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03/11/2020 | FRANCE | N°18VE01932

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 4ème chambre, 03 novembre 2020, 18VE01932


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. F... D... a demandé au Tribunal administratif de Cergy-Pontoise d'annuler la décision du 25 janvier 2016 par laquelle la commune d'Argenteuil a rejeté son recours gracieux formé contre la décision implicite lui retirant sa carte de commerçant volant, d'enjoindre au maire de la commune d'Argenteuil de lui restituer sa carte de commerçant volant dans un délai de trois jours à compter de la notification du jugement, sous astreinte de 500 euros par jour de retard, et de condamner la commune à lui verser la

somme de 10 000 euros en réparation du préjudice économique subi, ainsi...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. F... D... a demandé au Tribunal administratif de Cergy-Pontoise d'annuler la décision du 25 janvier 2016 par laquelle la commune d'Argenteuil a rejeté son recours gracieux formé contre la décision implicite lui retirant sa carte de commerçant volant, d'enjoindre au maire de la commune d'Argenteuil de lui restituer sa carte de commerçant volant dans un délai de trois jours à compter de la notification du jugement, sous astreinte de 500 euros par jour de retard, et de condamner la commune à lui verser la somme de 10 000 euros en réparation du préjudice économique subi, ainsi que la mise à la charge de l'Etat du versement de la somme de 4 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un jugement n° 1602733 du 30 novembre 2017, le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté la demande de M. D....

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 6 juin 2018, M. D..., représenté par Me Brame, avocat, demande à la cour :

1° d'annuler ce jugement ;

2° d'annuler la décision en date du 25 janvier 2016 par laquelle E... de la commune d'Argenteuil a rejeté son recours gracieux formé contre la décision implicite lui retirant sa carte de commerçant volant ;

3° d'enjoindre au maire de la commune d'Argenteuil de lui restituer sa carte de commerçant volant, dans un délai de trois jours à compter de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 500 euros par jour de retard ;

4° de condamner la commune d'Argenteuil à lui verser la somme de 10 000 euros en réparation du préjudice économique qu'il a subi ;

5° de mettre à la charge de la commune d'Argenteuil le versement de la somme de 4 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

M. D... soutient que c'est à tort que le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a écarté ses moyens tirés de ce que :

- la décision implicite de retrait de sa carte de commerçant volant est entachée d'un défaut de motivation ;

- la décision attaquée est entachée d'erreurs de procédure résultant de l'absence de notification et du non-respect de la procédure contradictoire ;

- la décision portant retrait de sa carte de commerçant volant est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ; qu'elle n'est pas justifiée par un motif d'intérêt général.

...............................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général de la propriété des personnes publiques ;

- le code général des collectivités territoriales ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. B...,

- les conclusions de Mme Grosshloz, rapporteur public,

- et les observations de Me C..., substituant Me A..., pour la commune d'Argenteuil.

Considérant ce qui suit :

1. M. D..., qui exerce la profession de commerçant ambulant, a obtenu le 25 avril 2012 une " carte de volant " pour le marché Héloïse à Argenteuil (Val d'Oise), qui a été renouvelée à plusieurs reprises, la validité de la dernière carte qui lui a été délivrée expirant à la fin de l'année 2015. Lors de sa séance du 2 juillet 2015, la commission des marchés de la commune d'Argenteuil a toutefois décidé de limiter à quarante-huit le nombre de titulaires de " carte de volant " pour le marché Héloïse. La commission a en conséquence remis à jour la liste des titulaires de ces cartes, sans sélectionner M. D.... A la suite de cette réunion de la commission, la société Mandon, délégataire du service public des halles et marchés de la commune d'Argenteuil, a fait procéder, le 3 juillet 2015, par les " placiers " du marché Héloïse, au retrait de la carte dont M. D... disposait. Celui-ci a, le 27 novembre 2015, formé un recours gracieux contre la décision implicite de retrait de sa carte de volant. Ce recours a été rejeté le 25 janvier 2016 par une décision du maire de la commune d'Argenteuil. Par un nouveau courrier en date du 16 février 2016, M. D... a réitéré sa demande tendant à la restitution de sa carte et a également demandé l'indemnisation de son préjudice estimé à 10 000 euros. Cette demande a été implicitement rejetée. M. D... relève régulièrement appel du jugement du 30 novembre 2017 par lequel le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande tenant à l'annulation de la décision du 25 janvier 2016 rejetant son recours gracieux à l'encontre de la décision implicite de retrait de sa carte de volant et à la réparation du préjudice économique qu'il estime avoir subi.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

En ce qui concerne la légalité externe de la décision attaquée :

2. Aux termes de l'article L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration : " Les personnes physiques ou morales ont le droit d'être informées sans délai des motifs des décisions administratives individuelles défavorables qui les concernent. / A cet effet, doivent être motivées les décisions qui : / 1° Restreignent l'exercice des libertés publiques ou, de manière générale, constituent une mesure de police ; / 2° Infligent une sanction ; / (...) 4° Retirent ou abrogent une décision créatrice de droits ; / (...) 6° Refusent un avantage dont l'attribution constitue un droit pour les personnes qui remplissent les conditions légales pour l'obtenir ; / 7° Refusent une autorisation (...). Aux termes de l'article L. 121-1 du même code : " Exception faite des cas où il est statué sur une demande, les décisions individuelles qui doivent être motivées en application de l'article L. 211-2, ainsi que les décisions qui, bien que non mentionnées à cet article, sont prises en considération de la personne, sont soumises au respect d'une procédure contradictoire préalable. ".

