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02/07/2020 | FRANCE | N°18VE03169

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 7ème chambre, 02 juillet 2020, 18VE03169


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Par une première demande, Mme A... B... a demandé au tribunal administratif de Versailles d'annuler, d'une part, les décisions du 27 juillet 2015 par lesquelles le directeur de l'établissement d'hébergement pour personnes âgées dépendantes (EHPAD) Richard de Conflans-Sainte-Honorine a rejeté ses demandes tendant à son affectation sur un poste adapté ou, à défaut, à son reclassement, à l'octroi d'un bénéfice d'un congé formation, au retrait des décisions par lesquelles elle avait été maintenue d

'office en congé de maladie ordinaire après le 3 février 2015 et à la reconstitutio...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Par une première demande, Mme A... B... a demandé au tribunal administratif de Versailles d'annuler, d'une part, les décisions du 27 juillet 2015 par lesquelles le directeur de l'établissement d'hébergement pour personnes âgées dépendantes (EHPAD) Richard de Conflans-Sainte-Honorine a rejeté ses demandes tendant à son affectation sur un poste adapté ou, à défaut, à son reclassement, à l'octroi d'un bénéfice d'un congé formation, au retrait des décisions par lesquelles elle avait été maintenue d'office en congé de maladie ordinaire après le 3 février 2015 et à la reconstitution de sa carrière à compter de cette même date, et d'autre part, la décision, révélée par l'interruption du versement de son traitement à la fin du mois d'août 2015, de lui supprimer toute rémunération à compter de cette date.

Par une seconde demande, Mme B... a demandé au tribunal administratif de Versailles d'annuler la décision du 26 mai 2016 par laquelle le directeur de l'EHPAD Richard de Conflans-Sainte-Honorine lui a infligé la sanction disciplinaire de l'exclusion temporaire de fonctions pendant une durée de trois mois.

Par un jugement n° 1506121, 1604183 du 12 juillet 2018, le tribunal administratif de Versailles, après avoir joint ses demandes, a :

- prononcé un non-lieu à statuer sur ses conclusions tendant à l'annulation de la décision lui supprimant toute rémunération à compter de la fin du mois d'août 2015 ;

- annulé les décisions du directeur de l'EHPAD Richard de Conflans-Sainte-Honorine du 27 juillet 2015 et du 26 mai 2016 ;

- enjoint au directeur de l'EHPAD Richard de Conflans-Sainte-Honorine de prendre les mesures nécessaires pour rétablir ses droits sociaux et à pension au titre de la période allant du 26 février 2015 au 31 décembre 2015 ;

- enjoint au directeur de l'EHPAD Richard de Conflans-Sainte-Honorine de procéder à la reconstitution de sa carrière pour la période courant entre la date à laquelle son exclusion temporaire de fonctions a pris effet et la date de l'ordonnance du juge des référés de ce tribunal ayant suspendu l'exécution de cette sanction ;

- rejeté le surplus des conclusions de sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire enregistrés le 13 septembre 2018 et le 5 juillet 2019, l'EHPAD Richard de Conflans-Sainte-Honorine, représenté par Me E..., avocat, demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement en tant qu'il a prononcé l'annulation de la décision de son directeur du 27 juillet 2015 concernant Mme B... et qu'il lui a enjoint de prendre les mesures nécessaires pour rétablir ses droits sociaux et à pension, au titre de la période allant du 26 février 2015 au 31 décembre 2015 ;

2°) de rejeter les conclusions de la demande présentée par Mme B... devant le tribunal administratif de Versailles tendant à l'annulation des décisions du 27 juillet 2015 et à ce qu'il soit enjoint à son directeur de prendre les mesures nécessaires pour rétablir ses droits sociaux et à pension au titre de la période allant du 26 février 2015 au 31 décembre 2015 ;

3°) de mettre à la charge de Mme B... la somme 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- le jugement attaqué est irrégulier dès lors que la procédure n'a pas été communiquée à son conseil en dépit de deux demandes adressées en ce sens ;

- ce jugement est également irrégulier car il n'a pas été mis en mesure de répondre en toute connaissance de cause au moyen relevé d'office par le tribunal ;

- son premier mémoire en défense n'a pas été communiqué à Mme B..., en méconnaissance des dispositions de l'article R. 611-1 du code de justice administrative ;

