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09/07/2020 | FRANCE | N°19VE02395

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 1ère chambre, 09 juillet 2020, 19VE02395


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La SARL CTA AUTOVISION a demandé au Tribunal administratif de Cergy-Pontoise de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des rappels de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été réclamés pour la période du 1er janvier 2012 au 31 janvier 2015, et des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des exercices clos en 2012 et 2013.

Par un jugement n° 1610106 du 24 mai 2019, le Tribunal administratif de

Cergy-Pontoise a rejeté sa

demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 2 juillet 2019, la SA...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La SARL CTA AUTOVISION a demandé au Tribunal administratif de Cergy-Pontoise de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des rappels de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été réclamés pour la période du 1er janvier 2012 au 31 janvier 2015, et des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des exercices clos en 2012 et 2013.

Par un jugement n° 1610106 du 24 mai 2019, le Tribunal administratif de

Cergy-Pontoise a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 2 juillet 2019, la SARL CTA AUTOVISION, représentée par Me C..., demande à la Cour :

1° d'annuler ce jugement ;

2° de prononcer la décharge demandée ;

3° de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros, sur le fondement de l'article L 761-1 du Code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le jugement est entaché d'un défaut de réponse au moyen tiré du caractère non permissif du logiciel de comptabilité utilisée ;

- l'administration a rejeté à tort sa comptabilité, dès lors qu'il n'est pas démontré qu'elle utiliserait un logiciel permissif ;

- l'administration, qui supporte la charge de la preuve en raison du caractère contradictoire de la procédure, n'établit pas la fraude alléguée concernant les factures émises au nom de la société Iordanescu ;

- les écritures retraçant les virements à destination de M. A... E... correspondent à des frais de publicité pour la pose de panneaux publicitaires dans le jardin de son pavillon ;

- la proposition de rectification ne porte pas le visa et la signature d'un agent de catégorie A détenant au moins le grade d'inspecteur départemental, en méconnaissance de l'article R 80 E-1 du livre des procédures fiscales et du BOI 13L-3-07 n° 76 du 30 mai 2007.

......................................................................................................

Vu les pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- les articles 7 et 12 de l'ordonnance n° 2020-305 portant adaptation des règles applicables devant les juridictions de l'ordre administratif modifiée par les ordonnances n° 2020-405 du 8 avril 2020, n° 2020-427 du 15 avril 2020 et n° 2020-558 du 13 mai 2020 ;

- le code de justice administrative.

En application de l'article 7 de l'ordonnance n°2020-305 du 25 mars 2020, les parties ont été régulièrement informées de la tenue d'une audience partiellement dématérialisée.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. B... ;

- et les conclusions de Mme Méry, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. La SARL CTA AUTOVISION, qui exerce une activité de contrôle technique automobile, relève appel du jugement n° 1610106 du 24 mai 2019, par lequel le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande tendant à la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée pour la période du 1er janvier 2012 au 31 janvier 2015, des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés au titre des exercices 2012 et 2013, et des pénalités dont elles ont été assorties.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. La SARL CTA AUTOVISION soutient que le rejet de sa comptabilité et les rectifications litigieuses sont fondées sur le caractère " permissif " du logiciel de gestion PHILAUTO grâce auquel il aurait été possible de modifier après coup les enregistrements de recettes en fin de journée. Elle estime qu'en ne tranchant pas la question de la faculté de corriger les enregistrements de recettes grâce à ce logiciel, les premiers juges ont entaché leur décision d'un défaut de motivation et de réponse à moyen. Toutefois, les premiers juges ont estimé explicitement que le vérificateur ne s'est pas fondé sur le caractère " permissif " du logiciel, mais sur les graves irrégularités dont la comptabilité était entachée, notamment l'enregistrement de produits au nom d'une société cliente qui avait été radiée du registre du commerce et des sociétés. Dans ces conditions, ils n'étaient pas tenus de se prononcer sur la fiabilité de ce logiciel de gestion. Le moyen tiré du défaut de motivation du jugement ne peut qu'être écarté.

Sur le bien-fondé des impositions :

En ce qui concerne la charge de la preuve :

3. En vertu des dispositions de l'article L. 192 du livre des procédures fiscales, la charge de la preuve incombe au contribuable lorsque la comptabilité comporte de graves irrégularités et que l'imposition a été établie conformément à l'avis de la commission des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires. La charge de la preuve des graves irrégularités invoquées par l'administration incombe, en tout état de cause, à cette dernière lorsque le litige ou la rectification est soumis au juge.

