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16/06/2020 | FRANCE | N°19VE03135

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 1ère chambre, 16 juin 2020, 19VE03135


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... C... a demandé au Tribunal administratif de Versailles de condamner 1'Etat à lui verser la somme de 144 400 euros pour la période du

1er septembre 1988 au 30 avril 2017, assortie des intérêts au taux légal et de leur capitalisation, et d'enjoindre à la ministre des armées de réexaminer sa demande concernant l'indemnité compensatrice à compter du 3 mai 2017.

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Par un jugement n° 1705444 en date du 15 juillet 2019, le Tribunal administratif de Versailles a rejeté l'ensemble

de ses demandes.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 4 septembre 20...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... C... a demandé au Tribunal administratif de Versailles de condamner 1'Etat à lui verser la somme de 144 400 euros pour la période du

1er septembre 1988 au 30 avril 2017, assortie des intérêts au taux légal et de leur capitalisation, et d'enjoindre à la ministre des armées de réexaminer sa demande concernant l'indemnité compensatrice à compter du 3 mai 2017.

.

Par un jugement n° 1705444 en date du 15 juillet 2019, le Tribunal administratif de Versailles a rejeté l'ensemble de ses demandes.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 4 septembre 2019, et un mémoire en réplique enregistré le 13 mai 2020, M. C..., représenté par la Selarl Lex Publica, demande à la Cour :

1° d'annuler ce jugement ;

2° de condamner 1'Etat à lui verser la somme de 144 400 euros pour la période du 1er septembre 1988 au 30 avril 2017, assortie des intérêts au taux légal et de leur capitalisation ;

3° de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens.

Il soutient que :

- la prescription quadriennale ne lui était pas opposable, dès lors qu'il pouvait être regardé comme ignorant légitimement l'existence de sa créance ;

- en tout état de cause, la prescription a été interrompue par un courrier du 18 septembre 2013 ;

- l'indemnité compensatrice qu'il a perçue en tant qu'ingénieur d'études et de fabrications du 1er janvier 2013 au 31 mai 2015 était sous-évaluée, en raison de ce qu'elle était notamment basée sur un calcul erroné de l'indemnité différentielle à laquelle il avait droit en application du décret n° 62-1389 du 23 novembre 1962 et du décret n° 89-753 du

18 octobre 1989.

....................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la loi n° 68-1250 du 31 décembre 1968 ;

- le décret n° 62-1389 du 23 novembre 1962 ;

- le décret n° 89-751 du 18 octobre 1989 relatif à l'attribution d'une prime de rendement aux techniciens supérieurs d'études et de fabrications du ministère de la défense ;

- le décret n° 89-754 du 18 octobre 1989 relatif à l'attribution d'une prime de rendement aux ingénieurs d'études et de fabrications du ministère de la défense ;

- le décret n° 2011-962 du 16 août 2011 ;

- l'ordonnance n° 2020-305 du 25 mars 2020 modifiée portant adaptation des règles applicables devant les juridictions de l'ordre administratif ;

- le code de justice administrative ;

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Beaujard, président ;

- les conclusions de Mme Méry, rapporteur public ;

- et les observations de Me A..., pour M. C....

Considérant ce qui suit :

1. M. C..., technicien supérieur d'études et de fabrications de 1ère classe au centre d'essais des propulseurs de Saclay, a été intégré à compter du 1er janvier dans le corps des ingénieurs d'études et de fabrications. En tant que technicien supérieur d'études et de fabrications, M. C... avait droit à une indemnité différentielle, basée sur le salaire maximum de la profession ouvrière à laquelle il appartenait précédemment, en application du décret n° 62-1389 du 23 novembre 1962. En tant qu'ingénieur d'études et de fabrications, M. C... avait également droit à une indemnité compensatrice, dont le mode de calcul prend notamment en compte l'indemnité différentielle perçue précédemment par l'agent en tant que technicien supérieur d'études et de fabrications. Il a perçu cette indemnité compensatrice jusqu'en juin 2015, date à laquelle cette indemnité lui a été retirée. Estimant que le montant de son indemnité différentielle perçue de 1988 à 2012, et de son indemnité compensatrice perçue en tant qu' ingénieur d'études et de fabrications à partir de 2013, a été calculée de façon erronée, M. C... a demandé au ministre de la défense, le 4 mai 2017, le paiement de la différence entre le montant de l'indemnité différentielle et de l'indemnité compensatrice perçues, et le montant de ces indemnités, tenant compte d'une prime de rendement des ouvriers d'Etat au taux maximum de 32%, et non au taux moyen de 16%.

M. C... relève appel du jugement en date du 15 juillet 2019 par lequel le Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande tendant à la condamnation de 1'Etat à lui verser la somme de 144 400 euros pour la période courant à partir du 1er septembre 1988.

Sur l'application de la prescription quadriennale :

2. En premier lieu, aux termes du premier alinéa de l'article 1er de la loi du 31 décembre 1968 : " Sont prescrites, au profit de l'Etat, des départements et des communes, sans préjudice des déchéances particulières édictées par la loi, et sous réserve des dispositions de la présente loi, toutes créances qui n'ont pas été payées dans un délai de quatre ans à partir du premier jour de l'année suivant celle au cours de laquelle les droits ont été acquis ". Aux termes de l'article 3 de la même loi : " La prescription ne court ni contre le créancier qui ne peut agir, soit par lui-même ou par l'intermédiaire de son représentant légal, soit pour une cause de force majeure, ni contre celui qui peut être légitimement regardé comme ignorant l'existence de sa créance ou de la créance de celui qu'il représente légalement ".