- les premiers juges se sont appuyés sur une pièce qui n'était pas versée aux débats pour faire droit aux conclusions de la demande de Mme B... ;

- le moyen tiré de la méconnaissance de l'obligation de reclassement étant inopérant et en tout état de cause non fondé, c'est à tort que le tribunal administratif l'a accueilli ;

- le moyen tiré de l'erreur de droit soulevé à l'encontre du refus de congé de formation professionnelle n'étant pas fondé, c'est également à tort que le tribunal l'a accueilli ;

- il convient, en tout état de cause, de neutraliser l'un des motifs, à le supposer illégal, de cette décision, voire de substituer le motif tiré de la méconnaissance des obligations issues de l'article 30 du décret du 21 août 2008 aux motifs initiaux de cette décision ;

- le placement de Mme B... en position de congé de maladie à compter du 3 février 2015 étant régulier, c'est à tort que les premiers juges ont annulé les refus de retirer cette décision et de procéder à la reconstitution de la carrière de l'intéressée.

.......................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;

- la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 ;

- le décret n° 88-386 du 19 avril 1988 ;

- le décret n° 89-376 du 8 juin 1989 ;

- le décret n° 2008-824 du 21 août 2008 ;

- le code de justice administrative et l'ordonnance n° 2020-305 du 25 mars 2020.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Illouz, conseiller,

- les conclusions de Mme Danielian, rapporteur public,

- et les observations de Me C..., substituant Me E..., pour l'EHPAD Richard de Conflans-Sainte-Honorine, et de Me D..., substituant Me F..., pour Mme B....

Considérant ce qui suit :

1. Mme B..., agent titulaire du corps des aides-soignants et des agents des services hospitaliers qualifiés, exerçant ses fonctions au sein de l'EHPAD Richard de Conflans-Sainte-Honorine depuis le 1er janvier 2012, souffrant d'importantes douleurs lombaires, a été reconnue inapte à l'exercice de ses fonctions au sein de l'unité de vie " Alzheimer " de l'établissement par le médecin du travail le 20 octobre 2014, et placée d'office en position de congé de maladie ordinaire. Le comité médical a émis un avis défavorable à son placement en congé de longue maladie à l'issue de sa séance du 3 novembre suivant. Par un courrier daté du 30 juin 2015, Mme B... a demandé au directeur de l'EHPAD Richard de Conflans-Sainte-Honorine de procéder à son affectation sur un poste adapté à son état de santé ou, à défaut, à son reclassement, de lui octroyer un congé de formation professionnelle, de retirer les décisions la maintenant en position de congé de maladie ordinaire après le 3 février 2015 et de procéder à la reconstitution de sa carrière à compter de cette même date. Par une décision du 27 juillet 2015, cette autorité a rejeté l'ensemble de ces demandes. L'EHPAD Richard de Conflans-Sainte-Honorine fait régulièrement appel du jugement du 12 juillet 2018 en tant que, par ce jugement, le tribunal administratif de Versailles a annulé cette décision et enjoint à son directeur de prendre les mesures nécessaires pour rétablir les droits sociaux et à pension de Mme B... au titre de la période allant du 26 février 2015 au 31 décembre 2015.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. La règle selon laquelle aucun document ne saurait être régulièrement soumis au juge sans que les parties aient été mises à même d'en prendre connaissance est au nombre des règles générales de procédure qui s'imposent même en l'absence de texte exprès.

3. Pour prononcer l'annulation des différentes décisions contenues dans le courrier du directeur de l'EHPAD Richard de Conflans-Sainte-Honorine daté du 27 juillet 2015 et lui enjoindre de prendre les mesures nécessaires pour rétablir les droits sociaux et à pension de Mme B..., au titre de la période allant du 26 février 2015 au 31 décembre 2015, le tribunal administratif de Versailles s'est notamment fondé sur le tableau des emplois et de suivi des effectifs de l'établissement de mars 2015, alors que ce document n'avait pas été versé par les parties au dossier de première instance enregistré au greffe de ce tribunal sous le n° 1506121. Par suite, et dès lors qu'une jonction ne saurait par elle-même avoir une incidence quelconque sur l'issue d'un litige, le jugement attaqué, en tant qu'il a statué sur ces différentes conclusions, est irrégulier et doit être annulé.

