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17/12/2020 | FRANCE | N°19VE00292

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 2ème chambre, 17 décembre 2020, 19VE00292


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... C... a demandé au Tribunal administratif de Cergy-Pontoise de condamner l'Etat à lui verser la somme de 29 153,47 euros augmentée des intérêts légaux à compter du 9 mars 2016 avec capitalisation des intérêts en réparation du préjudice financier et du préjudice moral qu'il a subis du fait de la sanction d'exclusion temporaire de ses fonctions qui lui a été infligée le 6 juillet 2012 par le ministre de la culture annulée par un arrêt de la Cour administrative d'appel de Versailles en date du

21 juillet 2015.

Par un jugement n° 1609729 du 27 novembre 2018, le Tribunal ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... C... a demandé au Tribunal administratif de Cergy-Pontoise de condamner l'Etat à lui verser la somme de 29 153,47 euros augmentée des intérêts légaux à compter du 9 mars 2016 avec capitalisation des intérêts en réparation du préjudice financier et du préjudice moral qu'il a subis du fait de la sanction d'exclusion temporaire de ses fonctions qui lui a été infligée le 6 juillet 2012 par le ministre de la culture annulée par un arrêt de la Cour administrative d'appel de Versailles en date du 21 juillet 2015.

Par un jugement n° 1609729 du 27 novembre 2018, le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire en réplique enregistrés les 25 janvier 2019 et 30 septembre 2019, M. C..., représenté par Me Cellupica, avocat, demande à la Cour :

1° d'annuler ce jugement ;

2° de condamner l'Etat à lui verser la somme de 9153,47 euros augmentée des intérêts légaux avec capitalisation au titre de son préjudice financier et la somme de 20 000 euros augmentée des intérêts légaux avec capitalisation au titre de son préjudice moral.

3° de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

M. C... soutient que :

- il a été réintégré à temps plein dans ses fonctions par arrêté du 6 juillet 2012 ; l'indemnité compensant le préjudice financier subi du fait de la mesure irrégulière s'élève donc à 9153,47 euros ;

- la lourde sanction qui a été annulée lui a causé un préjudice moral qui ne peut être contesté au regard de la sanction de blâme qui lui a été substituée.

.....................................................................................................................

Vu :

- les autres pièces du dossier ;

- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;

- la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ;

- le décret n° 82-624 du 20 juillet 1982 ;

- le décret n° 95-239 du 2 mars 1995 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme A...,

- les conclusions de M. Bouzar, rapporteur public,

- et les observations de M. C....

Considérant ce qui suit :

1. Par un arrêté du ministre de la culture en date du 6 juillet 2012, M. C... a fait l'objet d'une sanction d'exclusion temporaire de ses fonctions d'adjoint technique de surveillance et de magasinage au musée de Malmaison-Bois-Préau d'une durée de deux ans dont dix-huit mois avec sursis. Par un arrêt en date du 21 juillet 2015, la Cour administrative d'appel de Versailles a annulé cette sanction au motif de son caractère disproportionné. M. C... relève appel du jugement en date du 27 novembre 2018 par lequel le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande tendant à l'indemnisation des divers préjudices qu'il estime avoir subis du fait de cette sanction illégale.

2. En vertu des principes généraux qui régissent la responsabilité de la puissance publique, un agent public irrégulièrement évincé a droit à la réparation intégrale du préjudice qu'il a effectivement subi du fait de la mesure illégalement prise à son encontre. Sont ainsi indemnisables les préjudices de toute nature avec lesquels l'illégalité commise présente, compte tenu de l'importance respective de cette illégalité et des fautes relevées à l'encontre de l'intéressé, un lien direct de causalité.

Sur le préjudice financier :

3. Pour l'évaluation du montant de l'indemnité due, doit être prise en compte la perte du traitement ainsi que celle des primes et indemnités dont l'intéressé avait, pour la période en cause, une chance sérieuse de bénéficier, à l'exception de celles qui, eu égard à leur nature, à leur objet et aux conditions dans lesquelles elles sont versées, sont seulement destinées à compenser des frais, charges ou contraintes liés à l'exercice effectif des fonctions. Enfin, il y a lieu de déduire, le cas échéant, le montant des rémunérations que l'agent a pu se procurer par son travail au cours de la période d'éviction

