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25/02/2020 | FRANCE | N°18VE04064

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 7ème chambre, 25 février 2020, 18VE04064


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B... a demandé au Tribunal administratif de Cergy-Pontoise d'annuler l'arrêté du 29 décembre 2017 par lequel le préfet des Hauts-de-Seine a rejeté sa demande de titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n° 1800112 du 15 novembre 2018, le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a annulé cet arrêté.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 7 décembre 201

8, le préfet des Hauts-de-Seine demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) de rejeter la ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B... a demandé au Tribunal administratif de Cergy-Pontoise d'annuler l'arrêté du 29 décembre 2017 par lequel le préfet des Hauts-de-Seine a rejeté sa demande de titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n° 1800112 du 15 novembre 2018, le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a annulé cet arrêté.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 7 décembre 2018, le préfet des Hauts-de-Seine demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) de rejeter la demande présentée par M. B... devant le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise.

Il soutient que :

- le rapport médical établi dans le cadre de l'instruction de la demande de titre de séjour sollicité par l'intéressé a été rédigé par un médecin n'ayant pas siégé au sein du collège des médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII) qui a rendu un avis sur cette demande ;

- c'est, dès lors, à tort que les premiers juges se sont fondés sur ce moyen pour annuler son arrêté ;

- les autres moyens soulevés par M. B... devant le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise ne sont pas fondés.

..........................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. Illouz, conseiller, a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. B..., ressortissant tunisien né le 22 octobre 1978, a été muni d'une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " délivrée sur le fondement du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, au cours de la période allant du 18 mai 2016 au 17 mai 2017, dont il a sollicité le renouvellement le 17 mars 2017. Par un arrêté du 29 décembre 2017, le préfet des Hauts-de-Seine a refusé de lui renouveler le titre demandé, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination. Ce préfet relève régulièrement appel du jugement du 15 novembre 2018 par lequel le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise, à la demande de M. B..., a annulé cet arrêté.

Sur le moyen d'annulation retenu par les premiers juges :

2. Aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" est délivrée de plein droit : (...) 11° A l'étranger résidant habituellement en France, si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié. La condition prévue à l'article L. 313-2 n'est pas exigée. La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative après avis d'un collège de médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, dans des conditions définies par décret en Conseil d'Etat. (...) ".

3. L'article R. 313-22 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dispose que : " Pour l'application du 11° de l'article L. 313-11, le préfet délivre la carte de séjour au vu d'un avis émis par un collège de médecins à compétence nationale de l'Office français de l'immigration et de l'intégration. L'avis est émis dans les conditions fixées par arrêté du ministre chargé de l'immigration et du ministre chargé de la santé au vu, d'une part, d'un rapport médical établi par un médecin de l'Office français de l'immigration et de l'intégration et, d'autre part, des informations disponibles sur les possibilités de bénéficier effectivement d'un traitement approprié dans le pays d'origine de l'intéressé. (...) ". Aux termes de l'article R. 313-23 du même code : " Le rapport médical visé à l'article R. 313-22 est établi par un médecin de l'Office français de l'immigration et de l'intégration à partir d'un certificat médical établi par le médecin qui le suit habituellement ou par un médecin praticien hospitalier inscrits au tableau de l'ordre (...) Sous couvert du directeur général de l'Office français de l'immigration et de l'intégration le service médical de l'office informe le préfet qu'il a transmis au collège de médecins le rapport médical. (...) Le collège à compétence nationale, composé de trois médecins, émet un avis dans les conditions de l'arrêté mentionné au premier alinéa du présent article. La composition du collège et, le cas échéant, de ses formations est fixée par décision du directeur général de l'office. Le médecin ayant établi le rapport médical ne siège pas au sein du collège (...) ".

4. Il résulte de la combinaison de ces dispositions que les documents soumis à l'appréciation du préfet doivent comporter l'avis du collège de médecins et être établis de manière telle que, lorsqu'il statue sur la demande de titre de séjour, le préfet puisse vérifier que l'avis au regard duquel il se prononce a bien été rendu par un collège de médecins tel que prévu par l'article L. 311-11. L'avis doit, en conséquence, permettre l'identification des médecins dont il émane. L'identification des auteurs de cet avis constitue ainsi une garantie dont la méconnaissance est susceptible d'entacher l'ensemble de la procédure. Il en résulte également que, préalablement à l'avis rendu par ce collège de médecins, un rapport médical relatif à l'état de santé de l'intéressé et établi par un médecin de l'OFII doit lui être transmis et que le médecin ayant établi ce rapport médical ne doit pas siéger au sein du collège de médecins qui rend l'avis transmis au préfet. En cas de contestation devant le juge administratif portant sur ce point, il appartient à l'autorité administrative d'apporter les éléments qui permettent l'identification du médecin qui a rédigé le rapport au vu duquel le collège de médecins a émis son avis et, par suite, le contrôle de la régularité de la composition du collège de médecins.

