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19/05/2020 | FRANCE | N°19VE02428

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 1ère chambre, 19 mai 2020, 19VE02428


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... C... a demandé au Tribunal administratif de Cergy-Pontoise d'annuler l'arrêté du 2 avril 2019 par lequel le préfet de police l'a obligé à quitter le territoire français sans délai et a fixé le pays de destination de sa reconduite à la frontière.

Par un jugement n° 1904945 du 4 juin 2019, le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrées le 4 juillet 2019, M.

C..., représenté par Me D..., demande à la Cour :

1°d'annuler le jugement susmentionné ;

2° d'ann...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... C... a demandé au Tribunal administratif de Cergy-Pontoise d'annuler l'arrêté du 2 avril 2019 par lequel le préfet de police l'a obligé à quitter le territoire français sans délai et a fixé le pays de destination de sa reconduite à la frontière.

Par un jugement n° 1904945 du 4 juin 2019, le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrées le 4 juillet 2019, M. C..., représenté par Me D..., demande à la Cour :

1°d'annuler le jugement susmentionné ;

2° d'annuler l'arrêté du 7 février 2019 par lequel le préfet du Val-d'Oise l'a obligé à quitter le territoire français sans délai et a fixé le pays de destination de sa reconduite à la frontière ;

3° d'enjoindre au préfet territorialement compétent de procéder à l'examen de sa situation ou, à défaut, de lui délivrer sans délai un titre de séjour, sous astreinte de 500 euros par jour de retard à compter de la notification du présent arrêt ;

4° de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- l'arrêté en litige a été signé par une autorité incompétente ;

- il est insuffisamment motivé dès lors que le préfet n'a notamment coché aucune des cases relatives à la situation de l'intéressé, ne mettant ainsi ni ce dernier ni la Cour en mesure de savoir sur quel fondement l'obligation de quitter le territoire français a été prise ;

- il méconnaît les dispositions du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dès lors que l'intéressé est entré en France à partir de l'Espagne, muni d'un visa de court séjour ;

- il méconnaît les stipulations du 5° de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 et est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation des conséquences sur la situation personnelle de l'intéressé ;

- il méconnaît les stipulations de l'article 7 du même accord ainsi que les dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- il méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le jugement attaqué.

..................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme A... a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. C..., ressortissant algérien né le 24 juin 1990 à Oran (Algérie), fait appel du jugement du 4 juin 2019 par lequel le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 2 avril 2019 du préfet de police l'obligeant à quitter le territoire français sans délai et fixant le pays à destination duquel il pourra être reconduit d'office.

2. En premier lieu, l'arrêté du 2 avril 2019 a été signé par Mme E...

F..., attachée d'administration de l'Etat, qui disposait d'une délégation de signature à cet effet accordée par le préfet de police par un arrêté n° 2019-00250 du 21 mars 2019 régulièrement publié au bulletin municipal officiel de la ville de Paris le 29 mars suivant. Par suite, le moyen tiré de l'incompétence du signataire de l'arrêté contesté doit donc être écarté comme manquant en fait.

3. En deuxième lieu, il ressort des pièces du dossier que, devant le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise, M. C... n'avait soulevé que des moyens tirés de l'illégalité interne de la décision attaquée. Si devant la Cour, il soutient que cette décision serait entachée d'une insuffisance de motivation, ce moyen, fondé sur une cause juridique distincte, constitue une demande nouvelle irrecevable en appel, ainsi que le fait valoir le préfet de police en défense.

4. En troisième lieu, aux termes du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " I. - " L'autorité administrative peut obliger à quitter le territoire français un étranger non ressortissant d 'un Etat membre de l'Union européenne (...) lorsqu'il se trouve dans l'un des cas suivants : 1° Si l'étranger ne peut justifier être entré régulièrement sur le territoire français, à moins qu'il ne soit titulaire d'un titre de séjour en cours de validité ; 2° Si l'étranger s'est maintenu sur le territoire français au-delà de la durée de validité de son visa, à l'expiration d'un délai de trois mois à compter de son entrée sur le territoire sans être titulaire d'un premier titre de séjour régulièrement délivré ; (...) ".

5. M. C... soutient que le préfet ne pouvait prendre à son encontre une obligation de quitter le territoire français dès lors qu'il est entré en France muni d'un visa de court séjour. Toutefois, d'une part, l'intéressé ne produit aucun élément au soutien de ses allégations, et d'autre part, à supposer même qu'il serait entré en France muni d'un tel visa, il ressort des pièces du dossier qu'il se maintient irrégulièrement sur le territoire national depuis plus de trois mois à la date de l'arrêté en litige. Il s'ensuit que le préfet a pu légalement prononcer à son encontre une obligation de quitter le territoire français sur le fondement du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

