Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme C... A... a demandé au tribunal administratif de Cergy-Pontoise d'engager la responsabilité pour faute du centre hospitalier de Gonesse et de le condamner à indemniser le préjudice qu'elle estime avoir subi en raison de l'accident de service dont elle a été victime le 18 juillet 2012.
Par un jugement avant dire droit du 4 avril 2017, le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a ordonné une expertise médicale afin de déterminer la date de consolidation de son état de santé et l'évaluation définitive des préjudices consécutifs à cet accident de service.
Par un jugement n° 1402827 du 21 décembre 2018 le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a condamné solidairement le centre hospitalier de Gonesse et la société Yvelin à verser à Mme A... une somme de 34 900 euros en réparation du préjudice qu'elle a subi en raison de l'accident de service dont elle a été victime.
Procédure devant la Cour :
Par une requête et un mémoire, enregistrés les 21 février 2019 et 18 décembre 2019, la société Yvelin, représentée par Me D..., avocat, demande à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement en tant qu'il l'a condamné solidairement ;
2°) de condamner le centre hospitalier de Gonesse à lui verser une somme de 5 000 euros au titre des dommages et intérêts qu'il a subis du fait de la résistance abusive de l'établissement ;
3°) à titre principal, de condamner ce centre hospitalier à lui rembourser la somme totale de 38 824,81 euros, qu'il a été contraint de verser à Mme A..., en exécution du jugement attaqué ;
4°) à titre subsidiaire, de condamner Mme A... à lui rembourser les sommes versées en exécution du jugement attaqué ;
5°) de mettre à la charge de Mme A... la somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
6°) de condamner toute partie succombant aux dépens.
Elle soutient qu'elle est une société de courtage, qu'elle n'a jamais été l'assureur du centre hospitalier de Gonesse et qu'elle ne pouvait, par suite, être condamnée solidairement avec l'établissement.
Par des mémoires, enregistrés les 17 juillet 2019 et 9 décembre 2019, Mme A..., représentée par Me Kerdrebez-Gambuli, avocat, conclut au rejet de la requête, à titre subsidiaire, en cas d'infirmation du jugement, à ce que le centre hospitalier soit condamné à rembourser à la société Yvelin les sommes qui lui auraient été indûment versées et à ce qu'une somme de 3 000 euros soit mise à la charge de la requérante ou de toute partie succombant au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle fait valoir que les moyens soulevés par la requérante ne sont pas fondés.
La requête a été communiquée au centre hospitalier de Gonesse, qui n'a produit aucune observation.
Par une lettre du 27 avril 2020, les parties ont été informées de ce que, en application de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, l'arrêt de la Cour est susceptible d'être fondé sur un moyen relevé d'office, tiré de l'incompétence de la juridiction administrative pour connaître des actions tendant au paiement des sommes dues par un assureur au titre de ses obligations de droit privé.
Par une lettre du même jour, les parties ont également été informées de ce que, en application de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, l'arrêt de la Cour est susceptible d'être fondé sur un moyen relevé d'office tiré de ce que les conclusions de la requête d'appel, tendant à ce que le centre hospitalier soit condamné à verser à la société Yvelin la somme de 5 000 euros pour résistance abusive de l'établissement dans l'exécution du jugement du tribunal, sont nouvelles en appel et par suite irrecevables.
Par un mémoire, enregistré le 6 mai 2020, la société Yvelin, après avoir présenté ses observations sur les moyens relevés d'office susvisés, persiste dans ses conclusions.
Elle fait, en outre, valoir que le contrat de courtage passé avec le centre hospitalier a été passé au terme d'un marché public et que le comportement abusif du centre hospitalier est survenu postérieurement au prononcé du jugement du tribunal administratif de Cergy-Pontoise.
..........................................................................................................
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- l'ordonnance n° 2020-305 du 25 mars 2020 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme B...,
- et les observations de Me D..., pour la société Yvelin.
Considérant ce qui suit :
1. Mme C... A..., employée en qualité d'agent d'entretien qualifié au sein du centre hospitalier de Gonesse, a été victime d'un accident le 18 juillet 2012, qui a été reconnu comme imputable au service par une décision du centre hospitalier intervenue le 24 juillet 2012. Par un jugement avant dire droit du 4 avril 2017, le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a estimé que le centre hospitalier de Gonesse avait commis une faute de nature à engager sa responsabilité et a diligenté une expertise afin de déterminer les préjudices subis par Mme A... du fait de cet accident de service. Puis, par un jugement du 21 décembre 2018, le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a condamné solidairement le centre hospitalier de Gonesse et la société Yvelin, à verser à Mme A... la somme de 34 900 euros en réparation de ses préjudices, et a mis à la charge du centre hospitalier et de cette société les frais d'expertise à hauteur de 1 800 euros et les frais de justice à hauteur de 1 500 euros. La société Yvelin fait régulièrement appel de ce jugement.
