Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
La SCI Pienaggi a demandé au Tribunal administratif de Cergy-Pontoise de condamner la commune de Clamart à lui verser la somme de 1 312 530,50 euros, augmentée des intérêts légaux à compter du 3 novembre 2015, en réparation du préjudice qu'elle estime avoir subi du fait de l'illégalité des arrêtés des 31 mai 2011 et 1er août 2012 par lesquels le maire de Clamart a ordonné l'interruption des travaux autorisés par le permis de construire délivré le 4 décembre 2007, puis a retiré, pour fraude, ce permis de construire.
Par un jugement n° 1601962 du 5 octobre 2018, le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a condamné la commune de Clamart à verser à la SCI Pienaggi la somme globale de 37 840 euros, avec intérêts au taux légal à compter du 4 novembre 2015, en réparation des préjudices subis du fait de l'illégalité de l'arrêté du 1er août 2012 par lequel le maire de la commune a retiré le permis de construire accordé le 4 décembre 2007 à la SCI Pienaggi.
Procédure devant la Cour :
Par une requête, enregistrée le 4 décembre 2018, la SCI Pienaggi, représentée par Me Adeline-Delvolvé, avocat, demande à la Cour :
1° d'annuler l'article 4 du jugement rejetant le surplus de ses conclusions ;
2° de condamner la commune de Clamart à lui verser une somme de
1 312 530,50 euros, augmentée des intérêts légaux à compter du 3 novembre 2015 ;
3° de mettre à la charge de la commune de Clamart la somme de 3 600 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et, le cas échéant, les entiers dépens.
Elle soutient que :
- le jugement est insuffisamment motivé sur le préjudice moral ;
- le tribunal a commis une erreur de droit doublée d'une dénaturation, s'agissant de l'indemnisation des préjudices immobiliers, alors que le rapport d'expertise du 25 septembre 2015 établissait l'existence de deux offres d'achat de deux appartements pour une valeur cumulée de 900 000 euros ; le préjudice immobilier global est donc évalué à la somme de 1 153 000 euros incluant le manque à gagner sur la vente à bas prix de l'intégralité des trois appartements pour la somme totale de 690 000 euros ; de même, les pertes liées à la mise en location du dernier appartement sont en lien direct avec le retrait du permis de construire d'une durée de 2 ans et l'ensemble des complications successives faisant obstacle à toute signature d'un contrat de bail ;
- s'agissant de l'indemnisation des honoraires d'avocat, l'obtention de la somme de 2 000 euros au titre des frais irrépétibles, dans le cadre de l'instance dirigée contre l'arrêté de retrait n'a pas couvert l'entier préjudice subi ; le montant total de 58 026 euros se justifie par l'ensemble des diligences accomplies dans le cadre des diverses instances administratives, civiles et pénales ;
- les frais déboursés pour la réalisation des deux constats d'huissier les 21 septembre 2012 et 21 mars 2013 sont la conséquence directe de l'arrêté fautif ;
- les frais de géomètre sont en lien direct avec la faute en ce qu'ils s'inscrivaient dans l'action contentieuse alors en cours ; les honoraires d'architecte exposés pour élaborer la conception et l'agencement définitif des biens se sont révélés vains du fait de l'action de la commune, laquelle a fait fuir les futurs acquéreurs ; le montant des frais de commercialisation, d'architecte et de géomètre, s'élevant à 14 362 euros, devra donc être indemnisé ;
- les impositions supplémentaires par les taxes d'urbanisme sur une durée de plus de trois ans sont la conséquence directe de la faute commise par la commune ; le préjudice correspondant au remboursement de la part représentée par le lot n° 2 à compter de septembre 2011 s'élève à 2 183 euros ;
- les frais de compte bancaire débiteur sont la conséquence directe de la faute commise par la commune devant être réparée par la somme de 24 579,08 euros ; le préjudice lié aux intérêts des emprunts bancaires ne correspond pas à la seule période durant laquelle l'arrêté de retrait a été maintenu dans l'ordonnancement juridique mais à l'impact direct global sur le projet immobilier ; le préjudice indemnisable sur les frais bancaires consécutifs à la faute conduisant à l'échec des ventes d'appartement s'élève à la somme de 57 545,45 euros ;
- les frais hypothécaires sont la conséquence directe de l'arrêt des travaux qui l'ont empêché d'honorer ses obligations fiscales, circonstance qui a conduit, en décembre 2012, le Trésor public à prendre une hypothèque de 6 430 euros ; le préjudice s'élève à 3 100 euros de frais de levée d'hypothèque ;
- sur une période de trois ans, les agissements de la mairie et la succession d'arrêtés et de recours ont eu un impact psychologique grave sur la SCI ainsi que pour son gérant, qui, alors âgé de 65 ans, a, notamment, dû faire l'expérience d'une garde-à-vue pour la première fois de sa vie ; le préjudice moral sera donc réparé par la somme de 15 000 euros.
