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24/06/2021 | FRANCE | N°20VE01590

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 3ème chambre, 24 juin 2021, 20VE01590


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... B... a demandé au tribunal administratif de Cergy-Pontoise, d'une part, de lui accorder le bénéfice de l'aide juridictionnelle provisoire, d'autre part, d'annuler l'arrêté en date du 31 mai 2020 par lequel le préfet de police de Paris l'a obligé à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il est susceptible d'être reconduit et, enfin, de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros sur le fondement des articles 37 de la loi du

10 juillet 1991 et L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un jugem...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... B... a demandé au tribunal administratif de Cergy-Pontoise, d'une part, de lui accorder le bénéfice de l'aide juridictionnelle provisoire, d'autre part, d'annuler l'arrêté en date du 31 mai 2020 par lequel le préfet de police de Paris l'a obligé à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il est susceptible d'être reconduit et, enfin, de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros sur le fondement des articles 37 de la loi du 10 juillet 1991 et L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un jugement n° 2004892 du 18 juin 2020, la magistrate désignée par le président du tribunal administratif de Cergy-Pontoise l'a admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle provisoire et a rejeté le surplus des conclusions de sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 14 juillet 2020 et régularisée le 18 septembre 2020, M. B..., représenté par Me E..., avocate, demande à la cour :

1° d'annuler ce jugement ;

2° d'annuler l'arrêté contesté ;

3° de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 1 500 euros à Me E... au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique, sous réserve que Me E... renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat au titre de l'aide juridictionnelle, dans le cas où il serait admis au titre de l'aide juridictionnelle totale ou, à défaut, mettre à la charge de l'Etat la même somme au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- le jugement est insuffisamment motivé en ce que le premier juge n'a pas répondu à l'argument tiré de l'irrégularité, voire de l'inexistence de la délégation de signature ;

- la décision portant obligation de quitter le territoire français est entachée d'incompétence ;

- elle est insuffisamment motivée et entachée d'un défaut d'examen ;

- elle méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation.

..........................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme A... a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. B..., ressortissant malien né le 31 décembre 1989 à Kayes (Mali), est entré en France, selon ses déclarations, à l'âge de vingt-neuf ans. Il fait appel du jugement du

18 juin 2020 par lequel la magistrate désignée par le président du tribunal administratif de

Cergy-Pontoise a notamment rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté en date du

31 mai 2020 par lequel le préfet de police de Paris l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il est susceptible d'être reconduit.

Sur la régularité du jugement :

2. M. B... soutient que le jugement contesté serait entaché d'une insuffisance de motivation, en méconnaissance de l'article L. 9 du code de justice administrative, en ce que le premier juge n'aurait pas pleinement répondu à un moyen soulevé devant lui relatif à l'irrégularité de la délégation de signature octroyée au signataire de l'acte attaqué en ce que cette dernière n'est pas signée de façon manuscrite par le préfet et que la préfecture n'apporte pas la preuve que la délégation de signature était signée électroniquement de manière à respecter les garanties afférentes. Toutefois, les seules mentions figurant sur l'ampliation de l'arrêté publié au recueil suffisent à établir, en l'absence de toute contestation sérieuse sur ce point, que l'original de l'arrêté de délégation comporte bien la signature du préfet de police et il ne ressort d'aucune pièce du dossier que cette signature serait électronique. Dans ces conditions, M. B... ne pouvait utilement soutenir, devant le premier juge, que les dispositions relatives au procédé de signature électronique, lequel n'a pas été mis en oeuvre en l'espèce, auraient été méconnues. Par suite, en omettant de répondre à une branche d'un moyen qui était inopérante, le premier juge n'a pas entaché le jugement contesté d'irrégularité.