Sur la régularité du jugement attaqué :
2. Si l'action directe ouverte par l'article L.124-3 du code des assurances à la victime d'un dommage ou à l'assureur de celle-ci subrogé dans ses droits, contre l'assureur de l'auteur responsable du sinistre, tend à la réparation du préjudice subi par la victime, elle se distingue de l'action en responsabilité contre l'auteur du dommage en ce qu'elle poursuit l'exécution de l'obligation de réparer qui pèse sur l'assureur en vertu du contrat d'assurance. Il s'ensuit qu'il n'appartient qu'aux juridictions de l'ordre judiciaire de connaître des actions tendant au paiement des sommes dues par un assureur au titre de ses obligations de droit privé, alors même que l'appréciation de la responsabilité de son assuré dans la réalisation du fait dommageable relèverait de la juridiction administrative.
3. Il résulte de ce qui précède que le juge administratif n'est pas compétent pour connaître des conclusions présentées par Mme A... devant le tribunal administratif de Cergy-Pontoise tendant à la condamnation de la société Yvelin en qualité d'assureur du centre hospitalier responsable du dommage. Il y a, par suite, lieu d'annuler le jugement du tribunal administratif de Cergy-Pontoise en tant qu'il a condamné la société Yvelin et mis à sa charge les frais d'expertise et les frais de justice supportés par Mme A..., et, statuant immédiatement par la voie de l'évocation, de rejeter comme portées devant une juridiction incompétente pour en connaître, les conclusions présentées contre la société Yvelin.
Sur les conclusions tendant à la condamnation du centre hospitalier pour résistance abusive :
4. Si la société Yvelin demande la condamnation du centre hospitalier à lui verser une somme de 5 000 euros au titre des dommages et intérêts, résultant pour elle de la résistance abusive de l'établissement, ces conclusions ont le caractère de conclusions nouvelles en appel. Elles doivent, par suite, être rejetées comme irrecevables.
Sur les conclusions à tendant au remboursement des sommes versées en exécution du jugement du tribunal administratif :
5. Les conclusions par lesquelles la société Yvelin demande le remboursement de la somme totale de 38 824,81 euros, qu'elle établit avoir payée en exécution du jugement attaqué, doivent être regardées comme tendant à ce que la Cour enjoigne, à titre principal, au centre hospitalier, et, à titre subsidiaire, à Mme A..., sur le fondement de l'article L. 911-1 du code de justice administrative, de lui rembourser cette somme. Le présent arrêt implique nécessairement que le centre hospitalier de Gonesse procède au remboursement de cette somme que la société requérante a versée, après commandement aux fins de saisie vente. Il y a donc lieu de faire injonction au centre hospitalier de Gonesse de prendre une mesure en ce sens.
Sur les frais de justice :
6. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'il soit fait droit aux conclusions présentées par la société Yvelin tendant au paiement des frais exposés par lui et non compris dans les dépens, dès lors que ces conclusions sont dirigées à l'encontre de Mme A..., qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance. En outre, en l'absence de dépens, il n'y a pas lieu de faire application des dispositions de l'article R. 761-1 du code de justice administrative.
7. Il n'y a, en outre, pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge du centre hospitalier de Gonesse, la somme de 1 500 euros demandée par Mme A... au titre de ses frais de justice.
D E C I D E :
Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Cergy-Pontoise du 21 décembre 2018 est annulé en tant qu'il a condamné la société Yvelin à verser la somme de 34 900 euros en réparation du préjudice subi par Mme A... et qu'il a mis à sa charge les frais d'expertise et les frais de justice supportés par Mme A....
Article 2 : Les conclusions tendant à la condamnation de la société Yvelin sont rejetées.
Article 3 : Il est enjoint au centre hospitalier de Gonesse de rembourser à la société Yvelin la somme de 38 824,81 euros.
Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.
Article 5 : Les conclusions présentées par Mme A... sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
2
N° 19VE00676