4. Il est constant que la SARL CTA AUTOVISION a procédé à l'enregistrement de produits au nom de la société Iordanescu, alors qu'en réalité ces prestations ont été accomplies sur des véhicules dont étaient propriétaires des clients non professionnels dont certains, identifiés dans l'exercice du droit de communication et interrogés, ont déclaré ne pas connaître cette dernière société. L'inscription d'un produit au nom d'un client autre que celui à qui a été fournie la prestation révèle une grave irrégularité. En outre, les impositions résultant de la reconstitution de recettes ayant été établies conformément à l'avis en date du 8 mars 2016 de la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires, la

SARL CTA AUTOVISION supporte, contrairement à ce qu'elle soutient, la charge d'apporter la preuve de leur caractère exagéré.

En ce qui concerne la reconstitution des bases imposables :

5. Il résulte de l'instruction que la SARL CTA AUTOVISION a facturé 11,69 % des contrôles effectués au cours en 2012 au taux de 10 euros, et 2,2 % de ces contrôles à partir de novembre 2012, 19,33 % des contrôles en 2013 et 22,68 % des contrôles en 2014 au taux de 30 euros. Il apparaît que tous les contrôles enregistrés au nom de la société

IORDANESCU AUTOS ont été facturés jusqu'en août 2014 à 30 euros, tarif qui ne résulte pas d'un rabais et dont bénéficie exclusivement cette société, qui avait pourtant cessé d'exister, et qu'à compter de septembre 2014, 1 533 contrôles sur 6 727 ont été réglés à ce tarifs, tous clients confondus. Le niveau de ces tarifs est inférieur à celui pratiqué par les entreprises de contrôle technique, et son exactitude n'a pu être vérifiée en raison du règlement fréquent en espèces. Ces tarifs ont permis la dissimulation du montant réel des transactions. En raison de leur fréquence, leur enregistrement ne pouvait être considéré comme de simples erreurs de saisie. Si la société CTA AUTOVISION prétend expliquer ces enregistrements comptables par la réalisation de certaines prestations, en particulier de contre-visites, servies à tarif préférentiel, cette allégation n'est nullement justifiée, alors que la charge du caractère exagéré des impositions pèse sur la requérante. Le service vérificateur a, au contraire, constaté que l'examen des données comptables de la société n'a permis de déceler aucune écriture relative à des prestations de contre-visite, justifiant l'application d'un tarif préférentiel. Les fichiers comptables ne contiennent que les mentions " Avoirs ", " Réglementaires ", " Volontaires " et " Autres facturations ". Le caractère réitéré de ces enregistrements erronés ne permet pas d'y voir de simples erreurs de saisies. En présence de ces données comptables et des graves irrégularités exposées au paragraphe précédent, l'administration était fondée à rejeter la comptabilité comme non probante. Pour reconstituer les recettes, elle s'est fondée sur la moyenne des tarifs habituellement pratiqués par la société CTA AUTOVISION, à savoir en moyenne 60 euros et, partant, sur des rehaussements de tarifs de 50 euros et de 30 euros. Sur la base du nombre des contrôles effectués à prix minorés et en tenant compte des avoirs, le vérificateur est parvenu à une minoration HT de 33 512 euros en 2012, de 24 431 euros en 2013 et de 37 717 euros en 2014. Cette reconstitution n'est ni sommaire ni radicalement viciée. En se bornant à alléguer que les tarifs de 10 et 30 euros étaient destinés à fidéliser la clientèle, et étaient pratiqués par la concurrence, la SARL CTA AUTOVISION n'établit pas avoir effectivement pratiqués de tels tarifs, faute de trace de ces règlements.

En ce qui concerne rejet des dépenses de publicité :

6. Aux termes du 1 de l'article 39 du code général des impôts, dans sa version applicable au litige et qui est applicable à l'impôt sur les sociétés en vertu de l'article 209 du même code : " Le bénéfice net est établi sous déduction de toutes charges, celles-ci comprenant (...) notamment : / 1° Les frais généraux de toute nature (...) ". En outre, aux termes de l'article 54 du même code : " les contribuables mentionnés à l'article 53 A sont tenus de représenter à toute réquisition de l'administration tous documents comptables, inventaires, copies de lettres, pièces de recettes et de dépenses de nature à justifier l'exactitude des résultats indiqués dans leur déclaration (...) ".

