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27/05/2021 | FRANCE | N°19VE02215

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 3ème chambre, 27 mai 2021, 19VE02215


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. et Mme B... C... ont demandé au tribunal administratif de Versailles de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2012 et 2013.

Par un jugement n° 1804718 du 19 avril 2019, le tribunal administratif de Versailles a, après avoir constaté un non-lieu à statuer à hauteur du dégrèvement prononcé en cours d'instance, rejeté le surplus des conclusions de

leur demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 18 juin 20...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. et Mme B... C... ont demandé au tribunal administratif de Versailles de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2012 et 2013.

Par un jugement n° 1804718 du 19 avril 2019, le tribunal administratif de Versailles a, après avoir constaté un non-lieu à statuer à hauteur du dégrèvement prononcé en cours d'instance, rejeté le surplus des conclusions de leur demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 18 juin 2019, M. et Mme C..., représentés par Me D... et Me A..., avocats, demandent à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des suppléments d'impositions restant en litige ;

3°) de mettre à la charge de l'État la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- la reconstitution des recettes de l'EURL Soko-coiff est irréaliste dès lors que, au regard de la particularité de sa clientèle, elle n'a pas pu percevoir des produits sous forme d'espèces ; elle aboutit à une rentabilité qui n'est pas crédible ; elle est sommaire en ce qui concerne l'établissement de Neuilly-sur-Seine pour les deux années en litige dès lors que l'administration s'est fondée sur des mois qui ne prennent pas en compte la variabilité du chiffre d'affaire sur l'année ;

- la majoration pour manquement délibéré est irrégulière dès lors que la proposition de rectification ne comporte pas le nom et le grade de l'agent qui en a décidé, en méconnaissance des dispositions de l'article L. 80 E et R. 80 E- 1 du livre des procédures fiscales ainsi que des commentaires administratifs publiés au BOFiP sous la référence BOI-CF-INF-30-20, § 280 ;

- la majoration pour manquement délibéré n'est pas fondée dès lors que l'appréhension des revenus distribués, fondée sur la présomption qui s'attache à la qualité de maître de l'affaire, ne repose sur aucun élément concret.

..........................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme E...,

- et les conclusions de M. Huon, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. A l'issue de la vérification de la comptabilité de l'EURL Soko-Coiff, qui a porté sur la période du 1er janvier 2012 au 31 décembre 2013, et dont Mme C... était gérante de droit tandis que M. C... en détenait seul le capital social, l'administration a, après rejet de la comptabilité, estimée irrégulière et non probante, et reconstitution des recettes et des résultats de l'entreprise, relevé l'existence de minorations de recettes. Ces sommes ont été regardées comme constitutives de revenus distribués au profit de M. et Mme C..., en application du 1° du 1 de l'article 109 du code général des impôts, et imposées entre leurs mains, à l'issue d'un contrôle sur pièces et selon la procédure contradictoire, dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers. M. et Mme C... relèvent appel du jugement du tribunal administratif de Versailles en date du 19 avril 2019, en tant qu'il a, après avoir constaté qu'il n'y avait plus lieu de statuer à hauteur des dégrèvements survenus en cours d'instance, rejeté le surplus de leur demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2012 et 2013 ainsi que des pénalités correspondantes.

Sur le bien-fondé des impositions :

2. Aux termes de l'article 109 du code général des impôts : " 1. Sont considérés comme revenus distribués : / 1° Tous les bénéfices ou produits qui ne sont pas mis en réserve ou incorporés au capital (...) ; ".

3. L'administration supporte la charge de la preuve de l'existence et du montant des revenus distribués dès lors que le contribuable, comme c'est le cas en l'espèce, n'a pas accepté les redressements, notifiés selon la procédure contradictoire.

4. M. et Mme C... contestent le montant des bénéfices reconstitués de l'EURL Soko-Coiff, qui exerce une activité de coiffure à domicile au sein de résidences pour personnes âgées, et notamment la méthode de reconstitution des recettes suivie par l'administration. Il résulte de l'instruction qu'après avoir écarté la comptabilité comme irrégulière et non probante, l'administration a procédé à la reconstitution de ses recettes en se fondant sur les justificatifs produits par la société au cours du contrôle, à savoir des tableaux récapitulatifs mensuels, des agendas, et des carnets de fiches client pour les prestations réalisées dans les établissements pour personnes âgées situés à Marly-le-Roi, Courbevoie, Rocquencourt, Clamart et Louveciennes et des factures pour celui situé à Saint-Thibault-des-Vignes. En ce qui concerne l'établissement situé à Neuilly-sur-Seine, le vérificateur, compte tenu des lacunes des justificatifs des recettes qui ont été présentés, en l'occurrence des carnets de fiches client, a reconstitué les recettes annuelles en ramenant à l'année les recettes, pour 2012, des mois de février, juin et octobre et, pour 2013, des mois d'octobre, novembre et décembre.