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Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de l'urbanisme ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme B...,
- les conclusions de M. Bouzar, rapporteur public,
- les observations de Me D... pour la SCI Pienaggi et celles de Me A... pour la commune de Clamart.
Considérant ce qui suit :
1. Le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a condamné la commune de Clamart à verser à la SCI Pienaggi la somme globale de 37 840 euros, avec intérêts au taux légal à compter du 4 novembre 2015, en réparation des préjudices subis du fait de l'illégalité de l'arrêté du 1er août 2012 par lequel le maire de la commune a retiré le permis de construire accordé le 4 décembre 2007 à la SCI Pienaggi. La SCI Pienaggi relève appel de ce jugement et demande à la Cour dans le dernier état de ses écritures de condamner la commune de Clamart au versement de la somme de 2 064 733,75 euros correspondant à l'indemnisation des divers préjudices qu'elle estime avoir subis à raison de l'illégalité fautive de l'arrêté du 1er août 2012. La commune de Clamart demande à la Cour de rejeter la requête de la SCI Pienaggi et, par la voie de l'appel incident, de renoncer à toute indemnisation de la société requérante.
Sur la fin de non-recevoir opposée par la commune de Clamart à la demande de première instance :
2. La commune de Clamart soutient, pour la première fois en appel, que la réclamation préalable du 3 novembre 2015 présentée plus d'un an après l'annulation de l'arrêté du 1er août 2012 par un arrêt de la cour du 2 octobre 2014, était tardive. Cependant aucune règle de forclusion n'exige d'adresser une réclamation indemnitaire préalable dans un délai déterminé. A supposer que la commune de Clamart ait entendu opposer la tardiveté de la demande de première instance, la règle du délai raisonnable, qui ne saurait, en règle générale et sauf circonstances particulières, excéder un an, ne trouve pas à s'appliquer aux recours tendant à la mise en jeu de la responsabilité d'une personne publique qui, s'ils doivent être précédés d'une réclamation auprès de l'administration, ne tendent pas à l'annulation ou à la réformation de la décision rejetant tout ou partie de cette réclamation, mais à la condamnation de la personne publique à réparer les préjudices qui lui sont imputés. La prise en compte de la sécurité juridique, qui implique que ne puissent être remises en cause indéfiniment des situations consolidées par l'effet du temps, est alors assurée par les règles de prescription prévues par la loi n° 68-1250 du 31 décembre 1968. Par suite, la fin de non-recevoir doit être écartée.
