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27/05/2021 | FRANCE | N°19VE02210

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 3ème chambre, 27 mai 2021, 19VE02210


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

L'entreprise unipersonnelle à responsabilité limitée (EURL) Soko-coiff a demandé au tribunal administratif de Versailles de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des exercices clos en 2012 et 2013, des rappels de taxe sur la valeur ajoutée mis à sa charge pour la période allant du 1er janvier 2012 au 31 décembre 2013, ainsi que des pénalités correspondantes.

Par un jugement n° 1701858 du 19 avril 2019, le tri

bunal administratif de Versailles a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Pa...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

L'entreprise unipersonnelle à responsabilité limitée (EURL) Soko-coiff a demandé au tribunal administratif de Versailles de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des exercices clos en 2012 et 2013, des rappels de taxe sur la valeur ajoutée mis à sa charge pour la période allant du 1er janvier 2012 au 31 décembre 2013, ainsi que des pénalités correspondantes.

Par un jugement n° 1701858 du 19 avril 2019, le tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 18 juin 2019, l'EURL Soko-coiff, représentée par Me B... et Me A..., avocats, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) de prononcer la décharge, en droits et pénalités, sollicitée ;

3°) de mettre à la charge de l'État la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la reconstitution de ses recettes est irréaliste dès lors qu'au regard de la particularité de sa clientèle, elle n'a pas pu percevoir des produits sous forme d'espèces ;

- la reconstitution des recettes aboutit à une rentabilité qui n'est pas crédible ;

- la reconstitution de ses recettes provenant des clients de la résidence ORPEA à Neuilly-sur-Seine est sommaire s'agissant des deux exercices vérifiés, dès lors que l'administration s'est fondée sur des mois qui ne prennent pas en compte la variabilité du chiffre d'affaire sur l'année ;

- la majoration pour manquement délibéré n'est pas fondée.

..........................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme C...,

- et les conclusions de M. Huon, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. L'EURL Soko-coiff, qui exerce une activité de coiffure à domicile au sein de résidences pour personnes âgées, a fait l'objet d'une vérification de comptabilité portant sur la période du 1er janvier 2012 au 31 décembre 2013, à l'issue de laquelle le service, après avoir rejeté sa comptabilité et reconstitué ses recettes, lui a notifié des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés au titre des exercices clos en 2012 et 2013 ainsi que des rappels de taxe sur la valeur ajoutée pour cette même période. Par un jugement du 19 avril 2019 dont la société fait appel, le tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande tendant à la décharge de ces impositions.

Sur le bien-fondé des impositions :

2. En premier lieu, il résulte de l'instruction, et notamment de la proposition de rectification du 10 juin 2015, que pour écarter la comptabilité de l'EURL Soko-coiff comme irrégulière et non probante, le service vérificateur a constaté que cette dernière n'a pas conservé la totalité des pièces justificatives de recettes, qu'elle n'a pas enregistré en comptabilité de recettes en espèces, alors qu'il ressort des pièces produites par elle, dans le cadre des opérations de contrôle, qu'elle en a réalisées et qu'elle n'a pas tenu de compte de caisse ni présenté d'inventaire détaillé du stock des matières premières. Eu égard à ces irrégularités, qui n'ont été contestées ni en première instance ni en appel, sa comptabilité ne pouvait, faute de permettre de vérifier l'exhaustivité de l'enregistrement de ses recettes, être regardée comme exacte et sincère, et l'administration fiscale a pu reconstituer son chiffre d'affaires.

3. Aux termes de l'article L. 192 du livre des procédures fiscales : " Lorsque l'une des commissions visées à l'article L. 59 est saisie d'un litige ou d'une rectification, l'administration supporte la charge de la preuve en cas de réclamation, quel que soit l'avis rendu par la commission. / Toutefois, la charge de la preuve incombe au contribuable lorsque la comptabilité comporte de graves irrégularités et que l'imposition a été établie conformément à l'avis de la commission. La charge de la preuve des graves irrégularités invoquées par l'administration incombe, en tout état de cause, à cette dernière lorsque le litige ou la rectification est soumis au juge. (...). ".

4. Il résulte de ces dispositions qu'à défaut de saisine de la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires, et lorsque le contribuable n'a pas accepté les rehaussements qui lui avaient été notifiés dans le cadre de la procédure contradictoire, il revient à l'administration d'apporter la preuve du bien-fondé des suppléments d'impôt en litige.