4. M. C... avait été autorisé par un arrêté du 25 novembre 2011 à exercer ses fonctions au musée de Malmaison-Bois-Préau à mi-temps. Il ne résulte pas de l'instruction qu'à la date à laquelle a été décidée la sanction finalement annulée par le juge administratif, M. C... aurait demandé à pouvoir les exercer à temps plein ni même manifesté une telle intention auprès de son administration. Ainsi, quand bien même l'arrêté prononçant la sanction d'exclusion temporaire de ses fonctions a par son article 1er prononcé " la réintégration à temps plein pour ordre " de M. C..., cette circonstance ne lui donne pas droit à être indemnisé au titre des rémunérations dont il a été irrégulièrement privé sur la base d'un exercice de ses fonctions à temps plein.

5. Ainsi qu'il a été dit ci-dessus, la faute commise par le ministre chargé de la culture en prononçant de façon illégale la sanction d'exclusion temporaire des fonctions de M. C..., en l'absence de preuve de ce que M. C... aurait exercé une activité de remplacement pendant la durée de son éviction illégale du service, lui donne droit à être indemnisé à hauteur de la rémunération nette mensuelle qu'il aurait perçue pour ses fonctions du 13 juillet 2012 au 12 janvier 2013. M. C... justifie que les sommes déclarées à l'administration fiscale perçues au titre de l'année 2012 correspondent aux rémunérations qu'il percevait pour des activités d'enseignement accessoires et effectuées parallèlement au mi-temps effectué pour le compte du ministère de la culture et qu'il a poursuivies. Il n'est pas démontré que M. C... aurait perçu un revenu de remplacement correspondant à l'absence de traitement au cours du second semestre 2012. Par suite il y a lieu de faire droit à sa demande d'indemnisation et de condamner l'Etat à lui verser la somme de 4 502,41 euros augmentée des intérêts de droit à compter de sa demande préalable. Ces intérêts seront capitalisés à compter du 16 mars 2018, date à laquelle était due plus d'une année d'intérêts et à chaque échéance annuelle.

Sur le préjudice moral :

6. Eu égard au comportement professionnel de M. C... et aux faits, matériellement établis, qui ont conduit à le sanctionner, quand bien même la sanction infligée a été annulée au regard de son caractère disproportionné, celui-ci ne peut être regardé comme établissant l'existence d'un préjudice moral alors que les pièces produites pour attester d'une dégradation de son état de santé en raison de la sanction annulée sont rédigées de façon peu circonstanciée. Par suite, les conclusions de M. C... tendant à l'indemnisation de son préjudice moral doivent être rejetées.

7. Il résulte de tout ce qui précède que M. C... est fondé à demander l'annulation du jugement attaqué du Tribunal administratif de Cergy-Pontoise en tant qu'il a rejeté sa demande tendant à l'indemnisation de son préjudice financier et la condamnation de l'Etat à lui verser la somme de 4 502,41 euros augmentée des intérêts de droit à compter de sa demande préalable. Ces intérêts seront capitalisés à compter du 16 mars 2018, date à laquelle était due plus d'une année d'intérêts et à chaque échéance annuelle. Le surplus des conclusions à fin d'annulation de M. C... doit être rejeté.

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

8. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 2 000 euros au titre des frais exposés par M. C... et non compris dans les dépens.

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement n° 1609729 du 27 novembre 2018 du Tribunal administratif de Cergy-Pontoise est annulé en tant qu'il a rejeté la demande de M. C... tendant à la réparation du préjudice financier subi du fait de la sanction irrégulière qui lui a été infligée.

Article 2 : L'Etat est condamné à verser à M. C... la somme de 4 502,41 euros augmentée des intérêts de droit à compter de sa demande préalable. Ces intérêts seront capitalisés pour produire eux-mêmes intérêts à la date du 16 mars 2018 et à chaque échéance annuelle ultérieure.

Article 3 : L'Etat versera à M. C... la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête de M. C... est rejeté.

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N° 19VE00292


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 19VE00292
Date de la décision : 17/12/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

36-13-03 Fonctionnaires et agents publics. Contentieux de la fonction publique. Contentieux de l'indemnité.


Composition du Tribunal
Président : M. BRUMEAUX
Rapporteur ?: Mme Sophie COLRAT
Rapporteur public ?: M. BOUZAR
Avocat(s) : CELLUPICA

Origine de la décision
Date de l'import : 08/01/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2020-12-17;19ve00292 ?
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