Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Par une première demande, M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Montreuil d'annuler la décision par laquelle le préfet de la Seine-Saint-Denis a implicitement rejeté sa demande de titre de séjour.
Par une seconde demande, M. A... a demandé au tribunal administratif de Montreuil d'annuler l'arrêté du 6 juillet 2018 par lequel le préfet de la Seine-Saint-Denis a rejeté sa demande de titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français, dans un délai de trente jours, et a fixé le pays de destination.
Par un jugement n° 1803636, 1807405 du 14 février 2019, le tribunal administratif de Montreuil a prononcé un non-lieu à statuer sur les conclusions tendant à l'annulation de la décision implicite de rejet de sa demande de titre de séjour et rejeté le surplus des conclusions de ses demandes qu'il avait jointes.
Procédure devant la Cour :
Par une requête et des mémoires enregistrés les 14 et 29 mars 2019, le 2 avril 2019, le 1er mai 2019 et le 2 septembre 2019, M. A..., représenté par Me Crusoé, avocat, demande à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) d'annuler l'arrêté du préfet de la Seine-Saint-Denis du 6 juillet 2018 ;
3°) d'enjoindre au préfet de la Seine-Saint-Denis de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " salarié ", dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 50 euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge de l'État la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- les premiers juges ont omis de viser et de répondre au moyen, qui n'était pas inopérant, tiré de la méconnaissance, par le refus de titre de séjour en litige, de l'article L. 114-5 du code des relations entre le public et l'administration ;
- l'arrêté attaqué est insuffisamment motivé ;
- le préfet n'a pas procédé à un examen particulier de sa situation administrative ;
- le refus de titre de séjour est entaché d'une première erreur de fait, en ce qu'il ne retient pas qu'il travaille au sein de la même entreprise depuis le mois de juin 2014 ;
- il est entaché d'une deuxième erreur de fait, dès lors qu'il établit la réalité de sa présence en France au cours des années 2015 et 2016 ;
- il est entaché d'une troisième erreur de fait, dès lors qu'il avait produit une demande d'autorisation de travail établie par le restaurant qui l'emploie, à l'appui de sa demande de titre présentée aux services préfectoraux ;
- à supposer qu'un tel document ait fait défaut, cette décision a été prise en méconnaissance de l'article L. 114-5 du code des relations entre le public et l'administration, dès lors que le préfet de la Seine-Saint-Denis était tenu de l'inviter à compléter sa demande avant de la rejeter ;
- le refus de titre de séjour est entaché d'une erreur de droit dans l'application des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- cette décision est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation de son insertion sociale et professionnelle dans la société française ;
- il remplit les conditions de l'admission exceptionnelle au séjour fixées par la circulaire du ministre de l'intérieur du 28 novembre 2012 ;
- l'arrêté attaqué est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle.
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Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative et l'ordonnance n° 2020-305 du 25 mars 2020.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de M. Illouz, conseiller, a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. A..., ressortissant malien, né le 31 décembre 1985, est entré en France, selon ses déclarations, en 2012. A la suite du rejet de sa demande de protection internationale par l'Office français de protection des réfugiés et des apatrides, puis par la Cour nationale du droit d'asile, il a présenté une demande d'admission exceptionnelle au séjour auprès des services du préfet de la Seine-Saint-Denis le 4 octobre 2017. Par une première demande, M. A... a sollicité du tribunal administratif de Montreuil l'annulation de la décision implicite née du silence gardé par le préfet sur cette demande pendant plus de quatre mois. Par un arrêté du 6 juillet 2018, le préfet de la Seine-Saint-Denis a expressément rejeté cette demande, a obligé l'intéressé à quitter le territoire français, dans un délai de trente jours, et a fixé le pays de renvoi. M. A... a, par une seconde demande, introduit un recours devant le tribunal administratif de Montreuil tendant à l'annulation de cet arrêté. L'intéressé fait régulièrement appel du jugement du 14 février 2019 en tant que, par ce jugement, le tribunal administratif de Montreuil, après avoir prononcé un non-lieu à statuer sur les conclusions à fin d'annulation de la décision implicite de rejet de sa demande d'admission exceptionnelle au séjour, a rejeté le surplus des conclusions de ses demandes qu'il avait jointes.