Sur la régularité du jugement attaqué :
3. En premier lieu, aux termes de l'article L. 9 du code de justice administrative : " Les jugements sont motivés ". Il ressort du point 19 du jugement attaqué que, pour fixer à la somme de 5 000 euros le montant du préjudice moral subi par la SCI Pienaggi, le tribunal a constaté que " la société a nécessairement subi, à raison de la faute commise par la commune de Clamart, un préjudice moral, tenant aux troubles qu'a causés la décision illégale en retardant le projet immobilier de la société, qui n'est pas un professionnel de l'immobilier ". Ainsi, le jugement contesté, qui n'était pas tenu de répondre à l'ensemble des arguments présentés par les parties, est, dès lors notamment que la commune de Clamart n'a pas contesté en première instance le fait que la SCI Pienaggi et son gérant étaient " novices dans le domaine de l'immobilier ", suffisamment motivé sur ce point.
4. En second lieu, les dénaturations, les erreurs de droit et d'appréciation qu'aurait commises le tribunal administratif ont trait au bien-fondé du jugement et à l'effet dévolutif de l'appel, mais sont sans incidence sur la régularité dudit jugement.
Sur les conclusions à fin d'indemnisation :
En ce qui concerne le principe de la responsabilité :
5. Le maire de Clamart a, par une décision du 1er août 2012, retiré le permis de construire délivré à la SCI Pienaggi le 4 décembre 2007, et modifié le 21 septembre 2009, pour la transformation d'un bâtiment existant à usage de garage professionnel en quatre logements, au motif de la fraude commise sur la surface de plancher existante lors de la demande de permis de construire. Par un arrêt du 2 octobre 2014, devenu définitif, la cour de céans a annulé cette décision pour excès de pouvoir. Cette illégalité est constitutive d'une faute de nature à engager la responsabilité de la commune de Clamart envers la SCI Pienaggi.
6. Il ne résulte pas de l'instruction que la SCI Pienaggi aurait, en commençant seulement en 2011 les travaux autorisés par les permis de construire de 2007 et 2009 et en poursuivant postérieurement à l'annulation du retrait du permis de construire un projet qualifié de minimaliste par cette SCI au regard des permis de construire pourtant rétablis par l'arrêt de la cour du 2 octobre 2014, adopté un comportement fautif de nature à exonérer même partiellement la commune de Clamart de sa responsabilité.
En ce qui concerne les préjudices :
S'agissant des préjudices immobiliers :
7. La perte de bénéfices ou le manque à gagner découlant de l'impossibilité de réaliser une opération immobilière en raison d'une décision illégale telle le retrait d'une autorisation délivrée en vue de sa réalisation revêt un caractère éventuel et ne peut, dès lors, en principe, ouvrir droit à réparation. Il en va toutefois autrement si le requérant justifie de circonstances particulières, tels que des engagements souscrits par de futurs acquéreurs ou l'état avancé des négociations commerciales avec ces derniers, permettant de faire regarder ce préjudice comme présentant, en l'espèce, un caractère direct et certain. Il est fondé, si tel est le cas, à obtenir réparation au titre du bénéfice qu'il pouvait raisonnablement attendre de cette opération.
8. Le préjudice immobilier global, évalué dans le dernier état des écritures d'appel à la somme de 1 902 480 euros, a été calculé, notamment par renvoi au chiffrage d'un document de janvier 2017 d'un expert en évaluation immobilière mandaté par la SCI Pienaggi, au vu d'une estimation d'un prix de revente de 2 356 480 euros par référence aux prix de vente en 2019 et 2020 de logements implantés dans la même rue, et d'une indemnité d'immobilisation de 448 000 euros correspondant à des pertes de revenus locatifs, de laquelle ont été déduits des frais d'acquisition de 200 000 euros, de démolition de 16 000 euros, de travaux de construction de 544 000 euros, ainsi que des frais de négociation d'agence de 88 000 euros et de notaire, d'architecte et de portage financier de 54 000 euros.