7. Alors que la SARL CTA AUTOVISION a d'abord soutenu que des dépenses d'un montant de 750 euros HT par mois avaient été faites en faveur des sociétés TIPS et OLGA PUB, la vérification de comptabilité a permis de constater que le bénéficiaire réel de ces virements était M. A... E.... Pour justifier ces virements au père de son gérant, la société requérante avance qu'ils correspondaient au règlement des loyers pour la pose de panneaux publicitaires dans le jardin du pavillon du bénéficiaire. Toutefois, elle n'apporte aucun commencement de preuve de la réalité et du montant de cette charge. Le moyen tiré du caractère injustifié du rejet de la déduction de ces dépenses ne peut qu'être écarté.

Sur les pénalités pour manoeuvres frauduleuses :

8. En premier lieu, en vertu des dispositions de l'article L 80 D du livre des procédures fiscales, les sanctions fiscales ne peuvent être prononcées avant l'expiration d'un délai de trente jours à compter de la notification du document par lequel l'administration a fait connaître au contribuable ou redevable concerné la sanction qu'elle se propose d'appliquer, les motifs de celle-ci et la possibilité dont dispose l'intéressé de présenter dans ce délai ses observations. Et en vertu des dispositions de l'article L. 80 E du même livre, la décision d'appliquer les majorations prévues aux articles 1729, 1732 et 1735 ter du code général des impôts est prise par un agent de catégorie A détenant au moins un grade fixé par décret, qui vise à cet effet le document comportant la motivation des pénalités. Si la proposition de rectification du 6 août 2015 qui motive les pénalités, ne mentionne pas le nom ni le grade de celui qui l'a visée, elle porte une signature. Il n'est pas sérieusement contesté que cette signature est identique à celle apposée sur la réponse aux observations de la contribuable du 2 novembre 2015, laquelle porte le visa et le nom de l'inspecteur principal, M. D... F... et renvoie pour la motivation des pénalités à la proposition de rectification. Ainsi, l'erreur non substantielle du défaut d'indication du nom de cet inspecteur sur ce document a été réparée dans un document ultérieur. De plus, la SARL CTA AUTOVISION se prévaut, sur le fondement de l'article

L. 80 A du livre des procédures fiscales, du BOI 13 L-3-07 n° 76 du 30 mai 2007 selon lequel l'administration doit apposer le visa de l'agent ayant le grade d'inspecteur départemental non seulement sur le document initial de motivation des pénalités, mais également sur tout document qui avant leur mise en recouvrement et pour quelque motif que ce soit, modifie la base légale, la qualification ou les motifs des pénalités. Toutefois, cette interprétation de la loi fiscale ne s'inscrit pas en faux contre l'absence de mention du nom et du grade de l'agent de catégorie A dont la signature figure sur le document motivant les sanctions. Ainsi le moyen tiré de l'absence de visa par un inspecteur principal du document motivant les pénalités litigieuses doit être écarté tant sur le terrain de la loi fiscale que de son interprétation.

9. En second lieu, il y a lieu d'écarter, par adoption des motifs des premiers juges, qui ne sont pas critiqués en appel par une argumentation renouvelée, le moyen tiré de ce que l'administration ne rapporte pas la preuve des manoeuvres frauduleuses de la

SARL CTA AUTOVISION.

10. Il résulte de tout ce qui précède que la SARL CTA AUTOVISION n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande tendant à la décharge, en droits et pénalités, des rappels de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été réclamés pour la période du 1er janvier 2012 au

31 janvier 2015, et des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2012 et 2013. Par voie de conséquence, doivent être rejetées ses conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de la SARL CTA AUTOVISION est rejetée.

2

N°19VE02395


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 19VE02395
Date de la décision : 09/07/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

Contributions et taxes - Généralités - Amendes - pénalités - majorations.

Contributions et taxes - Impôts sur les revenus et bénéfices - Règles générales - Impôt sur les bénéfices des sociétés et autres personnes morales - Détermination du bénéfice imposable.


Composition du Tribunal
Président : M. BEAUJARD
Rapporteur ?: M. Jean-Eric SOYEZ
Rapporteur public ?: Mme MERY
Avocat(s) : CABINET ROUZAUD

Origine de la décision
Date de l'import : 28/07/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2020-07-09;19ve02395 ?
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