4. Il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur les conclusions de la demande de Mme B... tendant à l'annulation des différentes décisions contenues dans le courrier du directeur de l'EHPAD Richard de Conflans-Sainte-Honorine daté du 27 juillet 2015 et à ce qu'il lui soit enjoint de rétablir ses droits sociaux et à pension au titre de la période allant du 26 février 2015 au 31 décembre 2015 présentées devant le tribunal administratif de Versailles.

Sur les conclusions à fin d'annulation des décisions du 27 juillet 2015 :

En ce qui concerne le refus d'affectation sur un poste aménagé et de reclassement :

5. Il ressort des pièces du dossier que, par une décision du 4 janvier 2016 postérieure à l'introduction de la demande, le directeur de l'EHPAD Richard de Conflans Saint-Honorine a affecté Mme B... sur un poste de nature administrative adapté à son état de santé. Cette affectation a été confirmée par une décision du 18 juillet 2016 prise après le retour de l'intéressée, qui lui a été régulièrement notifiée et est devenue définitive. Mme B... ne conteste pas l'adéquation de ce nouveau poste à son état de santé. Ses conclusions tendant à l'annulation de la décision du 27 juillet 2015 en tant que celle-ci refuse de prononcer son affectation sur un poste adapté à son état de santé ou, à défaut, à son reclassement, ont, dès lors, perdu leur objet. Il n'y a, par suite, plus lieu d'y statuer.

En ce qui concerne le refus de congé de formation professionnelle :

6. Aux termes de l'article 41 de la loi du 9 janvier 1986 : " Le fonctionnaire en activité a droit : (...) / 6° Au congé de formation professionnelle (...) ". Aux termes des troisième et quatrième alinéas de l'article 30 du décret du 21 août 2008 relatif à la formation professionnelle tout au long de la vie des agents de la fonction publique hospitalière : " La demande de congé de formation professionnelle doit être formulée soixante jours au moins avant la date à laquelle commence la formation. / Cette demande doit porter mention de cette date et préciser la durée du congé demandé. ".

7. Il résulte de ces dispositions qu'une demande de congé de formation professionnelle adressée par un fonctionnaire hospitalier à l'établissement qui l'emploie doit nécessairement se rattacher à une formation préalablement identifiée par l'agent, lequel doit préciser la date de démarrage de la formation et la durée du congé demandé en vue d'y participer.

8. Il ressort des pièces du dossier que la demande de congé de formation professionnelle présentée par Mme B... le 30 juin 2015 ne précise ni la formation pour laquelle ce congé est sollicité, ni sa date de démarrage, ni la durée du congé souhaité. Le directeur de l'EHPAD Richard de Conflans-Sainte-Honorine, qui n'était pas tenu d'inviter l'auteur de cette demande à la régulariser, était, dès lors, en situation de compétence liée pour rejeter cette demande comme irrecevable. Les moyens soulevés par Mme B... à l'encontre de la décision rejetant sa demande, tirés de son insuffisante motivation, de l'erreur de droit et du détournement de pouvoir doivent, par suite, être écartés comme inopérants.

En ce qui concerne le refus de retirer les décisions maintenant Mme B... en position de congé de maladie ordinaire à compter du 3 février 2015 et de reconstituer sa carrière à compter de cette même date :

9. En premier lieu, aucun principe ni aucune disposition législative ou réglementaire n'impose à l'autorité administrative de motiver la décision par laquelle elle place d'office un de ses agents en position de congé de maladie ordinaire. Il en va de même, par voie de conséquence, de la décision par laquelle elle refuse de rapporter une telle décision et de reconstituer la carrière de l'agent à raison de la prétendue irrégularité de cette position administrative. Le moyen tiré de l'insuffisance de motivation de cette décision doit, par suite, être écarté comme inopérant.

10. En deuxième lieu, aux termes de l'article 14 du décret du 19 avril 1988 : " (...) en cas de maladie dûment constatée le mettant dans l'impossibilité d'exercer ses fonctions, le fonctionnaire hospitalier est de droit placé en congé de maladie. ". Ces dispositions ne subordonnent pas la mise en congé de maladie à une demande du fonctionnaire et ne sauraient donc par elles-mêmes faire obstacle à ce qu'un fonctionnaire soit placé d'office dans cette position dès lors que sa maladie a été dûment constatée et qu'elle le met dans l'impossibilité d'exercer ses fonctions.

