Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. D... A... D... a demandé au tribunal administratif de Versailles d'annuler l'arrêté du 7 août 2019 par lequel le préfet des Yvelines lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français, dans un délai de trente jours, et a fixé le pays de destination.
Par une ordonnance n° 1906567 du 10 septembre 2019, le président de la 8ème chambre du tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête, des pièces complémentaires et un mémoire, enregistrés les 5 octobre 2019, 8 octobre 2019, 14 octobre 2019, 27 février 2020 et 10 septembre 2020, M. A... D..., représenté par Me G..., avocat, demande à la Cour dans le dernier état de ses écritures :
1°) d'annuler cette ordonnance ;
2°) d'annuler cet arrêté ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1500 euros à verser à son avocat au titre des dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Il soutient que la décision attaquée :
- est entachée d'un défaut d'examen particulier et méconnait son droit à être entendu ;
- est entachée d'une insuffisance de motivation ;
- méconnaît les stipulations des articles 3 et 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et les dispositions des articles L. 511-1-I 6°, L. 743-1, L.743-2 et L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
- il a obtenu le statut de réfugié par une décision de la Cour nationale du droit d'asile du 29 mai 2020.
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Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. B... ;
- les conclusions de M. E....
Considérant ce qui suit :
1. M. D... A... D..., ressortissant soudanais, né le 11 janvier 1996, qui déclare être entré en France le 18 août 2017, a sollicité le 3 octobre 2017 l'obtention d'une carte de résident sur le fondement des dispositions énoncées par les articles L. 313-25 ou L. 314-11-8° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par un arrêté du 7 août 2019, le préfet des Yvelines a rejeté sa demande, lui a fait obligation de quitter le territoire, dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination. M. A... D... fait appel de l'ordonnance du 10 septembre 2019 par lequel le président de la 8ème chambre du tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté en application de l'alinéa 7 de l'article R 222-1 du code de justice administrative.
2. Aux termes de l'article L 743-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Le demandeur d'asile dont l'examen de la demande relève de la compétence de la France et qui a introduit sa demande auprès de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides bénéficie du droit de se maintenir sur le territoire français jusqu'à la notification de la décision de l'office ou, si un recours a été formé, dans le délai prévu à l'article L. 731-2 contre une décision de rejet de l'office, soit jusqu'à la date de la lecture en audience publique de la décision de la Cour nationale du droit d'asile, soit, s'il est statué par ordonnance, jusqu'à la date de la notification de celle-ci... "
2. L'article L. 731-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dispose que : " La Cour nationale du droit d'asile statue sur les recours formés contre les décisions de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides prises en application des articles L. 711-1 à L. 711-4, L. 712-1 à L. 712-3, L. 713-1 à L. 713-4, L. 723-1 à L. 723-8, L. 723-11, L. 723-15 et L. 723-16. A peine d'irrecevabilité, ces recours doivent être exercés dans le délai d'un mois à compter de la notification de la décision de l'office (...) ".
3. Aux termes de l'article 9-4 de la loi du 10 juillet 1991, applicable aux demandes introduites devant la Cour nationale du droit d'asile avant le 1er janvier 2019 : " Devant la Cour nationale du droit d'asile, le bénéfice de l'aide juridictionnelle est de plein droit, sauf si le recours est manifestement irrecevable. Si l'aide juridictionnelle est sollicitée en vue d'introduire le recours devant la cour, elle doit être demandée dans le délai de quinze jours à compter de la notification de la décision de l'office. Dans le cas contraire, l'aide juridictionnelle peut être demandée lors de l'introduction du recours, exercé dans le délai. Ces délais sont notifiés avec la décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides susceptible de recours ". L'article 39 du décret du 19 décembre 1991, applicable devant la Cour nationale du droit d'asile, dispose que lorsque l'aide juridictionnelle a été sollicitée avant l'expiration du délai imparti pour le dépôt du pourvoi ou des mémoires, " un nouveau délai court à compter du jour de la réception par l'intéressé de la notification de la décision du bureau d'aide juridictionnelle ou, si elle est plus tardive, de la date à laquelle un auxiliaire de justice a été désigné ". Enfin, selon les dispositions de l'article R. 733-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Le président de la cour et les présidents qu'il désigne à cet effet peuvent, par ordonnance motivée : (...) 4° Rejeter les recours entachés d'une irrecevabilité manifeste non susceptible d'être couverte en cours d'instance ou qui n'ont pas été régularisés à l'expiration du délai imparti par une demande adressée en ce sens en application de l'article R. 733-9 ".