3. Pour soutenir qu'il était dans l'ignorance légitime de sa créance,

M. C... soutient qu'il'ignorait l'existence de cette créance avant le 30 juin 2016, date à laquelle le jugement d'un Tribunal administratif a remis en cause le mode de calcul de l'indemnité différentielle d'un agent appartenant au corps des techniciens supérieur d'études et de fabrications. Il soutient également que son ignorance peut se déduire de la lecture erronée de la règlementation en vigueur faite par le ministre.

4. Cependant, la détermination du montant et du mode de calcul de l'indemnité différentielle en litige résultait de l'application des dispositions du décret du

23 novembre 1962 et du décret du 18 octobre 1989, qu'il était loisible au requérant de consulter. L'erreur commise par l'administration dans l'interprétation de ces textes n'était pas de nature à faire obstacle à ce que M. C... ait accès à tous les éléments matériels nécessaires à l'analyse de sa situation. M. C... ne peut ainsi, dans les circonstances de l'espèce, être regardé comme ayant légitimement ignoré l'existence de sa créance. Il ne se trouvait pas dès lors dans l'un des cas visés à l'article 3 de la loi du 31 décembre 1968 susceptibles de faire obstacle à ce que le délai de prescription puisse courir.

5. En second lieu, aux termes de l'article 2 de la loi du 31 décembre 1968 précitée : " La prescription est interrompue par : / (...) Toute communication écrite d'une administration intéressée, même si cette communication n'a pas été faite directement au créancier qui s'en prévaut, dès lors que cette communication a trait au fait générateur, à l'existence, au montant ou au paiement de la créance ".

6. M. C... soutient que le cours de la prescription aurait été interrompue par la communication, par le ministère de la défense, d'un courrier du 18 septembre 2013 lui indiquant les nouvelles modalités de calcul de l'indemnité différentielle attribuée aux agents du corps des techniciens supérieurs d'études et de fabrications.

7. Cependant, interrompt seule le cours de la prescription une communication de l'administration qui se prononce sur le fait générateur, l'existence, le montant ou le paiement de la créance même dont se prévaut le créancier, soit la créance personnelle qui est précisément en litige.

8. En l'espèce, la communication du 18 septembre 2013, dont se prévaut le requérant, dispose expressément qu'elle concerne " votre indemnité différentielle (...) calculée à compter du 1er octobre 2013 ". Ce courrier du 18 septembre 2013 concerne ainsi non la créance dont se prévaut M. C..., à l'encontre de laquelle est soulevée la prescription quadriennale, et qui est relative aux années 1988 à 2013, mais une créance postérieure, courant à compter du 1er octobre 2013. Ne portant pas sur la créance personnelle en litige, la communication du 18 septembre 2013 n'est pas de nature à avoir interrompu la prescription quadriennale, en application de l'article 2 précité de la loi du 31 décembre 1968.

9. Il résulte de ce qui précède que M. C... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que les premiers juges ont retenu que sa créance était prescrite pour les années antérieures à l'année 2013.

Sur l'indemnité compensatrice :

10. Si, dans le dernier état de ses conclusions, le requérant détaille le montant de sa créance mois par mois, il ne justifie pas de la réalité des chiffres avancés par la production de ses bulletins de salaires ou de tout autre document adéquat.

11. Par ailleurs, la Cour ne trouve pas au dossier les éléments nécessaires au calcul, d'une part, de la rémunération globale de M. C... dans son ancienne situation de technicien d'études et de fabrications, et de sa rémunération globale en qualité d'ingénieur d'études et de fabrications, à la date de sa nomination dans ce dernier corps, en vue de déterminer ses droits à l'indemnité compensatrice au sens de l'article 1er du décret du 24 septembre 2001, d'autre part, dans l'hypothèse où ses droits à cette indemnité serait établi, les éléments nécessaires au calcul de cette indemnité, et notamment les éléments nécessaires au calcul de l'indemnité différentielle et de la prime de rendement dont l'intéressé bénéficiait en qualité de technicien d'études et de fabrications. Il y a lieu, par suite, de surseoir à statuer et d'enjoindre aux parties de produire ces pièces ou éléments.

DECIDE :

Article 1er : Il sera, avant de statuer, ordonné un supplément d'instruction en vue d'enjoindre : à M. C... de produire ses bulletins de salaires ou pièces justificatives de sa rémunération pour la période courant à partir du 1er janvier 2013, au besoin rectifiés pour tenir compte de sa nomination à titre rétroactif à compter de cette dernière date ; à l'administration de produire tous éléments permettant de déterminer les droits de

M. C... à l'indemnité compensatrice, et le montant de cette dernière, ainsi qu'il a été dit au point 12 ci-dessus, cela dans le délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt.

Article 2 : Tous droits et moyens des parties sur lesquels il n'aurait pas été expressément statué par le présent arrêt sont réservés jusqu'en fin d'instance.

N° 19VE03135 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 19VE03135
Date de la décision : 16/06/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

36-04-05 Fonctionnaires et agents publics. Changement de cadres, reclassements, intégrations. Changement de corps.


Composition du Tribunal
Président : M. BEAUJARD
Rapporteur ?: M. Patrice BEAUJARD
Rapporteur public ?: Mme MERY
Avocat(s) : SELARL LEX PUBLICA

Origine de la décision
Date de l'import : 28/07/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2020-06-16;19ve03135 ?
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