9. Il résulte de l'instruction, notamment d'un document de 2015 de la SCI Pienaggi précisant que le " tout d'une superficie " loi Carrez " de 320 m² " était, à la date de la décision fautive du 1er août 2012, " entièrement à aménager " et nécessitait une " création de parkings en sous-sol ", et de l'acte de vente du lot 1 indiquant que le logement existant était en 2010 en " très mauvais état ", que l'ensemble en cause était impropre à l'habitation à la date du 1er août 2012 de l'arrêté fautif. Ainsi, à supposer même que des négociations de vente " en l'état futur d'achèvement " étaient avancées en 2011 pour deux logements projetés sur les quatre autorisés par les permis de construire initial et modificatif délivrés respectivement les 4 décembre 2007 et 21 septembre 2009, la SCI Pienaggi, en décidant de ne pas reprendre à compter d'octobre 2014 l'exécution des permis de construire retirés illégalement par la commune, de vendre, le 22 juillet 2015, les lots 4 à 9 et 11 à 13 pour un montant global de 690 000 euros à charge pour chacun des acquéreurs de faire les travaux d'aménagement et de conserver dans son patrimoine les lots 1 et 10 correspondant à un logement de 108 m², qui ont été vendus le 11 juillet 2018 pour un montant de 630 000 euros après des travaux d'aménagement, et ainsi en n'exécutant pas les permis de construire rétablis dans l'ordre juridique, a procédé à un choix d'opportunité dont elle a retiré des bénéfices. Il ne résulte pas de l'instruction, alors même qu'un établissement bancaire lui demandait le remboursement des prêts relais pour la somme de 341 606,65 euros, que ce choix lui aurait été imposé par la situation dans laquelle elle s'est trouvée à la suite du retrait fautif des permis de construire qui a été annulé le 2 octobre 2014 par la cour. Dès lors, le manque à gagner allégué, ainsi que les pertes de revenus locatifs, lesquelles ne sont au demeurant nullement justifiées dans leur montant dès lors que la SCI Pienaggi, qui n'a pas exposé les dépenses relatives aux travaux d'aménagement des trois logements et qui ne pouvait ni les vendre en état futur d'achèvement ni les louer, ne se fonde que sur des estimations pour les invoquer, n'ont pas de lien direct et certain avec le retrait fautif des permis de construire, Par suite, la demande d'indemnisation de ces préjudices doit être rejetée.
S'agissant des frais de justice :
10. Les frais de justice, s'ils ont été exposés en conséquence directe d'une faute de l'administration, sont susceptibles d'être pris en compte dans le calcul du préjudice résultant de l'illégalité fautive imputable à l'administration. Toutefois, lorsque l'intéressé a fait valoir devant le juge une demande fondée sur l'article L. 761-1 du code de justice administrative, le préjudice est intégralement réparé par la décision que prend ce juge sur ce fondement.
11. Si la SCI Pienaggi produit des factures d'honoraires de quatre avocats pour la période de juin 2009 à mars 2015 et leurs attestations de paiement ou de non paiement, il ne résulte pas de l'instruction, notamment des mentions figurant sur ces documents, que ces frais ont été exposés en lien direct et certain avec l'illégalité de l'arrêté du 1er août 2012. En outre, dès lors que l'arrêt de la cour annulant cet arrêté lui a accordé une somme au titre des frais exposés et non compris dans les dépens, la SCI Pienaggi ne saurait obtenir, dans le cadre du présent appel, une somme destinée à couvrir les frais d'avocat exposés pour le même contentieux. Enfin, s'agissant des frais de justice engagés dans le cadre de la plainte pénale déposée à l'encontre du gérant de la SCI Pienaggi et de la procédure de saisie immobilière initiée par la banque HSBC, la SCI Pienaggi n'établit pas davantage en appel, ni même n'allègue, qu'elle n'aurait pas sollicité ou bénéficié du remboursement des frais qu'elle aurait pu engager, sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, comme l'a retenu à bon droit le tribunal.