5. Pour procéder à la reconstitution des recettes de l'EURL Soko-coiff, l'administration s'est fondée sur les justificatifs produits par la société au cours du contrôle, à savoir des tableaux récapitulatifs mensuels, des agendas, et des carnets de fiches clients pour les prestations réalisées dans les établissements pour personnes âgées situés à Marly-le-Roi, Courbevoie, Rocquencourt, Clamart et Louveciennes et des factures pour celui situé à Saint-Thibault-des-Vignes. En ce qui concerne l'établissement situé à Neuilly-sur-Seine, le vérificateur, compte tenu des lacunes des justificatifs des recettes qui ont été présentés, en l'occurrence des carnets de fiches client, a reconstitué les recettes annuelles en ramenant à l'année les recettes, pour 2012, des mois de février, juin et octobre et, pour 2013, des mois d'octobre, novembre et décembre.

6. Pour contester la méthode de reconstitution, la société requérante soutient tout d'abord avoir déclaré la totalité des recettes encaissées sur son unique compte bancaire et en déduit que les prestations non déclarées proviennent nécessairement de règlements en espèces ce qui est impossible au regard de la particularité de sa clientèle constituée de personnes âgées dépendantes qui ne règlent pas elles-mêmes les prestations qu'elles reçoivent. Il est toutefois constant, ainsi qu'il ressort des pièces justificatives qu'elle a présentées au service, que la société a perçu des règlements en espèces, qu'elle n'a pas comptabilisés. La seule circonstance, à la supposée établie, qu'une partie de la clientèle ne pourrait procéder à des règlements en espèces n'est pas de nature à faire regarder la reconstitution comme exagérée, dès lors qu'elle se fonde sur les documents fournis par la société pour attester du montant de ses recettes et alors au demeurant que l'administration n'a jamais estimé que les minorations de recettes proviendraient exclusivement de paiements en espèces.

7. Si la société fait valoir ensuite, s'agissant de l'établissement de Neuilly sur Seine, que les résultats mensuels peuvent être très variables et que la méthode utilisée ne peut être représentative de l'activité de la société sur l'année, il résulte de l'instruction que la part, au sein des recettes annuelles, de la somme des recettes réalisées, soit au cours des mois de février, juin et octobre, soit au cours des mois d'octobre, novembre et décembre, est sensiblement la même que celle des autres établissements, et s'établit autour du quart des recettes annuelles. En se bornant à soutenir, à nouveau en appel, sans toutefois proposer une autre méthode alternative de reconstitution, que l'administration aurait dû se fonder sur d'autres mois plus fiables, l'EURL Soko-coiff n'indique pas en quoi d'autres mois de référence auraient permis une meilleure prise en compte de la variabilité du chiffre d'affaires de la société sur l'année. Enfin, elle ne saurait utilement soutenir qu'en changeant de période de référence pour 2013 la méthode retenue ne serait pas cohérente avec celle de 2012, l'administration s'étant attachée à prendre en compte les seules périodes mensuelles couvertes par des fiches clients exhaustives. Par suite, la méthode de reconstitution des recettes de l'établissement de Neuilly-sur-Seine, ne peut être regardée comme sommaire.

8. Enfin, si la société requérante soutient que la rentabilité dégagée par la reconstitution de recettes est exagérée, le calcul qu'elle présente, déterminé artificiellement à partir du rapport entre, d'une part, la rémunération de la gérante à laquelle s'ajoute l'omission de recettes et, d'autre part, le chiffre d'affaires rectifié, ne tient pas compte de différentes variables indispensables telles que les charges engagées pour l'exploitation de la société.

9. Il résulte de ce qui précède que l'administration doit être regardée comme apportant la preuve qui lui incombe du bien-fondé de la méthode de reconstitution mise en oeuvre et, par suite, des bases d'imposition en litige.

Sur les pénalités :

10. L'EURL Soko-coiff reprend en appel, sans l'assortir d'arguments nouveaux ou de critique utile du jugement, le moyen tiré de ce que l'administration n'apporterait pas la preuve du caractère délibéré des manquements. Il convient d'écarter ce moyen par adoption des motifs pertinents retenus à bon droit par les premiers juges au point 4 de leur jugement.

11. Il résulte de tout ce qui précède que l'EURL Soko-coiff n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande. Ses conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent dès lors qu'être rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de l'EURL Soko-coiff est rejetée.

2

N° 19VE02210


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 19VE02210
Date de la décision : 27/05/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

19-04-01-04 Contributions et taxes. Impôts sur les revenus et bénéfices. Règles générales. Impôt sur les bénéfices des sociétés et autres personnes morales.


Composition du Tribunal
Président : Mme DANIELIAN
Rapporteur ?: Mme Isabelle DANIELIAN
Rapporteur public ?: M. HUON
Avocat(s) : NOEL ; NOEL ; NOEL

Origine de la décision
Date de l'import : 08/06/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2021-05-27;19ve02210 ?
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