlement du plan local d'urbanisme relatif au stationnement aux termes desquelles : " En plus des normes fixées ci-dessus pour les véhicules motorisés, il sera prévu un local sécurisé pour le stationnement des 2 roues non motorisés. L'espace destiné au stationnement sécurisé des deux roues non motorisées possède les caractéristiques minimales suivantes : / - pour les bâtiments à usage principal d'habitation collective, l'espace possède une superficie de 0,75 m² par logement pour les logements jusqu'à deux pièces principales et 1,5m² par logement dans les autres cas, avec une superficie totale minimale de 3 m² ; / - pour les bâtiments à usage principal de bureaux, l'espace possède une superficie de 1,5m² par tranche de 100m² de surface de plancher ; / - pour les activités, commerces de plus de 500m² de surface de plancher, industries et équipements publics, il est exigé une place pour 10 employés ainsi que des places pour les visiteurs à définir en fonction des besoins (...) ".

7. Il ressort des pièces du dossier de demande de permis de construire que le plan du sous-sol du bâtiment projeté comporte cinq places destinées au stationnement des deux roues. Toutefois, il n'est pas précisé que cet emplacement serait réservé à la seule catégorie des deux roues non motorisés et il n'est pas justifié que sa surface répondrait aux exigences prévues, pour les locaux sécurisés pour le stationnement des 2 roues non motorisés, par l'article UEa 12 précité. Par suite, c'est à bon droit que les premiers juges ont retenu ce motif pour procéder à l'annulation des deux permis de construire en litige.

Sur les conclusions de la SCI 33 Jardy et de la commune de Marnes-la-Coquette fondées sur les articles L. 600-5 et L. 600-5-1 du code de l'urbanisme :

8. Aux termes de l'article L. 600-5 du code de l'urbanisme : " Sans préjudice de la mise en œuvre de l'article L. 600-5-1, le juge administratif qui, saisi de conclusions dirigées contre un permis de construire, de démolir ou d'aménager ou contre une décision de non-opposition à déclaration préalable, estime, après avoir constaté que les autres moyens ne sont pas fondés, qu'un vice n'affectant qu'une partie du projet peut être régularisé, limite à cette partie la portée de l'annulation qu'il prononce et, le cas échéant, fixe le délai dans lequel le titulaire de l'autorisation pourra en demander la régularisation, même après l'achèvement des travaux. Le refus par le juge de faire droit à une demande d'annulation partielle est motivé. ". Aux termes de l'article L.-600-5-1 du code de l'urbanisme : " Sans préjudice de la mise en œuvre de l'article L. 600-5, le juge administratif qui, saisi de conclusions dirigées contre un permis de construire, de démolir ou d'aménager ou contre une décision de non-opposition à déclaration préalable estime, après avoir constaté que les autres moyens ne sont pas fondés, qu'un vice entraînant l'illégalité de cet acte est susceptible d'être régularisé, sursoit à statuer, après avoir invité les parties à présenter leurs observations, jusqu'à l'expiration du délai qu'il fixe pour cette régularisation, même après l'achèvement des travaux. Si une mesure de régularisation est notifiée dans ce délai au juge, celui-ci statue après avoir invité les parties à présenter leurs observations. Le refus par le juge de faire droit à une demande de sursis à statuer est motivé. ".

9. Il résulte de ces dispositions, éclairées par les travaux parlementaires ayant conduit à l'adoption de la loi du 23 novembre 2018 portant évolution du logement, de l'aménagement et du numérique, que lorsque le ou les vices affectant la légalité de l'autorisation d'urbanisme dont l'annulation est demandée sont susceptibles d'être régularisés, le juge doit, en application de l'article L. 600-5-1 du code de l'urbanisme, surseoir à statuer sur les conclusions dont il est saisi contre cette autorisation, sauf à ce qu'il fasse le choix de recourir à l'article L. 600-5 du code de l'urbanisme, si les conditions posées par cet article sont réunies, ou que le bénéficiaire de l'autorisation lui ait indiqué qu'il ne souhaitait pas bénéficier d'une mesure de régularisation. Un vice entachant le bien-fondé de l'autorisation d'urbanisme est susceptible d'être régularisé, même si cette régularisation implique de revoir l'économie générale du projet en cause, dès lors que les règles d'urbanisme en vigueur à la date à laquelle le juge statue permettent une mesure de régularisation qui n'implique pas d'apporter à ce projet un bouleversement tel qu'il en changerait la nature même.

10. Il ne résulte pas des dispositions applicables à la zone dans laquelle est situé le projet litigieux, qui porte pour l'essentiel sur la construction d'un immeuble de bureaux autorisée par les dispositions applicables du plan local d'urbanisme, que la régularisation du permis de construire litigieux au regard des dispositions des articles UEa 2 et UEa 12 du règlement du plan local d'urbanisme nécessiterait des modifications telles qu'elle en changerait la nature même. Par suite, il y a lieu de faire droit aux conclusions de la SCI 33 Jardy et de la commune de Marnes-la-Coquette tendant à ce qu'il soit fait application des dispositions précitées de l'article L. 600-5-1 du code de l'urbanisme et à ce qu'il soit sursis à statuer sur la présente requête pour permettre à l'illégalité constatée d'être régularisée par un permis de construire modificatif qui devra être communiqué à la cour dans le délai de quatre mois à compter de la notification du présent arrêt, tous droit et moyens des parties sur lesquels il n'est pas statué étant réservés jusqu'en fin d'instance.

DÉCIDE :

Article 1er : Il est sursis à statuer sur la requête de la SCI 33 Jardy et sur l'appel incident de la commune de Marnes-la-Coquette jusqu'à l'expiration du délai fixé à l'article 2 du présent arrêt.

Article 2 : Le délai dans lequel la régularisation des permis de construire délivrés le 9 août 2017 et le 20 juillet 2018 doit être notifiée à la cour est fixé à quatre mois.

Article 3 : Tous droit et moyens des parties sur lesquels il n'est pas statué sont réservés jusqu'en fin d'instance.

2

N° 19VE04278


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 19VE04278
Date de la décision : 28/01/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Urbanisme et aménagement du territoire - Permis de construire.

Urbanisme et aménagement du territoire - Autorisations d`utilisation des sols diverses.


Composition du Tribunal
Président : M. EVEN
Rapporteur ?: Mme Sophie COLRAT
Rapporteur public ?: Mme MARGERIT
Avocat(s) : SELARL LE ROY GOURVENNEC PRIEUR LGP

Origine de la décision
Date de l'import : 15/02/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2022-01-28;19ve04278 ?
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