4. Il résulte de ces dispositions, applicables en l'espèce, que le président de la Cour nationale du droit d'asile ou les présidents qu'il a désignés peuvent rejeter par une ordonnance motivée les recours manifestement irrecevables parce que tardifs, notamment lorsque le recours du requérant ayant obtenu l'aide juridictionnelle a été enregistré après l'expiration du nouveau délai ouvert, dans les conditions prévues par l'article 39 du décret du 19 décembre 1991, à la suite de l'interruption du délai de recours par l'effet de la demande d'aide juridictionnelle. Toutefois, afin d'assurer au requérant le bénéfice effectif du droit qu'il tient de la loi du 10 juillet 1991, dans le cas où, conformément à l'article 84 du décret du 19 décembre 1991, un auxiliaire de justice qui prêtait son concours au bénéficiaire de l'aide juridictionnelle a été déchargé de sa mission, et qu'un remplaçant a été désigné, le recours introduit dans le mois qui suit la date de cette désignation ne peut être regardé comme tardif.
6. Il ressort des pièces du dossier de la procédure devant la Cour nationale du droit d'asile, figurant au dossier, que la décision de rejet par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides de la demande d'asile introduite par M. D..., du 14 mars 2019, lui a été notifiée le même jour. Ce dernier a formé une demande d'aide juridictionnelle dans le délai de 15 jours prescrit par l'article 9-4 de la loi du 10 juillet 1991 le 29 mars 2019. La décision du bureau d'aide juridictionnelle de la CNDA du 12 avril 2019 l'admettant à l'aide juridictionnelle, lui a été notifiée le 24 avril suivant. Maître F... a été désigné comme avocat de M. D... en lieu et place de Maître C... par le bureau d'aide juridictionnelle de la CNDA, en remplacement de celle-ci, déchargée de sa mission du fait de sa carence, le 13 août 2019, cette désignation ayant eu pour effet de décaler le point de départ du délai de recours contentieux. Ce recours était donc recevable lorsqu'il a été introduit auprès de la CNDA le 29 août 2019, ce qu'a d'ailleurs implicitement jugé cette Cour, par sa décision intervenue le 29 mai 2020, annulant celle de l'OFPRA et attribuant le statut de réfugié à M. D....
7. Il résulte de tout ce qui précède qu'en raison de l'existence de cette procédure alors pendante devant la CNDA, M. D... avait le droit de se maintenir sur le territoire français à la date de l'arrêté contesté du 7 août 2019 par lequel le préfet des Yvelines lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français, dans un délai de trente jours, et a fixé le pays de destination. Cette décision est donc intervenue en méconnaissance des dispositions de l'article L.743-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et doit être annulée.
8. Il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin de statuer sur la régularité, que M. A... D... est fondé à soutenir que c'est à tort que, par l'ordonnance attaquée, le président de la 8ème chambre du tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande.
9. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros à verser à Me G... au titre des frais liés au litige en application des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique, sous réserve que celle-ci renonce au versement de la part contributive de l'Etat au titre de l'aide juridictionnelle.
DÉCIDE :
Article 1er : L'ordonnance du président de la 8ème chambre du tribunal administratif de Versailles n° 1906567 du 10 septembre 2019 et l'arrêté du 7 août 2019 par lequel le préfet des Yvelines a refusé la délivrance d'un titre de séjour à M. D..., l'a obligé à quitter le territoire français, dans un délai de trente jours, et a fixé le pays de destination sont annulées.
Article 2 : L'Etat versera à Me G... la somme de 1 500 euros au titre des frais liés au litige en application des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique sous réserve que celle-ci renonce au versement de la part contributive de l'Etat au titre de l'aide juridictionnelle.
N° 19VE03357 4