6. En quatrième lieu, aux termes des stipulations du 5) de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968, le certificat de résidence d'un an portant la mention " vie privée et familiale " est délivré de plein droit au ressortissant algérien " dont les liens personnels et familiaux en France sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus ". Aux termes des stipulations de l'article 7 du même accord : " (...) b) Les ressortissants algériens désireux d'exercer une activité professionnelle salariée reçoivent, après le contrôle médical d'usage et sur présentation d'un contrat visé par les services du ministère chargé de l'emploi, un certificat de résidence valable un an pour toutes professions et toutes régions, renouvelable et portant la mention " salarié " ; cette mention constitue l'autorisation de travail exigée par la législation française.(...) ". Aux termes de l'article 9 du même accord : " (...) Pour être admis à entrer et séjourner plus de trois mois sur le territoire français au titre des articles 4, 5, 7, 7 bis, alinéa 4 " (lettres c et d) ", et du titre III du protocole, les ressortissants algériens doivent présenter un passeport en cours de validité muni d'un visa de long séjour délivré par les autorités françaises. (...) ".

7. Indépendamment de l'énumération faite par l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile des catégories d'étrangers qui ne peuvent faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français, l'autorité administrative ne saurait légalement prendre une obligation de quitter le territoire français à l'encontre d'un étranger que si ce dernier se trouve en situation irrégulière au regard des règles relatives à l'entrée et au séjour. Ainsi, lorsque la loi ou une convention internationale prévoit que l'intéressé doit se voir attribuer de plein droit un titre de séjour, cette circonstance fait obstacle à ce qu'il puisse légalement être l'objet d'une mesure d'éloignement.

8. M. C... fait valoir qu'il est venu en France pour rejoindre son père retraité, isolé et malade, dont il est très proche, ainsi que ses amis d'enfance. Il ajoute qu'il est désormais très bien intégré notamment par le travail puisqu'il est titulaire d'un contrat à durée indéterminée depuis 2016 et qu'il est autonome financièrement, et qu'il n'a plus de liens avec sa famille demeurant en Algérie dès lors qu'il n'y est jamais retourné depuis quatre ans. Toutefois, si M. C... qui est sans charge de famille, affirme s'occuper de son père, il reconnaît également ne pas être dépourvu de tout lien de famille dans son pays d'origine. En outre, le requérant n'établit pas être entré régulièrement en France ni avoir jamais sollicité la délivrance d'un titre de séjour. Par suite, M. C... n'est pas fondé à soutenir qu'il remplissait les conditions pour se voir attribuer de plein droit un titre de séjour en application des stipulations des articles 6 et 7 de l'accord franco-algérien.

9. En cinquième lieu, aux termes de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L.313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée aux 1°et 2° de l'article L.313-10 peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels tels qu'il fait valoir, sans que soi opposable la condition prévue à l'article L.313-2.(...) ". Portant sur la délivrance des catégories de cartes de séjour temporaire prévues par les dispositions auxquelles il renvoie, l'article L. 313-14 est relatif aux conditions dans lesquelles les étrangers peuvent être admis à séjourner en France soit au titre d'une activité salariée, soit au titre de la vie familiale. Dès lors que ces conditions sont régies de manière exclusive par l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968, un ressortissant algérien ne peut utilement invoquer les dispositions de cet article à l'appui d'une demande d'admission au séjour sur le territoire national. Toutefois, si l'accord franco-algérien ne prévoit pas, pour sa part, de semblables modalités d'admission exceptionnelle au séjour, il y a lieu d'observer que ses stipulations n'interdisent pas au préfet de délivrer un certificat de résidence à un ressortissant algérien qui ne remplit pas l'ensemble des conditions auxquelles est subordonnée sa délivrance de plein droit. Il appartient au préfet, dans l'exercice du pouvoir discrétionnaire dont il dispose sur ce point, d'apprécier, compte tenu de l'ensemble des éléments de la situation personnelle de l'intéressé, l'opportunité d'une mesure de régularisation.

10. Le requérant, qui ne peut utilement se prévaloir des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, ne peut pas davantage se prévaloir du pouvoir de régularisation dont dispose le préfet à le faire bénéficier d'une admission exceptionnelle au séjour dès lors que il n'a pas, préalablement à l'édiction de la décision attaquée, déposé de demande de délivrance d'un titre de séjour sur laquelle il n'aurait pas été statué.

11. En dernier lieu, aux termes des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale (...). / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. ".

12. L'arrêté litigieux n'a pas, pour les mêmes motifs exposés au point 8, méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne des droits de l'homme et des libertés fondamentales et n'est pas entaché d'erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur la situation personnelle de l'appelant.

13. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. C... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande. Il y lieu, par voie de conséquence, de rejeter les conclusions aux fins d'injonction ainsi, que, les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de M. C... est rejetée.

2

N° 19VE02428


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 19VE02428
Date de la décision : 19/05/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-03 Étrangers. Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. BEAUJARD
Rapporteur ?: Mme Alice DIBIE
Rapporteur public ?: Mme BOBKO
Avocat(s) : CHARTIER

Origine de la décision
Date de l'import : 09/06/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2020-05-19;19ve02428 ?
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