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19/05/2020 | FRANCE | N°18VE01248

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 1ère chambre, 19 mai 2020, 18VE01248


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société SIDA ENGINEERING SL a demandé au Tribunal administratif de Montreuil de prononcer le remboursement de deux crédits de taxe sur la valeur ajoutée de 260 264,25 euros au titre de la période du 1er janvier au 31 décembre 2013 et de 80 845,80 euros au titre de la période du 1er janvier au 31 décembre 2014. Par un jugement n° 1606194 - 1606196 du 28 novembre 2017, le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté ses demandes.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le

12 avril 2018, la société SIDA ENGINEERING SL, représentée par Me B..., demande à la Co...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société SIDA ENGINEERING SL a demandé au Tribunal administratif de Montreuil de prononcer le remboursement de deux crédits de taxe sur la valeur ajoutée de 260 264,25 euros au titre de la période du 1er janvier au 31 décembre 2013 et de 80 845,80 euros au titre de la période du 1er janvier au 31 décembre 2014. Par un jugement n° 1606194 - 1606196 du 28 novembre 2017, le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté ses demandes.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 12 avril 2018, la société SIDA ENGINEERING SL, représentée par Me B..., demande à la Cour :

1° d'annuler le jugement susmentionné ;

2° de lui accorder le remboursement des crédits de taxe sur la valeur ajoutée susmentionnés ;

3° de condamner l'Etat au versement d'une somme de 320 643,44 euros avec intérêts légaux capitalisés avec anatocisme capitalisés à compter du 11 novembre 2015, en réparation du préjudice subi ;

4° de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

5° de condamner l'Etat aux entiers dépens.

La société SIDA ENGINEERING SL soutient que :

En ce qui concerne la régularité du jugement attaqué :

- le principe du contradictoire a été méconnu ;

- les premiers juges ont soulevé d'office un moyen qui n'est pas d'ordre public et ont statué ultra petita ;

- ce moyen n'a pas été soulevé par le président du Tribunal administratif de Montreuil ;

En ce qui concerne le bien-fondé du jugement attaqué,

- le moyen soulevé par les premiers juges et sur lequel ils se sont fondés pour rejeter sa demande est inopérant ; n'ayant pu imputer la taxe sur la valeur ajoutée en litige qu'elle a acquittée auprès de ses fournisseurs, elle a droit au remboursement de son crédit de taxe en application des dispositions de l'article 271 du code général des impôts et selon la procédure de droit commun ; les modalités de remboursement prévues par la directive 2008/9 CE ne sont pas applicables en l'espèce ;

- l'administration fiscale a manqué à son obligation d'information ; à raison de ce manquement, elle n'a pas été en mesure de présenter des demandes de remboursement dans une forme permettant leur acceptation ; elle a subi une perte de chance dont elle est légitime à demander l'indemnisation.

..................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la directive 2008/9/CE du Conseil du 12 février 2008 définissant les modalités du remboursement de la taxe sur la valeur ajoutée, prévu par la directive 2006/112/CE, en faveur des assujettis qui ne sont pas établis dans l'Etat membre du remboursement, mais dans un autre Etat membre ;

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme A...,

- et les conclusions de Mme Bobko, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. la société SIDA ENGINEERING SL, dont le siège est situé en Espagne, a demandé les 20 et 25 novembre 2015 le remboursement d'un crédit de taxe sur la valeur ajoutée par l'intermédiaire du portail de l'administration fiscale espagnole, appliquant ainsi la procédure de remboursement de la taxe sur la valeur ajoutée communautaire prévue par les directives susvisées, procédure dite dérogatoire prévue par les dispositions transposées des articles 242-0 M et suivants du code général des impôts, respectivement pour un montant de 260 264,25 euros au titre de la période du 1er janvier 2013 au 31 décembre 2013 et pour un montant de 80 845,80 euros au titre de la période du 1er janvier au 31 décembre 2014. L'administration fiscale a rejeté ces demandes pour forclusion par deux décisions des 28 avril et 3 mai 2016. Par la présente requête, la société SIDA ENGINEERING SL relève appel du jugement du 28 novembre 2017 par lequel le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande tendant au remboursement de ce crédit de taxe sur la valeur ajoutée.

Sur l'étendue du litige :

2. Il résulte de l'instruction qu'en cours d'instance, par une décision du 14 septembre 2018, l'administration fiscale a procédé au remboursement de 250 087,63 euros au titre de la période du 1er janvier au 31 décembre 2013, et de 77 096,30 euros au titre de la période du 1er janvier au 31 décembre 2014. Ainsi, les conclusions de la requête sont, dans cette mesure, devenues sans objet. Il n'y a, dès lors, pour la Cour, pas lieu d'y statuer.

Sur le surplus des conclusions de la requête :

En ce qui concerne la régularité du jugement attaqué :

3. La société requérante soutient qu'en soulevant d'office le moyen tiré de ce qu'elle n'était pas éligible au dispositif par lequel elle a sollicité le remboursement de taxe sur la valeur ajoutée en litige, qui n'était pas d'ordre public, les premiers juges ont méconnu le principe du contradictoire et ont statué ultra petita. Elle ajoute que ce moyen n'a pas été soulevé par le président du tribunal.

4. D'une part, il résulte de l'instruction que le moyen d'ordre public a été communiqué par lettre du 2 novembre 2017 aux deux parties, avec un délai suffisant pour pouvoir y répondre, l'administration y ayant d'ailleurs répondu par un mémoire du

13 novembre 2017.