5. Il ressort des pièces du dossier que le préfet des Hauts-de-Seine a rejeté la demande de renouvellement de titre de séjour présentée par M. B... au regard d'un avis émis le 7 novembre 2017 par le collège des médecins de l'OFII composé des docteurs Mettasi-Cartier, Lancino et Tretout. Il ressort par ailleurs d'une attestation du médecin coordonnateur Ile-de-France de l'OFII, produite pour la première fois en appel par le préfet, que le rapport médical relatif à la situation de l'intéressé a quant à lui été rédigé par le docteur Delaunay, qui ne siégeait pas au sein du collège ayant rendu l'avis médical du 7 novembre 2017. Dès lors, c'est à tort que les premiers juges ont estimé que cet avis avait été émis dans des conditions irrégulières au regard des dispositions précitées pour prononcer l'annulation de l'arrêté en litige.

6. Il appartient toutefois à la Cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. B... devant le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise.

Sur les autres moyens soulevés par M. B... devant les premiers juges :

7. Sous réserve des cas où la loi attribue la charge de la preuve à l'une des parties, il appartient au juge administratif, au vu des pièces du dossier, et compte tenu, le cas échéant, de l'abstention d'une des parties à produire les éléments qu'elle est seule en mesure d'apporter et qui ne sauraient être réclamés qu'à elle-même, d'apprécier, pour l'application des dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile citées au point 2., si l'état de santé d'un étranger nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve de l'absence d'un accès effectif au traitement approprié dans le pays de renvoi, sauf circonstance humanitaire exceptionnelle. La partie qui justifie d'un avis du collège des médecins de l'OFII qui lui est favorable doit être regardée comme apportant des éléments de fait susceptibles de faire présumer l'existence ou l'absence d'un état de santé de nature à justifier la délivrance ou le refus d'un titre de séjour. Dans ce cas, il appartient à l'autre partie, dans le respect des règles relatives au secret médical, de produire tous éléments permettant d'apprécier l'état de santé de l'étranger et, le cas échéant, l'existence ou l'absence d'un accès effectif à un traitement approprié dans le pays de renvoi. La conviction du juge, à qui il revient d'apprécier si l'état de santé d'un étranger justifie la délivrance d'un titre de séjour dans les conditions ci-dessus rappelées, se détermine au vu de ces échanges contradictoires.

8. Pour rejeter la demande de renouvellement de titre de séjour présentée par M. B..., le préfet des Hauts-de-Seine, qui s'est approprié les motifs de l'avis du collège des médecins de l'OFII, a relevé dans les motifs de son arrêté que si l'état de santé de l'intéressé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entrainer des conséquences d'une exceptionnelle gravité, celui-ci pourrait néanmoins bénéficier effectivement d'un traitement approprié à sa pathologie en Tunisie. Toutefois, M. B... produit un certificat médical émanant d'un praticien hospitalier français, daté du 31 janvier 2017, indiquant que le traitement approprié " ne peut être dispensé dans son pays d'origine, la Tunisie ", ainsi qu'un second certificat médical d'un professeur de médecine exerçant dans un hôpital de Tunis, daté du 23 janvier 2017, et une attestation du directeur technique de la pharmacie centrale de Tunisie datée du 9 février 2017 indiquant, en des termes dépourvus de toute ambiguïté, que le médicament Simponi, nécessaire au traitement de sa pathologie, n'est pas commercialisé en Tunisie. Si le préfet des Hauts-de-Seine produit quant à lui un état des commandes reçues par la pharmacie centrale de Tunisie au cours du mois d'avril 2018, ce document, postérieur de plus de trois mois à son arrêté, n'est pas de nature à établir la disponibilité du Simponi à la date de cette décision, sans qu'y fasse obstacle la circonstance que le médicament ait fait l'objet d'une autorisation de mise sur le marché tunisien avant cette date, l'intimé versant quant à lui aux débats un certificat médical d'un praticien exerçant dans le même établissement hospitalier de Tunis du 10 janvier 2018 réitérant cette attestation d'indisponibilité du traitement en Tunisie. Par ailleurs, il ressort également des pièces du dossier, et notamment des certificats médicaux qui viennent d'être évoqués, qu'en dépit de traitements médicaux antérieurs, la spondylarthrite ankylosante axiale dont souffre l'intéressé n'a rencontré une évolution favorable qu'à compter de l'année 2013, au cours de laquelle le médicament Simponi a commencé à lui être prescrit. Ainsi, et dans les circonstances très particulières de l'espèce, M. B... doit être regardé comme produisant des éléments suffisants de nature à révéler l'absence d'un accès effectif dans son pays d'origine à ce médicament, lequel constitue le seul traitement approprié à sa pathologie. Le préfet des Hauts-de-Seine ne pouvait, dès lors, rejeter sa demande de renouvellement de titre de séjour sans méconnaitre les dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

9. Il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur les autres moyens de la demande, que le préfet des Hauts-de-Seine n'est pas fondé à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a annulé son arrêté du 29 décembre 2017 rejetant la demande de renouvellement de titre de séjour de M. B..., obligeant celui-ci à quitter le territoire français, dans un délai de trente jours, et fixant le pays de destination.

D É C I D E :

Article 1er : La requête du préfet des Hauts-de-Seine est rejetée.

2

N° 18VE04064


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 7ème chambre
Numéro d'arrêt : 18VE04064
Date de la décision : 25/02/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335 Étrangers.


Composition du Tribunal
Président : M. EVEN
Rapporteur ?: M. Julien ILLOUZ
Rapporteur public ?: Mme DANIELIAN
Avocat(s) : BOUDJELLAL

Origine de la décision
Date de l'import : 18/04/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2020-02-25;18ve04064 ?
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