Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
La fédération française du transport de personnes sur réservation et les sociétés Transdev Shuttle France, Voxtur, Transcovo, Snapcar, Allocab et ClassetCo ont demandé au tribunal administratif de Montreuil d'annuler l'arrêté du 29 février 2016 par lequel le préfet de la Seine-Saint-Denis a créé et réglementé l'usage d'une voie réservée sur l'autoroute A1, dans le sens province-Paris, en tant qu'il exclut les véhicules de transport avec chauffeur (VTC) de l'utilisation de cette voie.
Par un jugement n° 1601789 du 17 octobre 2017, le tribunal administratif de Montreuil a rejeté leur demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête, enregistrée le 13 décembre 2017, la fédération française du transport de personnes sur réservation et les sociétés Transdev Shuttle France, Transcovo, Snapcar et Allocab, représentées par Me C... et Ragot, avocats, demandent à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) d'annuler cet arrêté ;
3°) de mettre à la charge de l'État la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elles soutiennent qu'en excluant la circulation des VTC sur cette voie réservée, l'arrêté en litige porte atteinte à la liberté du commerce et de l'industrie et à la liberté d'entreprendre, cette décision n'étant pas justifiée par l'intérêt général ni proportionnée aux objectifs poursuivis.
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Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code des transports ;
- le décret n° 2015-1252 du 7 octobre 2015 ;
- l'arrêté du 2 novembre 2015 relatif aux tarifs des courses de taxi ;
- l'ordonnance n° 2020-305 du 25 mars 2020 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme A...,
- les conclusions de Mme Danielian, rapporteur public,
- et les observations de Me B... pour l'union nationale des industries du taxi.
Considérant ce qui suit :
1. Le préfet de la Seine-Saint-Denis a, par un arrêté n° 2016-0523 du 29 février 2016, créé et réglementé l'usage d'une voie, sur une partie du trajet allant de l'aéroport de Roissy - Charles de Gaulle à Paris, située sur l'autoroute A1, dans le sens province-Paris, d'une longueur de 4,5 kilomètres, au niveau des communes de la Courneuve et de Saint-Denis, qui est réservée aux véhicules assurant les services de transport public régulier de personnes, aux véhicules assurant les services du réseau de transport de personnes à mobilité réduite (PAM) et aux taxis, les jours ouvrés, du lundi au vendredi, le matin de 6 heures 30 à 10 heures. La fédération française du transport de personnes sur réservation (FFPTR) et les sociétés Transdev Shuttle France, Transcovo, Snapcar, Allocab, font appel du jugement du 17 octobre 2017 par lequel le tribunal administratif de Montreuil a rejeté leur demande tendant à l'annulation de cet arrêté.
Sur l'intervention de l'union nationale des industries du taxi :
2. L'union nationale des industries du taxi (UNIT) justifie, par son objet statutaire et la nature de son action, d'un intérêt suffisant au maintien de l'arrêté attaqué. Dès lors, son intervention est recevable.
Sur la légalité de l'arrêté contesté :
3. La circonstance que les mesures de police administrative ont pour objectif la protection de l'ordre public ou, dans certains cas, la sauvegarde des intérêts spécifiques que l'administration a pour mission de protéger ou de garantir, n'exonère pas l'autorité investie de ces pouvoirs de police de l'obligation de prendre en compte également la liberté du commerce et de l'industrie et les règles de concurrence, lorsque l'exercice de ces pouvoirs est susceptible d'affecter des activités de production, de distribution ou de services. Il appartient au juge de l'excès de pouvoir d'apprécier la légalité de ces mesures de police administrative en recherchant si elles ont été prises compte tenu de l'ensemble de ces objectifs et de ces règles et si elles en ont fait, en les combinant, une exacte application.