11. Il est constant que les importantes douleurs lombaires dont souffre Mme B... la mettant dans l'impossibilité d'exercer ses fonctions d'aide-soignante avaient été constatées par la médecine du travail, ainsi que par le comité médical à la date de la décision attaquée. Cette circonstance faisait obstacle, dans l'attente d'un éventuel reclassement ultérieur, au maintien de l'intéressée en position d'activité. La circonstance que le comité médical ait émis, à l'issue de sa séance du 3 novembre 2014, un avis défavorable au placement de Mme B... en congé de longue maladie, si elle faisait obstacle à un placement de l'intéressée en une telle position, ne s'opposait en revanche pas à son maintien en congé de maladie ordinaire. Dès lors, l'administration, qui était tenue de placer son agent dans une position statuaire régulière, pouvait légalement maintenir d'office l'intimée en position de congé de maladie ordinaire au-delà du 3 février 2015. Le moyen tiré de ce que le directeur de l'EHPAD était tenu de retirer les décisions maintenant Mme B... dans une telle position à compter de cette date et de reconstituer sa carrière en conséquence de la prétendue irrégularité de cette position doit, dès lors, être écarté.

12. Enfin, le détournement de pouvoir allégué n'est pas établi.

13. Il résulte de tout ce qui précède que Mme B... n'est pas fondée à demander l'annulation de la décision du directeur de l'EHPAD Richard de Conflans-Sainte-Honorine du 27 juillet 2015 en tant que celui-ci a rejeté sa demande d'octroi d'un congé de formation professionnelle et a refusé de retirer les décisions la maintenant en position de congé de maladie ordinaire après le 3 février 2015 et de reconstituer sa carrière à compter de cette même date. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction ne peuvent qu'être rejetées.

Sur les frais liés au litige :

14. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'EHPAD Richard de Conflans-Sainte-Honorine, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie principalement perdante, le versement de la somme que Mme B... demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens. Il y a lieu, en revanche, de mettre à la charge de Mme B... une somme de 1 000 euros à verser à l'EHPAD Richard de Conflans-Sainte-Honorine au titre des mêmes dispositions.

D É C I D E :

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Versailles n° 1506121, 1604183 du 12 juillet 2018 est annulé en tant qu'il prononce l'annulation des décisions du directeur de l'EHPAD Richard de Conflans-Sainte-Honorine du 27 juillet 2015 et qu'il lui enjoint de prendre les mesures nécessaires pour rétablir les droits sociaux et à pension de Mme B... au titre de la période allant du 26 février 2015 au 31 décembre 2015.

Article 2 : Il n'y a plus lieu de statuer sur les conclusions de la demande de Mme B... tendant à l'annulation de la décision du directeur de l'EHPAD Richard de Conflans-Sainte-Honorine du 27 juillet 2015 en tant que celui-ci a refusé de prononcer son affectation sur un poste aménagé ou de procéder, à défaut, à son reclassement.

Article 3 : Les conclusions de la demande de Mme B... tendant, d'une part, à l'annulation de la décision du directeur de l'EHPAD Richard de Conflans-Sainte-Honorine du 27 juillet 2015 en tant que celui-ci a rejeté sa demande d'octroi d'un congé de formation professionnelle et a refusé de retirer les décisions la maintenant en position de congé de maladie ordinaire après le 3 février 2015 et de reconstituer sa carrière à compter de cette même date, et d'autre part, à ce qu'il lui soit enjoint de prendre les mesures nécessaires au rétablissement de ses droits sociaux et à pension au titre de la période allant du 26 février 2015 au 31 décembre 2015, ainsi que ses conclusions d'appel présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, sont rejetées.

Article 4 : Mme B... versera à l'EHPAD Richard de Conflans-Sainte-Honorine une somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

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N° 18VE03169


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 7ème chambre
Numéro d'arrêt : 18VE03169
Date de la décision : 02/07/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

36 Fonctionnaires et agents publics.


Composition du Tribunal
Président : M. EVEN
Rapporteur ?: M. Julien ILLOUZ
Rapporteur public ?: Mme DANIELIAN
Avocat(s) : SELASU LAPISARDI AVOCAT

Origine de la décision
Date de l'import : 28/07/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2020-07-02;18ve03169 ?
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