S'agissant des frais d'huissier, de géomètre, d'architecte et de commercialisation :
12. Il résulte de l'instruction que la décision fautive ayant fait l'objet d'une suspension par la juridiction administrative entre le 18 octobre 2012 et le 22 février 2013, les constats d'huissier de justice des 21 septembre 2012 et 21 mars 2013 ont eu pour but de relever que les travaux autorisés par les permis de construire retirés étaient interrompus par la SCI Pienaggi, d'une part, après la prise de l'arrêté litigieux, et, d'autre part, après le jugement rejetant la demande d'annulation du même arrêté. S'ils sont ainsi en lien suffisamment direct avec l'arrêté fautif, les frais engagés, dès lors que la seconde facture produite est datée de 2011 et non de 2013, ne sont justifiés que pour la somme de 344,03 euros. Il y a donc lieu de condamner la commune de Clamart à verser cette somme de 344,03 euros à la SCI Pienaggi et de réformer le jugement sur ce point.
13. La SCI Pienaggi soutient que l'intervention d'un géomètre facturée le 14 novembre 2014 pour la somme de 3 000 euros a été indispensable pour pouvoir faire établir par un expert la configuration des lieux et l'état des travaux afin d'obtenir l'annulation de l'arrêté fautif. Toutefois, la note d'honoraires produite, qui concerne une mission d'assistance juridique et foncière dans le cadre de la mise en copropriété et de la commercialisation du bien, est dépourvue de lien avec la faute commise. Par ailleurs, si, comme en première instance, la SCI Pienaggi réclame l'indemnisation des frais d'architecte, elle n'apporte aucune précision ni justificatif sur ce point.
14. Par la voie de l'appel incident, la commune de Clamart soutient que c'est à tort que le jugement entrepris l'a condamnée à rembourser la moitié d'une note d'honoraires d'avocat de Me C... datée du 24 juin 2009 d'un montant de 22 724 euros, alors que la SCI Pienaggi demande le remboursement de la totalité de cette somme correspondant à des frais engagés pour la commercialisation de l'opération autorisée par le permis de construire délivré le 4 décembre 2007. Il ne résulte pas de l'instruction, ainsi qu'il a été dit précédemment au point 9, ni que le projet de commercialisation aurait été abandonné du fait de l'arrêté fautif ni que les frais de commercialisation auraient été engagés en pure perte. En l'absence de caractère certain, ce chef de préjudice doit, dès lors, être écarté, et le jugement être réformé sur ce point.
S'agissant des impositions :
15. Il est soutenu en appel par la SCI Pienaggi qu'elle a été contrainte d'acquitter des taxes d'urbanisme en l'absence de vente des appartements et que le préjudice correspond au remboursement de la part représentée par le lot n° 2 à compter de septembre 2011, soit 2 183 euros. Toutefois, la société requérante se borne à produire une lettre de relance concernant la taxe locale d'équipement et diverses taxes pour un montant initial de 1 069 euros correspondant au permis modificatif du 21 septembre 2009, une mise en demeure et un avis à tiers détenteur concernant les mêmes taxes. La perception de ces taxes est donc dépourvue de lien direct avec le retrait illégal de ce permis de construire, le 1er août 2012, dès lors, ainsi qu'il a été dit précédemment, que la société n'était pas contrainte d'abandonner les travaux autorisés par ce permis de construire.
S'agissant des frais bancaires :
16. Contrairement à ce que soutient la commune de Clamart, d'une part, le retrait illégal des permis de construire accordés à la SCI Pienaggi lui interdisait de commercialiser le projet pour lequel elle avait souscrit en mai et juin 2011 deux emprunts de 150 000 euros et 190 000 euros, et, d'autre part, la période de suspension de l'arrêté du 1er août 2012 par la juridiction administrative entre le 18 octobre 2012 et le 22 février 2013, n'a pas, eu égard au caractère provisoire d'une telle mesure, à être soustraite de la période d'indemnisation des frais bancaires courant donc en l'espèce du 1er août 2012 au 2 octobre 2014. Si la SCI Pienaggi soutient que la décision fautive a eu des conséquences prolongées au-delà de cette période, elle ne justifie pas de circonstances particulières en lien avec l'annulation du retrait des permis de construire dont les effets ont été rétablis à compter du 2 octobre 2014. Compte tenu du montant du capital emprunté et restant dû à la date du 1er août 2012, de la durée de la période et des taux d'intérêt pratiqués par l'établissement bancaire, les premiers juges n'ont pas fait une inexacte appréciation du préjudice subi par la SCI Pienaggi, compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce, en l'évaluant à la somme de 21 478 euros, représentative des frais financiers supportés par la requérante en lien avec la faute de la commune. Ainsi, la SCI requérante n'est pas fondée à demander la majoration de cette indemnité, tandis que la commune de Clamart n'est pas fondée à contester l'indemnité mise à sa charge par les premiers juges à raison de ce chef de préjudice.