5. Au soutien de leurs allégations, M. et Mme C... font valoir d'une part, que la société ayant déclaré la totalité des recettes encaissées sur son unique compte bancaire, les prestations non déclarées proviennent nécessairement de règlements en espèces ce qui est impossible au regard de la particularité de la clientèle constituée de personnes âgées dépendantes qui ne règlent pas elles-mêmes les prestations qu'elles reçoivent. Toutefois, ces circonstances à les supposer établies, ne sont pas de nature à faire regarder la reconstitution comme exagérée, dès lors qu'il est constant que le dépouillement des documents remis par la société a montré que la société a reçu des règlements en espèces qu'elle n'a pas comptabilisés et que l'administration n'a jamais estimé que les minoration de recettes proviendraient exclusivement de paiements en espèces. Si les appelants font valoir d'autre part, s'agissant de l'établissement de Neuilly-sur- Seine, que les résultats mensuels peuvent être très variables et que la méthode utilisée ne peut être représentative de l'activité de la société sur l'année, il résulte de l'instruction que la part, au sein des recettes annuelles, de la somme des recettes réalisées, soit au cours des mois de février, juin et octobre, soit au cours des mois d'octobre, novembre et décembre est sensiblement la même que celle des autres établissements, et s'établit autour du quart des recettes annuelles. En se bornant à soutenir à nouveau en appel, sans, toutefois, proposer une autre méthode alternative de reconstitution, que l'administration aurait dû se fonder sur d'autres mois plus fiables, M. et Mme C... n'indiquent pas en quoi d'autres mois de référence auraient permis une meilleure prise en compte de la variabilité du chiffre d'affaires de la société sur l'année. Enfin, ils ne sauraient utilement soutenir qu'en changeant de période de référence pour 2013 la méthode retenue ne serait pas cohérente avec celle de 2012, l'administration s'étant attachée à prendre en compte les seules périodes mensuelles couvertes par des fiches client exhaustives. Par suite, la méthode de reconstitution des recettes de l'établissement de Neuilly-sur-Seine, ne peut être regardée comme sommaire. Enfin, si les requérants soutiennent que la rentabilité dégagée par la reconstitution est exagérée, le calcul qu'ils présentent, à partir du rapport entre, d'une part, la rémunération de la gérante à laquelle s'ajoute l'omission de recettes et, d'autre part, le chiffre d'affaires rectifié, ne tient pas compte de différentes variables indispensables telles que les charges engagées pour l'exploitation de la société. Dans ces conditions, l'administration, dont la méthode repose sur les données de l'entreprise, doit être regardée comme apportant la preuve qui lui incombe de l'existence et du montant des distributions en litige.

Sur la majoration pour manquement délibéré :

6. D'une part, aux termes de l'article L. 80 E du livre des procédures fiscales : " La décision d'appliquer les majorations et amendes prévues aux articles 1729, 1732 et 1735 ter du code général des impôts est prise par un agent de catégorie A détenant au moins un grade fixé par décret qui vise à cet effet le document comportant la motivation des pénalités " ; et aux termes de l'article R. 80 E-1 du même code : " La décision d'appliquer les majorations et amendes mentionnées à l'article L. 80 E est prise par un agent ayant au moins le grade d'inspecteur divisionnaire ".

7. Il résulte de l'instruction que la proposition de rectification comporte la signature de l'agent qui l'a établie. Si le nom de celui-ci n'y figure pas, ainsi que le soutiennent les requérants, cette circonstance, qui n'est au demeurant pas exigée des dispositions précitées seules invoquées, n'a pas entaché d'irrégularité la procédure d'imposition dès lors que la signature manuscrite est identique à celle apposée sur la réponse aux observations du contribuable datée du 22 septembre 2015, qui comportait le visa et le nom du signataire, détenant le grade d'inspecteur principal, supérieur à celui d'inspecteur divisionnaire, et permettant ainsi de l'identifier. Dès lors, le moyen tiré d'une irrégularité de la procédure doit être écarté. Les requérants ne sont par ailleurs pas fondés à se prévaloir, à nouveau en appel, sur le fondement de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales, des commentaires administratifs publiés au BOFiP sous la référence BOI-CF-INF-30-20, § 280, dès lors que cette doctrine relative à la procédure d'établissement des pénalités n'est pas opposable à l'administration sur le fondement de cet article.

8. D'autre part, les époux C... soutiennent que la pénalité en litige n'est pas justifiée dès lors que l'appréhension des revenus distribués, fondée sur la présomption qui s'attache à la qualité de maître de l'affaire, ne repose sur aucun élément concret. Il est toutefois constant que M. B... C..., seul associé de l'EURL Soko-coiff, en a été le gérant de droit jusqu'au 2 novembre 2011, date à laquelle son épouse lui a succédé. Il est demeuré, même après cette date, le seul titulaire de la signature sur l'unique compte bancaire de la société mais aussi le signataire des factures d'achat ainsi que des factures envoyées pour règlement des prestations. Par suite, et ainsi que l'ont retenu les premiers juges, c'est à bon droit que l'administration a regardé M. et Mme C..., membres du même foyer fiscal, non seulement comme constituant un collège de gérance mais également comme seuls maîtres de l'affaire, qualité qui suffit à regarder les intéressés comme bénéficiaires des revenus distribués, en application du 1° du 1 de l'article 109 du code général des impôts, sans qu'ait d'incidence la circonstance qu'ils n'auraient pas effectivement appréhendé ces sommes. Par suite, et eu égard aux responsabilités exercées par M. et Mme C... ainsi qu'à la nature, à l'importance et au caractère répété des infractions constatées, l'administration justifie l'application de la pénalité pour manquement délibéré aux rehaussements dont les intéressés ont fait l'objet.

9. Il résulte de tout ce qui précède que M. et Mme C... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Versailles, a, après avoir constaté un non-lieu à statuer partiel, rejeté le surplus des conclusions de leur demande. Leurs conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent dès lors qu'être rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. et Mme C... est rejetée.

2

N° 19VE02215


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 19VE02215
Date de la décision : 27/05/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

19-04-01-02 Contributions et taxes. Impôts sur les revenus et bénéfices. Règles générales. Impôt sur le revenu.


Composition du Tribunal
Président : Mme DANIELIAN
Rapporteur ?: Mme Isabelle DANIELIAN
Rapporteur public ?: M. HUON
Avocat(s) : NOEL ; NOEL ; NOEL

Origine de la décision
Date de l'import : 08/06/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2021-05-27;19ve02215 ?
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