5. D'autre part, l'article R. 611-7 du code de justice administrative n'impose pas que le président de la juridiction soulève un tel moyen dès lors qu'il dispose que c'est " le président de la formation de jugement " qui informe les parties. Tel est le cas en l'espèce, le courrier ayant été signé par la présidente de la 10ème chambre qui a statué sur le litige devant le Tribunal administratif de Montreuil.

6. Enfin, il résulte de l'instruction qu'en relevant que la demande en litige tendant au remboursement d'un crédit de taxe sur la valeur ajoutée n'entrait pas les prévisions de l'article 242-0 A de l'annexe II au code général des impôts, les premiers juges se sont régulièrement saisis d'office d'un moyen relatif au champ d'application de ces dispositions, qui n'était pas soulevé devant elle. Et en retenant le moyen soulevé d'office pour rejeter les conclusions aux fins de de remboursement du crédit de taxe sur la valeur ajoutée en litige, les premiers juges se sont limités aux conclusions dont ils étaient saisis et n'ont ainsi pas statué ultra petita.

7. Il s'ensuit que les moyens relatifs à la régularité du jugement doivent être écartés.

En ce qui concerne le bien-fondé du jugement en litige :

S'agissant des conclusions aux fins de remboursement de la taxe sur la valeur ajoutée restant en litige :

8. Aux termes de l'article 259 du code général des impôts : " Le lieu des prestations de services est situé en France : / 1° Lorsque le preneur est un assujetti agissant en tant que tel et qu'il a en France : / a) Le siège de son activité économique, sauf lorsqu'il dispose d'un établissement stable non situé en France auquel les services sont fournis ; / b) Ou un établissement stable auquel les services sont fournis ; / c) Ou, à défaut du a ou du b, son domicile ou sa résidence habituelle (...) ".

9. Il est constant que la société SIDA ENGINEERING SL, dont le siège est en Espagne, est intervenue au cours de la période en litige sur le territoire français pour piloter l'installation d'une chaîne de peinture à Lyon au siège social de la société Plastic Omnium. Il résulte de l'instruction que les demandes de remboursement demeurant en litige, à la suite du dégrèvement mentionné au point 2 prononcé par l'administration fiscale, sont relatives à des prestations de services qui ont été facturées à la société requérante par les sociétés

Locli Rhône-Alpes et Emploi Interim Ouest à hauteur de 3 749,50 euros pour 2014 et 10 176,62 euros pour 2013, et qui sont, en application des dispositions de l'article 259 du code général des impôts précité, imposables dans le pays du preneur. En conséquence, au regard de la taxe sur la valeur ajoutée, dès lors qu'il est constant que la société SIDA ENGINEERING SL n'a en France ni le siège de son activité économique ni un établissement stable, les prestations de services qu'elle a prises sont réputées être situées en Espagne où elle a établi son siège. Dans ces conditions, les prestataires français de la société requérante ne pouvaient appliquer la taxe sur la valeur ajoutée au prix des prestations servies à cette dernière. La taxe relative à ces prestations ayant été, ainsi, facturée à tort, la société SIDA ENGINEERING SL ne peut en demander le remboursement en France.

10. Il résulte de tout ce qui précède que la société SIDA ENGINEERING SL n'est pas fondée à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté ses conclusions tendant au remboursement de 10 176,62 euros au titre de la période du 1er janvier au 31 décembre 2013, et de 3 749,50 euros au titre de la période du 1er janvier au 31 décembre 2014.

S'agissant des conclusions indemnitaires :

11. Les conclusions tendant à la condamnation de l'État au versement d'une somme de 320 643,44 euros avec intérêts légaux capitalisés avec anatocisme capitalisés à compter du 11 novembre 2015, en réparation du préjudice subi, n'ont pas été soumises aux premiers juges et ont ainsi, et en tout état de cause, le caractère de conclusions nouvelles en appel. Elles doivent par suite être rejetées comme irrecevables.

En ce qui concerne les frais liés à l'instance :

12. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. En revanche, ne peuvent qu'être rejetées les conclusions présentées par le société

SIDA ENGINEERING SL tendant au remboursement des dépens sur le fondement de l'article R. 761-1 du même code, la présente instance n'ayant pas généré de tels frais.

DÉCIDE :

Article 1er : Il n'y pas lieu de statuer sur les conclusions de la requête de la société

SIDA ENGINEERING SL tendant au remboursement de 250 087,63 euros au titre de la période du 1er janvier au 31 décembre 2013, et de 77 096,30€ au titre de la période du 1er janvier au 31 décembre 2014, correspondant au montant du remboursement accordé en cours d'instance.

Article 2 : L'Etat versera la société SIDA ENGINEERING SL la somme de 1 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le surplus de la requête de la société SIDA ENGINEERING SL est rejeté.

2

N° 18VE01248


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 18VE01248
Date de la décision : 19/05/2020
Type d'affaire : Administrative

Analyses

19-06-02-08-03-06 Contributions et taxes. Taxes sur le chiffre d'affaires et assimilées. Taxe sur la valeur ajoutée. Liquidation de la taxe. Déductions. Remboursements de TVA.


Composition du Tribunal
Président : M. BEAUJARD
Rapporteur ?: Mme Alice DIBIE
Rapporteur public ?: Mme BOBKO
Avocat(s) : SELARL LEXPATRIMONIS

Origine de la décision
Date de l'import : 09/06/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2020-05-19;18ve01248 ?
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