Sur la légalité des décisions attaquées :
2. Aux termes de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée aux 1° et 2° de l'article L. 313-10 peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 313-2. (...) ".
3. Pour rejeter la demande d'admission exceptionnelle au séjour présentée par M. A..., le préfet de la Seine-Saint-Denis a, dans les motifs de l'arrêté attaqué, notamment relevé, d'une part, que l'intéressé n'apportait pas d'éléments suffisamment probants propres à justifier de sa présence réelle et continue sur le territoire français depuis son arrivée, notamment pour les années 2005 et 2006, et d'autre part, que, ne présentant pas de contrat de travail ou de promesse d'embauche, il ne justifiait pas d'une insertion professionnelle stable en France, ni d'une perspective réelle d'embauche.
4. Toutefois, M. A... soutient sans être contredit en défense avoir fait usage pendant plusieurs années d'une fausse identité afin de faciliter son embauche, ainsi que l'accomplissement de diverses démarches administratives, avant de reprendre sa véritable identité pour régulariser sa situation relative à son droit au séjour. Ces allégations sont confirmées par deux attestations du représentant légal de la société employant M. A..., datées du 10 novembre 2016 et du 9 juin 2017, lequel indique que l'intéressé, recruté sous un nom d'emprunt en octobre 2014, qui est toujours employé au sein de sa société à la date de ces attestations, lui aurait révélé par la suite sa véritable identité afin notamment d'être accompagné par son employeur dans sa démarche de régularisation de sa situation administrative. Il ressort par ailleurs des pièces du dossier, et notamment des relevés bancaires produits par l'appelant, qu'au cours de l'année 2015, celui-ci a procédé, à intervalles réguliers, à des retraits d'argent dans un distributeur automatique de billets situé à Paris. M. A... verse également aux débats des bulletins de paie émis par la SARL La Mesure au nom de l'alias utilisé lors de son recrutement, lesquels confirment que l'intéressé a été recruté par cette société en octobre 2014, qu'il a continuellement travaillé en son sein durant l'intégralité de l'année 2016 et qu'il y travaillait encore à la date de l'arrêté attaqué. Il se déduit de l'ensemble de ces circonstances qu'en se déterminant, pour rejeter la demande de titre de séjour de M. A..., sur les éléments énoncés au point 3, le préfet de la Seine-Saint-Denis s'est fondé sur des faits matériellement inexacts. Il ne ressort pas des pièces du dossier que l'autorité administrative aurait pris la même décision sans se fonder sur ces différents éléments. Ce refus de titre de séjour doit, par suite, être annulé, ainsi que, par voie de conséquences, l'obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et la décision fixant le pays de renvoi prises sur son fondement.
5. Il résulte de ce qui précède, et sans qu'il soit besoin de se prononcer sur les autres moyens de la requête, que M. A... est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montreuil a rejeté le surplus des conclusions de sa demande.
Sur les conclusions à fin d'injonction :
6. Eu égard au motif d'annulation de l'arrêté attaqué ci-dessus retenu, l'exécution du présent arrêt n'implique pas nécessairement que le préfet de la Seine-Saint-Denis délivre à M. A... un titre de séjour portant la mention " salarié ". En revanche, il y a lieu, en application de l'article L. 911-2 du code de justice administrative, d'enjoindre au préfet de la Seine-Saint-Denis de réexaminer la demande d'admission exceptionnelle au séjour de M. A..., dans un délai de trois mois à compter de la notification du présent arrêt. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, d'assortir cette injonction d'une astreinte.
Sur les frais liés au litige :
7. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'État le versement d'une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par M. A... et non compris dans les dépens.
D É C I D E :
Article 1er : L'article 2 du jugement du tribunal administratif de Montreuil n° 1803636, 1807405 du 14 février 2019 et l'arrêté du préfet de la Seine-Saint-Denis du 6 juillet 2018 sont annulés.
Article 2 : Il est enjoint au préfet de la Seine-Saint-Denis de réexaminer la demande d'admission exceptionnelle au séjour présentée par M. A... dans un délai de trois mois à compter de la notification du présent arrêt.
Article 3 : L'État versera à M. A... une somme de 1 500 (mille cinq cent) euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.
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N° 19VE00917