4. En premier lieu, il ressort des termes de l'arrêté en litige que la limitation aux transports en commun et aux taxis de la voie réservée litigieuse est justifiée par les objectifs de fluidification du trafic, en provenance en particulier de l'aéroport de Roissy-Charles de Gaulle, et d'augmentation de la présence de taxis à Paris aux heures de pointe, le matin, pour mettre un terme au déséquilibre, constaté sur le marché de la maraude, entre le nombre de taxis en attente à l'aéroport de Roissy-Charles de Gaulle et celui qui est en circulation dans Paris le matin, en favorisant le retour vers la capitale des taxis inutilisés. Si la FFTPR et les sociétés requérantes soutiennent qu'il n'y aurait aucune augmentation du trafic liée à une ouverture de la voie réservée aux voitures de transport avec chauffeur (VTC), dès lors que ceci aurait pour seule conséquence d'entraîner un report de clientèle des taxis vers les VTC, elles n'apportent aucun élément de nature à l'établir, alors que, à la différence des taxis, les VTC ne disposent d'aucun signal lumineux permettant de les identifier, ce qui pourrait inciter de nombreux véhicules de particuliers à emprunter cette voie réglementée. En outre, le ministre soutient, sans être contredit, qu'à la date de la décision attaquée, 93 % des courses effectuées depuis l'aéroport Roissy-Charles de Gaulle en direction de Paris, relevait du marché dit de " la maraude ", qui est réservé par le législateur aux seuls taxis, en application de l'article L. 3121-1 du code des transports. Enfin, en se bornant à se référer aux commentaires de la presse sur ce sujet, les requérantes n'établissent pas que cet arrêté aurait été adopté dans le seul objectif de procurer un avantage aux taxis. Il résulte de l'ensemble de ces éléments que le fait de réserver un tronçon de l'autoroute A1 dans le sens province-Paris aux seuls transports en commun et taxi, répond à des motifs d'intérêt général.
5. En second lieu, il ressort des pièces du dossier que cette voie réservée n'est mise en place que sur un tronçon de 4,5 km, dans la seule direction province-Paris, du lundi au vendredi, entre 6 heures 30 et 10 heures, que la vitesse de circulation y est limitée à 70 km/h et que cette voie peut être désactivée en cas de " situation exceptionnelle ". Si les appelantes soutiennent que le recours à cette voie réservée génère d'importants gains de temps pour les taxis, qui en tirent selon elles un avantage substantiel en termes d'attractivité, le ministre fait valoir, sans être contredit, que le gain de temps établi du recours à cette voie n'est que de 6 à 10 minutes en moyenne, alors qu'il est de 3 minutes en raison de la fluidification du trafic pour les autres véhicules ne pouvant emprunter cette voie réservée, soit un gain de temps net de 3 à 7 minutes sur un trajet de 40 minutes entre l'aéroport de Roissy-Charles de Gaulle et Paris. Au demeurant, les appelantes ne produisent aucun élément chiffré permettant d'établir l'impact économique sur leur activité imputable à la création de cette voie réservée alors, qu'ainsi qu'il a été dit au point précédent, 93 % des courses effectuées depuis l'aéroport Roissy-Charles de Gaulle en direction de Paris, relèvent du marché dit de " la maraude ". En outre, contrairement aux VTC, les taxis sont, conformément aux dispositions du décret n° 2015-1252 du 7 octobre 2015, soumis à une tarification fixée chaque année par arrêté du ministre chargé de l'économie, " en fonction de l'évolution du prix des carburants, du prix des véhicules automobiles ainsi que de leurs frais de réparation et d'entretien et du tarif des assurances " et depuis l'entrée en vigueur de l'arrêté du 2 novembre 2015, relatif aux tarifs des courses de taxi, sont tenus d'appliquer une tarification forfaitaire entre l'aéroport de Roissy-Charles de Gaulle et Paris. Si la FFTPR et les sociétés requérantes soutiennent que ces montants sont des maxima, il est constant que les entreprises de VTC fixent quant à elles librement les tarifs de leurs courses, sans aucune contrainte réglementaire. Par suite, le fait de réserver l'accès à une voie spécifique aux seuls taxis et transports en commun, dans les conditions rappelées ci-dessus, n'est pas manifestement disproportionné au regard des motifs d'intérêt général qui justifient l'introduction d'une telle mesure.
6. Il résulte de ce qui précède que le moyen tiré de ce que l'atteinte portée aux libertés d'entreprendre, de commerce et d'industrie et aux règles de la concurrence ne serait ni justifiée par un objectif d'intérêt général, ni proportionnée, doit être écarté. Il résulte de tout ce qui précède que la FFTR et les sociétés Transdev Shuttle France, Transcovo, Snapcar et Allocab ne sont pas fondées à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montreuil a rejeté leur demande.
Sur les frais liés au litige :
7. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme demandée par la FFTPR et les sociétés requérantes au titre des frais liés au litige. Les conclusions présentées sur ce fondement par l'UNIT, qui n'a que la qualité d'un intervenant, sont irrecevables et ne peuvent donc qu'être rejetées.
D E C I D E :
Article 1er : L'intervention de l'union nationale des industries du taxi est admise.
Article 2 : La requête de la fédération française du transport de personnes sur réservation et des sociétés Transdev Shuttle France, Transcovo, Snapcar et Allocab est rejetée.
Article 3 : Les conclusions présentées par l'union nationale des industries du taxi au titre des frais de justice sont rejetées.
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N°17VE03782