Sur la décision portant obligation de quitter le territoire français :

3. En premier lieu, par un arrêté n° 2019-00749 du 11 septembre 2019 régulièrement publié au recueil des actes administratifs spécial de la préfecture de police du

12 septembre 2019, le préfet de police a donné à Mme D... F..., adjointe au chef de section des reconduites à la frontière, délégation à l'effet de signer les décisions dans la limite de ses attributions, dont relève la police des étrangers, en cas d'absence ou d'empêchement d'autorités dont il n'est pas établi qu'elles n'ont pas été absentes ou empêchées lors de la signature de l'acte attaqué. Devant le juge d'appel, le préfet de police produit une copie de cet arrêté attestant de sa signature manuscrite par le préfet de police. Par suite, le moyen tiré de l'incompétence du signataire de la décision attaquée, notamment en l'absence de délégation de signature régulièrement signée, ne peut qu'être écarté.

4. En deuxième lieu, l'arrêté litigieux vise le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, notamment le 1° du I de son article L. 511-1 dont il fait application. Il mentionne que M. B... est dépourvu de document transfrontière et qu'il ne peut justifier être entré sur le territoire français en possession des documents et visas requis pour une entrée régulière. Il précise que, compte tenu des circonstances propres au cas d'espèce, il n'est pas porté une atteinte disproportionnée au droit de l'intéressé au respect de sa vie privée et familiale. Ainsi, la décision faisant obligation à M. B... de quitter le territoire français, qui comporte l'énoncé des circonstances de droit et de fait sur lesquelles elle se fonde, satisfait l'exigence de motivation du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. La circonstance que le préfet de police, qui n'était nullement tenu de faire état de tous les éléments concernant la situation personnelle de l'intéressé, n'ait pas fait mention des éléments relatifs à son intégration professionnelle et familiale, n'est pas de nature à affecter la régularité de cette motivation. Par suite, le moyen manque en fait et ne peut, dès lors, qu'être écarté. Pour les mêmes motifs, le moyen tiré de ce que le préfet de police n'aurait pas procédé à un examen particulier de la situation de M. B... doit être écarté.

5. En troisième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance / (...) ".

6. Il ressort des pièces du dossier que M. B... indique être entré le 23 janvier 2018 en France, à l'âge de vingt-neuf ans. Faute d'en justifier, il n'établit pas une telle ancienneté de séjour. Si l'intéressé fait valoir qu'il vit auprès de son frère, titulaire d'un titre de séjour en cours de validité en qualité de conjoint de français et que " les liens unissant la fratrie sont naturellement très forts ", il n'apporte aucun élément attestant d'un tel lien de famille, aucun élément justifiant de la réalité de la cohabitation alléguée, ni aucun élément relatif à la nature et à l'intensité des relations familiales invoquées, alors qu'il est célibataire et sans charge de famille et n'établit, ni même ne soutient, être dépourvu d'attaches familiales dans son pays d'origine où il a vécu jusqu'à l'âge de vingt-neuf ans. S'il se prévaut également d'une insertion professionnelle et fait valoir, à cet égard, qu'il occuperait depuis juin 2018 un emploi d'agent de service, les bulletins de salaire produits ne sont corroborés par aucun autre document concernant les employeurs, alors que le préfet de police soutient avoir été dans l'incapacité de vérifier les conditions d'emploi alléguées. Cet emploi serait en tout état de cause récent et ne donnant lieu qu'à de faibles rétributions. Enfin, il n'est pas contesté que l'intéressé s'est maintenu en situation irrégulière sur le territoire français, sans entamer de démarche aux fins de régularisation. Dans ces conditions, la décision faisant obligation à M. B... de quitter le territoire français n'a pas porté une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale. Le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations citées au point 5. doit ainsi être écarté. Pour les mêmes motifs, le requérant n'est pas fondé à soutenir que la décision litigieuse serait entachée d'une erreur manifeste d'appréciation quant à sa situation personnelle et familiale.

7. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, la magistrate désignée par le président du tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté le surplus des conclusions de sa demande. Ses conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 ne peuvent, par suite, qu'être rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.

4

N° 20VE01590


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 20VE01590
Date de la décision : 24/06/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-03 Étrangers. Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. OLSON
Rapporteur ?: Mme Muriel DEROC
Rapporteur public ?: M. HUON
Avocat(s) : BENVENISTE

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2021-06-24;20ve01590 ?
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