Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. B... D... a demandé au Tribunal administratif de Versailles d'annuler l'arrêté du 13 août 2018 par lequel le préfet de l'Essonne lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination.
Par un jugement n° 1806508 du 31 janvier 2019, le Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête introductive d'instance et un mémoire complémentaire, enregistrés le 14 février 2019 et le 6 mai 2020, M. B... D..., représenté par Me C..., demande à la Cour :
1° d'annuler ce jugement ;
2° d'annuler l'arrêté du 13 août 2018 susmentionné
3° d'enjoindre au préfet de l'Essonne de lui délivrer une carte de séjour temporaire dans le délai de 15 jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;
4° de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros à lui verser sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que l'arrêté en litige :
- est entaché d'un défaut d'examen de sa situation individuelle ; le préfet ne l'a pas invité à exposer par écrit sa situation ;
- est entaché d'une erreur de droit dès lors que le préfet s'est cru à tort en situation de compétence liée ;
- méconnaît les dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dès lors que dès lors que le défaut de prise en charge médicale de ses pathologies est de nature à entrainer des conséquences d'une exceptionnelle gravité et qu'il ne pourrait pas bénéficier d'un traitement adapté au Congo en raison de l'insuffisance du système de soins ;
- est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation de sa situation et méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- méconnaît les stipulations de l'article 3 de la même convention.
Vu le jugement attaqué.
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Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- l'arrêté du 5 janvier 2017 fixant les orientations générales pour l'exercice par les médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, de leurs missions, prévues à l'article L. 313-11 (11°) du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- les articles 7 et 12 de l'ordonnance n° 2020-305 portant adaptation des règles applicables devant les juridictions de l'ordre administratif modifiée par les ordonnances n° 2020 405 du 8 avril 2020, n° 2020-427 du 15 avril 2020 et n° 2020-558 du 13 mai 2020 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
En application de l'article 7 de l'ordonnance n°2020-305 du 25 mars 2020, les parties ont été régulièrement informées de la tenue d'une audience partiellement dématérialisée.
Le rapport de Mme A... a été entendu via un moyen de télécommunication audiovisuelle, au cours de l'audience publique partiellement dématérialisée.
Considérant ce qui suit :
1. M. D..., ressortissant congolais né le 8 août 1968 à Matadi (République démocratique du Congo), et entré en France le 3 mai 2015 selon ses déclarations, a sollicité la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement des dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par un arrêté en date du 13 août 2018, le préfet de l'Essonne a rejeté sa demande, l'a obligé à quitter le territoire français, dans un délai de trente jours, et a fixé le pays de destination de cette mesure d'éloignement. Par la présente requête, M. D... relève appel du jugement du 31 janvier 2019 par lequel le Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande.
2. En premier lieu, il ressort des pièces du dossier, et notamment des termes de l'arrêté litigieux, qui mentionnent de manière précise et circonstanciée la situation personnelle de M. D... notamment sur le plan médical, que le préfet de l'Essonne, qui n'avait pas à inviter l'intéressé à exposer par écrit sa situation en sus de la demande qui lui a été présentée, a procédé à un examen suffisant de la situation personnelle de
M. D... lors de l'examen de sa demande de titre de séjour présentée sur le fondement du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
3. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 11° A l'étranger résidant habituellement en France, si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié. La condition prévue à l'article L. 313-2 n'est pas exigée. La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative après avis d'un collège de médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, dans des conditions définies par décret en Conseil d'Etat. (...) ". Aux termes de l'article 4 de l'arrêté du 5 janvier 2017 susvisé : " Les conséquences d'une exceptionnelle gravité résultant d'un défaut de prise en charge médicale, mentionnées au 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, sont appréciées sur la base des trois critères suivants : degré de gravité (mise en cause du pronostic vital de l'intéressé ou détérioration d'une de ses fonctions importantes), probabilité et délai présumé de survenance de ces conséquences. / Cette condition des conséquences d'une exceptionnelle gravité résultant d'un défaut de prise en charge doit être regardée comme remplie chaque fois que l'état de santé de l'étranger concerné présente, en l'absence de la prise en charge médicale que son état de santé requiert, une probabilité élevée à un horizon temporel qui ne saurait être trop éloigné de mise en jeu du pronostic vital, d'une atteinte à son intégrité physique ou d'une altération significative d'une fonction importante. / Lorsque les conséquences d'une exceptionnelle gravité ne sont susceptibles de ne survenir qu'à moyen terme avec une probabilité élevée (pathologies chroniques évolutives), l'exceptionnelle gravité est appréciée en examinant les conséquences sur l'état de santé de l'intéressé de l'interruption du traitement dont il bénéficie actuellement en France (rupture de la continuité des soins). Cette appréciation est effectuée en tenant compte des soins dont la personne peut bénéficier dans son pays d'origine. "
4. Il appartient à l'autorité administrative, lorsqu'elle envisage de refuser la délivrance d'un titre de séjour à un étranger qui en fait la demande sur le fondement des dispositions législatives précitées, de vérifier, au vu de l'avis émis par le collège de médecins mentionné au même point, que cette décision ne peut avoir de conséquences d'une exceptionnelle gravité sur l'état de santé de l'intéressé et, en particulier, d'apprécier, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, la nature et la gravité des risques qu'entraînerait un défaut de prise en charge médicale. Lorsque le défaut de prise en charge risque d'avoir des conséquences d'une exceptionnelle gravité sur la santé du demandeur, l'autorité administrative ne peut légalement refuser le titre de séjour sollicité que s'il existe des possibilités de traitement approprié de l'affection en cause dans le pays dont il a la nationalité.