17. Il ne résulte pas de l'instruction que le solde débiteur total de 24 736,41 euros du compte courant de la société tel que constaté par l'établissement bancaire le 21 juin 2012 trouverait sa cause dans la décision fautive de la commune de Clamart, dans la mesure où, ainsi que l'a retenu à bon droit le tribunal, la société requérante ne fait état d'aucune circonstance ni d'aucun élément de nature à établir le lien de causalité direct et certain avec l'illégalité fautive commise par la commune de Clamart. Par suite, la société requérante n'est pas fondée à rechercher la responsabilité de la commune de Clamart à ce titre.
S'agissant de frais de levée d'hypothèque :
18. La SCI Pienaggi réclame une indemnisation de la somme de 3 100 euros qu'elle a dû verser pour lever une hypothèque d'un montant de 6 430 euros prise sur son bien immobilier. Toutefois, la seule production en appel comme en première instance d'un acte de vente du 22 juillet 2015 mentionnant l'existence de cette hypothèque légale du Trésor prise le 11 décembre 2012 n'est pas de nature à établir un lien de causalité direct et certain avec la faute de la commune de Clamart. Par suite, il n'y a pas lieu de faire droit à la demande de la SCI Pienaggi relative à ce chef de préjudice.
S'agissant du préjudice moral :
19. La SCI Pienaggi justifie suffisamment de la réalité du préjudice moral que son gérant né en 1946 estime avoir subi du fait de la décision fautive prise au motif d'une fraude et rendant impossible la poursuite de l'exécution du permis de construire pendant plus de deux années. Contrairement à ce qui est soutenu par la SCI requérante et par la commune de Clamart, le tribunal n'a pas fait une inexacte appréciation du préjudice subi à ce titre en allouant à la SCI Pienaggi une indemnité de 5 000 euros.
20. Il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il soit besoin de statuer sur la recevabilité des conclusions présentées par la SCI Pienaggi tendant à majorer en appel le montant de la réparation demandée en première instance, que l'indemnité à laquelle la SCI Pienaggi peut prétendre doit être ramenée à la somme totale de 26 822,03 euros. Il y a donc lieu de réformer l'article premier du jugement du Tribunal administratif de Cergy-Pontoise en ce sens, de rejeter la requête d'appel de la SCI Pienaggi dirigée contre l'article 4 du jugement rejetant le surplus de ses conclusions indemnitaires et de rejeter le surplus de l'appel incident de la commune de Clamart dirigé contre les articles 1er et 2 du jugement.
Sur les frais liés au litige :
21. Ces dispositions font obstacle à ce que la commune de Clamart, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, verse à la SCI Pienaggi une somme au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il n'y a pas lieu, par ailleurs, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la SCI Pienaggi le versement à la commune de Clamart de la somme que celle-ci demande sur le fondement de ces mêmes dispositions.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de la SCI Pienaggi est rejetée.
Article 2 : La condamnation de la commune de Clamart prononcée par l'article premier du jugement n° 1601962 du 5 octobre 2018 du Tribunal administratif de Cergy-Pontoise est ramenée à la somme de 26 822,03 euros.
Article 3 : Le surplus de l'appel incident de la commune de Clamart est rejeté.
N° 18VE04051 2