3. En premier lieu, il ressort des pièces du dossier que la révision par la commission des marchés de la commune d'Argenteuil de la liste des titulaires de cartes de commerçants " volants ", en conséquence de laquelle M. D... s'est vu retirer sa " carte de volant ", a été faite " en fonction de l'assiduité, de l'article, du respect du règlement ". Ainsi la décision en litige repose sur des considérations liées à l'intérêt du domaine public communal. Une telle décision ne constitue donc pas une mesure de police. Il ne ressort pas davantage des pièces du dossier qu'en prenant cette mesure la commune ait entendu sanctionner le comportement de M. D.... Ce dernier étant titulaire d'une autorisation d'occupation du domaine public, la décision litigieuse ne constitue pas un refus d'autorisation mais une abrogation de cette autorisation. Une telle abrogation n'est cependant pas au nombre des décisions devant être motivée par application de l'article L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration dès lors qu'une autorisation temporaire d'occupation du domaine public n'est pas créatrice de droits au profit de son bénéficiaire. Le requérant n'est donc pas fondé à soutenir que la décision litigieuse serait entachée d'une insuffisance de motivation, en méconnaissance des dispositions précitées dudit code.

4. En deuxième lieu, dès lors qu'une telle mesure n'est pas au nombre des décisions devant être motivées en application de l'article L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration, qu'elle n'a pas été prise en considération de la personne de M. D... et qu'il ne résulte d'aucun principe général du droit que l'autorité gestionnaire du domaine public doive respecter une procédure contradictoire lorsqu'elle prend dans l'intérêt de ce domaine une mesure qui, comme en l'espèce, ne revêt pas le caractère d'une sanction, le moyen tiré de l'absence de procédure contradictoire ne peut qu'être écarté.

5. En dernier lieu, M. D... ne peut utilement critiquer les conditions de notification de la décision litigieuse dès lors que celles-ci sont sans incidence sur la légalité de cette décision administrative. Il en va de même des conditions dans lesquelles les " placiers " du marché Héloïse lui ont confisqué sa " carte de volant ".

En ce qui concerne la légalité interne de la décision attaquée :

6. Aux termes de l'article L. 2122-1 du code général de la propriété des personnes publiques, dans sa rédaction alors en vigueur : " Nul ne peut, sans disposer d'un titre l'y habilitant, occuper une dépendance du domaine public d'une personne publique mentionnée à l'article L. 1 ou l'utiliser dans des limites dépassant le droit d'usage qui appartient à tous. " Aux termes de l'article L. 2122-2 du même code : " L'occupation ou l'utilisation du domaine public ne peut être que temporaire. ". Aux termes du second alinéa de l'article L. 2224-18 du code général des collectivités territoriales : " Le régime des droits de place et de stationnement sur les halles et les marchés est défini conformément aux dispositions d'un cahier des charges ou d'un règlement établi par l'autorité municipale après consultation des organisations professionnelles intéressées. "

7. L'article 4-6 du règlement des marchés de la commune d'Argenteuil prévoit que " Les commerçants volants souhaitant exercer leur activité sur le marché du boulevard Héloïse devront être titulaires d'une carte de commerçant volant attribuée par Monsieur E..., après avis de la commission pour ce marché (...) Les cartes de volants sont attribués par M. E... et auront une durée de validité proposée par la commission, sous réserve que la validité de la carte de commerçant non sédentaire ou du livret de circulation couvre cette période. La liste des cartes de volants sera remise à jour chaque année en commission pour tenir compte de l'assiduité ou des éventuelles infractions au règlement (...) ".

8. Il ressort des pièces du dossier, ainsi qu'il a été dit au point 3, que la révision par la commission des marchés de la commune d'Argenteuil de la liste des titulaires de cartes de volants a été faite " en fonction de l'assiduité, de l'article, du respect du règlement " et ceci afin d'améliorer la gestion dudit domaine public. Contrairement ce que soutient le requérant, de telles considérations relèvent de l'intérêt général et justifient légalement la décision attaquée. M. D... n'apporte par ailleurs aucun élément permettant de contester valablement le bien-fondé du choix opéré par la commission parmi les commerçants titulaires d'une " carte de volant ", pas plus du reste que sur le caractère disproportionné de la mesure. Dans ces conditions, le requérant n'est pas fondé à soutenir que la décision litigieuse est entachée d'illégalité.

9. Il résulte de tout ce qui précède que M. D... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision de la commune d'Argenteuil ainsi que, par voie de conséquence, les conclusions de sa demande tendant à la réparation du préjudice économique qu'il estime avoir subi.

Sur les conclusions à fin d'injonction :

10. Le présent arrêt, qui rejette les conclusions de M. D..., n'implique aucune mesure particulière d'exécution. Par suite, les conclusions à fin d'injonction présentées par l'intéressé ne peuvent qu'être rejetées.

Sur l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

11. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de M. D... le versement de la somme de 1 000 euros au titre des frais exposés par la commune d'Argenteuil et non compris dans les dépens. En revanche, ces dispositions font obstacle à ce que la somme que demande M. D... soit mise à la charge de la commune d'Argenteuil, qui n'est pas la partie perdante.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. D... est rejetée.

Article 2 : M. D... versera la somme de 1 000 euros à la commune d'Argenteuil au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le surplus des conclusions présentées par la commune d'Argenteuil au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative est rejeté.

N° 18VE01932 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 18VE01932
Date de la décision : 03/11/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

24-01 Domaine. Domaine public.


Composition du Tribunal
Président : M. BROTONS
Rapporteur ?: M. Bruno COUDERT
Rapporteur public ?: Mme GROSSHOLZ
Avocat(s) : BLUTEAU

Origine de la décision
Date de l'import : 21/11/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2020-11-03;18ve01932 ?
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