5. D'une part, que si la décision attaquée reprend les termes de l'avis émis le 16 février 2018 par le collège des médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, il ressort également des termes mêmes de cette décision que le préfet de l'Essonne a estimé qu'à la lumière de toutes les informations dont il disposait et à la date de la décision, aucun élément probant ne permettait de délivrer au demandeur un titre de séjour pour soins sur le fondement des dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Ainsi, le préfet de l'Essonne ne peut être regardé comme s'étant à tort considéré en situation de compétence liée au regard des conclusions de l'avis du collège des médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration. Le moyen tiré de l'erreur de droit ne peut qu'être écarté.
6. D'autre part, il ressort des pièces du dossier que par avis émis le 16 février 2018, le collège des médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, a considéré que l'état de santé de M. D... nécessitait une prise en charge dont le défaut ne pourrait toutefois pas entraîner pour l'intéressé de conséquences d'une exceptionnelle gravité et que celui-ci pouvait bénéficier du traitement approprié dans son pays d'origine et que son état de santé lui permettait de voyager sans risque. Les deux certificats médicaux produits par M. D..., datés des 23 août 2018 et 10 septembre 2018, établis par son médecin traitant, ne sont pas suffisamment circonstanciés, pour établir effectivement qu'une telle absence de prise en charge médicale serait susceptible d'entraîner pour l'intéressé des conséquences d'une exceptionnelle gravité et ne comportent, par ailleurs, aucun élément sur l'absence d'accès aux soins requis par son état de santé dans son pays d'origine. Un troisième certificat daté du 4 septembre 2018 établi par un médecin ophtalmologue établi à Maladi en République démocratique du Congo dont l'intéressé est originaire, fait état de l'état de santé de
M. D... qu'il a constaté en 2012, et ne peut dès lors se prononcer valablement sur la pathologie de l'intéressé et sur les soins nécessaires. Enfin, M. D... produit divers documents médicaux épars qui ne permettent pas d'établir qu'une absence de prise en charge médicale serait susceptible d'entraîner pour l'intéressé des conséquences d'une exceptionnelle gravité ainsi que des articles de presse dont il ne ressort pas qu'aucun traitement approprié à son état de santé ne serait disponible dans son pays d'origine. Par suite, il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet de l'Essonne, se prononçant au vu de l'avis susmentionné, et qui, au demeurant, n'avait pas à se prononcer sur la disponibilité d'un traitement approprié au Congo, aurait méconnu les dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en refusant à M. D... de lui délivrer un titre de séjour en qualité d'étranger malade.
7. En troisième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. (...) ".
8. Si M. D... soutient qu'il vit maritalement avec une compatriote titulaire d'une carte de résident valable jusqu'en 2026 et qu'il a conclu avec elle un pacte civil de solidarité depuis le 6 octobre 2018, qu'il a exercé un certain nombre d'activité sur le territoire national tant que son état de santé le permettait, il ressort des pièces du dossier que
M. D... est entré très récemment sur le territoire français, au plus tôt en mai 2015, et la communauté de vie avec sa partenaire avec qui il a conclu un PACS postérieurement à l'arrêté en litige, est également très récente, datant de quelques mois. En outre, il ne conteste pas les énonciations de l'arrêté attaqué selon lesquelles il n'est pas dépourvu d'attaches familiales dans son pays d'origine, la République démocratique du Congo, où résident sa fratrie ainsi que trois enfants mineurs et où il a vécu au moins jusqu'à l'âge de 47 ans. Dans ces conditions, M. D... n'est pas fondé à soutenir que l'arrêté attaqué aurait porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels il a été pris. Le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations précitées de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit donc être écarté. Pour les mêmes motifs, le moyen tiré de l'erreur manifeste d'appréciation sur les conséquences de la décision sur sa situation personnelle ne peut qu'être écarté.
9. En dernier lieu, aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants ".
10. M. D..., qui se prévaut de son état de santé pour soutenir que son renvoi dans son pays d'origine méconnaîtrait ces stipulations, doit être regardé comme invoquant ce moyen contre la décision fixant le pays de destination. Pour les mêmes motifs que ceux précédemment énoncés au point 3, et alors qu'il n'est pas établi au surplus que M. D... ne pourrait pas bénéficier en République démocratique du Congo d'un traitement approprié, le moyen doit être écarté.
11. Il résulte de ce qui précède que M. D... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement du 31 janvier 2019, le Tribunal administratif de Versailles a rejeté la demande dont il était saisi. Il y a lieu, par voie de conséquence, de rejeter les conclusions aux fins d'injonction et tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
D E C I D E :
Article 1er : La requête de M. D... est rejetée.
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N° 19VE00482